La paupérisation des classes moyennes en Europe
+6
euthyphron
quid
poussbois
lesourire01
neopilina
Bergame
10 participants
Page 1 sur 5
Page 1 sur 5 • 1, 2, 3, 4, 5
La paupérisation des classes moyennes en Europe
Véronique N'Guyen enseigne à HEC. Son bref article m'a semblé une excellente synthèse de la situation :
"La paupérisation des classes moyennes, le déclassement de leurs franges inférieures, la précarisation et l’insécurité sociale, la polarisation de la société avec la montée des inégalités, sont des faits établis dans tous les pays occidentaux (cf. les Cahiers Français, Janvier 2014). Entre 1980 et 2010, les Anglais ont ainsi vu le nombre de ménages pauvres augmenter de 60%, les ménages riches progresser de 33%, alors que le nombre de ménages aux revenus moyens diminuait de 27% (The Guardian, 7 mars 2015).
En trente ans, l’Union Européenne a délibérément sabordé son modèle social, sans même avoir la satisfaction de contribuer à la diminution des inégalités sur la planète. Le coefficient de Gini, qui mesure l’inégalité dans le monde sur une échelle de 0 à 1, est resté figé à un niveau élevé de 0,7, et ceci malgré la hausse ininterrompue de la richesse produite. Entre 1988 et 2008, la moitié de la population mondiale a certes vu son revenu moyen progresser (entre +2% et +3% par an) mais une minorité de privilégiés s’est accaparée l’essentiel des bénéfices de la croissance (Banque Mondiale, novembre 2012). Autrement dit, le sacrifice des classes moyennes européennes et nord-américaines n’a pas servi à créer une gigantesque classe moyenne mondiale.
En imposant le libre-échange, en généralisant la concurrence à toutes les activités, en refusant de protéger ses industries, même contre les pratiques les plus déloyales [...] l’Europe a organisé un incroyable transfert de richesses de la moitié de sa population vers la frange des 15% les plus fortunés des pays émergents. Il était illusoire de croire que les bienfaits de la croissance allaient se répandre dans toutes les couches de ces sociétés. Les nantis de ces nouveaux pays riches n’avaient aucun intérêt à laisser monter les salaires de leurs compatriotes, s’ils souhaitaient préserver leur avantage de coûts dans la compétition mondiale.
Quant aux entreprises européennes confrontées à cette hyper-compétition, deux voies s’offraient à elles, afin de ne pas être balayées par leurs concurrents à bas prix. Soit elles cultivaient un avantage de coûts qui leur permettait de résister aux offensives sur les prix, soit elles développaient leur capacité à faire payer un premium pour leur marque, leur qualité ou leur innovation. Dans la course aux prix les plus bas, les entreprises occidentales partaient avec un handicap majeur, lié au coût de leurs employés, à la fiscalité et aux contraintes environnementales. Il leur a donc été très difficile de mettre en œuvre des stratégies de domination par les coûts, sauf à délocaliser leur production…. Restait enfin la voie de la différenciation, pour tous les produits ou services qui n’étaient pas devenus des « commodités ». Certaines entreprises, majoritairement implantées en Europe du Nord, sont ainsi parvenues à répercuter leurs surcoûts à leurs clients, à l’image de la machine-outil allemande. Au total, les secteurs pourvoyeurs d’emploi en Europe appartiennent aujourd’hui à deux catégories : les activités non délocalisables (presque tous les services mais aussi le BTP) et celles qui ont réussi à échapper à la guerre des prix grâce à leur différence.
Certains pays européens, au premier rang desquels l’Allemagne, ont clairement réussi leur stratégie de différenciation et ont maintenu la part de l’industrie dans leur PIB à plus de 30% (contrairement à la France ou au Royaume-Uni). Pour les autres, la mondialisation s’est traduite par une désindustrialisation et un appauvrissement. Les tribulations des classes moyennes européennes ne se limitent malheureusement pas à la destruction de l’emploi industriel, au sur-travail qui doit être fourni pour « garder son job », au sous-travail contraint, ou à la pression sur les salaires. Elles ont été aggravées par les politiques monétaires de baisse des taux d’intérêt qui ont fait flamber les prix immobiliers depuis le début des années 2000.
Pour lutter contre les dégâts que les politiques d’intensification de la concurrence avaient volontairement causés (désindustrialisation et baisse des profits pour toutes les entreprises qui ne jouissaient pas d’un avantage compétitif ou d’une rente de situation), la Banque Centrale Européenne a mené des politiques de soutien à l’activité, en baissant les taux d’intérêt, jusqu’à les laisser sombrer en territoire négatif. Comme si le chef Sioux, après que ses valeureux archers aient été décimés par l’artillerie américaine, offraient aux survivants du bois à profusion pour qu’ils reconstituent leur stock de flèches et repartent au combat.
Nous ne sommes pas dans Avatar. Ces mesures ont manqué, de façon prévisible, leur objectif initial qui était le financement de l’investissement productif (devenu insuffisamment rentable ou trop risqué), mais alimenté différentes bulles, dont la bulle immobilière. Conséquence : sauf chez les gagnants de la mondialisation, les classes moyennes ont non seulement de plus en plus de mal à trouver un emploi correctement rémunéré, mais elles ont de plus en plus de mal à se loger. Il n’est guère surprenant qu’elles expriment leur colère et leur volonté de stopper la dynamique à l’œuvre avec des votes iconoclastes, qui laissent les élites médusées."
"La paupérisation des classes moyennes, le déclassement de leurs franges inférieures, la précarisation et l’insécurité sociale, la polarisation de la société avec la montée des inégalités, sont des faits établis dans tous les pays occidentaux (cf. les Cahiers Français, Janvier 2014). Entre 1980 et 2010, les Anglais ont ainsi vu le nombre de ménages pauvres augmenter de 60%, les ménages riches progresser de 33%, alors que le nombre de ménages aux revenus moyens diminuait de 27% (The Guardian, 7 mars 2015).
En trente ans, l’Union Européenne a délibérément sabordé son modèle social, sans même avoir la satisfaction de contribuer à la diminution des inégalités sur la planète. Le coefficient de Gini, qui mesure l’inégalité dans le monde sur une échelle de 0 à 1, est resté figé à un niveau élevé de 0,7, et ceci malgré la hausse ininterrompue de la richesse produite. Entre 1988 et 2008, la moitié de la population mondiale a certes vu son revenu moyen progresser (entre +2% et +3% par an) mais une minorité de privilégiés s’est accaparée l’essentiel des bénéfices de la croissance (Banque Mondiale, novembre 2012). Autrement dit, le sacrifice des classes moyennes européennes et nord-américaines n’a pas servi à créer une gigantesque classe moyenne mondiale.
En imposant le libre-échange, en généralisant la concurrence à toutes les activités, en refusant de protéger ses industries, même contre les pratiques les plus déloyales [...] l’Europe a organisé un incroyable transfert de richesses de la moitié de sa population vers la frange des 15% les plus fortunés des pays émergents. Il était illusoire de croire que les bienfaits de la croissance allaient se répandre dans toutes les couches de ces sociétés. Les nantis de ces nouveaux pays riches n’avaient aucun intérêt à laisser monter les salaires de leurs compatriotes, s’ils souhaitaient préserver leur avantage de coûts dans la compétition mondiale.
Quant aux entreprises européennes confrontées à cette hyper-compétition, deux voies s’offraient à elles, afin de ne pas être balayées par leurs concurrents à bas prix. Soit elles cultivaient un avantage de coûts qui leur permettait de résister aux offensives sur les prix, soit elles développaient leur capacité à faire payer un premium pour leur marque, leur qualité ou leur innovation. Dans la course aux prix les plus bas, les entreprises occidentales partaient avec un handicap majeur, lié au coût de leurs employés, à la fiscalité et aux contraintes environnementales. Il leur a donc été très difficile de mettre en œuvre des stratégies de domination par les coûts, sauf à délocaliser leur production…. Restait enfin la voie de la différenciation, pour tous les produits ou services qui n’étaient pas devenus des « commodités ». Certaines entreprises, majoritairement implantées en Europe du Nord, sont ainsi parvenues à répercuter leurs surcoûts à leurs clients, à l’image de la machine-outil allemande. Au total, les secteurs pourvoyeurs d’emploi en Europe appartiennent aujourd’hui à deux catégories : les activités non délocalisables (presque tous les services mais aussi le BTP) et celles qui ont réussi à échapper à la guerre des prix grâce à leur différence.
Certains pays européens, au premier rang desquels l’Allemagne, ont clairement réussi leur stratégie de différenciation et ont maintenu la part de l’industrie dans leur PIB à plus de 30% (contrairement à la France ou au Royaume-Uni). Pour les autres, la mondialisation s’est traduite par une désindustrialisation et un appauvrissement. Les tribulations des classes moyennes européennes ne se limitent malheureusement pas à la destruction de l’emploi industriel, au sur-travail qui doit être fourni pour « garder son job », au sous-travail contraint, ou à la pression sur les salaires. Elles ont été aggravées par les politiques monétaires de baisse des taux d’intérêt qui ont fait flamber les prix immobiliers depuis le début des années 2000.
Pour lutter contre les dégâts que les politiques d’intensification de la concurrence avaient volontairement causés (désindustrialisation et baisse des profits pour toutes les entreprises qui ne jouissaient pas d’un avantage compétitif ou d’une rente de situation), la Banque Centrale Européenne a mené des politiques de soutien à l’activité, en baissant les taux d’intérêt, jusqu’à les laisser sombrer en territoire négatif. Comme si le chef Sioux, après que ses valeureux archers aient été décimés par l’artillerie américaine, offraient aux survivants du bois à profusion pour qu’ils reconstituent leur stock de flèches et repartent au combat.
Nous ne sommes pas dans Avatar. Ces mesures ont manqué, de façon prévisible, leur objectif initial qui était le financement de l’investissement productif (devenu insuffisamment rentable ou trop risqué), mais alimenté différentes bulles, dont la bulle immobilière. Conséquence : sauf chez les gagnants de la mondialisation, les classes moyennes ont non seulement de plus en plus de mal à trouver un emploi correctement rémunéré, mais elles ont de plus en plus de mal à se loger. Il n’est guère surprenant qu’elles expriment leur colère et leur volonté de stopper la dynamique à l’œuvre avec des votes iconoclastes, qui laissent les élites médusées."
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
C'est tout à fait ça.
Petite remarque. Je trouve l'article assez iconoclaste dans la mesure où il émane d'un enseignant d'H.E.C. qui me semble une " splendide " usine à requins libéraux. On ne s'attend pas à un tel constat ici !
Petite remarque. Je trouve l'article assez iconoclaste dans la mesure où il émane d'un enseignant d'H.E.C. qui me semble une " splendide " usine à requins libéraux. On ne s'attend pas à un tel constat ici !
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
je vois pas le problème perso'. les inégalités sont naturelles (c'est la vie)....
lesourire01- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 155
Date d'inscription : 03/10/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Il me semble que cet article est un peu plus précis : il montre que par " Nature ", ce qu'ils sont, certains creusent ces inégalité à leur profit et au dépens de l'autre.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
alors moi je suis d' extrême gauche donc égalitariste pur sucre MAIS y' a la réalité malheureusement.
elle nous dit quoi? bah que les gens sont pas égaux entre eux sur tous les plans.
mon point c' est de dire que les gens riches sont au dessus du lot et se donnent les moyens de l' être (Jobs, Gates et compagnie). en plus ils créent des richesses via leur pognon.
pour les autres? bah c' est pas en se plaignant avec une mentalité d' assisté qu' on s' enrichit ( le pognon tombe pas du ciel )....
elle nous dit quoi? bah que les gens sont pas égaux entre eux sur tous les plans.
mon point c' est de dire que les gens riches sont au dessus du lot et se donnent les moyens de l' être (Jobs, Gates et compagnie). en plus ils créent des richesses via leur pognon.
pour les autres? bah c' est pas en se plaignant avec une mentalité d' assisté qu' on s' enrichit ( le pognon tombe pas du ciel )....
lesourire01- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 155
Date d'inscription : 03/10/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Tu as parfaitement le droit d'avoir les opinions que tu veux, et tu n'es aucunement obligé de les annoncer, mais hum, ca ressemble pas vraiment à de l'extrême-gauche pur sucre, ce que tu dis là.
Et puis, il y a la pression des évènements, bien sûr. Les élites sont bien contraintes de constater que quelque chose s'est enrayé.
Oui, c'est l'une des raisons pour lesquelles je le poste : Pour montrer que ce type d'analyse, aujourd'hui, n'est plus l'apanage de quelques marxistes égarés et disqualifiés d'avance pour l'analyse économique, mais a acquis des lettres de noblesse. Pour te dire, c'est à l'origine une tribune que N'Guyen a fait publier dans Le Figaro ! La crise des subprimes a eu au moins cet effet bénéfique qu'elle a ré-ouvert le champ économique, et que l'"hétérodoxie" commence à se faire entendre.neo a écrit:Petite remarque. Je trouve l'article assez iconoclaste dans la mesure où il émane d'un enseignant d'H.E.C. qui me semble une " splendide " usine à requins libéraux. On ne s'attend pas à un tel constat ici !
Et puis, il y a la pression des évènements, bien sûr. Les élites sont bien contraintes de constater que quelque chose s'est enrayé.
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
c'était pas pour raconter ma vie mais pour dire qu' il y a une différence profonde entre la foi, l'idéologie , l'utopie ( l'égalitarisme) et la réalité ( l'inégalité entre les êtres humains ).
lesourire01- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 155
Date d'inscription : 03/10/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
C'est une tendance lourde qui était connue depuis de nombreuses années mais qui depuis 2013/14 a été étudiée très précisément pour avoir des données et des chiffres fiables.
Je me souviens en particulier du livre de Picquetty en 2013 : "le capital au XXIe"
Une somme, avec des enquêtes historiques notamment sur les archives des impôts et qui démontre à quel point le capital a tendance à se concentrer s'il n'est pas régulé. Rien de nouveau sous le soleil, donc, mais il est vrai que de voir des intervenants HEC se saisir de ces chiffres et en tirer les bonnes conclusions est assez atypique. Chez les économistes atterrés, on trouve 95% d'universitaires, et pas d'HEC, c'est clair.
Merci pour le partage en tout cas.
Je me souviens en particulier du livre de Picquetty en 2013 : "le capital au XXIe"
Une somme, avec des enquêtes historiques notamment sur les archives des impôts et qui démontre à quel point le capital a tendance à se concentrer s'il n'est pas régulé. Rien de nouveau sous le soleil, donc, mais il est vrai que de voir des intervenants HEC se saisir de ces chiffres et en tirer les bonnes conclusions est assez atypique. Chez les économistes atterrés, on trouve 95% d'universitaires, et pas d'HEC, c'est clair.
Merci pour le partage en tout cas.
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
donc les bons économistes et scientifiques sont ceux qui justifient l 'intervention de l'Etat en somme?
lesourire01- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 155
Date d'inscription : 03/10/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Sont ceux qui partent des observations, des statistiques et des tendances pour en faire la présentation factuelle.
La paupérisation est un fait qui se constate depuis une trentaine d'année en Europe. L'explication en était au début la mondialisation pour permettre la création d'une immense classe moyenne mondiale, et que tout cela allait s'équilibrer progressivement. Or, les économistes cités montrent que les mécanismes lancés par l'Europe et les USA aboutissent à une paupérisation de leur population, une diminution de la classe moyenne et une concentration du capital dans les classes les plus riches, de plus en plus riches et de moins en moins nombreuses sans que cela aboutisse à une augmentation du coefficient de Gini (voir plus haut).
Ce qui est intéressant, c'est de comprendre les mécanismes pour ensuite décider si on veut un interventionnisme de l'Etat et surtout sur quels leviers. Nguyen et Piketty ne nous disent pas ce qu'il faut faire, mais quels sont les mécanismes économiques à l'oeuvre. Libre à chacun ensuite d'en tenir compte ou pas.
La paupérisation est un fait qui se constate depuis une trentaine d'année en Europe. L'explication en était au début la mondialisation pour permettre la création d'une immense classe moyenne mondiale, et que tout cela allait s'équilibrer progressivement. Or, les économistes cités montrent que les mécanismes lancés par l'Europe et les USA aboutissent à une paupérisation de leur population, une diminution de la classe moyenne et une concentration du capital dans les classes les plus riches, de plus en plus riches et de moins en moins nombreuses sans que cela aboutisse à une augmentation du coefficient de Gini (voir plus haut).
Ce qui est intéressant, c'est de comprendre les mécanismes pour ensuite décider si on veut un interventionnisme de l'Etat et surtout sur quels leviers. Nguyen et Piketty ne nous disent pas ce qu'il faut faire, mais quels sont les mécanismes économiques à l'oeuvre. Libre à chacun ensuite d'en tenir compte ou pas.
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Le problème n'est pas la présence d'inégalités de fait, mais plutôt l'exploitation des hommes par d'autres hommes. Cette exploitation étant des plus pernicieuses lorsqu'elle se cache derrière un système, le capitalisme sauvage en l'occurrence, celui exploitant la mondialisation.lesourire01 a écrit:alors moi je suis d' extrême gauche donc égalitariste pur sucre MAIS y' a la réalité malheureusement.
elle nous dit quoi? bah que les gens sont pas égaux entre eux sur tous les plans.
mon point c' est de dire que les gens riches sont au dessus du lot et se donnent les moyens de l' être (Jobs, Gates et compagnie). en plus ils créent des richesses via leur pognon.
pour les autres? bah c' est pas en se plaignant avec une mentalité d' assisté qu' on s' enrichit ( le pognon tombe pas du ciel )....
quid- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1080
Date d'inscription : 04/08/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Et en admettant qu' il y ait exploitation, je vois toujours pas où est le problème honnêtement.... Si le monde se divise entre exploiteurs et exploités eh bien ça fait partie de la nature humaine.
lesourire01- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 155
Date d'inscription : 03/10/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Intéressant, mais ambigu : veux-tu dire "il n'est pas sûr du tout qu'il y ait exploitation, mais accordons provisoirement cette hypothèse", ou bien "bien sûr qu'il y a exploitation, mais qu'importe"?lesourire01 a écrit:Et en admettant qu' il y ait exploitation
Cet aveu d'aveuglement t'honore, d'autant plus que c'est bien de cela qu'il s'agit manifestement, d'une forme d'infirmité qui empêche de voir.lesourire01 a écrit: je vois toujours pas où est le problème
L'adverbe de trop! "Honnêtement" veut dire ici, sans doute, le contraire de ce qu'il dit, et indiquer ce que l'aveuglement susmentionné a de volontaire, à moins qu'il soit vraiment aussi candide qu'il le suggère? Dans ce cas l'aveuglement ne devrait pas durer, l'honnêteté intellectuelle y remédiera.lesourire01 a écrit: honnêtement....
Ce n'est pas le monde qui se divise en exploiteurs et en exploités, c'est x ou y qui choisit de le diviser ainsi plutôt qu'en, par exemple, gros et maigres, ou encore pourvus ou dépourvus du sens de l'humour, il y a d'infinies divisions possibles!lesourire01 a écrit: Si le monde se divise entre exploiteurs et exploités
Eh bien non justement. D'abord parce que cette division est une interprétation culturelle (cf. citation précédente) ensuite parce que la nature n'engage à rien, et qu'il est tout aussi naturel de se regrouper pour être plus forts, ou bien de s'entretuer sans prendre le temps d'organiser sa suprématie par un système d'exploitation, sans parler évidemment de ce qui risque de choquer un aveugle volontaire, la possibilité de la fraternité.lesourire01 a écrit:eh bien ça fait partie de la nature humaine.
Il n'est donc pas écrit que nous devions nous résoudre à l'exploitation.
Pour en revenir au sujet, il semble qu'il y ait un choix à faire, du point de vue des profiteurs du système : ou bien s'en mettre plein les poches le plus vite possible et donc augmenter les inégalités quitte à fragiliser le système, ou bien préserver le système en accordant des satisfactions aux classes moyennes et inférieures afin d'acheter la paix sociale. Quelqu'un ici sait-il si un penseur quelconque a théorisé cette alternative?
_________________
amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1505
Date d'inscription : 01/06/2011
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Il y a un problème si on se réfère au sens suivant du mot
On voit bien qu'il y a problème si on se réfère à une définition plus neutre
wiki a écrit:Exploitation sociale, ou sexuelle, lorsqu'un individu ou un groupe d'individus est abusé par d'autres (voir par exemple exploitation de l'enfant)
On voit bien qu'il y a problème si on se réfère à une définition plus neutre
Pour l'écologie il y a problème si on ajoute abusivement dans la définition.wiki a écrit:Exploitation des ressources naturelles, recouvre l'ensemble des métiers d'extraction des matières premières telles que le pétrole, le gaz naturel, et d'autres ressources naturelles, du sous-sol et des océans
il s' agit sans doute d' une interprétation (vol) de la part des salariés et d'une autre de la part du patron( juste rémunération du capitaliste ou autres arguments valorisant le système).wiki a écrit:Selon la théorie marxiste, l'exploitation est l'extorsion de la plus-value générée par le travail du salarié par le capitaliste.
Disons que celle là (comme celle entre gros et maigre) est possible.euthyphon a écrit: il y a d'infinies divisions possibles!
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12505
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
hks a écrit:Pour l'écologie il y a problème si on ajoute abusivement dans la définition.
On peut préciser : aux dépens de l'homme, des autres espèces vivantes, en un mot, de la biosphère.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
euthyphron a écrit:Ce n'est pas le monde qui se divise en exploiteurs et en exploités, c'est x ou y qui choisit de le diviser ainsi plutôt qu'en, par exemple, gros et maigres, ou encore pourvus ou dépourvus du sens de l'humour, il y a d'infinies divisions possibles!lesourire01 a écrit: Si le monde se divise entre exploiteurs et exploités
Oui, mais on voit bien que les " groupes d'intérêts ", pour être le plus général possible, des " x " qui optent pour leur " enrichissement aux dépens de " l'emportent très largement. Désolé : l'inaction des gens de bien suffit au triomphe du mal.
euthyphron a écrit:Eh bien non justement.lesourire01 a écrit:eh bien ça fait partie de la nature humaine.
Malheureusement, oui, mais j'ajoute aussi vite, très exactement autant que l'aptitude au bien. C'est dans la " Nature " humaine, c'est à dire ce qu'est l'homme, dans la " Nature " animale aussi, d'abord même : mais toujours ainsi, c'est axiomatique, il y a bien, mal, etc., très exactement dans la mesure où il y a Sujet.
Je rappelle qu'un comportement résulte de la réaction d'un organisme, d'un individu, voire d'un Sujet, en fonction de ce qu'il est, à des stimuli, à un contexte, des circonstances, des situations, etc., extérieurs.
Si je devais nommer Notre problème constitutif, je dirais bien évidemment " hybris " ( " Chantes la colère, déesse, ... " ), et à titre personnel, je ne vois qu'une solution : la connaissance.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
lesourire01 a écrit:Et en admettant qu' il y ait exploitation, je vois toujours pas où est le problème honnêtement.... Si le monde se divise entre exploiteurs et exploités eh bien ça fait partie de la nature humaine.
Que dans le monde, de fait et par constatation, il y ait des exploiteurs, des exploités, et peut-être certains avec les deux qualités simultanément, tout comme il y a des gros et des minces, certainement ; même si la question de savoir à partir de quand on est exploiteur et de quand on est exploité reste ouverte. Mais dire que ce sont des inégalités, de surcroît naturelles, ne nous renseigne pas beaucoup. Car les inégalités, c'est ce qui est le « commun » pour toutes choses de la réalité de manière générale. Cela n'est pas spécifique à la nature humaine.
Et donc le « naturel », ne nous en dit pas beaucoup non plus s'il se rapporte à la constatation de ce qui est.
Mais dire que c'est la nature humaine n'est alors pas juste, puisqu'il il n'y a pas de nature humaine de l'exploité, car ce n'est pas une vocation, une envie, quelque chose d'agréable, en somme une volonté, d'être exploité. Alors peut-être que l'on peut dire qu'il y a une tendance naturelle de l'humain à exploiter son voisin, en privilégiant ses intérêts, mais l'inverse n'est pas vrai. Il n'y a pas de naturel de l'exploité dans la nature humaine.
Ensuite, si l'on s'en tient au naturel hors nature humaine, comme dit précédemment, on est dans un truisme dans la constatation de ce qui est. Et faire du naturalisme sur cette base, c'est un peu dire que puisqu'il n'y avait pas d'homme sur la lune, ni se déplaçant dans les airs durant l'antiquité, on en serait venu à conclure que cela fait parti de la nature humaine pour toute éternité. C'est un peu ce genre de naturalisme qu'a voulu faire Aristote en analysant les équilibres de sa société, qui était basée en partie sur l'esclavage.
Or l'on voit que les hommes ont su aller sur la lune et se déplacer dans les airs. Cela montre bien que l'on a pas à faire à des inégalités ou des distinctions de fait qui ne dépendraient pas des hommes, mais qui dépendent de leurs agissements volontaires. On n'est donc plus tout à fait dans le même naturel. C'est un naturel qui dépend de ce que veulent les hommes. Ainsi, si des hommes veulent exploiter d'autres hommes, c'est sans doute naturel qu'il y ait ce genre d'homme avec de telles volontés, mais à l'inverse, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup d'hommes exploités qui aient cette volonté d'être exploité par d'autres, même si au final, c'est ce qu'ils subissent.
Du coup, faire de la division un naturel qui serait de plus le naturel des choses ainsi divisées, ne me semble pas pertinent en ce qui concerne l'homme, mais certainement aussi une partie du vivant. Il va falloir aller creuser un peu plus loin, sauf à nier que l'on a pas spécialement envie d'être exploité, et que si cela nous arrivait, on trouverait cela tout ce qu'il y a de plus naturel, et de plus en parfaite concordance avec notre nature.
Par contre il pourrait être tout à fait naturel ou plutôt conséquentiel, qu'entraînés dans un système, on n'en vienne activement, sans spécialement s'en rendre compte, à contribuer à l'exploitation d'autres hommes. Cela ne faisant pas de nous directement et de manière avisée, des exploiteurs.
Le capitalisme ne relève d'ailleurs pas particulièrement d'un mérite, ou alors hors de toute considération de mérite, chose qui si elle est ignorée, aurait tendance à nous faire croire qu'il n'a que du vertueux, alors que dans ce système, la réussite des uns tient parfois à l'exploitation des autres.
lesourire01 a écrit:mon point c' est de dire que les gens riches sont au dessus du lot et se donnent les moyens de l' être (Jobs, Gates et compagnie). en plus ils créent des richesses via leur pognon.
pour les autres? bah c' est pas en se plaignant avec une mentalité d' assisté qu' on s' enrichit ( le pognon tombe pas du ciel )....
Et donc, là on sent pointer une justification par le mérite hors mérite, alors que pourtant, comme dit précédemment, la distinction naturelle n'est somme toute, pas au sein de la nature des personnes, en tout cas pas entièrement.
D'ailleurs, je ne pense pas que cela soit si simple, car qu'est-ce qui limiterait le nombre de riches, pourquoi ceux-ci seraient peu nombreux ? Le fait que les autres aient une mentalité d'assisté ?
Et puisque je ne pense pas que l'enfant du Sahel soit particulièrement assisté et qu'il reste toutefois plus souvent qu'à son tour déshérité, je me dis que le pauvre occidental, n'est pas non plus pauvre parce-qu'il le mériterait intrinsèquement.
quid- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1080
Date d'inscription : 04/08/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
quid a écrit:lesourire01 a écrit:Et en admettant qu' il y ait exploitation, je vois toujours pas où est le problème honnêtement.... Si le monde se divise entre exploiteurs et exploités eh bien ça fait partie de la nature humaine.
Que dans le monde, de fait et par constatation, il y ait des exploiteurs, des exploités, et peut-être certains avec les deux qualités simultanément, tout comme il y a des gros et des minces, certainement ; même si la question de savoir à partir de quand on est exploiteur et de quand on est exploité reste ouverte. Mais dire que ce sont des inégalités, de surcroît naturelles, ne nous renseigne pas beaucoup. Car les inégalités, c'est ce qui est le « commun » pour toutes choses de la réalité de manière générale. Cela n'est pas spécifique à la nature humaine.
Et donc le « naturel », ne nous en dit pas beaucoup non plus s'il se rapporte à la constatation de ce qui est.
L'alibi naturel est extraordinaire, il permet de justifier tout et son contraire en même temps, mais Pascal l'avait dit beaucoup mieux que moi.
« Les pères, craignent que l’amour naturel des enfants pour eux ne s’efface. Quelle est donc cette nature sujette à s’effacer? Qu’est-ce que nature? Je crains que cette nature ne soit elle-même qu’une première coutume comme la coutume est une seconde nature.»
A partir du constat de l'existence d'inégalités de fait, nous prétendons justifier l'existence d'inégalités de droits, comme si la condition humaine n'avait absolument rien à voir avec notre volonté.
baptiste- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 3116
Date d'inscription : 21/03/2012
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Bien sûr, c'est un grand classique, c'est même tellement ancré culturellement, si je puis dire, que c'est à peine une hypothèse formalisée. Cela relève plutôt de l'évidence, en tout cas depuis le célèbre article de Simon Kuznets, publié en 1955 : Economic Growth and Income Inequality. Kuznets a prétendu y montrer, dans une analyse très empirique de l'histoire de l'"occident" depuis la révolution industrielle, que la croissance économique s'accompagnait nécessairement d'un accroissement des inégalités économiques. C'est d'ailleurs précisément à cette "démonstration" que Piketty s'est attaquée récemment dans l'ouvrage déjà cité.euthyphron a écrit:Pour en revenir au sujet, il semble qu'il y ait un choix à faire, du point de vue des profiteurs du système : ou bien s'en mettre plein les poches le plus vite possible et donc augmenter les inégalités quitte à fragiliser le système, ou bien préserver le système en accordant des satisfactions aux classes moyennes et inférieures afin d'acheter la paix sociale. Quelqu'un ici sait-il si un penseur quelconque a théorisé cette alternative?
Pour avoir une bonne idée de ce que recouvre cette alternative ("trade off" dans le jargon anglophone), l'ouvrage de référence est celui d'Arthur Okun : http://www.brookings.edu/research/books/1975/equalityandefficiency
Mais je répète : Pour le libéralisme économique, cela relève de l'évidence, c'est l'un des piliers du dogme. On pourrait dire que c'est la face "positive" de la thèse complémentaire qui affirme que toute intervention de l'Etat dans l'économie est néfaste pour la croissance (puisque l'intervention de l'Etat est toujours supposée avoir pour finalité, plus ou moins avouée, de limiter voire d'abolir les inégalités socio-économiques).
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Merci!
Je n'ai pas bien compris ce qui relevait de l'évidence pour les libéraux. Est-ce l'idée que le choix des puissants sera toujours d'augmenter les inégalités plutôt que de s'assurer un confortable leadership en contribuant au mieux-être de la population? Les libéraux reconnaîtraient-ils alors que le libéralisme conduit à sa propre crise, par accroissement continu des inégalités, ou bien pensent-ils que l'accroissement continu des inégalités peut produire un équilibre?
Il me semble pourtant évident que si l'on peut parier que les puissants, inévitablement, vont travailler à augmenter les inégalités, alors ce sont les marxistes qui ont raison, et la lutte des classes s'impose. Le peuple a alors tout intérêt à nuire le plus possible aux patrons, au besoin par la violence, forcément légitime puisque seule manière de se défendre.
Cela m'étonne que les libéraux défendent l'idée dont la conséquence logique est qu'il faut faire crever les patrons la gueule ouverte...
Je n'ai pas bien compris ce qui relevait de l'évidence pour les libéraux. Est-ce l'idée que le choix des puissants sera toujours d'augmenter les inégalités plutôt que de s'assurer un confortable leadership en contribuant au mieux-être de la population? Les libéraux reconnaîtraient-ils alors que le libéralisme conduit à sa propre crise, par accroissement continu des inégalités, ou bien pensent-ils que l'accroissement continu des inégalités peut produire un équilibre?
Il me semble pourtant évident que si l'on peut parier que les puissants, inévitablement, vont travailler à augmenter les inégalités, alors ce sont les marxistes qui ont raison, et la lutte des classes s'impose. Le peuple a alors tout intérêt à nuire le plus possible aux patrons, au besoin par la violence, forcément légitime puisque seule manière de se défendre.
Cela m'étonne que les libéraux défendent l'idée dont la conséquence logique est qu'il faut faire crever les patrons la gueule ouverte...
_________________
amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1505
Date d'inscription : 01/06/2011
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Je vais essayer de te répondre.
D'abord je pense qu'il faut comprendre que le marxisme et le libéralisme ne sont pas aussi opposés qu'on peut le penser. Pour être plus précis, disons qu'ils partagent souvent des fondamentaux et des "démonstrations", mais qu'ils diffèrent sur les conclusions. Je dis souvent qu'ils sont les deux faces d'une même médaille. Il n'y a aucun hasard là-dedans, ils piochent aux mêmes sources : L'économie classique (Smith, Ricardo, Say, etc.), un historisme progressiste, etc.
En l'occurrence, et par exemple, que le capitalisme génère ses propres crises, ca, c'est une idée partagée. C'est un point que le libéralisme économique a parfaitement intégré. Depuis Schumpeter -ca ne date donc pas d'hier- il en a même fait un élément positif : Les crises sont des épisodes de destruction créatrice , qui interviennent entre les cycles économiques, et qui, en quelque sorte, "nettoient" l'économie : Les entreprises dominantes qui n'ont pas su prendre le train de l'innovation disparaissent, et sont remplacées par de nouvelles venues, plus innovantes, plus dynamiques, etc. C'est en quelque sorte la version économique du "cimetière des élites" de Pareto.
Comme on le voit, cet argument est aussi indissociable du concept d'"innovation" qui est un autre pilier du dogme : Certes, le capitalisme génère ses propres crises, mais ces crises s'expliquent par l'irruption d'innovations technologiques qui : 1. ne sont rien d'autre que les manifestations du progrès de la science, et 2. satisfont des attentes, des besoins des individus, demandeurs de technologies qui impactent positivement leur vie quotidienne : Le frigidaire, le lave-vaisselle, le four a micro-ondes, l'informatique, internet, etc.
J'ajoute que jusqu'à présent, le discours était que la destruction d'entreprises -et donc d'emplois- dans les secteurs "vieillissants" était compensée par la création d'emplois dans les secteurs "innovants". C'est la raison pour laquelle, dans une précédente discussion, j'avais mis en exergue le fait, déterminant pour les fondements de notre culture libérale, que ce discours était en train de changer : Pour la première fois, en 2016, une institution économique de premier plan a annoncé que les futures destructions d'emploi conséquentes de la prochaine révolution technologique ne seraient pas pleinement compensées. Cela signifie ni plus ni moins que nous sommes en train de "changer de paradigme", comme on dit.
Ensuite, tu opposes "inégalités économiques" et "bien-être des individus" :
1. Parce que les inégalités sont corollaires de la croissance économique. Et que -comme j'avais essayé de l'expliquer dans une précédente discussion- le postulat est que les individus veulent de la croissance. Et pourquoi veulent-ils de la croissance économique, les individus ? Parce que, toutes choses étant égales par ailleurs, avec la croissance vont les emplois, les augmentations de salaire, etc. bref le "mieux-être" (dit le libéralisme économique, n'est-ce pas, c'est pas moi qui le dit, c'est le libéralisme économique, d'accord ?)
2. A cela, tu répondras sans doute : "Oui, mais si les inégalités s'accroissent, cela signifie que tout le monde ne bénéficie pas de la croissance : Il y a les riches qui s'enrichissent, et les pauvres qui ne s'enrichissent pas." Et là, le libéralisme économique répond : "Mais si, vil marxiste qui en est encore à opposer des classes sociales, tout le monde profite de la croissance. Bien sûr, ceux qui ont déjà une plus grosse part en profitent davantage que ceux qui avaient une petite part. Mais marginalement, et toutes choses etc., la part de chacun s'accroît.
C'est la fameuse métaphore du gâteau, tu connais ? Les libéraux disaient : Les marxistes envisagent l'économie comme un gâteau : "Si j'ai une plus grosse part qu'un autre, c'est forcément au détriment de celui-ci. Je lui prends une partie du gâteau auquel il aurait droit." Donc non seulement les libéraux demandaient alors de quel "droit" on parlait dans ce cas. Mais en plus, ajoutaient-ils, s'il y a de la croissance, le gâteau ne reste pas identique à lui-même : Il grossit. Et donc s'il grossit, hé bien, toutes choses etc. même la toute petite part du plus pauvre s'accroît. Tout le monde est donc content, et tout le monde a intérêt à la croissance économique -même les plus pauvres. (j'en parle au passé, parce que c'était une démonstration qu'on faisait encore dans les années 70-80, ca, aujourd'hui c'est pareil, c'est de l'ordre de l'évidence.
3. Parce que, comme vu plus haut, avec la croissance va l'innovation. Et que l'innovation technologique améliore le bien-être des individus. Alors tu diras peut-être : "Oui, mais si la croissance s'accompagne aussi d'inégalités, cela signifie que tout le monde n'a pas accès à l'innovation ?!" Les libéraux te répondraient donc : Regarde comment le mobile s'est développé en Afrique sub-saharienne ! C'est parce qu'un autre effet de l'innovation (et de la mondialisation du reste) est de réduire les coûts. L'informatisation, en particulier, a considérablement amélioré la productivité, et la mondialisation autorise la constitution de marchés de masse, qui renforcent les économies d'échelle, et qui engendrent de la compétition, etc. et tout cela, au final, fait baisser les prix et rend l'innovation accessible au plus grand nombre.
Oui, les riches sont toujours plus riches et les inégalités s'accroissent.
Mais d'abord, à l'échelle du monde, des régions entières sortent de la pauvreté. Evidemment, certains réfléchissent à l'échelle de l'Europe voire de la France, mais c'est mesquin et profondément égoïste, cela témoigne d'un "repli sur soi" etc.
Et puis même en Europe, ca ne va pas si mal que cela, il y a quand même de la croissance, regardez : 1%. Si on menait les réformes qu'il faut, et qu'on abolissait en particulier toutes ces contraintes règlementaires qui immobilisent le marché du travail, nous pourrions parfaitement faire baisser le chômage et tout le monde profiterait des fruits de cette croissance.
Et enfin, nous produisons toujours plus d'innovations technologiques qui impactent positivement notre mobilité, notre autonomie, notre capacité de choisir, bref : notre liberté.
Voila en tout cas ce que dit le libéralisme économique -en tant qu'idéaltype, tu l'as compris.
D'abord je pense qu'il faut comprendre que le marxisme et le libéralisme ne sont pas aussi opposés qu'on peut le penser. Pour être plus précis, disons qu'ils partagent souvent des fondamentaux et des "démonstrations", mais qu'ils diffèrent sur les conclusions. Je dis souvent qu'ils sont les deux faces d'une même médaille. Il n'y a aucun hasard là-dedans, ils piochent aux mêmes sources : L'économie classique (Smith, Ricardo, Say, etc.), un historisme progressiste, etc.
En l'occurrence, et par exemple, que le capitalisme génère ses propres crises, ca, c'est une idée partagée. C'est un point que le libéralisme économique a parfaitement intégré. Depuis Schumpeter -ca ne date donc pas d'hier- il en a même fait un élément positif : Les crises sont des épisodes de destruction créatrice , qui interviennent entre les cycles économiques, et qui, en quelque sorte, "nettoient" l'économie : Les entreprises dominantes qui n'ont pas su prendre le train de l'innovation disparaissent, et sont remplacées par de nouvelles venues, plus innovantes, plus dynamiques, etc. C'est en quelque sorte la version économique du "cimetière des élites" de Pareto.
Comme on le voit, cet argument est aussi indissociable du concept d'"innovation" qui est un autre pilier du dogme : Certes, le capitalisme génère ses propres crises, mais ces crises s'expliquent par l'irruption d'innovations technologiques qui : 1. ne sont rien d'autre que les manifestations du progrès de la science, et 2. satisfont des attentes, des besoins des individus, demandeurs de technologies qui impactent positivement leur vie quotidienne : Le frigidaire, le lave-vaisselle, le four a micro-ondes, l'informatique, internet, etc.
J'ajoute que jusqu'à présent, le discours était que la destruction d'entreprises -et donc d'emplois- dans les secteurs "vieillissants" était compensée par la création d'emplois dans les secteurs "innovants". C'est la raison pour laquelle, dans une précédente discussion, j'avais mis en exergue le fait, déterminant pour les fondements de notre culture libérale, que ce discours était en train de changer : Pour la première fois, en 2016, une institution économique de premier plan a annoncé que les futures destructions d'emploi conséquentes de la prochaine révolution technologique ne seraient pas pleinement compensées. Cela signifie ni plus ni moins que nous sommes en train de "changer de paradigme", comme on dit.
Ensuite, tu opposes "inégalités économiques" et "bien-être des individus" :
Or, ce qui précède doit commencer à t'indiquer que, pour le libéralisme économique, il n'y a pas d'opposition entre "inégalités" et "bien-être". Pourquoi ?l'idée que le choix des puissants sera toujours d'augmenter les inégalités plutôt que de s'assurer un confortable leadership en contribuant au mieux-être de la population?
1. Parce que les inégalités sont corollaires de la croissance économique. Et que -comme j'avais essayé de l'expliquer dans une précédente discussion- le postulat est que les individus veulent de la croissance. Et pourquoi veulent-ils de la croissance économique, les individus ? Parce que, toutes choses étant égales par ailleurs, avec la croissance vont les emplois, les augmentations de salaire, etc. bref le "mieux-être" (dit le libéralisme économique, n'est-ce pas, c'est pas moi qui le dit, c'est le libéralisme économique, d'accord ?)
2. A cela, tu répondras sans doute : "Oui, mais si les inégalités s'accroissent, cela signifie que tout le monde ne bénéficie pas de la croissance : Il y a les riches qui s'enrichissent, et les pauvres qui ne s'enrichissent pas." Et là, le libéralisme économique répond : "Mais si, vil marxiste qui en est encore à opposer des classes sociales, tout le monde profite de la croissance. Bien sûr, ceux qui ont déjà une plus grosse part en profitent davantage que ceux qui avaient une petite part. Mais marginalement, et toutes choses etc., la part de chacun s'accroît.
C'est la fameuse métaphore du gâteau, tu connais ? Les libéraux disaient : Les marxistes envisagent l'économie comme un gâteau : "Si j'ai une plus grosse part qu'un autre, c'est forcément au détriment de celui-ci. Je lui prends une partie du gâteau auquel il aurait droit." Donc non seulement les libéraux demandaient alors de quel "droit" on parlait dans ce cas. Mais en plus, ajoutaient-ils, s'il y a de la croissance, le gâteau ne reste pas identique à lui-même : Il grossit. Et donc s'il grossit, hé bien, toutes choses etc. même la toute petite part du plus pauvre s'accroît. Tout le monde est donc content, et tout le monde a intérêt à la croissance économique -même les plus pauvres. (j'en parle au passé, parce que c'était une démonstration qu'on faisait encore dans les années 70-80, ca, aujourd'hui c'est pareil, c'est de l'ordre de l'évidence.
3. Parce que, comme vu plus haut, avec la croissance va l'innovation. Et que l'innovation technologique améliore le bien-être des individus. Alors tu diras peut-être : "Oui, mais si la croissance s'accompagne aussi d'inégalités, cela signifie que tout le monde n'a pas accès à l'innovation ?!" Les libéraux te répondraient donc : Regarde comment le mobile s'est développé en Afrique sub-saharienne ! C'est parce qu'un autre effet de l'innovation (et de la mondialisation du reste) est de réduire les coûts. L'informatisation, en particulier, a considérablement amélioré la productivité, et la mondialisation autorise la constitution de marchés de masse, qui renforcent les économies d'échelle, et qui engendrent de la compétition, etc. et tout cela, au final, fait baisser les prix et rend l'innovation accessible au plus grand nombre.
Oui, les riches sont toujours plus riches et les inégalités s'accroissent.
Mais d'abord, à l'échelle du monde, des régions entières sortent de la pauvreté. Evidemment, certains réfléchissent à l'échelle de l'Europe voire de la France, mais c'est mesquin et profondément égoïste, cela témoigne d'un "repli sur soi" etc.
Et puis même en Europe, ca ne va pas si mal que cela, il y a quand même de la croissance, regardez : 1%. Si on menait les réformes qu'il faut, et qu'on abolissait en particulier toutes ces contraintes règlementaires qui immobilisent le marché du travail, nous pourrions parfaitement faire baisser le chômage et tout le monde profiterait des fruits de cette croissance.
Et enfin, nous produisons toujours plus d'innovations technologiques qui impactent positivement notre mobilité, notre autonomie, notre capacité de choisir, bref : notre liberté.
Voila en tout cas ce que dit le libéralisme économique -en tant qu'idéaltype, tu l'as compris.
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Si j'ai bien suivi, tout dépendrait de la réponse que l'on postule à la question suivante : l'accroissement des inégalités bénéficie-t-elle à ceux qui deviennent de plus en plus défavorisés?
Si l'on répond non, la conséquence logique est donc bien qu'il faut faire la guerre au capitalisme dès lors qu'on ne fait pas partie de ceux qui en profitent (puisqu'il tend inévitablement à accroître les inégalités).
Si l'on répond oui, en dehors du fait que cela tend fortement à prouver que l'on est complètement idiot il reste à trouver les moyens de bien persuader ceux qui deviennent de plus en plus défavorisés que c'est pour leur bien. Comme chacun est juge de son propre bonheur, les défavorisés en question sont parfaitement en droit d'égorger les patrons.
Bref, en tout état de cause le capitalisme ne peut survivre qu'en faisant croître le sentiment de sa non légitimité, ce qu'il doit compenser par la propagande.
Mais c'est sans espoir. Car en même temps que l'économiste libéral feint de croire que tout le monde profite du développement du capitalisme, sa pratique et même sa théorie confirment qu'il applique la lutte des classes, tel un marxiste de stricte obédience, mais bien sûr pas dans le même camp.
Si l'on répond non, la conséquence logique est donc bien qu'il faut faire la guerre au capitalisme dès lors qu'on ne fait pas partie de ceux qui en profitent (puisqu'il tend inévitablement à accroître les inégalités).
Si l'on répond oui, en dehors du fait que cela tend fortement à prouver que l'on est complètement idiot il reste à trouver les moyens de bien persuader ceux qui deviennent de plus en plus défavorisés que c'est pour leur bien. Comme chacun est juge de son propre bonheur, les défavorisés en question sont parfaitement en droit d'égorger les patrons.
Bref, en tout état de cause le capitalisme ne peut survivre qu'en faisant croître le sentiment de sa non légitimité, ce qu'il doit compenser par la propagande.
Mais c'est sans espoir. Car en même temps que l'économiste libéral feint de croire que tout le monde profite du développement du capitalisme, sa pratique et même sa théorie confirment qu'il applique la lutte des classes, tel un marxiste de stricte obédience, mais bien sûr pas dans le même camp.
_________________
amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1505
Date d'inscription : 01/06/2011
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
Ah mais tu sais qu'on est en train de se comprendre ?
En tout cas, tu vois peut-être mieux ce que je veux dire lorsque j'oppose d'un côté le libéralisme qui repose sur des "valeurs" et des postulats anthropologiques (càd qui postule que les hommes, dans leur généralité, veulent X ou attendent Y -en l'occurrence, la paix, la croissance, l'innovation technologique, etc.) et de l'autre la démocratie qui propose de demander leur opinion aux individus eux-mêmes : Qu'est-ce que vous voulez, en fait ?
Je pense qu'il est vraiment important de comprendre que les remises en cause successives des scrutins démocratiques qu'on connaît depuis quelques années en Europe ne sont pas du tout fortuites : Elles sont des conséquences tout à fait logiques du système idéologique dans lequel nous vivons et qui a déjà tranché quant à la question de savoir ce que les individus veulent et attendent profondément. Pour le dire en un mot, nos élites partent du principe qu'elles savent ce qui est bon pour nous. Et on me dira peut-être : "Ben ouais, c'est pour ca qu'elles sont des élites, elles nous mènent." Ben ouais, sauf qu'on ne peut pas ne pas observer, je crois, que les individus renâclent de plus en plus fort à suivre, et que le fossé se creuse. Et que ce qui va être en jeu, bientôt, si ce n'est déjà, c'est : Est-il bien raisonnable de conférer une parole politique aux citoyens ?
Et puis -et là, je ne vais pas te faire plaisir, j'en ai peur- le système n'est pas complet si on n'y inclut pas l'autre volet : Le libéralisme politique. Parce que c'est lui, essentiellement, qui fait passer la pilule.
Tu dis :
Et du reste, l'un des droits fondamentaux du citoyen, c'est le droit de propriété. Tout homme est en droit de voir reconnaître sa propriété par la justice, celui qui possède peu comme celui qui possède beaucoup ! C'est ca, l'égalité démocratique, môssieur le marxiste, l'égalité devant la Loi !"
C'est l'autre volet indissociable du libéralisme, puisque le libéralisme, c'est le système politique qui légitime l'inégalité économique par l'égalité juridique. Kerkoz résumait très bien ca d'une phrase, d'ailleurs, je ne retrouve plus où : Donner des droits, ca ne coûte pas grand-chose.
En tout cas, tu vois peut-être mieux ce que je veux dire lorsque j'oppose d'un côté le libéralisme qui repose sur des "valeurs" et des postulats anthropologiques (càd qui postule que les hommes, dans leur généralité, veulent X ou attendent Y -en l'occurrence, la paix, la croissance, l'innovation technologique, etc.) et de l'autre la démocratie qui propose de demander leur opinion aux individus eux-mêmes : Qu'est-ce que vous voulez, en fait ?
Je pense qu'il est vraiment important de comprendre que les remises en cause successives des scrutins démocratiques qu'on connaît depuis quelques années en Europe ne sont pas du tout fortuites : Elles sont des conséquences tout à fait logiques du système idéologique dans lequel nous vivons et qui a déjà tranché quant à la question de savoir ce que les individus veulent et attendent profondément. Pour le dire en un mot, nos élites partent du principe qu'elles savent ce qui est bon pour nous. Et on me dira peut-être : "Ben ouais, c'est pour ca qu'elles sont des élites, elles nous mènent." Ben ouais, sauf qu'on ne peut pas ne pas observer, je crois, que les individus renâclent de plus en plus fort à suivre, et que le fossé se creuse. Et que ce qui va être en jeu, bientôt, si ce n'est déjà, c'est : Est-il bien raisonnable de conférer une parole politique aux citoyens ?
Et puis -et là, je ne vais pas te faire plaisir, j'en ai peur- le système n'est pas complet si on n'y inclut pas l'autre volet : Le libéralisme politique. Parce que c'est lui, essentiellement, qui fait passer la pilule.
Tu dis :
"Mais pas du tout, quelle horreur ! Cela n'a rien à voir, répondra le libéral. Car dans les régimes libéraux (c'est là où lui utilisera le terme "démocratie", hein, je n'y reviens pas), et contrairement aux totalitarismes marxistes, les individus ont des droits ! Inaliénables ! Les individus sont libres, libres d'aller et venir, libres de leur opinion politique et de leur confession religieuse, libres d'exercer la profession qu'ils veulent, libres ! Et ils ont le droit de faire garantir ces libertés par la justice, une justice indépendante du pouvoir politique, fondée dans et par une constitution ! Et tous les citoyens sont d'ailleurs reconnus égaux devant la loi !en même temps que l'économiste libéral feint de croire que tout le monde profite du développement du capitalisme, sa pratique et même sa théorie confirment qu'il applique la lutte des classes, tel un marxiste de stricte obédience, mais bien sûr pas dans le même camp.
Et du reste, l'un des droits fondamentaux du citoyen, c'est le droit de propriété. Tout homme est en droit de voir reconnaître sa propriété par la justice, celui qui possède peu comme celui qui possède beaucoup ! C'est ca, l'égalité démocratique, môssieur le marxiste, l'égalité devant la Loi !"
C'est l'autre volet indissociable du libéralisme, puisque le libéralisme, c'est le système politique qui légitime l'inégalité économique par l'égalité juridique. Kerkoz résumait très bien ca d'une phrase, d'ailleurs, je ne retrouve plus où : Donner des droits, ca ne coûte pas grand-chose.
Dernière édition par Bergame le Sam 9 Juil 2016 - 17:29, édité 1 fois
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
euthyphron a écrit:Mais c'est sans espoir. Car en même temps que l'économiste libéral feint de croire que tout le monde profite du développement du capitalisme, sa pratique et même sa théorie confirment qu'il applique la lutte des classes, tel un marxiste de stricte obédience, mais bien sûr pas dans le même camp.
C'est moi qui souligne. Les libéraux savent parfaitement qu'ils ne travaillent pas pour tous, qu'ils ne respectent l'Autre que si on leur impose extérieurement, mais c'est ce qu'il ne cesse de dire, et ça, ça m'horripile au dernier degré.
P.S. à Bergame,
Dans ta liste de libertés, tu en oublies un petit paquet qui consiste à avoir la " liberté ", le droit, de se faire essorer, exploiter, économiquement, perpétuellement défendus, promus, étendus, par les plus énormes, puissants " groupements d'intérêts " qu'on connait.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: La paupérisation des classes moyennes en Europe
bergame a écrit:j'oppose: d'un côté le libéralisme qui repose sur des "valeurs" et des postulats anthropologiques (càd qui postule que les hommes, dans leur généralité, veulent X ou attendent Y -en l'occurrence, la paix, la croissance, l'innovation technologique, etc.) et de l'autre la démocratie qui propose de demander leur opinion aux individus eux-mêmes : Qu'est-ce que vous voulez, en fait ?
Ce n'est pas du tout opposable quand les individus eux mêmes
veulent X ou attendent Y -en l'occurrence, la paix, la croissance, l'innovation technologique, etc.)
Ce n'est plus opposable puisqu'il y a coïncidence .
Et c'est un cas de figure possible.
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12505
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Page 1 sur 5 • 1, 2, 3, 4, 5
Page 1 sur 5
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum