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La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ?

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Message par euthyphron Ven 10 Juil 2015 - 13:59

Il existe une conception qu'on peut en effet appeler religieuse de la démocratie, où la déclaration des droits de l'homme tient lieu de livres sacrés et le vote de sacrement. Mais il n'est absolument pas nécessaire d'y adhérer pour être démocrate. On peut être démocrate de façon pragmatique. N'est-ce pas ton cas puisque tu n'adhères pas à ce que tu écris?
Il me paraît évident en effet que le résultat d'un vote n'est pas "la vérité" ni l'expression du "juste en soi". Il est le résultat d'un acte, par lequel est prise une décision collective, c'est tout.
Donc, ce n'est pas parce que les Grecs ont voté "Non" que le "Non" devient "la vérité" (qu'est-ce que ça voudrait dire?). Mais c'est parce que voter "Oui" était accepter un gros mensonge que les Grecs dans leur majorité ne l'ont pas voulu.
Faut-il dire lequel? Voici la version officielle : l'Europe se propose d'aider les Grecs, en leur donnant de l'argent d'une part, et de bons conseils d'autre part, afin qu'ils redressent leur économie. Les Grecs n'y ont pas cru. Ils n'ont pas cru que c'est pour leur bien à eux, voire pour leur rédemption (pour que leur soient pardonnés leurs péchés de vol et de rapine) que l'Europe propose tous ces plans.

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Message par Courtial Ven 10 Juil 2015 - 17:03

quid a écrit:Alors oui, on ne peut conclure de la véracité du théorème de Pythagore par le résultat d'un vote.
Par contre, le vote doit être capable de jauger les personnes compétentes.
Et une personne sensé, ce qui est tout de même supposé des gens en démocratie à défaut d'être compétents, saura dire qu'un mathématicien sera plus à même de produire cette conclusion sur ce théorème. De la même manière et dans un tout autre domaine, le vote démocratique doit pouvoir dire qui sont les plus à même de les conduire.

Platon dit à peu près tout le rebours dans Protagoras.
Il serait d'abord étrange que des gens incompétents puissent juger des compétences des autres. Si je ne sais pas jouer de la flûte, il serait surprenant que je prétende en même temps être expert pour juger qui est ou non un bon flûtiste.
Bon mais ça, c'est Platon, je ne suis pas du tout d'accord, mais je voulais juste le faire entendre. Je crois au contraire qu'on peut être nul en flûte et tout à fait disposé à juger de qui est bon ou non. Cela s'appelle le "critique d'art", qui est incapable de vous pondre un tableau mais qui peut tout à fait voir les défauts d'un Picasso ou d'un Kandinsky.

Deuxièmement, où est-il écrit que le jugement démocratique (=le scrutin) devait être accordé à la compétence ? Il me paraît définitivement établi que la légitimité démocratique n'est pas la légitimité technique.
Faut-il mettre des mécecins au Ministère de la Santé ? Des flics à l'Intérieur et des Juges à la Justice ?A l'épreuve, cela n'implique pas. Le Professeur Schwartenberg, qui était sans doute un bon médecin, a tenu quelques semaines avant de se faire virer. Quant à Bachelot, Docteur en pharmacie, elle n'a pas séduit dans sa manière de gérer les vaccins, etc.

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Message par Ataraxie Ven 10 Juil 2015 - 22:24

euthyphron a écrit:Il existe une conception qu'on peut en effet appeler religieuse de la démocratie, où la déclaration des droits de l'homme tient lieu de livres sacrés et le vote de sacrement.
Mais les droits de l'homme ne sont-ils pas plutôt le fruit du libéralisme politique que de la démocratie ?

A plusieurs époques de l'histoire, la démocratie a été pratiquée en Europe sans déclaration des droits de de l'homme et, en théorie, il est possible d'abolir cette déclaration par vote démocratique (enfin je crois...)

Je me demande donc si la démocratie a un programme idéologique qui lui est propre ou s'il est seulement un régime d'arbitrage programmatiquement vide et, du même coup, disponible pour accueillir diverses idéologies politiques selon les contextes historiques.

Moi, je penche assez nettement pour la seconde option parce que je me dis simplement que si le régime instauré contient déjà en lui-même un programme idéologique contraignant en terme de politique pénale, économique, internationale, etc. nous sommes floués dés le départ, nous n'avons plus de choix à exercer ou alors un choix particulièrement restreint.

Si je devais appliquer cette idée aux droits de l'homme, je dirais que faire croire que la démocratie c'est les droits de l'homme, donc confondre un programme (quel qu'il soit du reste) avec un régime, c'est une conception abusive.        

euthyphron a écrit:On peut être démocrate de façon pragmatique. N'est-ce pas ton cas puisque tu n'adhères pas à ce que tu écris?
Raisonnable, pas pragmatique.

Le fait que je n'adhère pas à ce que je décris ne signifie pas que je suis pragmatique. Je soutiens le fait qu'il faut des croyances pour que la puissance publique existe et dure. Je soutiens aussi qu'il faut croire en une forme de grandeur de cette puissance publique (en l'occurrence dans une démocratie, cette grandeur est puisée dans la sacralité du suffrage universel). Que, par ailleurs, cette puissance publique soit efficace à transformer la société, ça me semble évidemment désirable et ça me semble aussi être une croyance absolument nécessaire.  

Courtial a écrit:Si je ne sais pas jouer de la flûte, il serait surprenant que je prétende en même temps être expert pour juger qui est ou non un bon flûtiste.
Bon mais ça, c'est Platon, je ne suis pas du tout d'accord, mais je voulais juste le faire entendre. Je crois au contraire qu'on peut être nul en flûte et tout à fait disposé à juger de qui est bon ou non.
En l'occurrence, le choix politique est fait AVANT que l'homme politique n'exerce le pouvoir ou que ses mesures ne soient mises en application. C'est d'ailleurs ce choix qui légitime son exercice du pouvoir. Si je reprends ton exemple, il faudrait donc soit juger le flûtiste avant qu'il n'ai joué de la flûte (donc exercé le pouvoir) ou bien, ce que je pense encore plus exact, il faudrait juger la qualité de la flûte (donc les mesures ou les moyens prônés) avant qu'elle n'ait servi. A moins que tu ne parles de juger d'une politique a posteriori, comme pour faire un bilan... s'il s'agit de ça je n'ai pas compris.
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Message par poussbois Sam 11 Juil 2015 - 4:20

Très juste, adhérer à une politique dans bien des cas, c'est comme sélectionner le flutiste de l'orchestre sur sa façon de nous parler de la musique ou de Mahler... et si par malheur on en sélectionne deux... :D

En fait, on ne fait qu'adhérer à nos désirs et juger des effets d'une politique en fonction de sa justesse, ou plutôt de sa justice. Le vrai et le faux, la bonne parole et le mensonge ne sont que des outils dans ce processus dynamique.

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Message par Bergame Sam 11 Juil 2015 - 11:43

Courtial a écrit:Il serait d'abord étrange que des gens incompétents puissent juger des compétences des autres. Si je ne sais pas jouer de la flûte, il serait surprenant que je prétende en même temps être expert pour juger qui est ou non un bon flûtiste.
Bon mais ça, c'est Platon, je ne suis pas du tout d'accord, mais je voulais juste le faire entendre. Je crois au contraire qu'on peut être nul en flûte et tout à fait disposé à juger de qui est bon ou non. Cela s'appelle le "critique d'art", qui est incapable de vous pondre un tableau mais qui peut tout à fait voir les défauts d'un Picasso ou d'un Kandinsky.
C'est un argument, oui. Mais il y en a un autre, qui me semble plus fort : Il n'y a tout simplement pas de vérité atteignable dans le monde socio-politique. Dans le sens précis qu'à chaque problème, il n'y a pas une solution, et une seule. Les problèmes qui se posent à un pays, un peuple, etc. ne sont pas du genre de baignoires qui se bouchent et de trains qui se croisent. La politique n'est pas une technique : Elle ne consiste pas à trouver la solution la plus appropriée étant donné les circonstances ; elle consiste à choisir une solution parmi un éventail (infini) de solutions possibles et à y faire adhérer le plus grand nombre.

Du moins, cela est-il la définition de la politique que je défends personnellement -parce que, de plus, elle est conséquente de ma représentation de ce qu'est le monde social, fondamentalement irréductible à toute tentative de mise en équations. Mais il y en a une autre, bien entendu, et sans doute largement dominante aujourd'hui. Une conception de la politique qui nous vient à l'origine de la discipline économie et qui considère, au contraire, que le comportement humain peut être mis équations. Que, par conséquent, le monde social et le monde physique ne sont pas fondamentalement différents, et que les sciences sociales ne sont pas méthodologiquement différentes des sciences physiques. Que, donc, lorsqu'un problème social au sens large se pose, il existe une solution, si ce n'est vraie à l'exclusion de toutes les autres, du moins optimale. Et qu'il existe des individus compétents, bien éduqués, qui connaissent cette solution. La meilleure -parce que la plus synthétique- formulation de cette représentation du politique ayant été énoncée par M.Thatcher : "TINA !" pour "There Is No Alternative !"

Dans cette perspective, bien entendu, les dit-individus compétents doivent avoir les mains aussi libres que possible pour agir. Et en particulier, il faut les protéger de tous les incompétents, nombreux, qui voudraient avoir leur mot à dire et qui, néanmoins, n'y connaissent rien. Dans cette perspective, donc, toute forme de participation du "peuple" aux décisions politiques est (plus ou moins) nuisible. Voila en quelques mots ce qu'on appelle le technocratisme.

La différence fondamentale entre ces deux représentations du politique tient à la fin qu'elles envisagent. Pour la représentation technocratique, la fin du politique est toujours déjà connue et implicite. Il y a une fin bonne, pour tout peuple et tout individu (disons pour la définir rapidement : amélioration des conditions matérielles d'existence). Raison pour laquelle on peut évaluer l'adéquation de telle ou telle solution à l'aune de cette fin, et raison pour laquelle on peut déterminer une solution optimale. Pour la représentation... -je ne sais pas comment l'appeler, néo-kantienne pour embêter Courtial ?   La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ? - Page 7 3184188294  ou sociologique peut-être, mais ce serait faire beaucoup d'honneur, j'en ai peur, à la sociologie- disons donc "alternative", la fin du politique n'est jamais présupposée. Elle repose sur l'idée qu'un pays, un peuple, une ethnie, un groupe, etc. peut poursuivre des fins différentes à différents moment de son histoire.

Par conséquent, et j'y reviens, dans cette perspective, la compétence du dirigeant politique sera très différente : Elle consistera à identifier quelle fin le groupe peut/devrait/veut poursuivre à ce moment de son histoire, rendre cette fin explicite, et mobiliser les énergies en vue de l'atteindre.

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Message par baptiste Sam 11 Juil 2015 - 18:17

Bergame a écrit:
Par conséquent, et j'y reviens, dans cette perspective, la compétence du dirigeant politique sera très différente : Elle consistera à identifier quelle fin le groupe peut/devrait/veut poursuivre à ce moment de son histoire, rendre cette fin explicite, et mobiliser les énergies en vue de l'atteindre.

Un gouvernement est élu sur la base d’une « ambition » d’un « programme », « d’intentions » encore plus lorsqu’il s’agit d’un parti qui a toujours été dans l’opposition. Il est élu pour négocier et décider au nom des électeurs, c’est le principe de la démocratie représentative. Pourquoi avoir appelé à un référendum pour accepter ensuite des conditions similaires alors que le référendum avait été un « succés» ? Etait-ce réellement un référendum ou bien une sorte de prononciamento ? N’a-t-on pas instrumentalisé le suffrage universel ? Toutes les réponses à ces questions et bien d’autres, la « verité » en quelques sorte, seront connues ultérieurement ce sera le travail des historiens et des journalistes.

La démocratie c’est simplement une possibilité donnée à chaque citoyen d’agir en politique. L’action politique pour laquelle tout est opinion, persuasion, consensus fait de la démocratie une forme politique qui se nourrit de l’affrontement de convictions opposées, et trop souvent les camps adverses se positionnent dans la falsification de la réalité.

« il faut avoir la force d’accepter ce que l’on ne peut changer, le courage de changer ce que l’on peut et la sagesse de discerner l’un de l’autre. » Marc Aurèle

Le « menteur » est celui qui estime qu’il n’a pas à déterminer sa conduite ou ses dires sur ce qui est ; il affirme sa volonté de changer la réalité, d’aller au-delà de ce qui est, mais l’exercice du pouvoir confronte le discours à la réalité et éloigne de la « vérité » du discours….la liberté n’est pas nécessairement synonyme de souveraineté.
Dans une démocratie moderne il me semble que le rôle d'un gouvernement sera moins dans la mise en oeuvre d'un idéal politique nécessairement minoritaire que dans la capacité à générer un consensus.

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Message par euthyphron Dim 12 Juil 2015 - 11:15

Bergame a écrit:Il n'y a tout simplement pas de vérité atteignable dans le monde socio-politique. Dans le sens précis qu'à chaque problème, il n'y a pas une solution, et une seule. Les problèmes qui se posent à un pays, un peuple, etc. ne sont pas du genre de baignoires qui se bouchent et de trains qui se croisent. La politique n'est pas une technique : Elle ne consiste pas à trouver la solution la plus appropriée étant donné les circonstances ; elle consiste à choisir une solution parmi un éventail (infini) de solutions possibles et à y faire adhérer le plus grand nombre.
Je suis totalement d'accord avec cela, à quelques nuances de formulation près, et même je crois que tout le monde peut s'accorder là-dessus.
Mais que s'ensuit-il de là? (comme dirait l'autre).
Ce que tu dis dans un premier temps. Le contraire de ce que tu affirmes, c'est en effet un certain discours technocratique, admirablement synthétisé par la formule TINA, qui constitue en fait un argument rhétorique : faire croire que toute proposition concurrente est impossible à appliquer.
Très bien, mais qu'en conclure par rapport au sujet? Eh bien, il apparaît que ce type de discours technocratique est fondamentalement un artifice de communication mensonger (exactement ce que Platon dénonçait chez les sophistes). Or, qu'est-ce qui en nous, en toi par exemple, mais aussi en moi, refuse le mensonge de ce discours? Cela s'appelle l'exigence de vérité, et c'est le plus grand ennemi du discours technocratique par exemple, mais aussi de tout discours qui vise à gouverner le peuple (en feignant de se laisser conduire par lui ou pas, peu importe) et non gouverner avec le peuple. C'est-à-dire d'à peu près tout discours de pouvoir, dont une des finalités est d'étouffer l'exigence de vérité.

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Message par Courtial Dim 12 Juil 2015 - 11:35

ataraxie a écrit:Je soutiens aussi qu'il faut croire en une forme de grandeur de cette puissance publique (en l'occurrence dans une démocratie, cette grandeur est puisée dans la sacralité du suffrage universel). Que, par ailleurs, cette puissance publique soit efficace à transformer la société, ça me semble évidemment désirable et ça me semble aussi être une croyance absolument nécessaire.

Ici, j'interpolerais volontiers un concept qui me semble indispensable, en dehors (ou en plus) de la "sacralité", c'est l'idée de contrôle. "Démocratie", cela veut dire que le peuple peut contrôler les politiques.
Il en était bien ainsi à Athènes, où le chef, Périclès par exemple, qu'il se représente ou non, avait des comptes à rendre sur sa gestion. Ce qui commençait, ce qui commence par des petites choses très simples (avant d'en revenir aux plus complexes) comme par exemple de lui demander combien il avait de pognon avant son mandat et combien il en a après.

Dans une version peut-être exagérée de la démocratie, on peut considérer qu'on doit contrôler non pas seulement après mais aussi pendant (le mandat). C'est-à-dire qu'on n'attend pas la fin du concert pour virer les mauvais flûtistes.
Je dis "exagéré" (comme on parlait sous la Révolution des Exagérés) car alors on risque de glisser doucement (ou moins doucement) de la démocratie à son méchant cousin, qui lui ressemble comme un frère, je veux dire le populisme.

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Message par Bergame Mar 14 Juil 2015 - 13:21

euthyphron a écrit:Je suis totalement d'accord avec cela, à quelques nuances de formulation près, et même je crois que tout le monde peut s'accorder là-dessus.
Mais que s'ensuit-il de là? (comme dirait l'autre).
Ce que tu dis dans un premier temps. Le contraire de ce que tu affirmes, c'est en effet un certain discours technocratique, admirablement synthétisé par la formule TINA, qui constitue en fait un argument rhétorique : faire croire que toute proposition concurrente est impossible à appliquer.
Très bien, mais qu'en conclure par rapport au sujet? Eh bien, il apparaît que ce type de discours technocratique est fondamentalement un artifice de communication mensonger (exactement ce que Platon dénonçait chez les sophistes). Or, qu'est-ce qui en nous, en toi par exemple, mais aussi en moi, refuse le mensonge de ce discours? Cela s'appelle l'exigence de vérité, et c'est le plus grand ennemi du discours technocratique par exemple, mais aussi de tout discours qui vise à gouverner le peuple (en feignant de se laisser conduire par lui ou pas, peu importe) et non gouverner avec le peuple. C'est-à-dire d'à peu près tout discours de pouvoir, dont une des finalités est d'étouffer l'exigence de vérité.
Je ne crois pas. Je loue ta tentative de synthèse, mais je ne te suis pas là-dessus.

Pour moi, c'est affaire de perspective, pardon. J'ai déjà dit (souvent, j'en ai peur) qu'à mon sens, toute théorie en sciences sociales est fondée sur un postulat anthropologique, et que sa vérité est relative à ce postulat.
Par exemple, la théorie technocratique, que j'ai essayée de synthétiser dans ses éléments fondamentaux, n'est pas fausse, au sens de faux en soi. Mais elle repose sur un postulat qu'il faut d'abord accepter : L'objectif premier de tous les hommes est de vivre dans les conditions matérielles le plus confortables possibles, autrement dit pour faire simple : L'objectif premier de tous les hommes est d'être le plus riche possible.
La question est : Cette proposition t'apparaît-elle vraie ou fausse ? "T'apparaît", car ce n'est en rien une proposition susceptible d'être testée scientifiquement. Il s'agit au fond d'une croyance à propos de ce que veulent les hommes en général. Partages-tu donc cette croyance ou non ?
Si oui, alors il y a de bonnes chances pour que tu puisses considérer que la théorie technocratique est vraie. Et que tu évalues l'ensemble des programmes et des actions politiques au regard de leur capacité à satisfaire cette attente généralisée.
Si non, alors effectivement, la théorie technocratique risque de t'apparaître fausse, mystificatrice, "idéologique", un tissu de mensonges à destination des pauvres lambda que nous sommes, et destiné d'abord à servir les intérêts d'une petite caste capitalistique.

Notons-le : Il existe des gens, nombreux, qui croient en la vérité de la théorie technocratique, qui pensent qu'effectivement, aujourd'hui, et dans le monde dans lequel nous vivons, "il n'y a pas d'alternative". Que peut-on donc en conclure ? Que les pauvres sont brainwashed, que les dirigeants politiques et leurs affidés les ont tellement bien gavés de mensonges en tout genre (bien aidés par la publicité, les medias, etc. que sais-je) qu'ils ne parviennent même plus à distinguer le vrai du faux ? Explication qui a d'ailleurs le mérite collatéral, remarquons-le, de nous positionner nous-mêmes dans le camp du Vrai, ce qui fait toujours plaisir.
On peut, bien sûr, mais à mon sens, on est là à un niveau de réflexion que j'appelle "politique" : J'ai raison, je suis dans le Vrai, et puisque l'autre ne pense pas comme moi, il a nécessairement tort. Avec ici la nuance indulgente : C'est pas de sa faute, son esprit a été obscurci par les mensonges du politique.

A niveau de réflexion où nous nous situons -qui est donc un niveau méta, me semble-t-il, un niveau disons philosophique- il me semble important de voir qu'il y a des individus qui croient vraiment, sincèrement, à la vérité de la théorie technocratique. Et qu'il est difficile de considérer qu'ils sont les jouets du mensonge politique, parce que, bien souvent, ce sont les mêmes qui vouent la politique aux gémonies. Ce sont les mêmes qui dénoncent le discours politique comme creux, mensonger, manipulateur, etc. et qui fustigent l'inutilité de la classe politique. Evidemment : Si l'on part du postulat qu'il y a une fin et une seule à l'action politique, à quoi sert un personnel politique nombreux, proposant des programmes différents ? Quelques experts qui appliquent et font appliquer les recettes "qui marchent", un personnel administratif réduit, responsabilisé et efficace, et ce sera bien suffisant.
Non, ils ne sont pas les jouets du mensonge politique, ils croient simplement à la vérité du postulat selon lequel l'objectif premier des hommes est d'être le plus riche possible. Peut-être, on peut le supposer, parce que c'est aussi le leur et que, comme nous le faisons tous plus ou moins, ils partent du principe que les autres pensent comme eux -à l'exception bien sûr des pauvres hères dont l'esprit a été obscurci par les mensonges et les manipulations de cette classe politique parasite, prête à toutes les malversations pour se faire réélire.

Dans le monde social et politique, la vérité d'une théorie est relative. Relative à ses postulats. Et ces postulats ne sont, au fond, que des croyances sur ce qu'est l'homme. On ne peut y parler de vérité (en soi) et de mensonge que si on oublie ce point fondamental, si on le met de côté -ce qui se fait très régulièrement, y compris dans le milieu académique. Si, ne serait-ce qu'implicitement, on adhère à une représentation de l'homme, si donc on choisit un postulat, à l'exception de tous les autres. Ensuite, bien sûr, le reste coule de source, et on peut alors discuter de ce qui est vrai et de ce qui est faux.

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Message par Ataraxie Mar 14 Juil 2015 - 14:43

Bergame a écrit:Par exemple, la théorie technocratique, que j'ai essayée de synthétiser dans ses éléments fondamentaux, n'est pas fausse, au sens de faux en soi. Mais elle repose sur un postulat qu'il faut d'abord accepter : L'objectif premier de tous les hommes est de vivre dans les conditions matérielles le plus confortables possibles, autrement dit pour faire simple : L'objectif premier de tous les hommes est d'être le plus riche possible.
Je ne suis pas d'accord avec ce postulat.

La technocratie est un régime qui considère :
1) que la politique se réduit à de la gestion économique et administrative
2) que le pouvoir doit être confié à une minorité de spécialistes.

Selon moi, le postulat qui ressort de tout cela est qu'une politique réussie ne nécessite rien d'autre que de l'argent. C'est différent de "l'objectif premier de tous les hommes est d'être le plus riche possible". Par contre, c'est très proche de "l'objectif premier de tous les hommes est de vivre dans les conditions matérielles les plus confortables possibles" mais dans cette affirmation ce qui est problématique c'est qu'il s'agisse de "l'objectif premier" car pour le reste de l'affirmation, c'est à dire le fait de ne pas vouloir souffrir de la pauvreté, il n'y a rien là-dedans de problématique ou de critiquable et personne ne saura décemment reprocher à un Etat d'agir pour que ses citoyens ne soient pas pauvres. Quoi qu'il en soit, ce postulat que j'ai formulé est une fausse bonne idée : une politique réussie ne se réduit pas à de l'argent. En revanche, dire qu'elle nécessite entre autres de l'argent (pour l'indépendance générale du pays, mais aussi pour la santé publique, l'éducation, la sécurité civile, la justice, les transports, etc.) là c'est différent et ce n'est plus un postulat, c'est une vérité.

Un deuxième postulat serait que seuls des ingénieurs de l'économie peuvent mener une politique réussie. Mais c'est un postulat qui découle naturellement du premier. Si ce dernier tombe, il emporte l'autre avec lui. A moins que vous ne considériez que le vrai problème est plutôt ce postulat... C'est possible.

Par ailleurs, je pose une question faussement naïve à propos de cette histoire d'argent : comment l'Etat peut-il participer au bonheur des citoyens autrement que matériellement ?
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Message par euthyphron Mar 14 Juil 2015 - 19:27

Bergame a écrit:
Par exemple, la théorie technocratique, que j'ai essayée de synthétiser dans ses éléments fondamentaux, n'est pas fausse, au sens de faux en soi. Mais elle repose sur un postulat qu'il faut d'abord accepter : L'objectif premier de tous les hommes est de vivre dans les conditions matérielles le plus confortables possibles, autrement dit pour faire simple : L'objectif premier de tous les hommes est d'être le plus riche possible.
La question est : Cette proposition t'apparaît-elle vraie ou fausse ? "T'apparaît", car ce n'est en rien une proposition susceptible d'être testée scientifiquement. Il s'agit au fond d'une croyance à propos de ce que veulent les hommes en général. Partages-tu donc cette croyance ou non ?
Si oui, alors il y a de bonnes chances pour que tu puisses considérer que la théorie technocratique est vraie. Et que tu évalues l'ensemble des programmes et des actions politiques au regard de leur capacité à satisfaire cette attente généralisée.
Si non, alors effectivement, la théorie technocratique risque de t'apparaître fausse, mystificatrice, "idéologique", un tissu de mensonges à destination des pauvres lambda que nous sommes, et destiné d'abord à servir les intérêts d'une petite caste capitalistique.
Tout d'abord, comme disait ce bon vieil Aristote, "bouc-cerf" n'est ni vrai ni faux. Seul un jugement est vrai ou faux, comme par exemple le jugement "le bouc-cerf existe". De ce point de vue il n'y a pas à distinguer entre le bouc-cerf et la technocratie, le mot "technocratie" n'est ni vrai ni faux.
Quant à la théorie technocratique, il faudrait s'entendre sur ce que c'est pour en juger. La version que propose Ataraxie me paraît plus fidèle que la tienne. Mais peu importe, ce qui compte c'est de savoir de quoi l'on parle, et là tu es précis, même si à mon avis (et à celui d'Ataraxie si j'ai bien compris) la proposition que tu énonces n'est pas ce qui caractérise la technocratie (c'est plutôt un principe fondamental du libéralisme pour moi, mais peu importe). Je ne dirai pas que la théorie technocratique est une erreur, je dis que la pratique technocratique génère le mensonge, car affirmer qu'il n'y a pas d'alternative quand il y en a une et qu'on le sait, c'est mentir.
Mais prenons plutôt l'exemple de la proposition sur laquelle tu m'interroges. L'objectif premier de tous les hommes est-il d'être le plus riche possible?
La réponse est non. Je dis bien "est" et non "paraît". Pourquoi? Parce que tu dis "premier" et tu dis "tous les hommes". Une telle affirmation, aussi générale, aussi méprisante, du coup, pour tous ceux qui ne s'y reconnaissent pas, est soit ce que l'on appelle une grosse connerie, soit, et beaucoup plus probablement, l'énoncé d'un point de vue, dont je ne discute pas la fécondité épistémologique.
Que donc quelque politologue ou économiste partant de ce point de vue dise où il arrive, je n'ai rien contre. Ce n'est ni vrai ni faux, c'est l'examen d'une hypothèse et de ses conséquences. Mais si quelqu'un me demande d'y croire parce que c'est comme ça il faut y croire (no alternative), je ne vois aucune raison de me laisser intimider. Ne confondons pas le travail théorique avec une série d'affirmations générales posées comme vraies.

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Message par Bergame Mer 15 Juil 2015 - 18:22

D'abord, il n'y a pas de contradiction entre la définition de technocratie d'Ataraxie et la mienne. J'adhère à la définition d'Ataraxie. Pour ma part, j'ai simplement essayé d'expliciter le postulat, en-deça de la théorie de la technocratie : Pourquoi la théorie de la technocratie peut-elle affirmer cette idée, autrement incongrue, que la politique se réduit à une gestion administrative et financière ? Parce qu'elle repose implicitement sur le postulat (certes classique pour la discipline économie) que les individus attendent prioritairement de voir leurs conditions matérielles s'améliorer. Si l'on accepte ce postulat, alors effectivement, ce qu'on appelle "la politique" peut légitimement se réduire à la simple gestion des moyens et ressources en vue de générer des outputs. Puisqu'on est parti du principe que c'est cela que veulent et attendent prioritairement les hommes. Suis-je compréhensible ?

Le libéralisme apparaît, en quelque, à un niveau supérieur de l'analyse. Parce que au niveau où nous nous situons pour l'instant, le "marxisme appliqué" est encore un candidat. En effet, le système communiste est/était lui aussi un système économico-politique orienté vers la production des outputs. Lui aussi était, en quelque sorte, technocratique, au sens où il réduisait "la politique" à la gestion (planifiée) des ressources et des moyens de production. Avec tous les éléments théoriques que cela impliquait, telle que la détermination de la superstructure par l'infrastructure, etc. Il prétendait seulement être meilleur, dans cet exercice, plus efficace, que le système capitaliste (ainsi que plus juste dans la redistribution).
Le libéralisme est donc une autre version du technocratisme.

L'une de mes idées, d'ailleurs, est que l'analyse politique s'est si longtemps fixée sur cette alternative, communisme vs libéralisme, qu'elle a entériné la technocratie comme allant de soi. Puisque ces deux corpus théorético-pratique partent, précisément, du même postulat : L'attente première des individus est de voir leurs conditions matérielles s'améliorer.

Ce postulat, je le redis, c'est celui de l'économie en tant que discipline. Et ce n'est pas un hasard : Libéralisme comme marxisme partagent cette caractéristique d'être des corpus à visée politico-sociale qui se sont forgés sur une anthropologie économique. Et pour un économiste, rien de plus naturel que de réduire le bonheur à l'amélioration des conditions matérielles d'existence. Bien sûr, c'est une réduction, qu'on appelle du terme bien connu "homo oeconomicus". Bien sûr que les hommes réels et singuliers sont plus diversifiés que cela. Mais on ne fait pas d'économie ni de politique, ni même de science, avec des individus singuliers.
Si l'on suivait ton raisonnement, euthyphron, toute science humaine et sociale mentirait, puisqu'elle réduirait immanquablement la diversité infinie de l'être humain à des types ou des catégories. En fait, toute science mentirait puisque toute science est réductrice, à un degré ou à un autre. Et l'on aboutirait donc à ce paradoxe que la science serait le domaine du mensonge.

Ceci étant posé, je propose plutôt d'aborder la question autrement, par exemple par la voie "faussement naïve" d'Ataraxie.
comment l'Etat peut-il participer au bonheur des citoyens autrement que matériellement ?
A mon avis, avant cette question, il y en a une autre : Qu'est-ce qui rend les hommes heureux ?
Je propose une petite liste, fondée sur mon expérience et mes croyances :
- L'argent
- Le pouvoir, la conquête
- La reconnaissance, voire la popularité/célébrité
- L'amour
- L'amitié
- Le sexe
- L'extase mystique, la révélation
- Le beau
- La création
- Se sentir partie d'un groupe, d'un projet
- Le sentiment de faire ce qui est bien, juste
- L'apprentissage, la connaissance
- La nature

La liste n'est sans doute pas exhaustive, elle est déjà longue. Mais on doit déjà distinguer comme les conséquences théorético-pratiques de ces postulats risquent de se révéler contradictoires.

Car comment l'Etat, ou plus précisément un groupement politique (je rappelle que mon propos n'est pas limité aux "Etats"), pourrait-il participer au bonheur des individus ? Générer des outputs certes, mais aussi par exemple :
- Octroyer davantage de pouvoirs aux citoyens : C'est peu ou prou le principe de la démocratie
- Peut-être pas directement provoquer l'extase mystique, mais en tout cas "administrer les biens de salut" comme disait Weber : C'est peu ou prou le principe des théocraties
- Constituer un groupe orienté vers un projet : C'est peu ou prou la méthode de toutes les politiques fondées sur l'identité, nationalisme, régionalisme, communautarisme, etc.
- Prôner le retour à la nature : C'est peu ou prou le programme de la deep ecology.
Etc.

Il me semble clair que, pour un communiste par exemple, la deep ecology apparaîtra sans doute comme un programme d'illuminés rétrogrades, et les pauvres gens qui y adhèreraient des victimes du mensonge et de l'idéologie. Tandis que ces derniers ne voient dans les communistes que les tenants d'un productivisme dépassé et idéologique qui nous entraîne dans l'abime. Qui est dans le vrai, qui est dans le faux ? Pour ma part, il me semble surtout que les uns et les autres adhèrent à des corpus théorético-pratiques qui procèdent à partir de différentes représentations anthropologiques.

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Message par euthyphron Mer 15 Juil 2015 - 18:50

Bergame a écrit:Si l'on suivait ton raisonnement, euthyphron, toute science humaine et sociale mentirait, puisqu'elle réduirait immanquablement la diversité infinie de l'être humain à des types ou des catégories. En fait, toute science mentirait puisque toute science est réductrice, à un degré ou à un autre. Et l'on aboutirait donc à ce paradoxe que la science serait le domaine du mensonge.
Tu ne m'as pas bien lu. Pour mentir, il faut prétendre dire le vrai (tout en sachant qu'on dit le faux). Travailler sur des hypothèses ne saurait être mentir.
Mais il est vrai que tout discours qui se prétend scientifique et qui au nom de cela fait passer ses postulats pour des vérités est mensonger, oui, car on peut supposer qu'un scientifique connaît son métier, et la différence entre un postulat et une conclusion.
D'autant que le postulat en question, tel que tu le formules, ignore la différence entre "parfois" et "toujours", ce qui, sauf à supposer une imbécillité congénitale chez tous les économistes (hypothèse qui demeure improbable) n'a de sens que si l'objectif est de raisonner dans le cadre d'une fiction. Cette fiction part de la question suivante : que se passerait-il si toujours les hommes n'avaient de préoccupation que celle de leur situation financière? Nous vivrions alors dans un monde que les économistes pourraient espérer maîtriser parfaitement sur le plan théorique. Ce qui n'est pas le cas. Mais cela n'a rien d'étonnant (et ne doit pas être imputé à charge aux économistes) puisque l'hypothèse de départ est manifestement fausse.

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Message par Bergame Mer 15 Juil 2015 - 23:05

Je ne parle pas d'hypothèse, euthyphron, je parle de postulats. Un postulat est un énoncé qu'on présume vrai. Une hypothèse est précisément un énoncé dont on teste la validité.
Oui, en économie comme dans n'importe quelle science, il existe des postulats, des propositions qui sont présumées vraies. Et puis sur la base de ces postulats, on élabore des théories qui donnent naissance à des hypothèses qu'on teste (prétend tester, en économie, et à mon avis, mais c'est un autre sujet).
Les problèmes épistémologiques liés au réductionnisme en sciences sociales sont bien connus, euthyphron -du moins des épistémologues. Le seul problème, peut-être, est que l'épistémologie n'est pas une branche très développée en économie, et que nombre d'économistes pensent les questions épistémo- et méthodologiques closes. Cf. la difficulté des courants dits "hétérodoxes" à se faire entendre.

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Message par baptiste Jeu 16 Juil 2015 - 7:59

euthyphron a écrit:
Tu ne m'as pas bien lu. Pour mentir, il faut prétendre dire le vrai (tout en sachant qu'on dit le faux).
.

N’est-il pas faux de s’en tenir à cette…. Quoi au fait ? Hypothése, postulat… La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ? - Page 7 177519025

Approcher le problème de la vérité en politique suppose en premier lieu de briser l’identification entre vérité et réalité n’en déplaise à Platon. Nous avons tendance à juger que ce qui est vrai est ce qui est réel. Pourtant, supposons que je regarde le soleil, je dis qu’il est réel ; mais quel sens y aurait-il à dire que le soleil est vrai ? Lorsque j’affirme que quelque chose est réel, je ne fais rien d’autre que reconnaître son existence. La vérité en politique semble exiger autre chose qu’une simple reconnaissance d’identité.

La notion de vérité en politique est extrêmement complexe puisque cette vérité dépend de la multitude de formes d’expériences que l’on a de la réalité et pas simplement de la logique du discours. La question de la vérité est désormais plus un point de vue épistémologique qu’un point de vue idéologique, c’est pourquoi le technicien apparaît plus apte à dire le vrai. Le domaine de la politique à ceci de particulier que je peux interpréter sincèrement certains arguments sur la base de mes connaissances et ne pas en accepter d’autres qui mettraient en doute mes croyances ainsi le militant peut mentir sincèrement en étant convaincu de dire le vrai.

La particularité du mensonge en politique c’est que le menteur croit en son mensonge il peut donc prétendre dire le vrai en "ignorant" que c’est faux.



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Message par euthyphron Jeu 16 Juil 2015 - 11:53

Désolé, mais on ne m'emberlificote pas si facilement, et une armée de chapeaux pointus ne suffit pas pour me faire admettre la platitude de la terre.
Bergame, s'il est vrai (j'en doute fort, mais pour te faire plaisir, puisque ce n'est pas le sujet, je veux bien te l'accorder) que pour tous les économistes il faut postuler que tout homme n'est préoccupé que par sa prospérité matérielle, eh bien il s'ensuit que tous les économistes se trompent, comme tu l'as montré facilement en citant nombre d'autres préoccupations. J'attendrai patiemment qu'ils fassent leur révolution copernicienne.

Quant à baptiste,
baptiste a écrit:Approcher le problème de la vérité en politique suppose en premier lieu de briser l’identification entre vérité et réalité n’en déplaise à Platon. Nous avons tendance à juger que ce qui est vrai est ce qui est réel. Pourtant, supposons que je regarde le soleil, je dis qu’il est réel ; mais quel sens y aurait-il à dire que le soleil est vrai ?
Tout ceci reprend, dit autrement, ce que j'ai dit moi-même en citant Aristote (épisode du bouc-cerf, message du 14/07). Ce n'est donc pas quelque chose qu'on puisse m'objecter.
baptiste a écrit:La notion de vérité en politique est extrêmement complexe puisque cette vérité dépend de la multitude de formes d’expériences que l’on a de la réalité et pas simplement de la logique du discours.
Ceci ne vaut pas qu'en politique, mais dans tout domaine. Mais, et alors?
baptiste a écrit:  La question de la vérité est désormais plus un point de vue épistémologique qu’un point de vue idéologique, c’est pourquoi le technicien apparaît plus apte à dire le vrai.
C'est typiquement le genre de phrases qui ne veut rien dire, même en y insérant un "c'est pourquoi" assez comique.
baptiste a écrit: Le domaine de la politique à ceci de particulier que je peux interpréter sincèrement certains arguments sur la base de mes connaissances et ne pas en accepter d’autres qui mettraient en doute mes croyances ainsi le militant peut mentir sincèrement en étant convaincu de dire le vrai.
La particularité du mensonge en politique c’est que le menteur croit en son mensonge il peut donc prétendre dire le vrai en "ignorant" que c’est faux.
Ce n'est pas particulier à la politique. Je ne vois même pas quel domaine de la vie serait épargné par ce que tu décris, et que l'on appelle couramment "mauvaise foi".
L'intérêt de la catégorie de "mauvaise foi" est d'occuper la place intermédiaire entre le mensonge pur (je connais le vrai et je dis le faux dans l'intention de tromper) et l'erreur pure (j'ignore le vrai et dit le faux en le croyant vrai). Tu as parfaitement raison d'en signaler l'importance. L'homme de mauvaise foi n'est pas vraiment un menteur, sauf dans la mesure où il pourrait être conscient de la vérité, mais où il fait tout pour l'ignorer. Il devient clairement menteur lorsque on lui montre qu'il se trompe et qu'il ne le reconnaît pas. S'il n'a aucun moyen de se rendre compte qu'il se trompe, il est pour l'instant dupe, et non menteur. Ce qui n'empêche que l'exigence de vérité se rapporte aussi à lui, sous la catégorie de lucidité, ou refus du "mensonge à soi-même", lequel comme je viens de le dire n'est pas exactement mensonge mais plus précisément mauvaise foi.

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Message par poussbois Jeu 16 Juil 2015 - 12:37

Oui, merci de ramener la discussion sur ce point, j'en avais déjà parlé plus haut, mais j'ai l'impression que dans ce cadre, le mensonge reste rarissime en politique. L'excès d'optimisme, certainement, mais pas réellement le mensonge. Ou en tout cas, bien difficile à établir. Un politique qui n'applique pas son programme n'est pas un menteur, en tout cas on ne peut pas le prouver. C'est juste quelqu'un qui est confronté "au réalité du pouvoir".
Et bizarrement, on ne trouvera lucide que les hommes politiques de son bord, ou les plus populistes si on est sensible aux chants des sirènes, et on traitera de mauvaise foi tous les autres.
Mais une fois de plus, pour moi, politique et vérité ne se confrontent réellement que très rarement et plutôt dans des histoires de droit commun (c'est le cas de Cahuzac) ou d'affaires troubles et dans ce cas, à nouveau, la vérité de ses affaires n'est mise à mal que quand elles apparaissent en plein jour. Ce qui est rare. Les mensonges, c'est Mitterand parlant de sa bonne santé, ou Hernu expliquant que les services secrets français n'ont pas fait sauté le Rainbow Warrior. Ca reste rarissime.
Dans le fonctionnement quotidien, c'est effectivement plus des tentatives plus ou moins lucide, plus ou moins de mauvaise foi, de tirer des plans sur l'avenir. Dans les faits, les politiques mentent rarement. Ils tripatouillent un peu les chiffres, mais c'est à peu près tout.

Je parle d'une démocratie qui dispose de journalistes qui font leur travail. Evidemment, dans les dictatures qui contrôlent la presse, le mensonge est alors une base de communication. Le mensonge et la vérité sont plus faciles à étudier à mon sens dans les relations presse / pouvoir que dans le seul focus des politiques.

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Message par euthyphron Jeu 16 Juil 2015 - 12:59

Il me semble qu'on peut néanmoins considérer comme mensonges (car on y trouve l'intention de tromper) la rétention d'informations, la démagogie, et la propagande, voire certaines stratégies de communication (dont le fameux argument TINA).
Se limiter aux mensonges factuels à propos des "affaires" (Cahuzac) me semble en effet appauvrir le débat.

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Message par Bergame Jeu 16 Juil 2015 - 15:11

poussbois a écrit:Et bizarrement, on ne trouvera lucide que les hommes politiques de son bord, ou les plus populistes si on est sensible aux chants des sirènes, et on traitera de mauvaise foi tous les autres.
Ca me semble également assez évident.
Par exemple, euthyphron, ce que toi tu appelles "démagogie", d'autres l'appellent "démocratie" -nous avons eu l'occasion de le vérifier. Il y a des individus, nombreux, qui pensent que "TINA" est une vérité. Peut-être que tu n'y es pas confronté, moi j'en connais beaucoup, et ils ont des arguments, que j'ai eu l'occasion de juger tout aussi fondés que les miens -mais fondés sur d'autres fondations que les miennes.

Le problème est toujours le même : C'est normal, cognitivement normal, de partir du principe que ce que je pense est vrai. Mais l'expérience nous apprend que les autres pensent, éventuellement, différemment. Dès lors, deux conclusions possibles :
- Soit on juge qu'ils tort, qu'ils sont dans le faux, et voila tout.
- Soit on essaie de comprendre pourquoi ils pensent ce qu'ils pensent, et on essaie éventuellement de trouver où se situe la divergence. C'est à peu près la chose qu'on peut faire : Essayer de comprendre.

Parce que, encore une fois, les problèmes qui se posent dans le monde social ne sont pas de l'ordre de la forme de la Terre, problème qu'il est possible de trancher empiriquement. Qui peut dire légitimement qu'il a la solution aux problèmes, pourtant cruciaux, qui se posent aujourd'hui à la Grèce et à l'Europe, par exemple ?

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Message par euthyphron Jeu 16 Juil 2015 - 15:34

Personne ne doute de tout cela. La question n'est pas de savoir si quelqu'un détient la vérité, ni qui fait le plus d'efforts pour comprendre les autres.
La question, rappelons-le, est de savoir si la politique échappe à l'exigence de vérité. Ou si au contraire l'exigence de vérité a son rôle à jouer en politique et si oui lequel.
Ce n'est certes pas d'apporter la prétendue solution à tous les problèmes. D'une manière générale, le dogmatisme n'exige pas la vérité, mais la croyance. Même quand c'est un dogmatisme qui se réclame de la science. Et même aussi quand c'est un dogmatisme relativiste.

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Message par baptiste Ven 17 Juil 2015 - 7:07

La vérité objective est peut-être compatible avec la république des philosophes elle ne l’est pas avec une démocratie ordinaire. La démocratie ordinaire présuppose non seulement qu’on ait certaines opinions et certaines croyances, mais aussi qu’on puisse les exprimer librement en les affirmant et en les soumettant à la discussion. Dans la démocratie ordinaire la seule chose dont nous ayons besoin est d’avoir des justifications pour nos conceptions – justifications qui peuvent ne rien avoir d’absolu.
Non seulement la justification n’entraîne pas la vérité car on peut être parfaitement justifié à croire quelque chose sans que ce soit vrai, mais aussi il n’y a rien de plus dans le concept de vérité en politique que le fait qu’un agent affirme une proposition comme vraie pour telle ou telle raison qu’il se trouve avoir ou que son parti lui-même approuve. « Vrai » n’est qu’une «marque» que nous apposons aux jugements que nous aimons bien. Je suis parfaitement conscient du fait que je m’oppose à la conception classique des relations théorique entre vérité et démocratie, mais le mot "vérité" dans la démocratie réelle ne peut recouvrir aucun absolu sauf à nier la démocratie. En effet la promotion d’une forme de vérité, l’idée même que la vérité puisse avoir une autorité quelconque, ou que ceux qui ont de l’autorité puissent s’en prévaloir, est considérée comme hautement problématique du point de vue de la promotion d’une forme de vie démocratique. Il n’y a rien d’autre dans la vérité que l’affirmation de l’opinion la plus personnelle,  il est de l’essence de la démocratie de récuser toute autorité extérieure quelle qu’elle soit, y compris et surtout celle de la vérité. Plus que toute autre forme de régime politique ce qui compte dans le vote c’est la simple expression de l’opinion parfaitement indifférente à la question de savoir si celle-ci est vraie ou fausse, justifiée ou pas. La question de savoir si cette opinion est vraie ou même simplement correcte est, dans une démocratie ordinaire, parfaitement indifférente.

Dans une démocratie ordinaire la « vérité » devient une notion « métaphysique », impossible à définir et surtout à mettre en œuvre, une relique d’un âge platonicien révolu. C'est d'ailleurs uniquement pour cela que les élèves dont Courtial a corrigé les copies ont jugés inutile de faire référence à Platon et non par ignorance comme ce fut suggéré par quelques profs malveillants et grincheux. La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ? - Page 7 177519025  La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ? - Page 7 177519025  La politique échappe-t-elle à l'exigence de vérité ? - Page 7 177519025

Paradoxalement il est tout de même possible d'observer que c’est la même démocratie ordinaire qui offre le plus de chances à la vérité de s’imposer.

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Message par quid Ven 17 Juil 2015 - 23:12

Ataraxie a écrit:Rien dans la définition de la démocratie ne peut théoriquement empêcher certains choix, fussent-ils mauvais, et ceci pour la simple raison que c'est un régime indifférent aux résultats qu'il peut générer, notamment par le vote.

à Ataraxie,

Il y a au moins le cas de la prise de pouvoir démocratique d'Hitler qui confirme le cas pratique, et sinon, oui il semble que théoriquement la démocratie n'empêche pas les mauvais choix.

Sauf que la théorie dans ce domaine si elle ne s'appuie que sur un aspect mathématique, on ne sait pas trop si c'est une théorie très complète en ce qui concerne le choix d'individus.
Les choix ne sont pas fait non plus au hasard, même s'ils sont contextuels et donc un tant soit peu relatifs. Ils ne sont pas fait au hasard mais pas non plus qu'avec rationalité.
Il serait intéressant de savoir ce que pourrait nous dire une théorie qui tiendrait compte de la combinaison de l'aspect mathématique de majorité, ainsi que de l'aspect anthropologique ou humain des motivations des choix.
Il y a certainement des critères dans les choix, qui font un large consensus, et ceci au-delà des clivages communautaires. Dans une population, la majorité ne se situe pas d'un côté ou d'un autre, elle se situe en général au centre, le reste est marginal.

Il y a bien sûr les sujets ou les options clivants.

La démocratie ne serait-elle pas la voie politique la plus à même d'éviter des dérives, même si elle n'a pas intrinsèquement la réponse ou la solution à toutes les problématiques, ni n'est à l'abri des mauvais choix.

Courtial a écrit:Deuxièmement, où est-il écrit que le jugement démocratique (=le scrutin) devait être accordé à la compétence ? Il me paraît définitivement établi que la légitimité démocratique n'est pas la légitimité technique.
Faut-il mettre des médecins au Ministère de la Santé ? Des flics à l'Intérieur et des Juges à la Justice ?A l'épreuve, cela n'implique pas. Le Professeur Schwartenberg, qui était sans doute un bon médecin, a tenu quelques semaines avant de se faire virer. Quant à Bachelot, Docteur en pharmacie, elle n'a pas séduit dans sa manière de gérer les vaccins, etc.

à Courtial,

Peut-être, mais s'il y a de l'enjeu, et de l'attention qui est réclamée par le scrutin, les votants ne sont-ils pas à la recherche de la compétence ? En tout cas majoritairement.

Celui qui voterait pour une personne qu'il considère incompétente, représenterait-elle pourtant ses idées, ne viserait pas la réussite de ses idées.

Stratégiquement, il pourrait y avoir ceux qui voteraient pour le candidat de l'échec afin de mieux s'imposer par la suite en tant qu'alternative, mais cela me semble une approche marginale, en tout cas tant que l'on croit en la politique.

Sur la considération du profil des ministres, cela me semble quelque peu évident qu'un médecin ne fait pas de la médecine au ministère de la santé, et que ce n'est donc pas cette compétence là qui lui est principalement demandée.

Je ne sais pas si les citoyens sont moins qualifiés pour juger de la compétence des hommes politiques, mais je ne sais pas qui alors est qualifié pour le faire.
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Message par Courtial Sam 18 Juil 2015 - 3:15

quid a écrit:Peut-être, mais s'il y a de l'enjeu, et de l'attention qui est réclamée par le scrutin, les votants ne sont-ils pas à la recherche de la compétence ? En tout cas majoritairement.

Celui qui voterait pour une personne qu'il considère incompétente, représenterait-elle pourtant ses idées, ne viserait pas la réussite de ses idées.

La difficulté, c'est pour moi de ne pas très bien saisir ce qu'est la "compétence" politique. Ce n'est pas un savoir de type scientifique, où dominerait un régime d'opposition vrai/faux, je crois qu'à ce point de la discussion, nous sommes à peu près d'accord là-dessus.

On peut essayer d'aller gratter ailleurs, mais je vais une fois encore revenir à Godard : c'est alors la quesiton des professionnels de la profession. Professionnels de la profession auxquels on reproche d'être seulement compétents, mais éloignés du peuple, de ses vraies préoccupations, etc.

Les Grecs avaient essayé de minimiser l'effet professionnel de la profession en désignant les Législateurs par un tirage au sort. Ca doit produire pas mal d'incompétents mais j'attends encore qu'on me démontre qu'il y en aura plus qu'avec un système d'élection. Les avantages immenses en contrepartie me semblent résorber ce désagrément marginal.
Je demeure en cela comme en tout le reste un aristotélicien strict : la démocratie est le régime où l'on est tour à tour gouvernant et gouverné.

C'est au reste ce en quoi consiste l'essentiel de ma philosophie politique, si vous voulez la connaître : un peu d'Aristote et beaucoup de Godard.

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Message par baptiste Sam 18 Juil 2015 - 7:26

Courtial a écrit:

Les Grecs avaient essayé de minimiser l'effet professionnel de la profession en désignant les Législateurs par un tirage au sort. Ca doit produire pas mal d'incompétents mais j'attends encore qu'on me démontre qu'il y en aura plus qu'avec un système d'élection. Les avantages immenses en contrepartie me semblent résorber ce désagrément marginal.
Je demeure en cela comme en tout le reste un aristotélicien strict : la démocratie est le régime où l'on est tour à tour gouvernant et gouverné.

C'est au reste ce en quoi consiste l'essentiel de ma philosophie politique, si vous voulez la connaître : un peu d'Aristote et beaucoup de Godard.

Le nombre de lois votées et inappliquées car totalement inapplicables s'en trouverait certainement encore accru. Condorcet avait imaginé un système pyramidal dans lequel toutes les fonctions électives étaient en cascade et tout élu était d'abord élu de quartier. Le quartier désignant son élu au municipal, lequel envoyait son élu au département ainsi de suite...Robespierre l'a accusé de vouloir ôter le pouvoir au peuple et lui a fait couper la tête.

"Mais convenez avec moi que ce mépris constitutionnel des minorités qui caractérise les régimes démocratiques peut surprendre le penseur humaniste qui sommeille chez tout cochon régicide. D'autant plus que, paradoxe, les intellectuels démocrates les plus sincères n'ont souvent plus d'autre but, quand ils font partie de la majorité élue, que d'essayer d'appartenir à une minorité." Desproges aussi avait noté le paradoxe. Les marins bretons disent que "le mieux est l'ennemi du bien".

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Message par kercoz Sam 18 Juil 2015 - 8:30

baptiste a écrit: Condorcet avait imaginé un système pyramidal dans lequel toutes les fonctions électives étaient en cascade et tout élu était d'abord élu de quartier. Le quartier désignant son élu au municipal, lequel envoyait son élu au département ainsi de suite...

Le concept de "Subsidiarité", qui gère la délégation verticale du pouvoir de décision, est par ex inscrit dans la Constitution Européenne.
Le problème est repoussé du fait qu'il y a 2 type de subsidiarité: Une montante l' autre descendante. Et que, de plus, il semble qu'il y ait inversion dans les signifiants intuitifs de ces 2 procédures.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_de_subsidiarit%C3%A9

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Message par Courtial Sam 18 Juil 2015 - 12:40

.
Robespierre l'a accusé de vouloir ôter le pouvoir au peuple et lui a fait couper la tête.

Pour être tout à fait précis, Robespierre avait bien décidé de lui faire couper la tête, mais il a été bien feinté, Condorcet ayant eu le mauvais goût (ou le bon goût, c'est une question de point de vue) de se suicider avant.

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