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Message par Bergame Sam 2 Jan 2016 - 11:47

Sans blagues ?!
Hé bien, ca m'intéresserait beaucoup de savoir en quoi, selon toi, nos "pensées" convergent !

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Message par baptiste Lun 4 Jan 2016 - 7:19

Bergame a écrit:Sans blagues ?!
Hé bien, ca m'intéresserait beaucoup de savoir en quoi, selon toi, nos "pensées" convergent !

Je me demande comment tu arrives à lire « vos pensées convergent », lorsque j’écris « Je ne vois dans la manière de penser de ce monsieur et la tienne aucune différence », « manière de penser » est une action pas un donné.

La manière de penser de ce monsieur repose sur une vision évidente et globale qui lui a été transmise par la tradition culturelle américaine, on retrouve dans son discours toute la trame de cette culture entrepreneuriale de pionniers sous forme d’un système. Bien que son discours comporte des explications causales, celles-ci ressemblent aux étiologies de fables, elles ont pour fonctions de sauver l’apparence de conformité à la réalité, une fonction légitimatrice en quelques sorte d’un enchaînement inévitable du « progrès ». Son discours s’appuie sur une représentation du monde qui bien qu’elle renvoi au monde réel échappe aux interférences nocives que pourrait présenter la réalité.

La tienne, de manière de penser, repose elle aussi sur une de ces visions évidentes et globales, mais cette fois-ci dans la tradition scolastique. Elle n’interroge pas plus la réalité que lui, simplement des réponses à des questions dont on a oublié la nature depuis longtemps, un système livré en kit de prêt à penser transmis socialement, elle sature le champ sémantique avec des discours purement rhétoriques pour échapper au réel jusqu’à faire d’un dictateur un grand démocrate

Deux manières de penser qui ne convergent pas mais se soumettent au même désir irréaliste d’entretenir de fausses représentations valorisantes, quelques part une sorte d’habitus aurait dit Bourdieu…non ?... enfin ce n’est qu’une compréhension d’un pékin de l’habitus.



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Message par jghislain Lun 4 Jan 2016 - 9:13

Saviez-vous déjà que dès lors que vous vous connectez à un site (et pas seulement Google), du moment qu'il a des accords commerciaux avec des partenaires publicitaires, ce même site envoie immédiatement vos données personnelles à travers d'innombrables passerelles de connexions ? Ainsi c'est comme si vous étiez connectés à toute une galaxie des sites commerciaux qui gravitent autour. Il y a d'ailleurs un logiciel qui permet de démasquer ce genre de liaisons que vous subissez malgré vous. Mais il me semble qu'il est impossible de bloquer ce type de partage, puisque c'est le site qui fait lui-même les envois, dès qu'une fois vos données appropriés directement.

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Message par Bergame Lun 4 Jan 2016 - 9:54

baptiste a écrit:Je me demande comment tu arrives à lire « vos pensées convergent », lorsque j’écris « Je ne vois dans la manière de penser de ce monsieur et la tienne aucune différence », « manière de penser » est une action pas un donné.
C'est peut-être parce que, comme beaucoup de gens, je conçois déjà la pensée comme une action et non comme un donné, rigolo.

Si je ne rechignais pas à t'encourager à continuer ainsi sur le procès ad hominem, baptiste, je te proposerais bien de qualifier précisément le "système de prêt à pensée en kit" qui est supposément le mien -juste pour voir. Mais je pense que cette petite diatribe a surtout pour finalité de nous renseigner sur le fait que ta "manière de penser", à toi, est d'interroger le réel, en-dehors de toute "représentation du monde". De nous rappeler que tu es un scientifique, toi, pas un de ces "intellectuels" qui abreuvent le monde de discours idéologiques et prétendent parler à la place du peuple bla-bla-bla. Permets-moi de te répondre que, pour ma part, je crois avoir bien intégré le truc, baptiste, et qu'il n'est peut-être pas nécessaire de continuer à essayer de me convaincre -mais tu fais ce que tu veux.


C'est clair, jghislain, il suffit de voir les publicités en haut de cette page. De quel logiciel est-ce que tu parles, stp ?

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Message par jghislain Lun 4 Jan 2016 - 9:58

http://www.cnil.fr/vos-droits/vos-traces/les-cookies/telechargez-cookieviz/

La CNIL met à disposition de tous un outil de visualisation qui identifie en temps réel les cookies qui transmettent des informations vous concernant à d'autres sites.
Dans le cadre d'un projet du laboratoire d'innovation, les experts de la CNIL ont développé Cookieviz, un outil de visualisation qui permet de mesurer l'impact des cookies lors de votre propre navigation. La CNIL met à la disposition de tous une version 1.1 de l'outil.
Concrètement, Cookieviz analyse les interactions entre votre ordinateur, votre navigateur et des sites et serveurs distants. En l'installant vous pourrez savoir à quels autres acteurs le site que vous visitez envoie des informations. Ce logiciel est à télécharger gratuitement depuis le compte Github de la CNIL. Deux minutes et quelques clics suffisent pour explorer " l'arrière boutique " du web et visualiser en temps réel l'ampleur du phénomène du tracking !

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Message par baptiste Mar 5 Jan 2016 - 7:30

Bergame a écrit:
Si je ne rechignais pas à t'encourager à continuer ainsi sur le procès ad hominem, baptiste,


Quel procés ad hominen ? Qui utilise des adjectifs disqualificatifs ? Grosse donnée - Page 2 177519025

La vrai question, me semble-t-il, c’est pourquoi dans un pays soi-disant libéral on encourage la constitution de monopoles dans le domaine de la communication ? Lorsque Rockefeller est devenu trop puissant on cassé son empire, pourquoi a-t-on non seulement laissé mais encouragé microsoft, google…à instituer ces monopoles privés ?

Il n’y a pas que l’aspect marketting qui pose problème, c'est même le moindre des problèmes. Ces sociétés sont des outils de puissance, un état fort ne peut exercer sa puissance uniquement avec des portes avions. Le fait que l’on connaisse mes habitudes d’achat ou bien avec qui je fornique n’est pas spécialement dérangeant pour les libertés publiques, le fait que l’on puisse écouter et influencer des décideurs étrangers pose un problème d'un autre ordre.




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Message par Courtial Mar 5 Jan 2016 - 13:07

quid a écrit:Je ne crois pas à la philanthropie de Google.
Si les outils de Google paraissent gratuit pour l'utilisateur final, ils s'intègrent complètement dans une logique économique.
Google a besoin du connecté pour vivre, c'est sa source de revenu. Il a besoin de revenus, et ces revenus, il les trouve dans la publicité, ou plus exactement dans le ciblage publicitaire.

Autrement dit, il y a une situation nouvelle (au moins en apparence, il faudrait se demander jusqu'à quel point c'est nouveau) : on ne vend pas des marchandises, on vend du client, c'est-à-dire que la marchandise est le client lui-même, le consommateur. Ca remet en question le schéma classique : le producteur (vendeur), le client, la marchandise. Les deux derniers se confondent. Le client croit naïvement qu'il consomme quelque chose (et est donc ravi que ce soit gratos, il n'est pas habitué), alors qu'en réalité, c'est lui qui est consommé.

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Message par jghislain Mar 5 Jan 2016 - 14:00

Tu as tout-à-fait raison, Courtial, pour ce qui est de l'évolution du marketing. Regarde même pour les innocents cookies du début de l'ère Internet. Ils servaient en pratique, pour les sites marchands, juste à mémoriser tes identifiants ou ton panier. Mais avec les nouvelles barres de navigation, on en est venu à mémoriser plus de données (historique, recherche web...) dans ces fameux cookies et fichiers 'temporaires'. C'est une dérive commerciale assez grave je trouve. C'est carrément du fichage.

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Message par quid Mar 5 Jan 2016 - 23:45

Courtial a écrit:
quid a écrit:Je ne crois pas à la philanthropie de Google.
Si les outils de Google paraissent gratuit pour l'utilisateur final, ils s'intègrent complètement dans une logique économique.
Google a besoin du connecté pour vivre, c'est sa source de revenu. Il a besoin de revenus, et ces revenus, il les trouve dans la publicité, ou plus exactement dans le ciblage publicitaire.

Autrement dit, il y a une situation nouvelle (au moins en apparence, il faudrait se demander jusqu'à quel point c'est nouveau) : on ne vend pas des marchandises, on vend du client, c'est-à-dire que la marchandise est le client lui-même, le consommateur. Ca remet en question le schéma classique : le producteur (vendeur), le client, la marchandise. Les deux derniers se confondent. Le client croit naïvement qu'il consomme quelque chose (et est donc ravi que ce soit gratos, il n'est pas habitué), alors qu'en réalité, c'est lui qui est consommé.

La situation n'est sans doute pas nouvelle, la publicité ne date pas d'aujourd'hui, et les revenus de la publicité financent en partie les chaînes de télévision, les journaux ou les stations radio. Et pour porter, la publicité doit être accessible, c'est son propre d'être gratuit pour ceux à qui elle est destinée, ce serait un comble s'il fallait payer pour voir de la publicité.

Pour autant tout n'est pas finançable par la publicité, le plus ou moins gratuit qui est financé correspond à certains types de produits qui s'y prêtes ; ce sont des produits ou des supports qui sont liés à de l'activité régulière : Lire un journal, écouter une émission radio, regarder un programme télévisé, naviguer sur internet ou lire ses e-mails, …

On peut alors légitimement se poser la question de la nature du contenu de certains de ces médias.

La particularité d'internet est que le support est plus diffus ; les routes de l'internet sont plus individuelles et plus nombreuses. Mais en contrepartie internet a un potentiel de ciblage également plus individualisé.

Il faut entériner le côté dématérialisé d'internet. Lorsque l'on navigue sur internet, on n'est pas à proprement parlé sur un site extérieur. Tout ce que l'on consulte est au final, expressément sur notre ordinateur. Le cookie n'échappe pas à la règle. Mais le principe du navigateur, est que, sauf virus ou autorisation particulière et expresse de l'utilisateur, il est cloisonné par rapport au système d'exploitation de la machine.
Les pages internets et les cookies stockés sur la machine pour les besoin de la navigation doivent être considérés comme extérieurs à celle-ci. L'information que l'on donne au cours de notre navigation n'est donc pas privée, elle est nécessairement connue du site sur lequel on navigue.
C'est donc plus une question de droit autour de cette information qui est la question, pas l'endroit où elle est stockée. Une session internet doit-elle être considérée comme se faisant dans un espace privé, comme dans une chambre ou comme si l'on était dans un magasin en pleine rue commerçante ?

C'est au final un accord de principe entre les utilisateurs et chaque espace web, dans les limites des législations.
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Message par Bergame Mer 6 Jan 2016 - 13:42

quid a écrit:
Courtial a écrit:Autrement dit, il y a une situation nouvelle (au moins en apparence, il faudrait se demander jusqu'à quel point c'est nouveau) : on ne vend pas des marchandises, on vend du client, c'est-à-dire que la marchandise est le client lui-même, le consommateur. Ca remet en question le schéma classique : le producteur (vendeur), le client, la marchandise. Les deux derniers se confondent. Le client croit naïvement qu'il consomme quelque chose (et est donc ravi que ce soit gratos, il n'est pas habitué), alors qu'en réalité, c'est lui qui est consommé.
La situation n'est sans doute pas nouvelle, la publicité ne date pas d'aujourd'hui, et les revenus de la publicité financent en partie les chaînes de télévision, les journaux ou les stations radio. Et pour porter, la publicité doit être accessible, c'est son propre d'être gratuit pour ceux à qui elle est destinée, ce serait un comble s'il fallait payer pour voir de la publicité.
Il y a bien une situation nouvelle. C'est que ce n'est pas seulement la publicité pour les services qui est gratuite, ce sont les services eux-mêmes, ceux proposés du moins par les géants de l'internet. Cette gratuité a été considérée à juste titre comme une 1ère révolution dans le business, dans le sens où elle menace les entreprises de la génération précédente qui distribuent les mêmes services, mais payants. Voir la situation des géants de l'entertainment, musique, cinéma, etc.
Cependant, cette gratuité a, en fait, un coût (caché et à plus long terme). Dans ses règles d'utilisation, Google, par exemple, dit explicitement que la raison pour laquelle il collecte les données personnelles de ses utilisateurs est qu'elles lui permettent de financer la gratuité de ses services. C'est la raison pour laquelle je parle de contrat faustien.

Et, encore une fois, la publicité n'est que l'avant-garde de cette révolution. Exemple concret, je m'intéresse actuellement à l'arrivée prochaine de la Big Data dans le domaine des Ressources Humaines. Imaginez Linked'In, qui est le grand réseau professionnel online, avec des millions de CV enregistrés. Linked'in travaille (comme d'autres), à partir de ces données, à élaborer statistiquement des carrières-type : Quand vous avez occupé telle fonction dans tel secteur à tel âge, il y a telle probabilité pour que vous soyez successful dans telle autre fonction, tel secteur, à tel autre âge -ou pas ! Hé bien, évidemment, ca intéresse déjà grandement les compagnies d'assurance qui proposent des contrats de prévoyance chômage. Par décence, je ne mentionne pas les utilisations en prévoyance santé -qui d'ailleurs, sont plus connues. Vous avez des assureurs aux Etats-Unis qui, pour amorcer la pompe, proposent des réductions de souscription aux clients qui "jouent le jeu de la transparence" et remplissent un questionnaire santé poussé. Pour l'instant, l'assureur a encore besoin de ce déclaratif et de proposer en contrepartie un bénéfice client ; demain, il y aura un marché des données personnelles.

Mais ceci n'est encore que la partie visible d'un mouvement plus large encore, qui, à ma connaissance, n'a même pas de nom -et pourtant, Dieu sait s'il s'agit d'une tendance lourde dans le "business" aujourd'hui- et qui consiste tout simplement à faire travailler le client. Pourquoi faire travailler le client ? Bien entendu, parce que tout ce que fait le client, c'est autant que ne font pas les employés -donc, au final et d'une manière ou d'une autre, une réduction de la masse salariale. Mouvement très large, certainement initié par les fast-foods du type McDo, qui ont su éduquer leurs clients à débarrasser eux-mêmes leur table. Aujourd'hui, ca passe par les caisses en supermarché où on scanne soi-même ses achats, tous les automates de service en agences bancaires -qui, d'ailleurs, sont destinées à disparaître- et plus largement, tous les services qu'on accomplit soi-même, du confort de son salon, sur internet. Pour exemple -et pour rester dans une thématique précédente-, je rencontrai récemment un responsable d'Orange qui dirigeait le projet du nouveau portail SAV du groupe. En fait, tout ce que faisaient les employés d'Orange lorsqu'ils recevaient un mobile à réparer -relever le numéro de série, l'enregistrer, enregistrer la carte SIM, enregistrer les données de la facture d'achat, etc. - hé bien ce sont les clients qui le feront de chez eux sur le portail ad hoc -gratuitement, cela va sans dire.

Le point commun entre ces deux mouvements, gratuité des services financés par les données personnelles des utilisateurs d'un côté, et gratuité de la main-d'œuvre exploitée chez l'utilisateur de l'autre, il est évident : Internet. Internet et la "liberté", la disponibilité qu'il permet.

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Message par kercoz Mer 6 Jan 2016 - 14:34

Une bonne intervention sur ce domaine par Daniel  Cohen:
http://www.franceculture.fr/emission-l-invite-des-matins-pas-de-croissance-forte-pour-2016-et-alors-2016-01-04

"""Les seuls emplois qui subsistent sont ceux qui ne sont pas informatisables "".

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Message par Courtial Mer 6 Jan 2016 - 14:49

Bergame a écrit:En fait, tout ce que faisaient les employés d'Orange lorsqu'ils recevaient un mobile à réparer -relever le numéro de série, l'enregistrer, enregistrer la carte SIM, enregistrer les données de la facture d'achat, etc. - hé bien ce sont les clients qui le feront de chez eux sur le portail ad hoc -gratuitement, cela va sans dire.

Ca , c'est un autre aspect intéressant, j'ai lu un dossier bien fichu dans une revue économique (éco-socio, plutôt, malheureusement, je ne me souviens pas le titre, un truc à destination des profs d'éco que j'ai vendangé en salle des profs..(1.) et qui s'inscrivait assez bien dans le genre de brouillage que j'évoquais (et que Quid n'a pas bien saisi, il semble), sauf que cette fois, ce n'est plus le mélange entre le client et la marchandise, mais entre le client et le producteur. Le client devient co-acteur de la production, ce qui va de la bibliothèque Ikea à monter soi-même (je co-produis la marchandise) à des formes plus complexes et nouvelles, qui sont favorisées par les technologies que tu évoques.
on peut l'entendre comme un (r)évolution  de la division du travail assez neuve aussi.

(1) j'ai renoncé à me soigner, il est trop tard, mais cette manie de se croire obligé de lire forcément tout ce qui est écrit est une pulsion qui mériterait la consultation d'un psychiâtre addictologue.

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Message par quid Mer 6 Jan 2016 - 23:17

Bergame a écrit:Il y a bien une situation nouvelle. C'est que ce n'est pas seulement la publicité pour les services qui est gratuite, ce sont les services eux-mêmes, ceux proposés du moins par les géants de l'internet. Cette gratuité a été considérée à juste titre comme une 1ère révolution dans le business, dans le sens où elle menace les entreprises de la génération précédente qui distribuent les mêmes services, mais payants. Voir la situation des géants de l'entertainment, musique, cinéma, etc.
Cependant, cette gratuité a, en fait, un coût (caché et à plus long terme). Dans ses règles d'utilisation, Google, par exemple, dit explicitement que la raison pour laquelle il collecte les données personnelles de ses utilisateurs est qu'elles lui permettent de financer la gratuité de ses services. C'est la raison pour laquelle je parle de contrat faustien.
...

Courtial a écrit:et qui s'inscrivait assez bien dans le genre de brouillage que j'évoquais (et que Quid n'a pas bien saisi, il semble)
Je suis d'accord qu'il faut pousser la réflexion un peu plus loin, et je me suis focalisé sur la familiarité avec les médias plus anciens concernant la gratuité, mais il me semble que la rémunération par la publicité reste un terrain très courant sur internet. Je ne saurais cependant pas dire quelle importance a ce phénomène par rapport à d'autres manières de proposer de la gratuité.

Par exemple, il me semble qu'un moteur de recherche, un site d'information en ligne ou même un forum, exploitent particulièrement ce mode de rémunération par la publicité.

Maintenant, ce que l'on soupçonne, c'est qu'il y a d'autres motivations de faire du gratuit que seulement les rentrées d'argent via la publicité. La motivation finale étant que cela soit rémunérateur à plus ou moins longue échéance.

On est d'accord que ce n'est pas du gratuit, en tout cas pas pour tout le monde. Le support publicitaire vend de l'espace publicitaire et de l'audience, et d'autres services vendent autre chose, tout en proposant un aspect gratuit.

Certains services directs, sans tiers, entre un client et le commerçant, sont aussi là pour gagner de l'argent sous forme d'économie sur les coûts.

En gros, nous avons à faire à un panel de motivations pour faire du gratuit, qui ne sont pas forcément des évolutions les unes par rapport aux autres.

Et donc, ce que j'ai compris Bergame, c'est que tu voudrais insister sur la motivation qui est la collecte et la revente d'information. On voit principalement cette motivation sur les sites de réseaux sociaux, puisqu'ils sont gratuits mais qu'ils génèrent tout de même des revenus. La technique publicitaire n'est pas en reste, mais peut-être que l'or pour ces sites est plutôt les informations au demeurant assez précises sur le profil des utilisateurs.

A but de traitement, ces informations doivent cependant légalement être dé-personnalisés. Cela se rapproche en quelque sorte de sondages variés qu'il n'y aurait alors pas besoin de mener. Reste à voir l'intérêt que représente ces collectes dépersonnalisés du point de vue économique.

Il n'y a en apparence pas de retour ou de mise en relation directe de ces statistiques avec la masse d'utilisateurs d'où proviennent ces statistiques. On a d'un côté une masse d'utilisateurs, et de l'autre une masse de statistiques. L'exploitation de ces informations semble ne pas pouvoir permettre de revenir à la source individualisé des utilisateurs ayant permis cette récolte statistique.
Sauf si en retour, on peut exploiter ces statistiques au travers de requêtes dépersonnalisées qui interrogeraient des critères personnels, permettant de se mettre en contact avec des profils individuels : Démarchages de toutes sortes, demande de contact, ….

Mais il y a certainement d'autres intérêts à pouvoir disposer de ces statistiques variées ; en terme d'anticipation des tendances par exemple.

Après, l'exploitation de ces données de manière non dé-personnalisée et illégale est une autre question.

Ca reste la masse de l'information qui est intéressante. Individuellement çà ne vaut rien, on ne va pas s'enrichir en vendant nos propres informations, et l'on est en fait déjà rémunérés par la gratuité du service. Reste à voir ce que l'on a réellement à y perdre.

Moi, ce qui me semble évident, c'est que la gratuité n'est pas là parce que l'on a trouvé un moyen ingénieux pour faire payer d'autres acteurs avec des inconvénients ou concessions très modestes, mais que la gratuité est nécessaire à l'exploitation de cette manne informationnelle ou publicitaire.
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Message par Courtial Jeu 7 Jan 2016 - 0:12

Tout ça, c'est bien gentil, mais ça ne parle pas de la production de la valeur.
Pourquoi ?
C'est sale, faut pas en parler ?

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Message par poussbois Jeu 7 Jan 2016 - 2:25

Nous n'en parlons pas, mais la bourse en parle. Ou peut-être n'avons nous pas les mêmes valeurs. :)

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Message par jghislain Jeu 7 Jan 2016 - 9:46

Ben ça, cracher sur l'argent alors que c'est le symbole de la réussite et du travail, c'est un peu facile.

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Message par hks Jeu 7 Jan 2016 - 15:24

poussbois a écrit:Nous n'en parlons pas, mais la bourse en parle. Ou peut-être n'avons nous pas les mêmes valeurs. :)


il est possible que courtial estime que la bourse ne parle pas de la création de valeur mais de la variation de la valeur.

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Message par quid Jeu 7 Jan 2016 - 23:12

Courtial a écrit:Tout ça, c'est bien gentil, mais ça ne parle pas de la production de la valeur.
Pourquoi ?
C'est sale, faut pas en parler ?

poussbois a écrit:Nous n'en parlons pas, mais la bourse en parle. Ou peut-être n'avons nous pas les mêmes valeurs. :)

jghislain a écrit:Ben ça, cracher sur l'argent alors que c'est le symbole de la réussite et du travail, c'est un peu facile.

hks a écrit:il est possible que courtial estime que la bourse ne parle pas de la création de valeur mais de la variation de la  valeur.

Ben je sais pas, j'avoue que je ne sais pas quoi dire ou répondre, y a peut-être quelque chose à répondre, mais non c'est que çà doit voler trop haut pour moi, parce-qu'y'en a qui semblent avoir compris, pas de mon niveau, je demande qu'à c' qu'on m'esplique, je vous en prie messieurs, déniez éclairer les bas-fonds où je me trouve....
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Message par quid Sam 9 Jan 2016 - 17:04

Courtial a écrit:Tout ça, c'est bien gentil, mais ça ne parle pas de la production de la valeur.
Pourquoi ?
C'est sale, faut pas en parler ?

Admettons que la remarque et la critique, soit recevable malgré sa forme courte et balancée. Admettons que mon texte élude cette question. Admettons que la remarque ne manque pas volontairement d'explication et de référence, mais que tu pensais que la référence allait de soi pour une personne suffisamment au fait. Admettons donc, que la remarque a une pertinence, puisque de plus, il lui a été répondu de manière entendue. Admettons qu'il n'y ait pas d'omerta autour de quelque chose dont on parle sans en parler, ou dont il ne faut pas prononcer le nom.
Etant donné que je n'ai pas saisi sur quoi elle portait, ni dans sa forme initiale, ni au travers des interventions suivantes, j'essaye donc de cerner son contenu et sa portée.

Premièrement, vu que le terme « production » n'a été introduit que dans ton intervention précédente, je suppose que cela y fait référence. Le terme « valeur » est plus délicat, car bien qu'apparaissant plusieurs fois en début du fil de la discussion, il ne semble pas être lié à ce début. Il est donc problématique, car il m'est difficile de trouver à quoi il fait référence.
Poussbois semble savoir, et donc son intervention laisserait à penser qu'il y a un lien avec les valeurs boursières. Or la valeur boursière est plutôt entendue comme étant une valeur financière, c'est un peu une valeur circulante, elle fait référence à l'argent, et il semble dire que « nous » n'entendons pas forcément la « valeur » de la même manière.
Il est important de cerner la valeur qui est visée dans la phrase, car on parle bien de « production de la valeur » et non pas de « valeur d'une production ».

Là vous m'excuserez, mais je vais tailler large. Je dirais que de par la remarque de Pousbois, la valeur visée par Courtial n'est pas une valeur financière, car mon texte peut sembler de prime abord plus accès sur le gain financier, et la remarque de Courtial est plutôt une critique sur quelque chose qu'éluderait mon texte, mais j'y reviendrais plus loin.

De plus, il me semble que la critique de Courtial dont se fait indirectement l'echo Poussbois, puis Jghislain, vise justement la considération de la valeur financière au détriment d'autres valeurs plus tangibles.
Et puisque le terme «valeur» arrive un peu d'une manière qui me paraît impromptue, associé au terme «production», cette combinaison me semble également faire écho à une critique plus ancienne de Courtial qui semblait voir dans le forum et au travers de certaines interventions, un « repaire de marxistes ». Il y a peut-être une allusion et une critique d'un aspect marxiste de mon intervention qui se focaliserait sur des aspects économiques.

Pour finir, la remarque peut également faire référence à un manque dans mon texte qui ne répondait pas à l'intervention précédente de Courtial, où justement il introduisait la notion de « production », ce qui rendrait non pertinente l'intervention de Poussbois puisqu'à aucun moment, ni dans mon texte ni avant, la bourse n'a été évoquée, et que l'argent et l'activité économique ne se résument pas à la bourse. Cela serait alors juste hors sujet.

Pour résumé, je pense qu'il faut entendre la critique de Courtial comme le fait que mon texte ne parlait pas de ce qu'il avait mis en avant précédemment et qui serait un genre de changement de paradigme concernant la marchandise, le produit et la production.

Or, je ne pense pas que j'ai éludé cette notion de « production de valeur ».

Mais avant de dire qu'il y aurait cette révolution de principe économique dans une certaine économie numérique, il faudrait déjà me dire où se trouve le produit dans la démarche publicitaire, sinon en lien direct avec les personnes ? Quel type de produit vendent les supports publicitaires aux annonceurs ? Qu'est-ce qu'un espace publicitaire ? Ce n'est pas le mur intérieur d'un garage par exemple. Un espace publicitaire se doit d'être visible, vu. Un support publicitaire vend de l'attention de la part des personnes. Qu'est-ce sinon « du consommateur » potentiel ? Le produit ici c'est le consommateur, et c'est ce que produit le support publicitaire comme valeur, en plus des contenus médiatiques éventuels.

Donc « la valeur de la production » ou la « valeur produite », j'en parle :
quid a écrit:
Le support publicitaire vend de l'espace publicitaire et de l'audience, et d'autres services vendent autre chose, tout en proposant un aspect gratuit.
… mais peut-être que l'or pour ces sites est plutôt les informations au demeurant assez précises sur le profil des utilisateurs.
Cela se rapproche en quelque sorte de sondages variés qu'il n'y aurait alors pas besoin de mener
Démarchages de toutes sortes, demande de contact, ….
Mais il y a certainement d'autres intérêts à pouvoir disposer de ces statistiques variées ; en terme d'anticipation des tendances par exemple.
Je ne sais pas exactement la valeur qu'y voient ceux qui achètent cette production, mais il est clair que même si a terme on souhaite faire de l'argent avec, il y a besoin de ce produit puisqu'ils l'achètent, tout comme l'on a besoin d'acier pour construire des paquebots.

Maintenant, qu'en est-il de « la production de la valeur » ? Il ne s'agit pas de penser que je ne voudrait pas en parler, on n'est pas obligé de parler de tout dans chaque intervention, il suffit de demander, ou de préciser ce que l'on pense d'important à mettre en avant.

Pourtant, j'en ai parlé un peu.

D'abord sur les sources de la valeur :
quid a écrit:
ce sont des produits ou des supports qui sont liés à de l'activité régulière : Lire un journal, écouter une émission radio, regarder un programme télévisé, naviguer sur internet ou lire ses e-mails, …
 
L'information que l'on donne au cours de notre navigation...
Ca reste la masse de l'information qui est intéressante. Individuellement çà ne vaut rien, on ne va pas s'enrichir en vendant nos propres informations...
Ce petit morceau de minerai de fer qui traîne au pied d'un rocher ne vaut rien en soi, tout comme ce bout de laine de mouton accroché sur ce buisson, ou cette goutte de pluie que je viens de recevoir sur le visage.
Mais en se mobilisant, on peut collecter beaucoup de minerai, de laine de mouton ou d'eau, et en faire de l'acier pour différents usages, fabriquer des vêtements de laine ou produire de l'hydro-électricité par l'intermédiaire de barrages.
Et voilà que quand j'aurais un peu de minerai de fer, de laine ou de cours d'eau sur ma propriété, je me dirais que ça a de la valeur.
Alors qu'un peu avant une chose n'avait pas de valeur particulière la chose n'ayant apparemment pas changée, cette chose prend de la valeur.
On ne peux pas alors dire que le minerai de fer, la laine du mouton ou l'eau ont une valeur en soi.
Le minerai de fer continue a faire ce que du minerai de fer fait suivant les lois de la nature, la laine de mouton continue à pousser sur les moutons et à faire ce que fait de la laine de mouton, et l'eau continue à couler et à faire ce que fait l'eau.

De la même manière, imaginons que dans une rue passante on installe à la place du trottoir un long mécanisme qui capture la pression et l'énergie produite par les pas des passants pour en faire de l'électricité. On fait un système qui ne capture que l'énergie qui est de toute manière perdue, ce qui n'influence alors pas la mobilité naturelle. Les passants continuent à vaquer à leurs occupations, celui qui allait chercher son pain fait ce qu'il voulait faire, et sa mobilisation sert entièrement ses propres buts. Voilà maintenant qu'il apprend qu'il y a ce mécanisme, il pourrait être tenté de « monnayer » cette production qui vient de lui. Or, en même temps que ce qu'il pourrait monnayer n'aurait qu'une valeur infime et sans intérêt, cette production ne vaudrait rien sans l'élaboration et l'exploitation du mécanisme en question. On ne peut donc proprement pas dire que le passant produit quelque chose, il ne peut pas vraiment se prévaloir de cette production puisqu'il ne fait pas particulièrement d'effort en vue de cette production, en plus qu'il n'est pas impacté par cette production. La production de la valeur ne vient pas de lui, puisque la valorisation non plus.

Donc, tout comme canaliser de l'eau dans le but de produire de l'hydro-électricité, laisse l'eau être de l'eau qui continue à couler, proposer de la gratuité de service est un moyen de canaliser sans contraindre. Les utilisateurs seront enclins d'eux-même à utiliser les services proposés, ils le feront pour les motivations qui sont les leurs, et puisque dans un réseau social, il est important de soi-même fournir de l'information pour les autres utilisateurs de ce réseau, ils le feront d'eux-même.

Si de l'extérieur on peut considérer cela comme un genre de nasse, du point de vue de l'utilisateur il n'y a pas spécialement de contrainte.

De ce fait, la valeur de l'information fournie n'en est une que de par son importance quantitative, et du fait de ceux qui se sont mobilisés pour collecter et exploiter cette information. On ne peut pas proprement dire que l'utilisateur ferait un effort particulier pour valoriser cette information telle qu'elle l'est par les exploitants du service, ni qu'elle ait eu une valeur avant cette canalisation, collecte, et exploitation, puisque si le service était proposé gratuitement sans que l'information soit exploitée, les utilisateurs n'en fourniraient pas moins ces informations.

La gratuité vient du fait que lorsque l'on veut toujours mieux capter, on en arrive à lisser le maximum les aspérités, à construire des canaux, …, mais c'est là un point de vue de l'exploitant.

Les questions restantes à mon avis sont celles-que je me suis posé ici :
quid a écrit:
Sauf si en retour, on peut exploiter ces statistiques au travers de requêtes dépersonnalisées qui interrogeraient des critères personnels, permettant de se mettre en contact avec des profils individuels : Démarchages de toutes sortes, demande de contact, ….
 
Après, l'exploitation de ces données de manière non dé-personnalisée et illégale est une autre question.
Reste à voir ce que l'on a réellement à y perdre.
En gros, si d'un premier abord, l'exploitation des informations paraissent quelques peu contingentes pour les utilisateurs, n'y a-t-il pas de possibles retours négatifs directs ou indirects pour les utilisateurs, ce qui ferait que ceux-ci pourraient avoir légitimement un droit de regard sur l'utilisation de ces collectes, puisque par cet impact on cesserait d'être le minerai, la laine ou l'eau.

La publicité n'est pas en reste, puisque l'on est indirectement pourvoyeur de ressources qui ont nécessairement un impact réel.

Et je livre tout ce « travail » de réflexion et de rédaction très gratuitement  Grosse donnée - Page 2 3184188294
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Message par Bergame Sam 16 Jan 2016 - 15:17

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Il y a plusieurs points.
D'abord, tu pars de l'idée que les données sont "dé-personnalisées". Or, là-dessus, plusieurs choses :

1. C'est effectivement ce que demande la CNIL, à certains égards, c'est-à-dire le législateur. Mais la loi et le business, c'est deux choses différentes. D'une manière générale, je trouve que, dans bien de nos discussions, un certain nombre d'entre vous sont naïfs sur ce point -et que c'est d'ailleurs l'origine de beaucoup de mes mésententes : La loi n'est rien sans le pouvoir de la faire respecter. Que la capacité à faire respecter la loi passe par le pouvoir de contrainte. Que l'instance chargée de faire respecter la loi, c'est l'Etat. Et que les Etats ont toujours moins de capacité de contrainte sur les Entreprises -que, d'ailleurs, on ne parle même plus de contraindre les Entreprises, en rien. On parle, éventuellement, de négocier.
Pour être concret, et comme l'a rappelé neo, la CNIL a récemment demandé des comptes à Google quant à son utilisation des données personnelles, la réponse a été "va te faire voir". Attends, les Etats en sont à essayer de récupérer un peu de l'immense manne qui part se planquer dans les paradis fiscaux, tu penses bien que le respect des lois sur la protection des données personnelles... c'est quand même pas un enjeu stratégique.

2. Il y a deux usages différents des données.
Google, Facebook, etc. sont propriétaires des données "personnelles" que les individus leur confient. Ils peuvent donc les revendre ou les mettre à disposition sous forme de licence, etc. Aujourd'hui, un profil Facebook moyen, ca se vend déjà $50 et ca représente environ 40 pages de données -pourquoi autant, parce que Facebook, Google, etc. trackent la provenance de leur utilisateurs ainsi que leurs destinations en quittant leurs pages. Autrement dit, ils sont capables d'identifier sur quel site vous étiez avant d'arriver sur votre page Facebook, et sur quel site vous allez ensuite. Et bien sûr, ces données sont personnalisées, puisque les utilisateurs ont contractuellement autorisés Facebook à les utiliser -et qu'elles seraient beaucoup moins intéressantes si elles n'étaient pas personnalisées.
Une seconde utilisation des données consiste à aller chercher l'information là où elle est et à l'utiliser à des fins de calcul, etc. Par exemple, on envoie des logiciels-espions sur LinkedIn, on "aspire" la donnée (les CVs), on l'agglomère et on la traite afin de ressortir des tendances -des modèles statistiques de carrière professionnelle, comme je disais précédemment. C'est tout à fait légal, et, dans ce cas, l'information est "dé-personnalisée", oui. On l'utilise à des fins statistiques, on ne la possède pas et on ne peut donc pas la revendre.

Ensuite, tu envisages essentiellement l'utilisation des données à des fins publicitaires, quid. Et tu dis : La publicité est gratuite, et elle l'a toujours été. C'est pas tellement ca le problème. Oui, aujourd'hui, l'utilisation des données sert essentiellement à personnaliser la publicité online. Mais demain, les usages seront bien plus larges -et plus lucratifs. Comme j'ai commencé à l'esquisser avec l'exemple de la Prévoyance, santé en particulier, ce qui est surtout en jeu, je crois, c'est à quel point nos futurs interlocuteurs nous connaîtront. Derrière la Big Data (dont le nom emprunte à Big Brother, ce n'est pas un hasard), il y a le fantasme de rendre les individus transparents. D'une part, et par exemple, qu'ils puissent en cacher le moins possible dès lors qu'il va s'agir de négocier avec eux -négocier un contrat d'assurance, négocier un salaire à l'embauche, etc. Evidemment, dans la négociation, la maitrise de l'information est déterminante. D'autre part, qu'on les connaisse jusque dans leurs secrets intimes, leurs désirs cachés et même inconscients. Ce qui, en somme, n'est rien d'autre que la continuation de l'idée à l'origine de l'économie de l'offre, pour laquelle il ne s'agit pas de répondre aux attentes exprimées, mais d'anticiper sur des attentes qui ne se sont pas encore révélées. Simplement, et comme je le disais dans un premier post, jusqu'à maintenant, lorsqu'on cherchait à faire émerger les attentes du client, il fallait le faire parler, lui poser des questions. La Big Data pousse la logique au bout et industrialise le processus : Il devient possible de se baser sur ce que disent les individus, eux-mêmes, spontanément, comme s'ils parlaient à des amis.

Elle est là, la création de valeur : Dans l'utilisation des informations que les individus donnent à propos d'eux-mêmes, ce en vue d'optimiser les process de l'Entreprise : L'élaboration des produits et services, la commercialisation, la promotion, etc.

Le fondement de la chose, il est toujours le même : La confiance. Les individus confient ainsi leurs données parce qu'ils ont confiance -et qu'ils ignorent, le plus souvent, à quoi elles serviront dans le futur.

Et j'en reviens toujours là, amèrement : Si ce phénomène était initié par des Etats, un seul cri jaillirait de centaines de millions de gorges déployées : "Totalitarisme ! On cherche à nous ficher ! A quoi vont servir ces données ? Qui, demain, les utilisera ?" En fait, si ce phénomène était initié par des Etats, il n'aurait tout simplement aucune chance de se réaliser car personne, de lui-même, ne leur confierait ainsi ses données personnelles. Mais il ne s'agit pas d'Etats, il s'agit d'Entreprises, alors, bien sûr, c'est tout à fait différent...

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Message par Bergame Mar 19 Jan 2016 - 10:08

Voici l'une des questions les plus sensibles de la littérature économique : L'évolution technologique a-t-elle pour conséquence la destruction d'emplois ? La réponse "oui" a longtemps été l'apanage des économistes "critiques", des hétérodoxes, et encore, une petite frange. La grande majorité des auteurs s'est efforcée de démontrer que la disparition d'emplois d'un côté était compensée par la création de nouveaux emplois de l'autre, c'est-à dire dans le secteur, précisément, des nouvelles technologies.
Mais c'est maintenant officiel, cette thèse ne tient plus : Le Forum Economique de Davos vient de publier ses prévisions, la "quatrième révolution industrielle" devrait détruire 7.1 millions d'emplois en 5 ans dans les 15 premières économies mondiales, et en créer seulement 2.1 (admirez au passage la précision sci-en-ti-fique). Perte sèche : 5 millions.

Il faut dire que l'urgence est maintenant de trouver une explication à l'accroissement des inégalités, y compris dans les économies développées. La voici donc : Ce n'est qu'une conséquence secondaire négative, non-intentionnelle, de l'évolution technologique. Hé oui, bonnes gens, vous voulez le progrès, il faut en payer le prix !
Et d'ailleurs, les choses étant particulièrement bien faites, les externalités négatives (autrement appelées "c'est po d'not'faute"), c'est aux Etats de les gérer :
Klaus Schwab, organisateur du Forum de Davos a écrit:Sans une réponse rapide et ciblée pour gérer la transition à très court terme et construire des forces de travail qualifiées, les gouvernement seront confrontés à un chômage grandissant et à des inégalités croissantes.
Les voila prévenus !

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Message par Courtial Mar 19 Jan 2016 - 13:23

Bergame a écrit:La grande majorité des auteurs s'est efforcée de démontrer que la disparition d'emplois d'un côté était compensée par la création de nouveaux emplois de l'autre, c'est-à dire dans le secteur, précisément, des nouvelles technologies.

Ne s'agit-il pas là de la fameuse doctrine schumpeterienne de la "destruction créatrice".

Sur les forums socio-éco que j'ai pu regarder, je constate en effet que ceci est tenu pour La Scïôônce, et tout autre approche renvoyée à l'idéologie pure, le refus de l'objectivité, le déni du réel.

Je dois partager ton pessimisme (que je crois voir pointer) sur les effets que peut produire le constat de la fausseté de ces vues, en termes empiriques, même si le constat est fait par un organisme (Davos) dont le bolchévisme échevelé n'était pas apparu comme le trait dominant. Car comme tu l'insinues (à moins que je ne surlise), la réponse est toute prête : ça ne marche pas parce qu'on est trop socialiste, trop étatiste, trop autoritaire : ce n'est pas la destruction des emplois qui fâche, c'est qu'il n'y en a pas assez, de destructions, encore trop de contraintes, trop d'Etat, trop de peuple.

Ceci est maintenant bien connu : du temps du Président Mao (ou du camarade Staline) on expliquait en même façon l'échec économique (sans parler du reste, encore pire) du système : c'est parce qu'on n'était pas assez communiste, pas assez totalitaire, trop bourgeois, etc.
Ou du temps de l'Inquisition : on avait beau faire, il y avait toujours plus d'athées et de sûppots de Satan : on était trop mou, trop indulgent, sans doute soi -même soumis aux appels du Mal, on ne brûlait pas assez, etc.

Notre gouvernement actuel (et pas Macron, il faut arrêter avec lui pour en faire un bouc émissaire, c'est grotesque) semble poursuivre son mouvement de conversion à la seule vraie foi Vérité scientifique : laissez-nous virer ces sales pauvres ou leur baisser leurs salaires scandaleux, ça va créer de l'emploi.


Dernière édition par Courtial le Mer 20 Jan 2016 - 13:36, édité 1 fois

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Message par quid Mar 19 Jan 2016 - 21:54

à Bergame.

Sur la publicité, par deux fois tu as parlé de « publicité gratuite » :
Bergame a écrit:
Il y a bien une situation nouvelle. C'est que ce n'est pas seulement la publicité pour les services qui est gratuite, ce sont les services eux-mêmes, ceux proposés du moins par les géants de l'internet.
Ensuite, tu envisages essentiellement l'utilisation des données à des fins publicitaires, quid. Et tu dis : La publicité est gratuite, et elle l'a toujours été.
La publicité est payante, elle est payée par les annonceurs, et ce n'est donc pas la publicité qui est gratuite, c'est un service permettant le déploiement de la publicité qui l'est.
Lorsque l'on écoute une radio, lit un journal ou regarde une chaîne de télévision, le tout gratuitement, on bénéficie bien d'un service qui n'a rien à voir a priori avec la publicité. On est donc bien dans une même dynamique qui promeut la gratuité d'un service financé par des recettes qui ne sont pas directement liées à ce service.

C'est pourquoi la frontière est mince concernant le but avoué. Est-on face à une démarche plutôt commerciale ou philanthrope ? Lorsque l'on propose sur des chaînes de télévision, des émissions de divertissement, cherche-t-on à divertir ou à générer de l'audience, et donc des rentrées d'argent par les annonces publicitaires payantes ? J'espère bien qu'il y a aussi un côté philanthrope là dedans.
Alors peut-on dire qu'une radio, une chaîne de télévision ou un journal serait plus philanthrope que les services internets de Google ou de Facebook ?

Un peu avant dans la discussion tu as cité et dit ceci :
Bergame a écrit:
Quand les services sont gratuits, c'est toi le produit.
C'est l'adage qui circule dans les milieux "geek". Il témoigne du pacte faustien sur lequel s'érige actuellement le monde numérique.
En fait, sans s'éterniser sur ma considération sur la publicité, j'essayais juste de montrer que si l'adage que tu soulignes a certainement une réalité, la gratuité est un phénomène qui n'est pas seulement lié au numérique.
Donc je sépare les deux problématiques, la gratuité et la collecte de données.

C'est surtout au niveau de la collecte que je vois une différence entre les deux procédés ; les services numériques et ceux non-numériques.

Si l'on prend le service qui est la télévision. Chacun est libre de regarder les émissions qu'il souhaite, et personne ne va pouvoir savoir si je regarde telle émission plutôt que telle autre, ni si j'ai éteint mon poste. Ceci du moins dans le cadre de la TNT, où il n'y a que de la diffusion, contrairement à une Box Internet où l'opérateur connaîtra peut-être les émissions choisies.
Donc, jusqu'à maintenant, pour connaître l'audience, on procédait par échantillonnage statistique, en proposant des appareils de mesure de l'audience dans un certain nombre de foyer, et on extrapolait à l'ensemble de la population.
Le diffuseur et les publicitaires touchaient directement les téléspectateurs, sans intermédiaire, et l'outil de mesure de l'audience était forcément statistique.
Une collecte se faisait au travers d'un panel d'utilisateurs, le côté personnel de ces données collectées n'ayant aucun intérêt, et la garanti de l'anonymat étant la condition même de la possibilité de collecte.
La création de valeur est dans ce cas l'audience, et la collecte n'est là que pour l'évaluer.

A l'ère du connecté, il n'y a pas seulement diffusion, mais mise en relation de services avec chaque utilisateur. Les données sont alors quasiment d'emblée individualisées, et la donnée statistique globale est reconstituée par dépersonnalisation de celles-ci (les données individualisées), celle-là (la donnée statistique) étant l'une des exploitations possibles de la collecte.

Dans le cas de l'audience, il y a bien création de valeur, mais l'on ne peut pas stocker ou conserver cette valeur quelque part. Aussitôt est elle produite, aussitôt est elle effective.

Dans le cas de la collecte numérique, la valeur c'est l'information glanée, amassée et exploitable pour différents buts. Elle vaut bien sûr par ce que l'on peut en faire, mais son exploitation peut être différée, elle peut être stockée.

Dans les deux approches, le produit c'est nous. Dans le cas de l'audience, c'est même un peu plus nous, car c'est directement notre attention qui est visée, sans intermédiaire.
Dans le cas de la collecte d'information, c'est indirectement nous en quelque sorte, ce sont des informations sur nous. Une photo ne capture pas au sens d'enlever, une partie de soi-même. Et la présence de l'utilisateur n'est plus indispensable pour l'exploitation des données collectées.

C'est le fait que l'information soit exploitable sans forcément ceux qui l'on fournie, qui décuple ses possibilités de valorisation par rapport à l'audience, qui elle, restera seulement de l'audience.

---
Le procédé connecté est forcément personnalisé, et à un moment donné ces informations existent, contrairement au non connecté qui fonctionne par diffusion.

La valorisation de la collecte est une volonté, mais le stockage de l'information, elle, est nécessaire au fonctionnement de ces services connectés, ne serait-ce que le temps d'une session d'utilisation.

Et du moment que ces informations existent, se pose effectivement le problème de leur utilisation, du fait qu'elles sortent du contrôle de l'utilisateur, là où l'audience ne pouvait être sur-exploitée.

Qui ou quoi pourra garantir leur dépersonnalisation et leur légale utilisation ?

Il y a en premier lieu le côté personnel de ces données, et comme déjà dans certains métier, il y a lieu de construire une déontologie autour de la protection et du devenir de ces informations.

Des procédés techniques tels que le chiffrage peuvent également assurer une meilleure confidentialité de ces informations.

Est-ce qu'un avocat, un journal, un psychanalyste ne font pas aussi du business ? Et pourtant, ils ont tous accès à des informations hautement confidentielles concernant leurs clients, leurs sources ou leurs patients.

Aujourd'hui notre dossier médical est informatisé, avons nous peur qu'on le communique illégalement à une compagnie d'assurance ?

Bergame a écrit:Google, Facebook, etc. sont propriétaires des données "personnelles" que les individus leur confient. Ils peuvent donc les revendre ou les mettre à disposition sous forme de licence, etc. Aujourd'hui, un profil Facebook moyen, ca se vend déjà $50... Et bien sûr, ces données sont personnalisées, puisque les utilisateurs ont contractuellement autorisés Facebook à les utiliser -et qu'elles seraient beaucoup moins intéressantes si elles n'étaient pas personnalisées.
Là dessus, je ne sais pas ce que stipule les liens contractuels entre les utilisateurs et Facebook, je n'y suis pas, mais je ne pense pas que les données personnelles soient exploitables comme cela. Pour le service Gmail de Google par exemple, il est clairement indiqué que les données ne sont utilisées que statistiquement et de manière dépersonnalisée. Au mieux, on pourra nous mettre en relation automatiquement avec une publicité.
Et donc je suis très dubitatif sur le fait qu'on pourrait vendre un profil Facebook non dépersonnalisé, à moins de le pirater. On peut toujours soupçonner qu'une utilisation frauduleuse puisse être faite par les services concernés, mais il faudrait alors soupçonner toutes les professions qui peuvent avoir des informations confidentielles entre leur mains.

Du moment que l'information existe, est diffusée et est conservé, elle est potentiellement exploitable d'une manière malveillante. Et qui sait comment seraient exploitées ces informations si demain elles étaient saisies par une dictature, utilisées par une entreprise peu scrupuleuse, s'il y avait une fuite ou un piratage massif.

C'est le procédé connecté qui veut cela, il y a nécessairement des traces, des données de connexions, des informations stockées pour le fonctionnement des services.

Cela veut dire qu'il faut faire attention aux différents niveaux de visibilité des informations que l'on fournit sur le net. En gros, il faut toujours se poser la question de si l'on est prés à assumer tel niveau de visibilité pour telle information.

Aujourd'hui, certains gros mastodontes profitent de cet espace encore mal protégé ou réglementé pour faire en sorte qu'ils puissent continuer à l'exploiter comme ils le font, en nous proposant effectivement le pacte faustien de la gratuité qui pourrait demain, s'il n'y a pas de mobilisation particulière, ne plus avoir d'alternative.

Sur certaines de tes inquiétudes, autant je comprends le côté « dangereux » que des données personnelles tombent entre de mauvaises mains, autant j'ai encore du mal à voir le signal d'alarme que tu tires concernant l'exploitation de données factuelles dépersonnalisée.

Bergame a écrit:Pour être concret, et comme l'a rappelé neo, la CNIL a récemment demandé des comptes à Google quant à son utilisation des données personnelles, la réponse a été "va te faire voir".
La requête en question de la CNIL concerne « le droit à l'oubli » ou comme l'a dit neo, « le droit de regard quant à l'empreinte numérique.
Cela concerne son moteur de recherche qui référence les contenus et non pas les contenus eux-mêmes. Ainsi, une personne devrait pouvoir demander aux moteurs de recherche de ne plus voir certains contenus référencés depuis son nom, contenus non protégés car a priori accessibles publiquement, qui font l'objet d'un indexage automatisé. Le litige porte sur le côté mondialisé et sans frontière de la mesure. Cela pose bien entendu le problème de l'accès à l'information, de la censure, des contenus diffamatoires ou socialement gênants, des homonymes, l'un voulant être visible et l'autre non, de qui doit faire le gendarme par rapport à l'accès et l'existence des contenus, ...
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Message par kercoz Mer 20 Jan 2016 - 12:14

En Sociologie éthologique, on dit que: "toute interaction est une prise de risque". Ce qui était vrai dans un groupe réduit, qui gardait en mémoire" toute action ou dire d' un individu, ce qui donnait de la valeur à ce dire et à cet acte, ne le serait plus sur la toile?
Cette approche est curieuse ou du moins , elle interpelle et demande qu'on s' y penche.

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Message par Bergame Mer 20 Jan 2016 - 15:33

Courtial a écrit:Je dois partager ton pessimisme (que je crois voir pointer) sur les effets que peut produire le constat de la fausseté de ces vues, en termes empiriques, même si le constat est fait par un organisme (Davos) dont le bolchévisme échevelé n'était pas apparu comme le trait dominant. Car comme tu l'insinues (à moins que je ne surlise), la réponse est toute prête : ça ne marche pas parce qu'on est trop socialiste, trop étatiste, trop autoritaire : ce n'est pas la destruction des emplois qui fâche, c'est qu'il n'y en a pas assez, de destructions, encore trop de contraintes, trop d'Etat, trop de peuple.
Je ne sais pas trop ce que je veux dire. En d'autres occasions, ce pourrait être cela, oui, mais ici, je crois que je veux dire deux choses :

D'abord, que l'idéologie tient de moins en moins bien. Les principes du dogme sont peu à peu remis en cause. Je ne lis plus beaucoup de croyants en l'efficacité du marché pour faire baisser les prix, par exemple, ce qui était l'argument central de la grande période de libéralisation des années 90-2000. Aujourd'hui, l'argument premier du libre-marché, c'est l'innovation. Avec la question récurrente qui est : Avons-nous vraiment besoin de toutes ces innovations ?

D'ailleurs, parenthèse, nous, nous n'en avons peut-être pas franchement besoin, mais l'économie, si. Par exemple, tous les objets connectés, nous sont-ils vraiment utiles ? Prenons la montre connectée, qui constitue un peu l'avant-garde de ce marché : Ca ne décolle pas, les vente sont très faibles, manifestement les gens ne sont pas très intéressés. Peu importe, l'industrie ne peut que s'obstiner et elle finira bien par trouver l'application qui va lancer le marché, au moins pour cette raison toute simple -j'y reviens donc- : En contrepartie des menus services que les objets connectés vont nous rendre, la masse d'informations sur nos habitudes quotidiennes et autres (santé en particulier) qu'ils seront en mesure de collecter est un formidable gisement de valeur. Donc on va bien finir par nous en faire acheter, des objets connectés ! Et s'il le faut, on nous les refourguera gratuitement ! Par pure philanthropie !...
Ce qu'il faut comprendre avec la Big Data est que le business est actuellement en train de créer un nouveau marché -comme il l'a toujours fait, du reste. D'une certaine manière, ta métaphore est juste, quid, les réserves sont déjà là, disponibles, l'industrie, actuellement, n'est jamais qu'en train de forer et d'installer les pipelines qui exploiteront ce qu'on appelle en effet "l'or noir du XXIe siècle". Il se trouve simplement que cette matière première-là, c'est nous.  Grosse donnée - Page 2 4017359721   Bon, mais j'admire le stoïcisme de ceux que cela indiffère, puisque, comme déjà dit, on n'y peut sans doute pas grand-chose.

Donc l'idéologie tient de moins en moins bien. Et comme tu le dis, Courtial, la théorie de la destruction créatrice a très longtemps été un pilier du dogme, parce qu'elle avait ce grand avantage de justifier les crises cycliques de l'économie capitaliste : "C'est bien les crises, du point de vue de l'économie, ca élimine la mauvaise graisse et réinjecte du sang neuf." Cependant, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne nouvelle. Puisque l'idéologie a aussi ce sens de voiler, d'euphémiser le pouvoir. Le retrait du voile signifie peut-être aussi que le pouvoir se montre peu à peu dans sa leviathanesque nudité. Et qu'un pouvoir qui n'a pas besoin de se justifier, c'est un pouvoir... qui n'a pas besoin de se justifier. En somme, j'ai peur que ce qui était, il y a 30 ans un slogan de Thatcher, soit simplement devenu notre réalité : Il n'y a plus d'alternative. Dès lors, pourquoi continuer à se cacher ? Assumons, et allons-y gaiement.

Et la seconde chose que je veux dire, je crois, et que je répète sous différentes formes, c'est le contraste pour moi saisissant entre le pouvoir de ce qu'on commence à appeler les TGE (Très Grandes Entreprises) et le pouvoir des Etats. D'une part, l'Etat est asphyxié financièrement, puisqu'une grande part des échanges commerciaux échappe à son contrôle. Il est donc contraint de réduire toujours plus sa voilure, et perd toujours davantage de capacité de contrôle et de contrainte sur les acteurs économiques. Cette incapacité le rend toujours plus perméable aux critiques quant à son inaction et son incapacité à défendre les intérêts des citoyens-électeurs. Moins il peut en faire, plus on lui reproche son inaction, et plus on exige de lui qu'au regard de son inefficacité, il réduise la voilure. Ceci, tout en continuant à lui imputer des responsabilités, néanmoins. C'est tout de même d'une ironie féroce comme les acteurs économique continuent de rendre l'Etat responsable de la situation économique des citoyens ! "C'est nous qui créons des emplois, c'est nous qui sommes le moteur de l'économie et toute intervention de l'Etat constitue une entrave potentielle à la dynamique que nous créons. Surtout, que l'Etat n'intervienne pas dans l'économie, les résultats seraient déplorables ! Mais en revanche, c'est à l'Etat de former les individus et de garantir leur employabilité. Et si demain la révolution technologique que nous initions vous laisse sur le carreau, bonnes gens, vous saurez à qui il faut vous en prendre !" Privatisation des bénéfices, socialisation des coûts, et un Etat qui n'a même plus la force de sortir de ce marché de dupes. A son chevet, une armée de médecins de Molière qui, diagnostiquant une faiblesse du sang, prescrivent saignée sur saignée.

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Message par Bergame Sam 17 Déc 2016 - 13:33

Ailleurs, je me demandais donc si le Marché, lui aussi, n'était pas entré dans une nouvelle ère.

Parce que, effectivement, jusque dans les années 2000, l'analyse qui prévalait -et qui prévaut toujours aujourd'hui, je pense- c'est que le Marché déteste l'instabilité. Les acteurs économiques sont des entités très rationnelles, nous disait-on, qui fondent leurs grandes orientations stratégiques d'après les prévisions qu'elles établissent à 3,10, 20, 50 ans. Du reste, le boom des logiciels de gestion et, en particulier, d'aide à la décision, dans les années 90-2000, ne repose que là-dessus : Aider les entreprises à faire des prévisions les plus fines possibles quant à l'évolution d'environnements hyper-complexes.

Or, dans la logique de cette analyse, le Marché, en particulier, déteste l'instabilité politique. Comme on le sait, c'est la bête noire du Marché, ca, la politique. Parce que la politique a pour finalité d'imposer, par la contrainte, des règles valables pour tous -y compris, donc, les acteurs économiques. A la limite, que le politique intervienne dans l'économie si ce n'est que pour fixer les règles du jeu économique, ce n'est pas trop grave. Les problèmes adviennent quand :
- Le politique arbitre entre l'économie et la société, pour faire simple (et par exemple se met en tête de redistribuer une partie de la plus-value aux "stakeholders" de l'Entreprise, et puis quoi encore ?)
- Le politique modifie les règles du jeu économique.

Et c'est là que résident les deux problèmes que le Marché entretient avec la démocratie. En effet :
1. Parce qu'elle consiste en un régime où les citoyens élisent leurs dirigeants, il y a toujours le risque que les dirigeants élus veulent "rendre" ce qu'ils doivent à leurs électeurs, et prennent des décisions qui consistent en pratique à leur redistribuer une part de la valeur ajoutée
2. Parce qu'elle laisse toujours ouverte la possibilité de changements de majorité, avec l'arrivée de nouveaux dirigeants au pouvoir, susceptibles de modifier ce qu'ont fait les précédents et de changer les règles du jeu.

Voila pourquoi le Marché a œuvré pour lisser tout ce que la démocratie peut avoir d'imprévisible : En faisant la promotion de dirigeants dits "responsables", en atténuant autant que possible la polarisation droite/gauche, en soustrayant les institutions chargées de la (dé-)réglementation des marchés à l'influence des électeurs (ce sont toutes les "autorités indépendantes" qui ont été chargées de libéraliser chaque secteur économique l'un après l'autre, depuis 20 ans), et même en co-créant, patiemment, une entité politique supra-nationale, ayant la primauté législative et juridique sur les Etats nationaux, mais dont les centres de décision sont totalement soustraits aux regards des citoyens-électeurs. Et tout cela en la dénommant "démocratie", et en faisant la promotion des "valeurs démocratiques" à travers le monde ! Un rêve de philosophe-roi, l'une des plus belles approximations du Conseil Nocturne de l'histoire, il faut quand même le souligner.

Donc. Tout cela pour dire que l'analyse générale était que le Marché détestait l'instabilité, et qu'il œuvrait sur tous les fronts afin de maitriser l'incertitude et rendre le complexe prévisible.
Mais, d'abord, comme chacun sait, l'économie a tendance à se financiariser. Et au sein de la communauté financière, on a tendance à envisager l'incertitude un peu différemment. Elle est en effet synonyme de pertes possibles, mais aussi de gains possibles. Et plus l'incertitude est élevée, plus les pertes sont potentiellement importantes, mais les gains aussi. En somme, on a longtemps considéré que le Marché craignait la volatilité. Mais la prise de risque étant devenue la norme, la volatilité est aujourd'hui davantage vue comme une opportunité que comme une menace.
Ensuite, le Marché n'en a pas pour autant abandonné le principe de réduire l'incertitude, bien sûr que non. En fait, tout ce qui précède dans ce topic consacré à la Big Data doit nous inciter à considérer que, désormais, il envisage simplement l'incertitude à un autre niveau. Il ne s'agit plus de politique, il ne s'agit plus de changements de majorité au sein de tel ou tel gouvernement, il ne s'agit plus du comportement de l'Etat instituant de nouvelles règles du jeu ou révisant les règles précédemment édictées, il s'agit de rendre prévisible le comportement de l'individu. De vous et moi. C'est cette incertitude-, aujourd'hui, que le Marché s'efforce de réduire.

Dès lors, on peut tout à fait imaginer qu'au niveau macro, si l'on peut dire, le Marché accepte et intègre parfaitement l'"instabilité". Qui devient alors génératrice d'opportunités, aussi longtemps du moins qu'au niveau micro, on peut prédire comment cet individu-ci va se comporter au sein du chaos. L'incertitude engendrée par l'instabilité du comportement des masses n'a que peu d'importance si l'on maitrise l'incertitude liée au comportement de l'individu.

C'est là où on en est. Cette semaine, j'apprenais que l'un des projets stratégiques sur lequel travaille Orange consiste à prédire l'humeur de ses clients. Vous vous rendez compte ? L'humeur !
C'est pour ca, que, bon, l'opposition rationalité/irrationalité, ca n'a plus aucun sens. Même les affects, même les émotions sont prédictibles, aujourd'hui.

Et alors, là-dedans, dites-moi un peu, amis libéraux : Où donc prend place votre Liberté ? Aujourd'hui, la menace qui pèse sur la liberté individuelle, elle émane du Marché. Et il s'agit d'une menace réelle et concrète, pas la menace d'un Léviathan fantasmé.

Bon. Nous allons très durement payer 40 années d'aveuglement idéologique.

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