La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
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Pour être tout à fait précis, Robespierre avait bien décidé de lui faire couper la tête, mais il a été bien feinté, Condorcet ayant eu le mauvais goût (ou le bon goût, c'est une question de point de vue) de se suicider avant.
Robespierre l'a accusé de vouloir ôter le pouvoir au peuple et lui a fait couper la tête.
Pour être tout à fait précis, Robespierre avait bien décidé de lui faire couper la tête, mais il a été bien feinté, Condorcet ayant eu le mauvais goût (ou le bon goût, c'est une question de point de vue) de se suicider avant.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Quel que soit le moyen de sélection des candidats, la démocratie par le vote est absurde et incohérente. Elle s’appuie sur l’idée qu’on doit accorder un respect égal aux opinions et aux diverses conceptions de la vie bonne. Mais la notion même de respect des opinions présuppose celle de droit. Ce sont les droits qui protègent la liberté des citoyens de poursuivre leur vie comme ils l’entendent. Or la notion de droit des individus, en ce sens, présuppose elle-même qu’il y ait une ¬distinction entre ce que le gouvernement – par définition dans une démocratie l’expression de la majorité – pense et ce que pensent les individus : si tout ce que pense la majorité était vrai, et si la majorité pensait qu’il n’y a pas de droit à la liberté d’expression par exemple, alors il n’y aurait pas de droit à la liberté d’expression. Il s’ensuit qu’une condition nécessaire pour que les gens puissent croire qu’il y a de tels droits est qu’il y ait place pour une différence entre l’opinion de la majorité et ce qui fonde la démocratie, une sorte de boucle impossible à boucler.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Toujours la même erreur :
Les prétendues démonstration fondées sur des exemples fictifs telles que celle que tu proposes ici n'ont aucune valeur. Parce que l'expérience montre que le consensus se fait autour de propositions qui, étrangement, vont dans le sens de la liberté et de l'égal respect des individus. Quoiqu'en pensent les adversaires de la démocratie, les gens ne sont pas complètement idiots, et lorsqu'on leur demande leur avis, ils votent rarement pour des mesures qui viseraient à ôter leurs propres droits. Il se trouve que les opinions radicales et extrémistes sont plutôt minoritaires.
Et si, pour être complet, un jour, une opinion radicale devait emporter la majorité des suffrages, hé bien cela signifiera qu'une majorité des citoyens d'un pays aura considéré que la situation ici et maintenant exige des décisions radicales. Cela arrive, dans l'histoire. Mais je te rassure, dans ce genre de situations, on ne demande précisément pas leur opinion aux citoyens.
Enfin, quoiqu'en disent, toujours, les adversaires de la démocratie, aucune dictature ne s'est jamais installée suite à un vote démocratique, c'est-à-dire majoritaire -et surtout pas le régime hitlérien. En tout cas, moi, je n'en vois pas.
Mais en même temps, très belle illustration du problème : La démocratie, c'est le règne de l'opinion vs des régimes qui se prétendent fondés sur la Vérité ; c'est l'unanime ou le consensus (pourtant un terme que tu as utilisé, baptiste) plutôt que l'Universel.baptiste a écrit: si tout ce que pense la majorité était vrai, et si la majorité pensait qu’il n’y a pas de droit à la liberté d’expression par exemple, alors il n’y aurait pas de droit à la liberté d’expression.
Les prétendues démonstration fondées sur des exemples fictifs telles que celle que tu proposes ici n'ont aucune valeur. Parce que l'expérience montre que le consensus se fait autour de propositions qui, étrangement, vont dans le sens de la liberté et de l'égal respect des individus. Quoiqu'en pensent les adversaires de la démocratie, les gens ne sont pas complètement idiots, et lorsqu'on leur demande leur avis, ils votent rarement pour des mesures qui viseraient à ôter leurs propres droits. Il se trouve que les opinions radicales et extrémistes sont plutôt minoritaires.
Et si, pour être complet, un jour, une opinion radicale devait emporter la majorité des suffrages, hé bien cela signifiera qu'une majorité des citoyens d'un pays aura considéré que la situation ici et maintenant exige des décisions radicales. Cela arrive, dans l'histoire. Mais je te rassure, dans ce genre de situations, on ne demande précisément pas leur opinion aux citoyens.
Enfin, quoiqu'en disent, toujours, les adversaires de la démocratie, aucune dictature ne s'est jamais installée suite à un vote démocratique, c'est-à-dire majoritaire -et surtout pas le régime hitlérien. En tout cas, moi, je n'en vois pas.
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Bergame- Persona
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Bergame a écrit:
Les prétendues démonstration fondées sur des exemples fictifs telles que celle que tu proposes ici n'ont aucune valeur. Parce que l'expérience montre que le consensus se fait autour de propositions qui, étrangement, vont dans le sens de la liberté et de l'égal respect des individus. Quoiqu'en pensent les adversaires de la démocratie, les gens ne sont pas complètement idiots, et lorsqu'on leur demande leur avis, ils votent rarement pour des mesures qui viseraient à ôter leurs propres droits. Il se trouve que les opinions radicales et extrémistes sont plutôt minoritaires.
Il faut ne pas avoir beaucoup de mémoire. Combien de temps s’est écoulé depuis que le « peuple » égyptien s’est soulevé contre la dictature militaire, puis a massivement voté pour les frères musulmans dont les idéaux étaient tout… sauf démocratiques…5 ans tout juste, plus loin, la république islamique d'Iran...
Je réponds de manière factuelle à la question de « l’exigence de vérité », j’observe que la démocratie élective n’est pas le système le mieux à même de répondre à cette exigence. Il est tout aussi objectif de reconnaître que c’est le système politique que nous chérissons majoritairement, surtout lorsque nous sommes dans l’opposition après c’est une autre histoire, aussi il me paraît évident qu’il faille chercher ailleurs que dans la raison pratique et « l’exigence de vérité » l’origine de cet attrait pour la démocratie qui n’existe pas chez les fourmis, société qui a cependant porté à la perfection la notion de bien commun.
Quand au fait que la majorité des Allemands, y compris les élites intellectuelles et scientifiques n’auraient pas adhéré en masse à l’idéologie nazie, ou les Italiens à l’idéologie fasciste, je ne me souviens pas avoir lu aucun historien sérieux qui soutienne cette « vérité », mais peut-être as tu des travaux à porter à ma connaissance?
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
"N'auraient pas", tu vois bien que tu te sens obligé d'utiliser le conditionnel.
Tu sais très bien ce que je veux dire, je l'ai déjà dit : Ni Mussolini ni Hitler n'ont été élus à la majorité des suffrages.
Et je ne le dis pas par hasard : L'élaboration de la constitution de Weimar a donné lieu à un âpre débat, et les voix étaient nombreuses -surtout à gauche, bien sûr- qui proposaient que le chef de l'exécutif soit élu directement par les citoyens au suffrage majoritaire. Mais ce n'est pas la solution qui a été adoptée, on a préféré un régime "modéré", "équilibré", un régime "parlementaire", sur le modèle de la monarchie britannique.
Bon, faut dire qu'on venait à peine d'échapper à une révolution marxiste, n'est-ce pas, on n'allait quand même pas donner les leviers politiques au "peuple" !
Tu sais très bien ce que je veux dire, je l'ai déjà dit : Ni Mussolini ni Hitler n'ont été élus à la majorité des suffrages.
Et je ne le dis pas par hasard : L'élaboration de la constitution de Weimar a donné lieu à un âpre débat, et les voix étaient nombreuses -surtout à gauche, bien sûr- qui proposaient que le chef de l'exécutif soit élu directement par les citoyens au suffrage majoritaire. Mais ce n'est pas la solution qui a été adoptée, on a préféré un régime "modéré", "équilibré", un régime "parlementaire", sur le modèle de la monarchie britannique.
Bon, faut dire qu'on venait à peine d'échapper à une révolution marxiste, n'est-ce pas, on n'allait quand même pas donner les leviers politiques au "peuple" !
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Bergame- Persona
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
J'aime beaucoup ce fil autour de la parole vraie ou fausse, mensongère ou idéale, utile,pratique,nécessaire, que sais-je encore...
Dans le cadre de la politique.
Je viens de débuter un livre d'Emmanuel Todd :"qui est Charlie ? " où rapidement il nous dit que son essai est sur le mensonge, que Charlie est un imposteur?
Je m'interroge ,dans quelle mesure la parole politique s'adresse à des personnes qui veulent entendre certaines choses,le désir des uns,la réponse d'autres,...
Dans le cadre de la politique.
Je viens de débuter un livre d'Emmanuel Todd :"qui est Charlie ? " où rapidement il nous dit que son essai est sur le mensonge, que Charlie est un imposteur?
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lanK- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Courtial a écrit:On peut essayer d'aller gratter ailleurs, mais je vais une fois encore revenir à Godard : c'est alors la quesiton des professionnels de la profession. Professionnels de la profession auxquels on reproche d'être seulement compétents, mais éloignés du peuple, de ses vraies préoccupations, etc.
à Courtial,
J'ai du coup moi-même du mal à cerner ce que serait un professionnel de la profession au sens où l'entend Godard.
La critique est sans doute le fait qu'un domaine d'activité se referme sur lui-même se transformant en caste, les participants définissant alors eux-même leurs critères de compétence et instituant leurs propres normes.
Et plutôt que de rester ouvert, il y a en fait la construction d'une ligne de démarcation entre ceux qui sont du métier et ceux qui pourraient prétendre à y être par leur activité.
On pourrait crier dans un certain sens à la paranoïa, mais en est-t-on certain ? Il y a certainement cette dérive en politique, où l'on essaye de faire entendre que le cursus d'homme politique passe par une haute qualification, alors que rien de tel n'est supposé dans le principe même de la démocratie. Mais vu qu'on n'y arrive pas seul en politique, on est alors obligé de passer par l'adoubement ou l'intronisation de la caste, qui a peut-être de tels critères.
Mais dans le cadre de la démocratie, je ne pensais pas à ce genre de critère de compétence qui serait interne à une caste, ni même à une compétence politique qui serait objectivement et définitivement définissable, mais à une compétence vue de l'extérieur, par les gens qui votent.
Ces critères de compétence ne sont alors pas dictés par la caste. Alors est-ce que l'on peut encore parler de critères de compétence dans ce cas, puisque ce ne sont plus les professionnels de la profession qui évalue le professionnalisme ? C'est une échelle d'évaluation ouverte puisqu'elle vient de l'extérieur de la caste et non pas de l'intérieur.
Elle peut alors être plus exigeante sur certains aspects et moins sur d'autres. Certains mettrons leur confiance dans des personnes hautement qualifiées alors que pour d'autre, si l'on sait lire compter et écrire, cela suffit bien du moment que la clarté des discours ou la pertinence des constats convainc.
La question est de savoir si l'on peut arriver en politique, sans passer par une méga structure et un système de caste, et de savoir alors quels sont les critères demandés par cette caste.
Mon sentiment est que le meilleurs moyen d'arriver sans se perdre est, plutôt que de prendre des raccourcis par piston, de faire ses preuves en commençant par le bas. Ca c'est la meilleure campagne que l'on puisse se faire, celle s'appuyant sur l'action, l'investissement et la démonstration de ses qualités et de son savoir faire.
quid- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
lanK a écrit:J'aime beaucoup ce fil autour de la parole vraie ou fausse, mensongère ou idéale, utile,pratique,nécessaire, que sais-je encore...
Dans le cadre de la politique.
Je viens de débuter un livre d'Emmanuel Todd :"qui est Charlie ? " où rapidement il nous dit que son essai est sur le mensonge, que Charlie est un imposteur?
Je m'interroge ,dans quelle mesure la parole politique s'adresse à des personnes qui veulent entendre certaines choses,le désir des uns,la réponse d'autres,...
J’avais en son temps émis quelques réserves à propos de l’identité réelle de Charlie, je fus mis en accusation, accusé de manipulation, on ne met pas aussi facilement en doute la sincérité du peuple manifestant…il me semble que la parole politique ordinaire vise d'abord et avant tout à conforter les opinions de son propre camp, mobiliser ses troupes, je ne crois pas qu'elle vise à convaincre au-delà.
Bergame, tu m’as mis au défi de justifier mes propos sur le vote majoritaire dans le monde réel, défi malheureux il suffit de se souvenir de l’épisode des frères musulmans démocratiquement portés au pouvoir en Egypte par une écrasante majorité et de ce qu’il advint par la suite. Si tu veux parler de la complicité du peuple allemand alors il faut partir du plébiscite du 12 novembre 1933 ou bien de celui du 19 Août 1934 ou encore le référendum du 29 mars 1936 ; ou bien des lettres d’allégeances envoyées par tous les Herr Professors et les Herr Doktors, pas d'une théorie du complot. Je répète, si tu as une seule publication d’historien justifiant tes dires alors n’hésite surtout pas à nous la faire connaître.
Dernière édition par baptiste le Mar 21 Juil 2015 - 7:41, édité 1 fois
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
quid a écrit:Courtial a écrit:On peut essayer d'aller gratter ailleurs, mais je vais une fois encore revenir à Godard : c'est alors la quesiton des professionnels de la profession. Professionnels de la profession auxquels on reproche d'être seulement compétents, mais éloignés du peuple, de ses vraies préoccupations, etc.
à Courtial,
J'ai du coup moi-même du mal à cerner ce que serait un professionnel de la profession au sens où l'entend Godard.
La critique est sans doute le fait qu'un domaine d'activité se referme sur lui-même se transformant en caste, les participants définissant alors eux-même leurs critères de compétence et instituant leurs propres normes.
"""le Peuple ne peut être compris que par le Prince....comme le Prince ne peut l' être que par le Peuple"""" ( Machiavel).
C'est le problème structurel issu de la spécialisation. La perte des fonctions "régaliennes" de l' individu en échange d' un "gain de productivité".
De quel droit un militant ( comme un militaire), peut il porter un jugement sur la manière de gérer un groupe, puisque ces mêmes activités militantes ( ou militaire), lui interdisent une vie "ordinaire", qui seule l' autoriserait à porter un jugement.
Ayant, un jour, porté jugement et décidé d'agir hors de son activité citoyenne " ordinaire", il décide d' être un outil d' action. Mais cet outil et cette action ne sont référés, en temporalité, qu'au moment ou il a pris cette décision...il ne peut plus, logiquement porter jugement sur l' instant présent.
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Non, pourquoi voudrais-tu maintenant que je parle du plébiscite ? J'ai dit : "Aucune dictature ne s'est jamais installée suite à un vote démocratique, c'est-à-dire majoritaire -et surtout pas le régime hitlérien".baptiste a écrit:Si tu veux parler de la complicité du peuple allemand alors il faut partir du plébiscite du 12 novembre 1933 ou bien de celui du 19 Août 1934 ou encore le référendum du 29 mars 1936 .
Effectivement, j'aurais du préciser néanmoins : Dans le monde occidental. L'exportation de la démocratie dans le monde, c'est encore un autre problème...
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Bergame- Persona
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Le FIS (Front islamique de salut) s'est fait élire de manière parfaitement démocratique en Algérie. On n'a pas parlé de trucage du vote (et ils n'étaient de toute manière pas en position de truquer grand chose).
Ce parti, de nature révolutionnaire, avait indiqué clairement dès le départ qu'il participait aux élections, certes, avait choisi "la voie démocratique" d'accèder, mais que s'il venait au pouvoir, il n'y aurait plus d'élection.
On peut les comprendre : il ferait beau voir que les Décrets Eternels d'Allah dépendent d'un vote ! C'est plus fort encore que le théorème de Pythagore, cela. L'erreur humaine est toujours possible, pas celle de Dieu. Même la science peut errer, pas le Coran.
Ils ont appliqué ensuite une conception un chouïa musclée de la Charia, que l'on peut approuver ou non (ou enregistrer simplement comme le résultat du vote, en lui-même incontestable), mais on ne peut pas dire qu'ils aient menti, ou promis autre chose, etc.
Rousseau soulignait (de manière très juste, à mon avis) que la volonté du peuple, c'est sa volonté éclairée. En principe, le peuple ne peut pas se tromper en ce sens qu'on ne peut vouloir son propre mal. Mais on réalité, on veut souvent son propre mal pour de multiples raisons, dont une est l'ignorance et l'illusion.
Mais cette option ne tient pas (i.e : le peuple a été abusé par des sophistes) car encore une fois, ces gens ont fait ce qu'ils avaient dit, et ils ont été élus non sur ce qu'ils semblaient ou faisaient croire, mais bien sur ce qu'ils étaient effectivement.
Ce parti, de nature révolutionnaire, avait indiqué clairement dès le départ qu'il participait aux élections, certes, avait choisi "la voie démocratique" d'accèder, mais que s'il venait au pouvoir, il n'y aurait plus d'élection.
On peut les comprendre : il ferait beau voir que les Décrets Eternels d'Allah dépendent d'un vote ! C'est plus fort encore que le théorème de Pythagore, cela. L'erreur humaine est toujours possible, pas celle de Dieu. Même la science peut errer, pas le Coran.
Ils ont appliqué ensuite une conception un chouïa musclée de la Charia, que l'on peut approuver ou non (ou enregistrer simplement comme le résultat du vote, en lui-même incontestable), mais on ne peut pas dire qu'ils aient menti, ou promis autre chose, etc.
Rousseau soulignait (de manière très juste, à mon avis) que la volonté du peuple, c'est sa volonté éclairée. En principe, le peuple ne peut pas se tromper en ce sens qu'on ne peut vouloir son propre mal. Mais on réalité, on veut souvent son propre mal pour de multiples raisons, dont une est l'ignorance et l'illusion.
Mais cette option ne tient pas (i.e : le peuple a été abusé par des sophistes) car encore une fois, ces gens ont fait ce qu'ils avaient dit, et ils ont été élus non sur ce qu'ils semblaient ou faisaient croire, mais bien sur ce qu'ils étaient effectivement.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
quid a écrit:J'ai du coup moi-même du mal à cerner ce que serait un professionnel de la profession au sens où l'entend Godard.
La critique est sans doute le fait qu'un domaine d'activité se referme sur lui-même se transformant en caste, les participants définissant alors eux-même leurs critères de compétence et instituant leurs propres normes.
Et plutôt que de rester ouvert, il y a en fait la construction d'une ligne de démarcation entre ceux qui sont du métier et ceux qui pourraient prétendre à y être par leur activité.
J'apprécie en amateur l'exercice de fausse modestie : dire je ne comprends pas pour montrer illico qu'on comprend parfaitement ce dont il s'agit...
J'ai évoqué quelques exemples, j'en donne un autre : Fabius est-il un incompétent ? Non, bien sûr, il a fait l'ENA et Normale Sup, donc il est compétent.
Vous vous souvenez sans doute de l'Affaire qui a passablement plombé son image pendant longtemps, l'histoire dite du "sang contaminé". Il s'agissait de sang qui avait été transfusé à des malades (hémophiles en particulier) et qui s'est trouvé infecté du virus du sida.
On a commencé à mettre en cause la Ministre (Giorgina Dufoix), puis le Premier Ministre (Fabius). Qui n'ont pas eu d'autre défense possible que de plaider leur incompétence. C'est-à-dire qu'on peut être un grand commis de l'Etat, plusieurs fois Ministre, présidentiable, respecté dans son image de "grosse tête" etc. et ne pas savoir qu'il faut chauffer le sang à 63° et pas à 46° pour tuer le virus (ce ne sont pas les vrais chiffres, les vrais je ne m'en souviens plus) et se retrouver par là comme un incompétent criminel. Parce que, incompétent, on a écouté les conseils d'autres incompétents.
On avait ici une belle allégorie à la Bruegel l'Ancien : les aveugles qui avancent en file indienne en se tenant par l'épaule (le suivant sur l'épaule du précédent) : le premier se casse la gueule et tous les autres suivent, en dominos.
Quoi qu'il en soit, c'est plutôt la nature de cette "compétence" qui est en cause et présente des problèmes de définition, que la détermination sociologique de qui sont les professionnels de la profession.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 03/07/2008
Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Bergame a écrit:Non, pourquoi voudrais-tu maintenant que je parle du plébiscite ? J'ai dit : "Aucune dictature ne s'est jamais installée suite à un vote démocratique, c'est-à-dire majoritaire -et surtout pas le régime hitlérien".baptiste a écrit:Si tu veux parler de la complicité du peuple allemand alors il faut partir du plébiscite du 12 novembre 1933 ou bien de celui du 19 Août 1934 ou encore le référendum du 29 mars 1936 .
Effectivement, j'aurais du préciser néanmoins : Dans le monde occidental. L'exportation de la démocratie dans le monde, c'est encore un autre problème...
En 1933 diverses lois sont votées restreignant les libertés fondamentale, interdiction des syndicats, des partis politiques autres que le NSDAP….Les Allemands qui l’ont plébiscité ce 19 août 1934 en lui donnant tous les pouvoirs exécutifs ne pouvaient donc pas prétendre ignorer le danger qu’Hitler représentait pour leurs libertés. Je ne prétends pas juger aujourd’hui le "volk" germanique d’hier. Je me borne à constater qu’il a réussi à envoûter son propre peuple, au sens du plus grand nombre, pour le conduire, à l’aveugle pour reprendre la parabole, et plus facilement à l’irréparable. Est-ce que cela a fait du peuple allemand une victime ? C’est un autre débat…En tout les cas le risque signalé n'est pas un mirage.Je pourrais rajouter d'autres exemples comme en France celui des Bonaparte, ou le recours permanent au plébiscite que fut le mode de gouvernement de Mussolini. A ce que je sache le plébiscite, comme le référendum font appel au vote du plus grand nombre ce qui est l"essence" de la démocratie et ta distinction entre vote et plébiscite me paraît relever
Courtial, dans l'affaire du sang contaminé ce n'est pas tant la compétence des experts qui est en cause que leur honnêteté, eux n'ignoraient rien des risques.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Relis l'histoire de la prise du pouvoir en Allemagne. Aux élections parlementaires du 5 mars 1933, les nazis n'ont toujours pas la majorité. Pourtant, le 23, le Reichstag donne les pleins pouvoirs à Hitler : Résultats des tractations avec le Zentrum, parti de la droite catholique.
Le seul parti à s'être opposé à ce vote parlementaire étant, bien entendu, le parti social-démocrate (les communistes étaient déjà interdits et incarcérés).
C'est le parlement, mon cher ami, qui fait de Hitler un dictateur -pas le peuple.
Attribuer cette responsabilité aux citoyens allemands -qui, tout le monde le sait, n'ont pourtant jamais élu Hitler au pouvoir- ça a surtout le grand avantage de passer sous silence la responsabilité, tout à fait avérée cette fois, des parlementaires de la droite "classique".
Le seul parti à s'être opposé à ce vote parlementaire étant, bien entendu, le parti social-démocrate (les communistes étaient déjà interdits et incarcérés).
C'est le parlement, mon cher ami, qui fait de Hitler un dictateur -pas le peuple.
Attribuer cette responsabilité aux citoyens allemands -qui, tout le monde le sait, n'ont pourtant jamais élu Hitler au pouvoir- ça a surtout le grand avantage de passer sous silence la responsabilité, tout à fait avérée cette fois, des parlementaires de la droite "classique".
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Bergame- Persona
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
La vérité historique importerait donc? La légende ne suffit-elle pas?
C'est cela aussi, l'exigence de vérité.
C'est cela aussi, l'exigence de vérité.
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euthyphron- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Son parti a quand même remporté les deux élections législatives de 1932 avec une majorité relative, assez loin devant le deuxième parti (37,3% en juillet devant le SPD à 21,6% et 33,1% en novembre devant le SPD à 20,4%). En principe, le président doit nommer chancelier le chef du parti qui remporte les élections législatives mais, en l'occurrence, le président Hindenburg a refusé de nommer Hitler après les élections de juillet. Il n'y a consenti, en janvier 1933, qu'après le résultat des élections de novembre. Et en mars 1933, le chancelier Hitler a exigé la tenue de nouvelles élections législatives car il trouvait son score aux dernières élections législatives trop bas. Le parti nazi a remporté les élections avec une majorité relative de 43,9%.Bergame a écrit:Relis l'histoire de la prise du pouvoir en Allemagne. Aux élections parlementaires du 5 mars 1933, les nazis n'ont toujours pas la majorité. Pourtant, le 23, le Reichstag donne les pleins pouvoirs à Hitler : Résultats des tractations avec le Zentrum, parti de la droite catholique.
Le seul parti à s'être opposé à ce vote parlementaire étant, bien entendu, le parti social-démocrate (les communistes étaient déjà interdits et incarcérés).
C'est le parlement, mon cher ami, qui fait de Hitler un dictateur -pas le peuple.
Attribuer cette responsabilité aux citoyens allemands -qui, tout le monde le sait, n'ont pourtant jamais élu Hitler au pouvoir- ça a surtout le grand avantage de passer sous silence la responsabilité, tout à fait avérée cette fois, des parlementaires de la droite "classique".
Le peuple allemand n'a jamais envoyé au pouvoir un dictateur car aucun dictateur ne se présente comme tel face au peuple. Si c'est cela le critère, de se présenter explicitement comme un dictateur et de demander a être élu, alors on ne trouvera jamais de dictateur ainsi élu, c'est certain.
Le peuple allemand n'a jamais envoyé au pouvoir dictateur mais le peuple allemand a majoritairement voté pour un antisémite et un raciste notoire qui, depuis les années 20, bien avant son accès son pouvoir, appelle explicitement dans ses déclarations publiques écrites ou orales à la haine des juifs et annonce sans ambiguïté qu'il emploiera des moyens brutaux pour résoudre "le problème juif".
Lorsqu'on a parlé de faire des "mauvais choix" à aucun moment il ne s'est agi de d'élire un dictateur. Hitler n'était pas un mauvais choix parce qu'il s'est présenté comme un dictateur aux élections mais parce qu'il est présenté comme un antisémite, un raciste adepte de la violence et du culte de la force.
Le peuple n'élit jamais un dictateur, il élit quelqu'un qui le fait jouir. Et il est assez banal que la haine d'un ennemi réel ou imaginaire et le soulagement symbolique (= par le discours) du désir de lui faire du mal soient jouissifs pour le peuple et politiquement très efficaces (quel que soit le régime d'ailleurs). Généralement, l'élu ne devient dictateur que plus tard. Mais le peuple, même s'il ressent bien qu'une adhésion aux discours haineux et violents le ferait jouir parce qu'elle permettrait le soulagement symbolique de ses frustrations, est tout à fait capable de résister à cette tentation. Le plus souvent c'est ce qui se passe dans les démocraties mûres. La question est de savoir jusqu'à quand peut-il résister à cette tentation lorsque le reste du système est à la ramasse.
Ataraxie- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Non, c'est faux. 43.9%, ce n'est pas une majorité, ni relative ni pas-relative. Et au moins, des chiffres, on ne peut discuter.Ataraxie a écrit: mais le peuple allemand a majoritairement voté pour un antisémite et un raciste notoire
Pour le reste, toujours la même question : Quand on véhicule la représentation anthropologique que tu fais tienne ici -qui illustre parfaitement mon propos, du reste- et que, parallèlement, on se prétend démocrate, ne se fiche-t-on pas un petit peu de la g... du monde ? Ah ça, évidemment, si les hommes du commun sont majoritairement des monstres toujours avides de jouir de la violence exercée sur un ennemi "réel ou imaginaire" (même pas nécessairement réel, dis donc, ces fous fantasment leurs ennemis et ce sont donc des victimes innocentes qu'ils massacrent !), on comprend qu'il faille de bons "systèmes", bien solides, pour les tenir en cage. Mais où peut bien se trouver la démocratie, là-dedans ?
Autrement dit, je t'ai déjà lu critiquer ma conception "électorale" de la démocratie au nom d'une version "délibérative". Soit. Mais si tu es cohérent avec toi-même, comment peux-tu espérer que des monstres pareils "délibèrent" ? Et avec quel résultat attendu ? Qu'ils se mettent d'accord sur l'identité de la première minorité à exterminer ?
Je te prie de m'excuser par avance, je ne souhaite pas particulièrement être désobligeant, mais, vu de ma fenêtre, ce genre de diatribe n'est rien d'autre qu'un délire -un cauchemar. Cependant, pour toi, elle a sa vérité, n'est-ce pas ?
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Bergame- Persona
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Bergame a écrit:Non, c'est faux. 43.9%, ce n'est pas une majorité, ni relative ni pas-relative. Et au moins, des chiffres, on ne peut discuter.Ataraxie a écrit: mais le peuple allemand a majoritairement voté pour un antisémite et un raciste notoire
« Le cabinet a décidé, d'une façon valable d'après le droit constitutionnel, de confier à ma personne, donc à la fonction de chancelier du Reich, les fonctions de l'ancien Président du Reich ; mais je veux que ce fait soit expressément sanctionné par le peuple allemand. Fermement convaincu que chaque pouvoir d'État doit émaner du peuple et doit être confirmé par lui moyennant une élection libre et secrète, je vous prie de soumettre, sans retard, la décision du cabinet et les compléments qui pourraient s'imposer au libre vote du peuple allemand. » Lettre d’Adolf Hitler au ministre de l’intérieur lui demandant d’organiser un vote, ce qui fut fait en Août 34.
Tu as raison, "les chiffres on ne peut pas discuter". Le peuple consulté à voté à 89,93% oui à la fusion de tous les pouvoirs exécutifs dans les mains d’un seul homme, après que celui-ci ait déjà en tant que chancelier fait voter toutes les lois liberticides connues, je rappelle aussi que le peuple qui a voté massivement oui n'était pas uniquement celui des miséreux et que l'élite intellectuelle et scientifique du pays avait elle aussi appelé massivement à voter oui.
En tout cas je dois te remercier d’avoir si pertinemment illustré mon propos concernant l’extrême difficulté si ce n’est l’impossibilité à faire cohabiter une liberté d’opinion qui s'affranchit de l'obligation de rationalité et l’exigence de vérité dans une démocratie.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Sur ce sujet, une vidéo de Castoriadis :
https://www.youtube.com/watch?v=5HL22xsVK4c&feature=youtu.be
https://www.youtube.com/watch?v=5HL22xsVK4c&feature=youtu.be
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
En exergue dans Delà horde à l'État de Enriquez«Cefutalorsl'instantqu'avaitattendulamassebestiale,ruminantsourdement,pourpoussersonhurlementd'allégresse,etc'estalorsqu'ellesedéchaîna,sansarrêtetsansfin,triomphante,faisanttouttrem-bler,irréfrénée,terrifiante,grandiose,ram-pante,s'adorantelle-mêmedanslapersonned'unseul.»1IERMANNBROCHLamortdeVirgile
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lanK- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Ataraxie a écrit:Le peuple n'élit jamais un dictateur, il élit quelqu'un qui le fait jouir. Et il est assez banal que la haine d'un ennemi réel ou imaginaire et le soulagement symbolique (= par le discours) du désir de lui faire du mal soient jouissifs pour le peuple et politiquement très efficaces (quel que soit le régime d'ailleurs). Généralement, l'élu ne devient dictateur que plus tard. Mais le peuple, même s'il ressent bien qu'une adhésion aux discours haineux et violents le ferait jouir parce qu'elle permettrait le soulagement symbolique de ses frustrations, est tout à fait capable de résister à cette tentation. Le plus souvent c'est ce qui se passe dans les démocraties mûres.
utilise-t-on ici le mot "dictateur" dans un sens précis et technique ou au sens vague, métaphorique ?
Au sens précis et technique, romain, disons, un "dictateur" obtient des pleins pouvoirs dans un régime d'exception (autrement dit : dérogatoire au droit ordinaire), ceci en général pour une durée limitée.
Ca arrivait en cas de gros problème (guerre extérieure ou civile, le plus souvent) : on installait un dictateur pour régler le problème rapidement, puis on revenait au cours normal du système (démocratie, aristocratie, etc.).
Il faut préciser que ces dictateurs étaient mis en place par les autorités compétentes (cf une assemblée qui vote "les plus pouvoirs") : ils pouvaient en profiter après pour s'inscruster, mais ils pouvaient aussi rentrer chez eux tranquillement après avoir fait leur boulot, c'est un autre problème.
Cela peut être proche de l'idée grecque de "tyrannie", qui comprenait aussi cet idée d'un pouvoir discrétionnaire et dérogatoire.
Ca n'était pas contraire à la volonté du peuple et d'ailleurs, si j'en crois Platon, les tyrans étaient presque toujours installés par le peuple, raison pour laquelle il explique dans la République que la démocratie se dégrade plus ou moins inévitablement en tyrannie. Si je me souviens bien (c'est une impression de lecture, il faudrait que j'aille revoir), il n'explique pas très bien pourquoi, ce n'est pas exposé de façon apodictique, ce dont j'avais conclu que c'est simplement un constat empirique.
La question du "plébisicite" est là-dedans un élément important (nous avons parlé de Hitler). C'est plutôt une manière, pour le despote, de valider après coup, de lessiver les circonstances peu reluisantes de son accession.
En général (presque toujours), ça marche très bien. Une fois en place, le dictateur obtient un score soviétique, et ceci sans avoir besoin de braquer un gun sur la tempe de chaque électeur. Napoléon III par exemple a usé et abusé de ce procédé. Dans son cas, les résultats se sont désoviétisés graduellement (au bout de 20 ans, même les meilleures volontés dictatoriales s'usent) mais il a gagné tous les plébiscites.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Le processus décrit par Platon ne me semble pas empirique (ce qui ne veut pas dire qu'il contredit l'expérience, bien entendu).
En effet, la série des régimes décrite dans la République obéit à deux lois, qui ont tout l'air d'un a priori :
- chaque régime est pire que le précédent (loi de dégradation qu'on peut, il me semble, rapprocher du mythe de l'âge d'or)
- ce qui perd un régime est ce qui en a constitué la qualité propre (et non un accident extérieur).
Or, le propre de la démocratie est de valoriser la liberté. C'est l'ivresse de la liberté qui conduit la démocratie à sa perte. Face au désordre qui s'installe, le peuple épuisé recourt à l'homme fort pour ramener l'ordre, ou plutôt son apparence, la tyrannie.
Quant à savoir si le peuple a toujours raison ou bien s'il a toujours tort, je suggère pour ma part d'y répondre par ma réponse favorite : "ça dépend".
En effet, la série des régimes décrite dans la République obéit à deux lois, qui ont tout l'air d'un a priori :
- chaque régime est pire que le précédent (loi de dégradation qu'on peut, il me semble, rapprocher du mythe de l'âge d'or)
- ce qui perd un régime est ce qui en a constitué la qualité propre (et non un accident extérieur).
Or, le propre de la démocratie est de valoriser la liberté. C'est l'ivresse de la liberté qui conduit la démocratie à sa perte. Face au désordre qui s'installe, le peuple épuisé recourt à l'homme fort pour ramener l'ordre, ou plutôt son apparence, la tyrannie.
Quant à savoir si le peuple a toujours raison ou bien s'il a toujours tort, je suggère pour ma part d'y répondre par ma réponse favorite : "ça dépend".
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amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/06/2011
Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
Quand on remporte une élection avec moins de 50% des suffrages exprimés mais avec plus de voix que ses concurrents, on la remporte avec une majorité relative.Bergame a écrit:Non, c'est faux. 43.9%, ce n'est pas une majorité, ni relative ni pas-relative. Et au moins, des chiffres, on ne peut discuter.Ataraxie a écrit: mais le peuple allemand a majoritairement voté pour un antisémite et un raciste notoire
Je suis surtout favorable à davantage de démocratie directe (un pléonasme) et effectivement je méprise la démocratie électorale. Comme je constate que tu as du talent pour les amalgames farfelus, je précise d'emblée que mépriser la démocratie électorale ce n'est pas mépriser les personnes qui y participent mais le système dans son abstraction et ses règles. Car je pense - mais c'est un avis discutable - que le système finit par acquérir sa propre autonomie pour ne plus véritablement obéir aux souhaits ni des citoyens ni des politiciens.Bergame a écrit:Autrement dit, je t'ai déjà lu critiquer ma conception "électorale" de la démocratie au nom d'une version "délibérative". Soit. Mais si tu es cohérent avec toi-même, comment peux-tu espérer que des monstres pareils "délibèrent" ? Et avec quel résultat attendu ? Qu'ils se mettent d'accord sur l'identité de la première minorité à exterminer ?
Pour le reste, il n'y a pas d'incohérence dans mes propos autre celle que tu inventes. Alors je vais préciser ma pensée. Je ne pense pas que le peuple est intrinsèquement cruel, avide de sang et de vengeance, pas plus je ne pense qu'il est innocent, sympathique ou honnête. En revanche, je pense qu'on peut le convaincre, pour peu qu'on ait du talent et que le contexte historique s'y prête, que ce que d'autres ou lui-même pourraient considérer comme de la cruauté ou de l'abjection n'est en fait ni de la cruauté ni de l'abjection abject mais seulement l'exercice juste et légitime de sa souveraineté pour son propre bien. Tout le talent du politicien pervers, du politicopathe, consiste à réussir cette transfiguration. Et c'est cela que tu ne comprends pas parce que tu réfléchis comme si un candidat demandait explicitement de voter pour la cruauté et le massacre de populations, ce qui t'amène évidemment à conclure que c'est délirant comme idée et insultant pour le peuple.
Mais je maintiens que les électeurs votent pour un homme ou une femme qui leur donne matière à jouir par son discours. Libre à cet homme de choisir comment il peut rendre son discours jouissif car je n'ai jamais dis qu'il n'y avait qu'une seule façon d'y parvenir. Cela dit, il faut bien reconnaître sur ce point une certaine efficacité à la haine et à l'envie de faire mal à quelqu'un pour se soulager. Mais comme je l'ai dit, ce ne sera jamais exposé sous cette forme et ce n'est pas non plus le seul ressort disponible. Et au fond je dirais que c'est une idée très proche de ce que tu disais à propos de la mobilisation des énergies en faisant appel aux sentiments.
Pour ce qui concerne la démocratie directe, je pense qu'on est moins susceptible de faire des choix extrêmes lorsqu'on est soi-même directement responsable des conséquences de sa décision. Mais je n'en ai pas de certitude.
Ataraxie- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 18/05/2012
Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
euthyphron a écrit:Or, le propre de la démocratie est de valoriser la liberté. C'est l'ivresse de la liberté qui conduit la démocratie à sa perte. Face au désordre qui s'installe, le peuple épuisé recourt à l'homme fort pour ramener l'ordre, ou plutôt son apparence, la tyrannie.
Ah merci, je comprends enfin ce que tu kiffes chez cet auteur pas commode (dans tous les sens du terme) : son hégélianisme rampant. Le contraire appelle le contraire, le moteur de l'histoire est dialectique, etc.
Dernière édition par Courtial le Sam 25 Juil 2015 - 15:15, édité 1 fois
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
euthyphron a écrit:
Quant à savoir si le peuple a toujours raison ou bien s'il a toujours tort, je suggère pour ma part d'y répondre par ma réponse favorite : "ça dépend".
C'est un peu léger, non? Pour comprendre on peut aussi s’intéresser à la théorie des jeux de Nash. Le domaine politique est par excellence un domaine de grandes interactions, c'est-à-dire que le résultat d’un processus dépend de l’ensemble des interactions entres différents acteurs, pas uniquement de l’action personnelle d’un acteur fut-il un dictateur.
La vision développée dans le discours politique partisan de ces interactions, parfaitement illustrée par Bergame, c’est de voir dans un camp tout ce qui a contribué à la promotion de l’événement rejeté mais uniquement cela et d’en faire la raison unique de l’axe du mal en oubliant la participation au jeu de son camp d’élection. La vision objective qui pourrait tendre vers une vérité ne peut être partisane car elle doit tenir compte des actions négatives de son propre camp.
On a dit Varoufakis spécialiste de la théorie des jeux, manifestement il avait de sérieuses lacunes en TP. En démocratie les acteurs sont supposés prendre leurs décisions librement par intelligemment.
baptiste- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 3117
Date d'inscription : 21/03/2012
Re: La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?
baptiste a écrit:C'est un peu léger, non? Pour comprendre on peut aussi s’intéresser à la théorie des jeux de Nash.
Ne paraît pas peser plus lourd. Aucune théorie des jeux ne dit qui a raison et qui a tort.
On peut utiliser une théorie des jeux pour déterminer qui a raison ou tort (si on s'en tient un instant à ces termes), mais ceci au nom d'autres principes que ce que peux produire une théorie des jeux, quelle qu'elle soit.
On peut renvoyer à ce sujet à ce qu'en a dit Bergame (et que je ne vais pas redire plus mal) touchant à l'économie. Les jeux présupposent un certain nombre d'éléments (par exemple : la notion de gain ou de perte) qu'ils n'ont pas besoin d'interroger.
Ici, nous ressentons le besoin de les interroger. Ce qu'on peut faire bien ou mal, avec profondeur ou avec légereté.
Mais il est fort improbable qu'une théorie des jeux donne ici quelque poids.
Courtial- Digressi(f/ve)
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