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Message par Bergame Mer 26 Juil 2017 - 11:21

Qu'est-ce qui justifierait que la métaphysique ne puisse pas s'appréhender logiquement ?

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Message par pame Mer 26 Juil 2017 - 12:47

Bergame a écrit:Qu'est-ce qui justifierait que la métaphysique ne puisse pas s'appréhender logiquement ?
Platon et Nicolas de Cues étaient-ils irrationnels selon vous, en recourant à la synthèse analogique plutôt qu'à la phénoménologie analytique ?

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Message par hks Mer 26 Juil 2017 - 14:24

bergame a écrit:Qu'est-ce qui justifierait que la métaphysique ne puisse pas s'appréhender logiquement ?
Il y a un problème de base .
L' un et le multiple sont contradictoires.
L'Un englobe le multiple et ainsi n'est plus l 'Un .
Le multiple est un ( on a un concept DU multiple comme se tenant en soi ) et il n'est alors plus le multiple .
Ce n'est pas logique au sens ou A =A (et non pas non A)
( exprimé multe  fois de manière différente, mais bref)

Chez de Cues et puis chez Giordano Bruno
l'enjeu est démontrer que les contraires coïncident dans un principe indivis

chez N de Cues si l'on soumet des figures géométriques contradictoires à un processus infini, alors on voit qu' elles coïncident dans l'infini.
leur coïncidence fait signe vers indifférencié , et à rebours leur divergence manifeste   l'explicatio ( de l' unité)
exemple la ligne courbe devient une ligne droite à l'infini.

https://books.google.fr/books?id=WUmz4GICldYC&pg=PA18&lpg=PA18&dq=l%27un+le+multiple+principe+de+non+contradiction&source=bl&ots=h6JLLjFdBl&sig=SPXN_8l2OmjUivulOqWTx7CZ5YU&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiJyYqS8qbVAhUoCMAKHayqCGEQ6AEIVTAH#v=onepage&q=l'un%20le%20multiple%20principe%20de%20non%20contradiction&f=false

perso je vois un effort rationnel de compréhension ... lequel  n'exclut pas du tout la phénoménologie... de cet effort rationnel.

La phénoménologie est simplement diffuse chez de Cues. Moins problématisée que justement ce qu' on fait de criticisme après Descartes.
Descartes problématise l'accès à la rationalité.

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Message par Bergame Mer 26 Juil 2017 - 16:32

hks a écrit:Il y a un problème de base .
L' un et le multiple sont contradictoires.
Qui dit cela ? A ma connaissance, même Platon qui est sans doute le réaliste le plus radical, conçoit très bien le multiple dans l'unicité -manquerait plus que ca, d'ailleurs...

De plus, je comprends que ce n'est pas cela, le problème de De Cues. Ce n'est pas l'Un et le Multiple qui sont des contraires (*), c'est le Minimum et le Maximum. Ce que dit De Cues -je parle sous l'autorité de pame- c'est que, à la limite, ces deux contraires, l'infiniment petit et l'infiniment grand, se rejoignent.

Maintenant, cette thèse n'a rien d'irrationnelle. Disons en tout cas qu'elle suit le raisonnement logique -les mathématiques en fait- jusque là où elle le peut, et ensuite constate une même ignorance au-delà des deux limites. Qu'elle associe donc. Pourquoi pas ?

Ceci étant dit, pame, qu'est-ce donc que la "phénoménologie analytique" et la "logique empirique" ?


(*) Je passe sur la différence entre "contraire" et "contradictoire".

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Message par pame Mer 26 Juil 2017 - 17:04

hks a écrit:Il y a un problème de base .
L' un et le multiple sont contradictoires
Le problème réside dans l’application abusive de la logique d’Aristote aux relations intelligibles.
N. de Cues a su différencier et unir les trois niveaux de la réalité et de la connaissance:
- les phénomènes perceptibles où les contraires s’excluent (Aristote),
- les relations et fonctions intelligibles où les contraires sont complémentaires (Socrate dans Phédon 70d - 71b ou Lupasco)
- l’Un où il y a « coïncidence des opposés » (le Cusain et le Nolain)

https://digression.forum-actif.net/t1256-unite-et-alterite-selon-nicolas-de-cues.


Bergame a écrit:A part cela, qu'est-ce donc que la "phénoménologie analytique" et la "logique empirique" ?
J’appelle  analyse la méthode réductionniste de Descartes (qu’il n’appliquait qu’aux phénomènes naturels et non pas en métaphysique),
J’appelle logique empirique les principe d’identité, de non-contradiction et du tiers exclu d’Aristote, y compris ses catégories et syllogismes qui se rapportent à des objets ou phénomènes observables.
Notez que les équations mathématiques représentent avec leur signe d’égalité des relations ou fonctions selon une logique de complémentarité. Sans cette logique il n’y aurait pas eu de progrès scientifique.

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Message par Bergame Mer 26 Juil 2017 - 17:21

Pardon, c'est trop vague pour moi. Je déduis par exemple de ce qui précède que ce que tu appelles la "phénoménologie analytique", c'est Husserl ?

Mais surtout, je ne vois pas trop ce que tu vises lorsque tu dis :
Le problème réside dans l’application abusive de la logique d’Aristote aux relations intelligibles.
Et
J’appelle logique empirique les principe d’identité, de non-contradiction et du tiers exclu d’Aristote,
Les mathématiques traitent sans doute de ce que tu appelles "des relations intelligibles", et non pas seulement de relations entre des objets empiriques.
Or, les mathématiques acceptent aussi les principes d'identité et de tiers exclu. Au moins, me semble-t-il, jusqu'à la logique intuitionniste.
Bref : Je ne vois pas ce que tu vises.

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Message par hks Mer 26 Juil 2017 - 19:13

Qui dit cela ? A ma connaissance, même Platon qui est sans doute le réaliste le plus radical, conçoit très bien le multiple dans l'unicité -manquerait plus que ca, d'ailleurs...
Le concevoir certes , tout le monde est bien obligé ...mais le concevoir très bien c'est une autre affaire.

Je me suis peut-être mal exprimé .

En soi l'un n'est pas contradictoire avec lui même
En soi le multiple n' est pas contradictoire avec lui même.
Mais leur co-existence (sauf à les maintenir distincts absolument) est contradictoire.

S' ils existent en relation l'un n'est plus un car il en existe un autre ( le multiple )
et le multiple est contradictoire non parce qu'il existerait l' UN (après tout l' un serait un élément du multiple)
mais parce que si le multiple existe l'UN alors est contradictoire.

Ou bien on évacue absolument l 'un ...mais comme on le retrouve dans toute identification des eccéités(individués) la relation est peut être pensable mais difficilement



Dernière édition par hks le Mer 26 Juil 2017 - 20:35, édité 1 fois

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Message par hks Mer 26 Juil 2017 - 19:21

De plus, je comprends que ce n'est pas cela, le problème de De Cues. Ce n'est pas l'Un et le Multiple qui sont des contraires (*), c'est le Minimum et le Maximum.
je ne pense pas que ce soit le problème majeur de N de Cues.

Le minimum et le maximum sont dans le même registre, celui de l infinitude.
Du moins dans le texte de la docte ignorance.Mais N de Cues regrettera d' avoir parlé de Dieu trop intellectuellement

En revanche le divers du multiple n' est pas dans le même registre. Les opposés ne sont pas dans le registre de l'infinitude et c'est pourquoi il faut(ou on peut) les faire coïncider
Dans les conjectures le maximun et le minimum se trouvent replacés dans le monde du divers, celui des conjectures possibles . Les conjectures visent à relier le fini et l'infini.

..........................

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Message par maraud Mer 26 Juil 2017 - 21:15

hks a écrit:
De plus, je comprends que ce n'est pas cela, le problème de De Cues. Ce n'est pas l'Un et le Multiple qui sont des contraires (*), c'est le Minimum et le Maximum.
je ne pense pas que ce soit le problème majeur de N de Cues.

Le minimum et le maximum sont dans le même registre, celui de l infinitude.
Du moins dans le texte de la docte ignorance.Mais N de Cues regrettera d' avoir parlé de Dieu trop intellectuellement  

En revanche le divers du multiple n' est pas dans le même registre. Les opposés ne sont pas dans le registre de l'infinitude et c'est pourquoi il faut(ou on peut) les faire coïncider
Dans les conjectures le maximun et le minimum se trouvent replacés dans le  monde du divers,  celui des conjectures possibles . Les conjectures visent à relier le fini et l'infini.

..........................

( minimum/maximum)
Sans trop verser dans l'hermétisme, on peut toutefois reconnaître le principe: " tout ce qui est en bas est comme tout ce qui est en haut", symbolisé par l'exagramme.
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Message par Vanleers Jeu 27 Juil 2017 - 15:46

Levineannamaria a écrit:

Gödel montra que "la méthode axiomatique possède des limites internes qui excluent la possibilté d'axiomatiser entièrement ne serait-ce que l'arithmétique ordinaire des entiers" (le théorème de Gödel, collection Points, page 19). Il alla encore plus loin en démontrant qu'il existera toujours, dans un système construit sur des principes élémentaires des propositions indécidables (vraies ou fausses) et que tout système pour asseoir une détermination totale de son contenu doit aller chercher ailleurs, dans un autre système, des démonstrations de base. D'une certaine manière Gödel a donné ses limites à la raison.

Le théorème de Gödel s’applique-t-il à l’Ethique de Spinoza ?

A première vue, il semble que oui : l’Ethique est une suite de propositions qui s’enchaînent et sont démontrées selon l’ordre géométrique à partir de définitions et d’axiomes.
On a même cherché à les démontrer avec l’aide d’assistants de preuve informatiques (voir, par exemple, les travaux de Baptiste Mélès qui utilise Coq).
Toutefois, Hubbeling, dans un article de 1977 : « Spinoza comme précurseur du reconstructivisme logique dans son livre sur Descartes », qu’on peut lire sur JSTOR, écrit :

Hubbeling a écrit: Dans cette méthode [la méthode géométrique de l’Ethique] il commence par des définitions et des axiomes évidents et il en déduit les propositions. Ces propositions peuvent être des prémisses pour des propositions nouvelles. Ainsi Spinoza présente un système axiomatique. Un système axiomatique, dans la logique moderne, est complètement formel, c’est-à-dire que la signification des termes ne doit jouer aucun rôle dans la déduction (excepté naturellement les termes logiques eux-mêmes). Dans la déduction de Spinoza les termes jouent un rôle, mais néanmoins on peut nommer le système de Spinoza un système axiomatique, mais en ce cas-là non un système formel, mais informel. (p. 91)

Il suffit de lire l’Ethique pour constater que ce qu’écrit Hubbeling est exact.

Or, si j’ai bien compris, le théorème de Gödel démontre l’incomplétude des systèmes formels (sauf des systèmes les plus simples mais de peu d’intérêt). En conséquence, il ne s’applique pas à l’Ethique qui n’est pas un système formel.
Ce livre, quoiqu’il fasse appel à des axiomes et soit démontré géométriquement, doit être considéré plutôt comme un art de la joie, l’essentiel pour le lecteur consistant dans une mise en œuvre concrète de la perspective ontologique qui y est exposée.

C’est sans doute le motif pour lequel Deleuze, commentant l’Ethique, donne une double définition de la raison, étrangère à l’axiomatisation. Il écrit, dans Spinoza Philosophie pratique – entrée : Notions communes, que la raison peut se définir comme la connaissance par notions communes (Ethique II 40 scolie 2) mais aussi comme « un effort pour sélectionner et organiser les bonnes rencontres », autrement dit les rencontres dans lesquelles nous serons en capacité de faire cause commune avec la chose rencontrée et, en conséquence, d’en être joyeux.

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Message par hks Jeu 27 Juil 2017 - 16:25

Dans la déduction de Spinoza les termes jouent un rôle,

On redécouvre que les mots ont un sens .
et entre autre puisque c'est le sujet du fil le mot raison a un sens pour Spinoza.

On pourrait difficilement affirmer que  
chez Spinoza  la signification des termes ne doit jouer aucun rôle dans la déduction
manipulant des non signifiants la déduction produirait du non signifiant.( ce qui n'est ni l'objectif ni la réalité de l' Ethique )

donc Hubellein rappelle avec raison que
Dans la déduction de Spinoza les termes jouent un rôle,
ce n'est donc pas un système axiomatique  au sens de la logique moderne.

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Message par Vanleers Mer 9 Aoû 2017 - 17:11

A mon point de vue, le grand intérêt de la notion de raison selon Spinoza est qu’elle conduit à définir ce qu’est l’homme qui, en pratique, suit la raison.

Dans un article publié dans la Revue Philosophique de la France et de l’Etranger 1994 n° 1 :

Giuseppina Totaro a écrit: Agir selon la raison consiste à ne poursuivre que ce qui suit de la nécessité de notre nature « in se sola considerata » (Ethique IV 59 dém.), en se conformant, aussi longtemps qu’on ignore que la mens est éternelle, à ce que la raison prescrit comme utile : les premières prescriptions de la raison sont le Courage (animositas) et la Générosité (generositas).

Rappelons que dans le scolie d’Ethique III 59 :

Spinoza a écrit: Toutes les actions qui suivent des affects se rapportant à l’esprit en tant qu’il comprend, je les rapporte à la Force d’âme (fortitudo), que je divise en Fermeté (animositas) et Générosité (generositas). Car par Fermeté, j’entends le désir par lequel chacun s’efforce de conserver son être sous la seule dictée de la raison. Et par Générosité, j’entends le désir par lequel chacun, sous la seule dictée de la raison, s’efforce d’aider les autres hommes et de se les lier d’amitié.

Le désir étant l’essence de l’homme, l’homme n’est vraiment lui-même que lorsque son désir est dicté par la raison, c’est-à-dire par des idées claires et distinctes.

Deux remarques :

1) Il me paraît évident que chacun préfère naturellement avoir des idées claires et distinctes plutôt que des idées mutilées et confuses. Chacun préfère donc, en son for intérieur, agir selon la raison.

2) Il suffit d’avoir des idées claires et distinctes pour agir au mieux, c’est-à-dire pour « ne poursuivre que ce qui suit de la nécessité de notre nature ».
Il n’est donc pas nécessaire d’avoir des connaissances étendues.
Des connaissances scientifiques mal assimilées qui échauffent inutilement l’esprit sont plutôt nuisibles et il est remarquable de constater que l’éthique de Spinoza (mais on pourrait en dire autant des éthiques antiques) ne se base pas sur des connaissances scientifiques étendues, et que les nouveaux acquis des sciences ne remettent pas en question l’art de vivre qui y est proposé.

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Message par Bergame Mer 9 Aoû 2017 - 19:07

Deux objections :

Le désir étant l’essence de l’homme, l’homme n’est vraiment lui-même que lorsque son désir est dicté par la raison, c’est-à-dire par des idées claires et distinctes.
Lorsque l'homme n'est pas vraiment lui-même, qu'est-ce qu'il est ?

1) Il me paraît évident que chacun préfère naturellement avoir des idées claires et distinctes plutôt que des idées mutilées et confuses. Chacun préfère donc, en son for intérieur, agir selon la raison.
Je ne vois pas ce que cela a de si évident. Je crois qu'il y a beaucoup de gens qui ne détestent pas vivre dans un état d'excitation, de multitâches, de distraction perpétuelle, éventuellement au prix de la confusion des idées. C'est même un des griefs classiques à l'encontre de la fameuse génération Y qui, notoirement, ne sait plus se concentrer.

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Message par Vanleers Sam 12 Aoû 2017 - 11:28

A Bergame

1) Il est clair que l’homme qui n’est pas vraiment lui-même ne se transforme pas pour autant en cheval ou en insecte.
C’est une façon de parler mais soyons plus précis.
Dans le cadre de la philosophie spinoziste, je poserai qu’un homme est vraiment lui-même lorsqu’il est cause adéquate de ce qu’il fait ou pense, c’est-à-dire lorsque ce qu’il fait ou pense peut s’expliquer par lui seul.
Dans ce cas, il est cause totale et non partielle ; il est, selon les définitions de Spinoza, actif et libre et non passif et contraint.

2) Je pense que si quelqu’un prend conscience de tous les inconvénients des idées mutilées et confuses, c’est-à-dire inadéquates, dont dépendent les passions, il comprendra qu’il est dans sa nature d’avoir des idées claires et distinctes.
L’Ethique est une voie possible, mais elle n’est pas la seule, qui mène à prendre conscience de notre nature véritable, ce que j’ai appelé notre for intérieur.
Il est vrai qu’il existe de nombreux obstacles à cette prise de conscience.

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Message par Bergame Sam 12 Aoû 2017 - 12:54

Vanleers a écrit:Dans le cadre de la philosophie spinoziste, je poserai qu’un homme est vraiment lui-même lorsqu’il est cause adéquate de ce qu’il fait ou pense, c’est-à-dire lorsque ce qu’il fait ou pense peut s’expliquer par lui seul.
Mais la pensée d'un individu ne se nourrit-elle pas toujours d'inputs en provenance de son environnement ? Ne serait-ce que des données sensibles : Ce qu'il voit, ce qu'il entend, ce qu'il touche, etc. Ainsi que des informations en provenance d'autres individus, qui alimentent sa réflexion. Ainsi que etc. Aucune pensée ne s'explique que "par elle seule". Qu'est-ce que cela pourrait seulement vouloir dire ?

Me trompai-je si je comprends donc que ton homme "vraiment lui-même" ressemble à un homme privé d'yeux, de bouche, d'oreilles, de mains, et coupé de toute interaction avec son environnement le plus immédiat ?

Dans ce cas, il est cause totale et non partielle ; il est, selon les définitions de Spinoza, actif et libre et non passif et contraint.
Cette insistance sur l'activité vs la passivité, topos si récurrent dans la philosophie occidentale, ne lasse jamais de m'étonner. Lorsqu'un homme est passif, il n'est pas vraiment un homme, voila ce que tu es en train de signifier. Alors je te répète la question : Il est quoi ?  

Je pense que si quelqu’un prend conscience de tous les inconvénients des idées mutilées et confuses, c’est-à-dire inadéquates, dont dépendent les passions, il comprendra qu’il est dans sa nature d’avoir des idées claires et distinctes.
L’Ethique est une voie possible, mais elle n’est pas la seule, qui mène à prendre conscience de notre nature véritable, ce que j’ai appelé notre for intérieur.
Il est vrai qu’il existe de nombreux obstacles à cette prise de conscience.
Comme si nos affects, nos émotions, ce que tu appelles nos passions, n'étaient pas en notre "for intérieur". Comme si elles n'étaient pas vraiment les nôtres, comme si elles ne nous appartenaient pas, au même titre que nos idées, nos pensées.
Ne t'est-il donc jamais arrivé de souffrir, Vanleers ? Ou jamais arrivé d'être heureux ? Ne connais-tu pas l'amour, la tendresse, le désir, le plaisir, la peine, la tristesse, la mélancolie, la faim, la soif, la joie ? Si ? Alors lorsque tu éprouves ces affects, as-tu véritablement l'impression qu'ils ne t'appartiennent pas ? Qu'ils ne proviennent pas de ton "for intérieur" ?

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Message par hks Sam 12 Aoû 2017 - 15:00

bergame a écrit:Lorsqu'un homme est passif, il n'est pas vraiment un homme, voila ce que tu es en train de signifier.

Passif ne signifie pas chez spinoza que l' homme ne fait rien mais plutôt qu'il agit sans savoir .


Spinoza a écrit:On dit que nous pâtissons, quand il survient en nous quelque chose dont nous ne sommes la cause que partiellement (par la définition 2, partie 3), en d'autres termes (par la définition 1, partie 3), quelque chose qui ne se peut déduire des seules lois de notre nature. Nous pâtissons donc en tant que nous sommes une partie de la nature, laquelle ne peut se concevoir indépendamment des autres.
.....
corollaire
Il suit de là que l'homme est nécessairement toujours soumis aux passions, qu'il suit l'ordre commun de la nature et y obéit et s'y accommode, autant que la nature des choses l'exige.
proposition 4  partie 4
.....................
autre remarque  
Spinoza a écrit:Il résulte, en outre, du Postulat 4 de la partie 2, qu'il nous est à jamais impossible de faire que nous n'ayons besoin d'aucune chose extérieure pour conserver notre être, et que nous puissions vivre sans aucun commerce avec les objets étrangers.
Scolie de la proposition 18/4

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Message par Vanleers Sam 12 Aoû 2017 - 17:17

Bergame a écrit:
Vanleers a écrit:Dans le cadre de la philosophie spinoziste, je poserai qu’un homme est vraiment lui-même lorsqu’il est cause adéquate de ce qu’il fait ou pense, c’est-à-dire lorsque ce qu’il fait ou pense peut s’expliquer par lui seul.
Mais la pensée d'un individu ne se nourrit-elle pas toujours d'inputs en provenance de son environnement ? Ne serait-ce que des données sensibles : Ce qu'il voit, ce qu'il entend, ce qu'il touche, etc. Ainsi que des informations en provenance d'autres individus, qui alimentent sa réflexion. Ainsi que etc. Aucune pensée ne s'explique que "par elle seule". Qu'est-ce que cela pourrait seulement vouloir dire ?

J’ai déjà expliqué tout ça dans le post inaugural de « Liberté sans libre arbitre selon Spinoza » en :

https://digression.forum-actif.net/t1392-liberte-sans-libre-arbitre-selon-spinoza

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Message par Vanleers Dim 13 Aoû 2017 - 15:54

A Bergame

Je reprends l’extrait du scolie d’Ethique III 59 cité ci-dessus afin de dissiper un problème

Spinoza a écrit: Toutes les actions qui suivent des affects se rapportant à l’esprit en tant qu’il comprend, je les rapporte à la Force d’âme (fortitudo), que je divise en Fermeté (animositas) et Générosité (generositas). Car par Fermeté, j’entends le désir par lequel chacun s’efforce de conserver son être sous la seule dictée de la raison. Et par Générosité, j’entends le désir par lequel chacun, sous la seule dictée de la raison, s’efforce d’aider les autres hommes et de se les lier d’amitié.

Il s’agit ici du double désir par lequel chacun s’efforce de faire quelque chose sous la dictée de la raison, c’est-à-dire, je le rappelle, en ayant des idées claires et distinctes.
Or Spinoza définit le désir comme suit :

Spinoza a écrit: Le Désir est l’essence même de l’homme en tant qu’on la conçoit déterminée, par suite d’une quelconque affection d’elle-même, à faire quelque chose.

Je comprends donc la fermeté (animositas) et la générosité (generositas) comme suit.
En ayant des idées claires et distinctes, j’accrois ma puissance et, en conséquence, j’éprouve de la joie (Ethique III 11 scolie).
C’est cette joie, cette affection de l’essence, qui détermine le double désir de fermeté et de générosité.
En simplifiant, on peut dire que, chez Spinoza, tout est affectif. Le for intérieur dont j’ai parlé est donc intégralement affectif.
Remarquons aussi que la joie qui naît de la raison (connaissance du deuxième genre) naît également de la science intuitive (connaissance du troisième genre). Dans ce cas, Spinoza l’appelle béatitude mais c’est encore une affection de l’essence qui détermine un désir de faire quelque chose.

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Message par Bergame Mar 15 Aoû 2017 - 13:59

Tout ca ne nous dit pas ce qu'est un individu qui n'agit pas "sous la dictée de la raison", avec "des idées claires et distinctes" y compris quant à ses affects (!) Si je te suis bien, ce n'est pas vraiment un homme. Donc, c'est quoi ? Un demi-homme ? Un sous-homme ? Un monstre, mi-homme mi-bête ? Est-ce que Spinoza dit quoi que ce soit à ce propos ?

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Message par Vanleers Mar 15 Aoû 2017 - 15:24

Charles Ramond écrit qu’« en Ethique IV, par exemple, Spinoza indique assez clairement que l’homme conduit par la raison doit garder une certaine distance par rapport à ses semblables ». (Ne pas rire mais comprendre in Kairos n° 11 1998).
Dans une note de bas de page, il précise :

Charles Ramond a écrit: Voir par exemple E IV 70 : « L’homme libre qui vit parmi les ignorants s’emploie autant qu’il peut à décliner leurs bienfaits ». La justification avancée par Spinoza, dans la démonstration, est sans doute universaliste en son principe (« […] l’homme libre s’emploie à s’attacher d’amitié tous les autres hommes […] et non pas à rendre aux hommes des bienfaits qu’ils jugent égaux d’après leurs affects […] ») ; mais le scolie qui suit contient une remarque plutôt stupéfiante pour ce qu’elle indique en creux : « je dis », écrit Spinoza, « autant qu’il peut. Car, encore que les hommes soient ignorants, ce sont pourtant des hommes, qui dans les cas de nécessité peuvent apporter un secours d’homme, qui est le plus précieux de tous » : comme s’il était nécessaire de rappeler qu’un homme, bien qu’ignorant, reste tout de même un homme : comme si, par conséquent, cela n’allait pas de soi. (p. 106)

Selon Spinoza, les hommes qui n’agissent pas sous la dictée de la raison, c’est-à-dire les ignorants, sont pourtant ( !) des hommes.

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Message par Bergame Mar 15 Aoû 2017 - 16:10

Hé oui, mais comme le note ton commentateur, manifestement, ca ne va pas de soi, et il semble nécessaire à Spinoza de le préciser. Je trouve même que la (*) scolie mérite d'être citée plus extensivement :
Spinoza a écrit:Je dis : autant qu’il peut. Car, bien que les hommes soient ignorants, il est cependant des hommes qui peuvent, dans les cas de nécessité, apporter un secours humain, auquel il n’en est aucun de préférable ; et par conséquent il arrive souvent qu’il soit nécessaire de recevoir d’eux un bienfait, et conséquemment de les féliciter en retour d’après leur disposition ; à quoi s’ajoute que, même en évitant leurs bienfaits, il nous faut prendre garde de ne pas paraître les mépriser ou craindre par avarice de leur rendre l’équivalent, et en fuyant leur haine, de ne pas les offenser par là même.
Donc l'homme libre, qui agit "sous la dictée de la raison", évitera de s'abaisser à rendre aux ignorants les bienfaits dont ils l'honorent. Mais parfois, il lui sera nécessaire de les accepter, et là, il faudra bien se mettre à leur niveau. Et il faudra même éviter, alors, de paraître les mépriser -puisque, manifestement, le risque existe...

Bon, cela étant dit, qu'avons-nous ici ? Un élitisme, tout simplement. En fait, ton homme qui agit "sous la dictée de la raison" et qui a "des idées claires et distinctes", Vanleers, c'est un non-ignorant, un sachant. Comme le dit hks, lui, il sait pourquoi il agit, quelles sont les causes, y compris affectives, qui le meuvent. Et de plus, il possède un savoir qui engendre la joie, une forme de béatitude. Bref, on pourrait proposer l'idée que c'est un sage.

Or, tu l'as parfaitement énoncé à propos d'une discussion sur le Mythe de la Caverne, le sage est un aristocrate. Il vit parmi les ignorants -bien obligé-, il s'assure autant que possible de leur amitié (c'est qu'ils ont l'offense et la haine faciles, les ignorants), mais ne s'abaisse certainement pas à se mettre à leur niveau. Il n'y a pas de réciprocité possible, d'échange, entre les sages et les ignorants. En fait, la réciprocité n'est possible qu'entre sages, c'est ce que dit la prop.71 suivante.

Pour moi, les pistes de réflexion, à partir de là, sont nombreuses, car il me semble qu'on touche ici à un élément central du concept de "raison". En voici au moins une :
Un sage est-il un homme ? Je veux dire, est-il un homme commun , générique ? Est-il un exemplaire représentatif de l'ensemble "Homme", c'est-à-dire : de l'humanité ?



(*) Scolie est féminin, pourquoi ton commentateur emploie-t-il le terme au singulier ?

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Message par Vanleers Mar 15 Aoû 2017 - 17:09

Scolie est masculin. C’est d’ailleurs à ça qu’on reconnaît ceux qui ont pratiqué Spinoza et les autres. Mais passons.
Vous devriez lire en totalité le scolie d’Ethique IV 73 qui fait le portrait de l’homme fort. Il n’est pas aussi catastrophique que vous l’imaginez.

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Message par neopilina Mar 15 Aoû 2017 - 18:45

(

Vanleers a écrit:Scolie est masculin. C’est d’ailleurs à ça qu’on reconnaît ceux qui ont pratiqué Spinoza et les autres.

Il faut préciser. Il y a un usage, marginal, du scholie ou scolie, notamment chez Spinoza, qui est masculin. Mais, dans l'immense majorité des cas, textes antiques donc, c'est bien une scholie. Je ne pratique pas Spinoza, par contre je pratique les Antiques, comme d'autres pratiquent Spinoza ...
Sinon, il y la scolie, chant à boire grec.

Wiki, je souligne : " Il existe un autre emploi du mot « scolie » ou « scholie », écrit avec ou sans h : c'est, dans un traité de mathématiques, une remarque qui suit un théorème démontré ou un problème résolu, et dont le contenu se situe en marge de la démarche démonstrative. Ce mot « scholie » est aussi employé dans l'Éthique de Spinoza, qui se présente comme une démonstration more geometrico. Dans cet usage, le mot « scholie » est du genre masculin, alors qu'en philologie on lui a donné le genre féminin.

Je ne sais pas quand apparaît cet usage au masculin, mais chez Euclide c'est encore féminin.

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Message par hks Mar 15 Aoû 2017 - 19:42

Vanleers a écrit:Scolie est masculin. C’est d’ailleurs à ça qu’on reconnaît ceux qui ont pratiqué Spinoza et les autres. Mais passons.
 La raison - Page 3 177519025  La raison - Page 3 2838363678  scratch  Rolling Eyes  Rolling Eyes  Rolling Eyes
oui passons ... bien que l'idée soit originale.

Il ne m'était jamais venu à l'esprit de distinguer les très honorables membres de la très respectée confrérie des pratiquants autocongrulatoires ...de Spinoza... par l'article du susdit Scolie.

Humm en allemand c'est quoi comme genre, Scolie...? en anglais?  bon on passe les anglais ne lisent pas Spinoza.

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Message par Bergame Mar 15 Aoû 2017 - 21:33

hks a écrit:Il ne m'était jamais venu à l'esprit de distinguer les très honorables membres de la très respectée confrérie des pratiquants autocongrulatoires ...de Spinoza... par l'article du susdit Scolie.
Non, moi non plus.   La raison - Page 3 2101236583   Il y a quand même quelque chose de très sectaire, dans tout cela.
Mais, à la réflexion, Spinoza écrit en latin, et scholium est neutre. Donc je suppose que le choix du genre dans la traduction relève du consensus.

Bon, mais cela nous éloigne de la question. Moi, je ne suis ni accusateur ni avocat de Spinoza, Vanleers. C'est toi qui ramènes toute discussion à Spinoza, mais je crois qu'en la matière, Spinoza n'est qu'un bon représentant de la philosophie occidentale. Et c'est davantage ce qui m'intéresse, moi : ce que recouvre le concept de "raison" pour la tradition occidentale de la philosophie.

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Message par neopilina Mar 15 Aoû 2017 - 22:59

(

Bergame a écrit:
hks a écrit:Il ne m'était jamais venu à l'esprit de distinguer les très honorables membres de la très respectée confrérie des pratiquants autocongrulatoires ...de Spinoza... par l'article du susdit Scolie.
Non, moi non plus.   La raison - Page 3 2101236583  

Moi non plus !
J'ai regardé, même chez les commentateurs d'Euclide postérieurs de plusieurs siècles, même après Jésus Crie, la scolie est au féminin. Un scolie, c'est pour les mathématiques, et ce beaucoup plus tard, et donc, puisque c'est " more geometrico ", pour Spinoza qui rédige ses propres scolies, à l'image des traités mathématiques, mais classiquement une scolie n'est pas de l'auteur et est au féminin.
Mais en fait, on sait tous bien que le " souci " n'était pas là, il y a l'art et la manière ...

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