Est-il impoli d'affirmer une vérité ?

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Message par Ataraxie Lun 20 Juin 2016 - 18:16

Lorsqu'autrui énonce ce qui est pour lui une vérité – et qui n’a pas cédé à cette tentation ? – ce à quoi son interlocuteur a immédiatement accès n’est rien d’autre qu’une affirmation. Et c’est bien problématique. Car si jamais, comme je le crois, il existe une implication réciproque entre l’énonciation d’une vérité et l’acte d’affirmation, il devient impossible d’énoncer une prétendue vérité à quelqu’un sans chercher par la même occasion à agir sur lui. Il est donc légitime que, se sentant l'objet non-consentant de cette action, la personne concernée commence par résister, considérant qu’en affirmant ce que nous lui affirmons nous faisons usage du caractère contraignant de la vérité 1) pour forcer sa pensée et 2) pour le mettre en position d’ignorant face à nous. Sachant par ailleurs, que chaque jour qui passe montre que la chose la mieux partagée du monde n’est pas le bon sens mais l’orgueil, il y a toutes les chances pour que les deux interlocuteurs s’engluent, sous le faux prétexte de la discussion, dans un stérile conflit d’égo : « Mais t’es qui pour dire aux autres (et surtout à moi) ce qui est vrai ?! » Conflit dans lequel le discernement du vrai et du faux est dégradé en un alibi ridicule qu’il est bon d’entretenir seulement pour la convenance. En réalité, faisant coquettement mine de discuter, les opposants cherchent plutôt à emporter une victoire symbolique (c’est à dire langagière) l’un sur l’autre ou au moins à parvenir à se neutraliser pour ne pas perdre la face. D'où cette question incongrue : est-il impoli d'affirmer une vérité ? Incongrue parce que, pour être pertinent, le qualificatif « impoli » doit ici signifier autre chose que « grossier » ou « inconvenant ». Il doit signifier « indifférent aux conséquences néfastes de ses propos sur les relations », et cette indifférence peut a priori être tout à fait compatible avec l'amour de la vérité. Elle implique aussi de choisir de négliger cette évidence que se parler ne consiste jamais seulement à se transmettre des informations mais aussi à vivre une relation ensemble. De ce point de vue, les deux « impolitesses » que j’ai mentionnées (mettre l’interlocuteur dans une position d’infériorité en voulant soit forcer sa pensée soit le placer dans le rôle de l’ignorant) mériteraient d’être étudiées plus attentivement dans le contexte d’une discussion critique. Plutôt que de juger les comportements des uns et des autres, ce serait mieux, je crois, de confronter la signification et l'effet de trois énoncés qui se distinguent uniquement par leur modalisation, par exemple : « Dieu existe », « J’affirme que Dieu existe » et « Je pense que Dieu existe ». Que fait-on quand on profère ces énoncés et que signifient-ils ? Finalement, certains problèmes attribués à la vérité ne seraient-ils pas dus en réalité aux affirmations ?
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Message par euthyphron Lun 20 Juin 2016 - 19:17

Je suis la règle que tu proposes.
Des trois énoncés, le plus impoli semble "j'affirme que Dieu existe". En effet, il met l'accent sur l'énonciateur d'une façon très égocentrique, comme si le fait qu'il affirme une proposition devait rendre cette proposition crédible et intéressante, plus que ne le ferait la proposition elle-même.
En second, "Je pense que Dieu existe", à quoi l'on a envie de répondre, pas très poliment, que ce n'est pas ça qui va le faire davantage exister.
Enfin, "Dieu existe" pose bien des problèmes épistémologiques, mais semble-t-il, pas de comportement. Ce n'est ni poli ni impoli, c'est une information.
Et pourtant, "Dieu existe" risque fort de très mal passer.
C'est que donner cette "information" présuppose que l'on est mieux placé que son interlocuteur pour le savoir. C'est donc s'arroger une autorité dont il y a fort à parier qu'elle est indue.
Il me semble qu'on peut généraliser. Dire la vérité est impoli dans deux cas.
Le premier, bien connu, est de dire une vérité blessante pour celui qui l'entend.
Le second est de dire la vérité par voie d'autorité sans y avoir droit.
As-tu en vue autre chose?

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Message par Bergame Lun 20 Juin 2016 - 19:40

En second, "Je pense que Dieu existe", à quoi l'on a envie de répondre, pas très poliment, que ce n'est pas ça qui va le faire davantage exister.
C'est vraiment intéressant parce que je pense que j'insiste beaucoup, dans mes différentes contributions, sur la prise en charge de mon discours. J'écris beaucoup de "je pense que", "il semble que", "il apparaît que", "pour ma part", "je crois que", "manifestement", etc. Précisément toujours afin de laisser la possibilité à l'autre d'avoir une opinion, une croyance différente.
Et je découvre donc que pour certains de mes interlocuteurs, c'est plutôt pas très poli -et qu'à ce genre de précautions, on a envie de répondre pas très poliment. C'est fascinant, vraiment.

Mais "Dieu existe" n'est pas une information, c'est une croyance. Cela me semble quand même très différent. Donc bien entendu que "Dieu existe" introduit tel quel dans une discussion, et introduit comme une information, ne peut que poser problème à autrui -du moins, à tous ceux qui ne croient pas en l'existence de Dieu, et il me semble qu'il y en a quelques-uns. C'est un coup de force, en quelque sorte.

Du reste, c'est vraiment assez impressionnant -pour moi !- que le sujet ayant pour titre : "Est-il impoli d'affirmer une vérité ?", l'exemple choisi puisse être : "Dieu existe".

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Message par Rêveur Mar 21 Juin 2016 - 0:13

Ataraxie a écrit:Elle implique aussi de choisir de négliger cette évidence que se parler ne consiste jamais seulement à se transmettre des informations mais aussi à vivre une relation ensemble.

  On ne dit jamais ce que ça signifie "se transmettre seulement des informations". J'avais entendu la même chose à propos de la prétention à l'universalité de la langue anglaise (une vidéo avec Chomsky, si je me souviens bien). On fait comme s'il existait des idée objectives arrangées d'une manière déterminée telle que ceux qui les entendraient les comprendraient parfaitement, qu'ils auraient les mêmes idées à l'esprit, et les mêmes pensées... C'est avec les ordinateurs que l'on parle le plus proprement de ces informations - mais finalement, ne faisons-nous donc pas comme si nous étions nous-mêmes des ordinateurs ? - comme si, comme pour les ordinateurs, nous connaissions parfaitement le mode de pensée des humains (alors qu'il y a une multitude de sciences, psychologiques, sociales, etc. pour ça), et pouvions réduire toutes nos pensées à une forme pure selon ce qu'on sait être la pensée de l'homme. Mais on ne le sait pas. Un ordinateur, on sait quelles informations lui donner, parce qu'on sait comment il les traite, d'ailleurs c'est un peu nous-mêmes qui les traitons. Mais comment nous, nous fonctionnons... Quand on parle, on ne fait jamais qu'envoyer un son qui signifiera quelque chose pour quelqu'un d'autre, sans qu'on sache quoi - et on ne peut que le deviner à travers ses réactions. Platon a beau dire, les âmes ne se parlent jamais vraiment, elles essaient, mais il n'en demeure pas moins qu'elles doivent toujours reconstituer en quelque sorte la pensée, la signification. Bref, les informations, ce sont avant tout, non pas les formes premières de la pensée, à quoi elle se réduit, en quoi elle se résout, mais des formes identifiées comme produisant des réactions déterminées, des formes telles que, non seulement les idées signifient quelque chose pour nous (nous et pas l'interlocuteur, ou pas de la même manière), mais la forme de la pensée, les relations déterminées qu'on y génère ont une signification qu'on a apprise, qui correspond à sa culture, même profondément implicite, à son rapport à la réalité et aux autres. Plus simplement, les informations ont avant tout une valeur d'utilité. Et l'interprétation "informative" est davantage une simplification, une synthétisation de ce qui se passe.
  Or tout ceci montre bien que si on informe, on cherche en somme à se faire comprendre, on entre dans le jeu de la langue qui permet une relation entre les hommes.
  L'information serait alors plutôt la pensée qui serait vouée à être réutilisée, qui serait donnée comme on donne une pièce de puzzle. Mais transmettre une pensée, ce n'est pas la donner toute brute, comme je l'ai dit : c'est se manifester à un autre (généralement par des sons ou des taches d'encre) de sorte à ce qu'une certaine pensée se forme en lui ; c'est créer une occasion pour une certaine signification, pour une certaine pensée. En ce sens on tyrannise en modifiant l'esprit (ou ce qu'il s'y passe) d'un autre ; encore que ce soit en dernière instance lui qui interprète, et qu'on ne lui donne jamais qu'une occasion, sans savoir précisément quelle pensée sera générée.
  Mais dans la communication, on manifeste sa présence. Ce n'est plus l'environnement indifférent qui inspire des idées à l'interlocuteur, mais c'est quelque chose dont on sait qu'il veut impacter sur sa pensée, sur son esprit. Donc le "j'affirme" est toujours présent implicitement ; ou plutôt, le "il affirme" - car en définitive, c'est dans l'auditeur, même indéterminé quand on s'exprime sur Youtube par exemple, que tout se résout. Il a dit qu'il est venu, qu'il a vu, et qu'il a vaincu.
  Dans toute information comme dans toute communication, il y a toujours ce "il", ce communiquant qui veut que des pensées déterminées soient inspirées à des interlocuteurs, généralement indéterminés (le lecteur quelconque de l'article). Même le journaliste veut - que l'on ait des idées d'évènements advenus parce qu'il est payé pour ça, mais aussi parce qu'il aime inspirer ces idées, comme d'autres des idées d'un autre type mais encore des idées. Le communiquant agit sur l'interlocuteur et le veut, et l'interlocuteur sait qu' "il" le veut.

  ...Le mot seul d'<< information >> vaut plus que tout ce discours bien confus - in-form-ation.

  Mais quel est vraiment le problème, en définitive ? On nous fait percevoir des liens possibles d'une idée à une autre, avec l'idée qu'<< il >> a inspiré ce lien. Étendant le champ de sa connaissance...
  Donc l'autorité illégitime. - Mais de quoi s'agit-il précisément ? A-t-on crainte de celui qui nous parle ? de ne pas penser ce qu'il veut qu'on pense ? de sorte qu'on sait qu'une pensée nous sera imposée par force ? Ou une peur de se trouver inférieure, à travers la discussion ?

  Est-ce qu'au fond on ne répudie pas comme égocentrique ce qui serait une pure honnêteté intellectuelle ?


Dernière édition par Rêveur le Jeu 23 Juin 2016 - 11:07, édité 1 fois

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Message par Invité Mar 21 Juin 2016 - 0:41


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Message par kercoz Mar 21 Juin 2016 - 9:27

Bergame a écrit:Elle implique aussi de choisir de négliger cette évidence que se parler ne consiste jamais seulement à se transmettre des informations mais aussi à vivre une relation ensemble.

Une autre évidence cachée, c'est que l' interaction peut avoir plus d' importance que l' information. L' information est relative à l ' informateur. Le cri d' alarme d' un corvidé dominant agé fait décoller la troupe de façon immédiate.....Le même cri de la part d' un juvénnil ne provoque qu' une alerte visuelle nécessitant une confirmation....
L' expression on n' apprend pas à un vieux singe ...est tout a fait exacte....L' apprentissage de l' accès un peu compliqué à une nourriture par un singe, ne peut être transmis qu' à un singe plus jeune, jamais à un singe plus vieux.

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Message par Ataraxie Jeu 23 Juin 2016 - 1:28

Rêveur a écrit:
Bergame a écrit:Elle implique aussi de choisir de négliger cette évidence que se parler ne consiste jamais seulement à se transmettre des informations mais aussi à vivre une relation ensemble.
Il y a erreur sur l’auteur. C’est de moi.

Euthphyron a écrit:Il me semble qu'on peut généraliser. Dire la vérité est impoli dans deux cas.
Le premier, bien connu, est de dire une vérité blessante pour celui qui l'entend.
Le second est de dire la vérité par voie d'autorité sans y avoir droit.
On est d'accord. L'énonciation de la vérité peut dégrader les relations. Certains diraient d'ailleurs qu'elle ne peut QUE les dégrader.

La politesse, si j’en crois les spécialistes, serait précisément l’ensemble des moyens voués à créer et maintenir l’harmonie relationnelle ainsi qu’à atténuer les causes de conflits. Si dire la vérité dégrade les relations, il faudrait peut-être choisir entre dire la vérité ou être aimé (si on peut appeler ça « aimer »). En tout cas, la théorie de la politesse dont je parle est inspirée  des travaux d’Erving Goffman puisqu’elle postule que dans les interactions, comme celles que nous avons ici, les participants engageraient deux faces : une face positive qui correspond à leur image sociale, leur désir d'être aimé et reconnu par les autres (pas par tous en ce qui me concerne) et une face négative qui renvoie plutôt à leur liberté d'agir, de profiter de leur temps et de leurs ressources matérielles sans entrave (plus ou moins le « territoire » chez Goffman). Manifestement, on nous a enseigné qu’il ne fallait jamais attenter à l’une ou l’autre des faces de l’interlocuteur. Nous sommes donc devenus maîtres dans le maniement de procédés linguistiques de politesse expressément destinés à deux choses : une série d'entre eux à flatter l'une et/ou l'autre de ces faces (remerciements, vœux, invitations, compliments, salutations) et une autre série, plus diversifiée, qui servirait à atténuer les atteintes à l'une et/ou l'autre de ces faces. Parmi les différents procédés de cette série, on peut citer :
-les minimiseurs : où il s'agit de minimiser l’atteinte, comme par exemple dans « T'as une petite cigarette ? » où « petite » ne signifie pas petite en taille (et tout le monde le sait) mais sert à minimiser une atteinte faite aux ressources personnelles de notre interlocuteur ;
-les justifieurs : où il s'agit de rationnaliser une atteinte pour la justifier, comme dans « Je viens de rater mon train, tu pourrais me ramener en voiture ? » où l'on justifie une atteinte faite au confort de notre interlocuteur ;
-les désarmeurs : où l'on adopte soi-même une attitude négative à l'égard de l'atteinte qu'on commet. Par exemple « Ca m'ennuie beaucoup de te demander ça mais est-ce que... » ;
etc.

Si donc l’affirmation d’une vérité est impolie, elle l’est parce qu’elle constitue une atteinte à l’égalité et à la liberté de l’interlocuteur en tant que celles-ci feraient partie de ses faces.
En même temps, cette théorie prévoit que les interlocuteurs ne peuvent jamais éviter toute atteinte et qu’ils recourent dans ce cas à ces procédés pragmatiques d’atténuations ; ainsi l’affirmation de la vérité devient polie si l’atteinte est atténuée. On peut donc éviter d’énoncer directement une vérité tout en laissant entendre qu’on en énonce quand même une.
Or, une telle approche revient à dire que la liberté et l’égalité n’existent pas dans les discussions indépendamment des conventions de politesse qui les imposent, que les participants ne connaissent de ces notions qu’une règle qui dit « On ne doit pas… » et, qu’ayant obéit à cette règle, ils s’imaginent avoir fait tout ce qu’il y avait à faire pour respecter vraiment la liberté et l’égalité de leur interlocuteur.
Je suis sévère car : que peuvent-ils faire de plus ?

Euthyphron a écrit:En second, "Je pense que Dieu existe", à quoi l'on a envie de répondre, pas très poliment, que ce n'est pas ça qui va le faire davantage exister.
Les modalisations du type "je pense que", "à mon avis", "il semble que", etc. constituent une autre grande catégorie de procédés pour atténuer les atteintes faites aux faces de l'interlocuteur. Cet énoncé est donc celui qui respecte le plus les faces de l'interlocuteur.
Au sens littéral, « penser que » signifie ici que le jugement qui suit est le fruit d'une déduction à partir d'indices ; donc nécessairement un jugement dépourvu de certitude. Ce qu’on appelle tout simplement une opinion.
Au sens pragmatique, cette incertitude exprime autre chose ; elle indique à l’interlocuteur qu’on lui fait la politesse de ne pas heurter ses faces.
Le problème est de savoir de quoi cette expression de l'incertitude est la manifestation : d'une obéissance aux règles de politesse ou d'une incertitude réelle ?
S'il s'agit d'une incertitude réelle, l'énonciateur se montrera ouvert à ce qu'on cherche des preuves qu'il a tort, quitte à finalement ne pas en trouver.
S'il s'agit d'une obéissance aux règles, ça risque de mal se passer. On se rendra compte qu'il n'était pas du tout ouvert à tout examen critique de ce qu’il énonçait alors même que c’est ce qu’il signifiait. Et ton commentaire, Euthyphron, va dans ce sens. C'est l'idée qu’on ne veut jamais vraiment dire ce qu’on dit en disant « Je pense que ». Ce qui explique que beaucoup de gens ne ressentent pas la différence entre son absence et sa présence, entre « Dieu existe » et « Je pense que Dieux existe ».
Tu as donc raison mais je déplore que tu aies raison. Toutes ces expressions, "je pense que", "je crois que", "à mon avis", "je considère que"... devraient constituer une véritable panopolie d'instruments de travail pour des gens qui agissent comme s'ils étaient aptes à discuter philosophiquement de sujets compliqués.

Euthyphron a écrit:Enfin, "Dieu existe" pose bien des problèmes épistémologiques, mais semble-t-il, pas de comportement. Ce n'est ni poli ni impoli, c'est une information.
Et pourtant, "Dieu existe" risque fort de très mal passer.
C'est que donner cette "information" présuppose que l'on est mieux placé que son interlocuteur pour le savoir. C'est donc s'arroger une autorité dont il y a fort à parier qu'elle est indue.
C'est pour moi le plus impoli des trois. Il n’explicite aucune relation entre l’énoncé et son énonciateur et l’absence de l’énonciateur dans l’énoncé signifie que la vérité de ce qui est dit est indépendante de celui qui l’énonce. Aurait-on affaire à un « on » universel qui serait personne en particulier et tout le monde à la fois ? Oui, le locuteur parle comme un énonciateur universel. Il s'imagine qu'on peut parler en étant autre chose que ce qu'on est.
Par ailleurs, imaginons que je veuille demander au locuteur de justifier son énoncé. A priori, je lui poserai la question « Comment tu le sais ? ». Je traiterai donc son énoncé comme un savoir en faisant comme si « Dieu existe » équivalait à « Je sais que Dieu existe ». La grande différence avec « Je pense que Dieu existe » est que « penser que », tout comme « croire que », n’est pas interrogeable en « comment » mais plutôt en « pourquoi », tandis que pour « savoir que » c’est l’inverse :
« Comment penses-tu que Dieu existe ? » (pas ok) / « Pourquoi penses-tu que Dieu existe ? » (ok)
« Comment sais-tu que Dieu existe ? » (ok) / « Pourquoi sais-tu que Dieu existe ? » (pas ok)
Ce qui revient à dire que dans un cas on s’engage sur une justification sur les raisons (de penser que ou de croire que) alors que dans l’autre on s’engage dans une explication sur les moyens (de savoir que).
On a donc un locuteur qui produit un énoncé très générique en tant qu’énonciateur universel, qui dit ce qu’il dit non pas parce qu’il a des raisons de « croire que » ou de « penser que » c’est vrai mais parce qu’il a les moyens de « savoir que » c’est vrai.
L'un des procédés - semble-t-il universels selon les spécialistes - de politesse est l'humiliation de soi - d'ailleurs particulièrement développé dans la politesse asiatique. Chez nous, on se contente de ce qu'on appelle la modestie. Si l'auto-humiliation consiste à attenter soi-même à ses faces (faire son mea culpa par exemple) pour mettre autrui en position de supériorité ; la modestie consiste à ne pas flatter soi-même sa face positive et à refuser que les autres la flattent. Les énoncés de ce genre passeront difficilement la rampe de l'acceptable à cause d'un reproche d'immodestie.  

Euthyphron a écrit:Des trois énoncés, le plus impoli semble "j'affirme que Dieu existe". En effet, il met l'accent sur l'énonciateur d'une façon très égocentrique, comme si le fait qu'il affirme une proposition devait rendre cette proposition crédible et intéressante, plus que ne le ferait la proposition elle-même.
On a donc deux énoncés extrêmes : « Je pense que Dieu existe » qui obéit parfaitement à la règle d'atténuation des atteintes faites aux faces d'autrui (raison pour laquelle tu sembles t'en méfier) et « Dieu existe » qui transgresse une règle qui interdit de flatter ses propres faces (raison de son rejet). Il reste donc « J'affirme que Dieu existe » qui, paradoxalement, occupe une place intermédiaire pour moi.
Ce qui fait la particularité de cet énoncé est qu’il peut difficilement exister dans une discussion sans un contexte passé dans lequel l'existence de Dieu a été fortement niée. Condition beaucoup importante pour l'apparition des deux autres énoncés. Ainsi, en disant « J'affirme que Dieu existe » non seulement je dis qu'il existe mais, par-dessus tout, je veux montrer qu’en le disant je nie avec certitude toute négation ou tout doute à propos de son existence.
Par ailleurs, ce n’est pas une affirmation grammaticale comme dans « Dieu existe » mais une affirmation performative explicite qui rend ostentatoire la certitude du sujet quant au fait que la proposition contradictoire, « Dieu n’existe pas », est fausse. Cette relation entre l’énoncé et son énonciateur explique qu’à l’instar de « Je pense que Dieu existe », « J’affirme que Dieu existe » est interrogeable par « pourquoi » et pas par « comment ».
Je dirais donc que c’est un énoncé très polémique (à cause de « J'affirme que » qui existe pour s’opposer à un discours antécédent), il est même le plus polémique des trois, mais qu’en même temps il ne fait que rendre évidente une polémique qui ne s’accepte pas.


Dernière édition par Ataraxie le Dim 26 Juin 2016 - 14:02, édité 1 fois
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Message par euthyphron Jeu 23 Juin 2016 - 10:45

Je trouve ton exposé très intéressant et je n'ai pas d'objection à lui faire.
Quelques précisions cependant. Si la question est : "Des trois énoncés proposés, lequel est le plus impoli?" je n'ai pas d'autre réponse à donner que ma réponse favorite :"ça dépend!". Cela me semblait assez évident, car comment pourrait-on juger de la politesse (ou de quelque composition de signes que ce soit d'ailleurs) indépendamment du contexte?
Mais ce qui me semble intéressant, et à toi aussi apparemment, ce sont les distorsions de sens que produit le souci d'être poli, qui peuvent générer des effets comiques si on feint de prendre à la lettre ce qui est dit. Si on prend à la lettre "je pense que Dieu existe" c'est assez ridicule. Pourquoi transmettre une information aussi égocentrique? faudrait-il ainsi informer autrui de toutes les calembredaines qui nous passent par la tête? J'ai appris pour ma part (question d'éducation sans doute) que la politesse exigeait de ne pas se mettre en avant.
Ergo, personne ne prend une telle phrase à la lettre, tout le monde traduit soit par "Dieu existe, mais je ne l'affirme pas ouvertement pour ne pas heurter éventuellement ta sensibilité" soit par "je suis assez partagé sur la question mais je suis enclin à croire plutôt à l'existence de Dieu qu'à son inexistence".
La situation est inverse en ce qui concerne "Dieu existe". A priori, elle n'est ni polie ni impolie, elle dit "ce qui est", c'est tout. Sauf que la proposition "Dieu existe" peut légitimement être considérée comme fausse. L'impolitesse ici, selon le contexte probable, c'est de dénier par avance à l'interlocuteur la possibilité de ne pas être d'accord. Mais c'est une marque de politesse chez les chrétiens orthodoxes (et peut-être chez d'autres chrétiens) que de se saluer le matin de Pâques en disant "Christ est ressuscité", proposition dont il est aisé de démontrer qu'elle est mathématiquement inférieure ou égale en probabilité à la proposition "Dieu existe". Question de contexte là encore.
Ce qui m'intéresse aussi dans la question, et sur quoi tu sembles avoir quelque idée, concerne la relation entre la politesse et la valorisation du sujet, dont l'éminente dignité implique le respect de  sa liberté et de son égalité.

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Message par Bergame Jeu 23 Juin 2016 - 11:06

euthyphron a écrit: Si on prend à la lettre "je pense que Dieu existe" c'est assez ridicule. Pourquoi transmettre une information aussi égocentrique? faudrait-il ainsi informer autrui de toutes les calembredaines qui nous passent par la tête? J'ai appris pour ma part (question d'éducation sans doute) que la politesse exigeait de ne pas se mettre en avant.
Fascinant, vraiment. Le fait même de prendre en charge son discours, de commencer tout simplement la phrase par "je", si je comprends bien, est pour toi une façon de se mettre en avant, et donc une marque d'impolitesse. Rien que dans la forme, je dois donc être particulièrement impoli pour toi. Est-il impoli d'affirmer une vérité ? 3438808084
Ce serait extrêmement intéressant pour moi de savoir de quelle éducation tu parles -mais je ne veux certainement pas demander des éléments biographiques.

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Message par euthyphron Jeu 23 Juin 2016 - 11:16

Je te rassure, tu ne comprends pas bien.
C'est pour une autre raison que le premier mot de tes messages si en effet je te trouve fréquemment impoli. C'est pour la raison qu'il arrive fréquemment que tu ne respectes pas tes interlocuteurs.
Mais en disant cela je ne t'apprends rien je pense. cool-1614...

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Message par poussbois Jeu 23 Juin 2016 - 11:35

2+2=4

Est-ce impoli ? A l'évidence non, tout le monde doit en principe y avoir accès.

La diagonale d'un carré, c'est la racine carré du double de son côté.

Est-ce impoli ?
Là, faut voir. Si on n'a pas accès à la démonstration géométrique, oui, il y a de bonnes chances pour que les règles de politesses ne soient pas respectées, voire que je ne sois même pas lu.


C'est ce qui manque aux forums, c'est la charge de la preuve ou a minima, la démonstration par l'expérience. Nous ne pouvons ici-même qu'argumenter. Or, l'argumentation a ses limites et si elle affute notre sagacité et notre capacité rhétorique, ce n'est pas une philosophie pour autant. Lui manque l'expérimentation, la démonstration par l'exemple, la possibilité de la porter au jour le jour, à notre travail, dans nos loisirs, avec notre famille et nos amis, dans nos expériences intimes...

Je vois de plus en plus les forums comme un des exercices des moines tibétains : un exercice d'opposition rhétorique pour pouvoir pousser au bout un raisonnement. Devenir malin....


Pour la valorisation du sujet, nous en avons déjà longuement parlé, et le problème est que bien souvent, de sujet, il n'y en a qu'un. Un sujet narcissique qui joue avec son miroir et qui, en difficulté, ne va pas regarder son interlocuteur mais uniquement retourner le miroir. Miroir contre miroir, ne reste qu'un grand vide infini, lassant et obnubilant. Bien souvent ne veut pas dire toujours et c'est pour ça que je continue à venir. Il y a de vrais fulgurances d'idée que j'ai plaisir à croiser.

J'ai l'impression... je commence par cette modalité non pour atténuer, mais parce que c'est en cours d'élaboration et que je vous livre une pensée brute... que la première politesse serait la reconnaissance qu'il est impossible, ici-bas, de valider la moindre théorie philosophique, sociologique, politique, tout simplement parce qu'il est impossible de démontrer que cette théorie permet une vie meilleure, ou plus utile à la société. Mieux, un observateur extérieur pourrait même démontrer l'inanité de ses théories par notre incapacité même à nous comprendre et à nous respecter.
Tout ce que nous pouvons démontrer sur ces forums quels qu'ils soient, c'est qu'il y en a de plus malins, ou de plus violents que d'autres. Ce qui n'a jamais constitué une preuve en soi.

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Message par Bergame Jeu 23 Juin 2016 - 11:51

Que tu me trouves impoli, non, tu ne me l'apprends pas. Que je ne respecte pas mes interlocuteurs, si, bien sûr, euthyphron, tu me l'apprends. Cela te semble manifestement extraordinaire, mais j'ai bien l'impression, tout au contraire, d'être l'un de ceux, ici, qui respectent le plus profondément le discours et la pensée des autres. Mais je peux parfaitement comprendre que cela ne soit pas du tout évident pour toi -ou pour d'autres.
Cependant, évitons un énième règlement de compte, si tu le veux bien -ou faisons-le par mp ? Et restons-en, ici, à ce que tu dis.

Parce que tu dis bien :
Mais ce qui me semble intéressant, et à toi aussi apparemment, ce sont les distorsions de sens que produit le souci d'être poli, qui peuvent générer des effets comiques si on feint de prendre à la lettre ce qui est dit. Si on prend à la lettre "je pense que Dieu existe" c'est assez ridicule.
Peut-être. Mais faut-il comprendre qu'il s'agirait de feindre de prendre ce que dit l'autre au pied de la lettre précisément pour s'en moquer ?
C'est étonnant, tout de même, comme idée : Tu vois bien que l'autre a le "souci d'être poli", et néanmoins, tu feindrais de mal le comprendre pour te moquer de son ridicule -que tu as apparemment produit tout seul à ton propre usage !  Est-il impoli d'affirmer une vérité ? 2101236583 Avoue que c'est quand même tordu !

La situation est inverse en ce qui concerne "Dieu existe". A priori, elle n'est ni polie ni impolie, elle dit "ce qui est", c'est tout. Sauf que la proposition "Dieu existe" peut légitimement être considérée comme fausse [...] proposition dont il est aisé de démontrer qu'elle est mathématiquement inférieure ou égale en probabilité à la proposition "Dieu existe".
Exact. Ce n'est ni poli ni impoli, ca n'a pas même le souci d'être poli. C'est présenté effectivement comme une information, voire une vérité : "Voila ce qui est. Et charge à toi, bonhomme, de me démontrer, rationnellement, mathématiquement, le contraire -si tu le peux."

En fait, je crois qu'il y a deux problèmes différents qui se mêlent ici. Il y a la question de la politesse, bien sûr, la préservation de la face de l'autre pour le dire effectivement en termes goffmaniens. Et il y a une question épistémologique. J'avoue que je ne comprends même pas comment on peut prétendre faire de la question de l'existence de Dieu une proposition mathématique. Et j'avoue que je ne comprends pas comment on peut prétendre faire de beaucoup de choses des propositions mathématiques. C'est déjà une conception du monde bien particulière que celle qui consiste à le voir comme un objet mathématique. Est-ce que l'amour est mathématisable ? Est-ce que l'amitié est mathématisable ? Est-ce que la mort, la vie, sont mathématisables ? Et l'art ? Et la beauté ? Etc. etc.
Et la politesse ?


Mon message croise celui de poussbois, et je crois dire en grande partie quelque chose de similaire. Mais j'ajoute : Selon moi -pardon pour la mise en avant- il n'y a pas grand-chose de plus à apprendre sur ces forums qu'à vivre ensemble, qu'à discuter et échanger, malgré les egos et les différences. Mais c'est déjà énormément.

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Message par lanK Jeu 23 Juin 2016 - 12:43

"Une tulipe vient dans mon jardin
   Nom d’une pipe donnez moi la main !
   Je n’ai pas de main dit-elle
   Pour vous saluer
   Je n’ai pas de main dit-elle
   Et vous me fâchez
  Mais je suis polie je pense
   Et je peux faire la révérence
   Bien mieux que vous voyez-vous !
"
Anne Sylvestre
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Message par poussbois Jeu 23 Juin 2016 - 12:48

Oui, Bergame, nous disons sensiblement la même chose, et je ne t'ai personnellement jamais trouvé impoli. Agaçant, voir blessant, oui, mais on s'en était expliqué par MP de mémoire et tu fais effectivement parti de ceux qui lisent les messages pour ce qu'ils veulent (essayer de) dire. Et reconnaissons à Bergame sa forte capacité à créer des espaces de discussions ouverts.

Là où nous divergeons, c'est que je n'ai pas ton optimisme. Je constate au contraire de plus en plus d'incapacité à échanger, sans doute lié à la taille trop réduite du forum qui fait qu'on bute trop facilement et trop systématiquement sur les mêmes oppositions. Ceci dit, les autres forums ne vont pas mieux non plus donc... Je me demande de plus en plus si la place de la philosophie est bien sur internet. Je ne retrouve plus ce qui me plaisait précédemment : trouver des références, obliger à une certaine rigueur, rendre nécessaire la connaissance des auteurs qui comptent. C'est même tout le contraire, la pensée libre à la mode internet me fatigue de plus en plus. Communauté oui, mais pour faire quoi ?

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Message par Invité Jeu 23 Juin 2016 - 13:49

Les incapacités de lire, je les explique ainsi quant à moi :
* http://hackingsociopolitique.blogspot.fr/2016/02/individualisme-liberal-humanitaire.html
* http://hackingsociopolitique.blogspot.fr/2016/04/conditions-de-notre-individualisme.html
* http://hackingsociopolitique.blogspot.fr/2016/06/allez-couche-ou-les-effets.html
* http://hackingsociopolitique.blogspot.fr/2016/05/etat-culture.html
* http://hackingsociopolitique.blogspot.fr/2016/06/uniformisation-gnoselogique-ou-comment.html
* et, par-devers la longueur & le bruit de & sur ce topic : http://libertephilo.forumactif.org/t32-d-ou-vient-le-peu-de-succes-des-forums-philo

Cordialement

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Message par Ataraxie Jeu 23 Juin 2016 - 19:47

Euthyphron a écrit:Mais ce qui me semble intéressant, et à toi aussi apparemment, ce sont les distorsions de sens que produit le souci d'être poli, qui peuvent générer des effets comiques si on feint de prendre à la lettre ce qui est dit. Si on prend à la lettre "je pense que Dieu existe" c'est assez ridicule. Pourquoi transmettre une information aussi égocentrique? faudrait-il ainsi informer autrui de toutes les calembredaines qui nous passent par la tête? J'ai appris pour ma part (question d'éducation sans doute) que la politesse exigeait de ne pas se mettre en avant.
Ergo, personne ne prend une telle phrase à la lettre, tout le monde traduit soit par "Dieu existe, mais je ne l'affirme pas ouvertement pour ne pas heurter éventuellement ta sensibilité" soit par "je suis assez partagé sur la question mais je suis enclin à croire plutôt à l'existence de Dieu qu'à son inexistence".
Il est évident que si on s'intéresse à une sémantique pragmatique, il ne faut pas prendre pas l'interprétation littérale comme l'interprétation ultime. "La poubelle est pleine" signifie que la poubelle est pleine. Mais cet énoncé, qui n'est ni poli ni impoli en apparence, comme "Dieu existe", est en réalité un summum de politesse lorsqu'il sert à signifier "Descends la poubelle !" sans le dire directement. C'est un acte de langage indirect sur une échelle d'indirection qui serait à peu près la suivante : "Descends la poubelle" > "Tu peux descendre la poubelle ?" > "La poubelle est pleine". Donc, oui, prendre les énoncés en un sens littéral provoque des distorsions. A moins d'être un martien ou de mauvaise foi, on ne peut pas prétendre ne pas comprendre ce qu'il signifie pragmatiquement. Si celui qui à cet énoncé est adressé répond "Ah oui, t'as raison" et ne fais rien alors il sera très mal jugé. Car on part du principe que nul n'est censé ignorer que "La poubelle est pleine" signifie "Descends la poubelle !", que "Il y a des courants d'air" signifie "Ferme la fenêtre !", etc. Que donc les plus banals constats ou informations peuvent sans difficulté exister pour le seul but de signifier autre chose qu'un banal constat ou information. Pour agir. Nous ne voulons pas toujours dire que ce nous signifions. Et nous le savons intuitivement.  
C'est donc vrai qu'il faut commencer par interpréter "Je pense que Dieu existe" de façon pragmatique, disons contextualisée, plutôt que littérale. Mais ce que j'ai voulu évoquer, peut être rapidement en parlant d'instruments de travail, c'est que les expressions de ce genre ont littéralement des significations très intéressantes philosophiquement. Prenons par exemple le cas de "Je trouve que". Si "Je pense que Dieu existe" peut sembler ridicule dans un sens littéral, au moins ce sens veut dire quelque chose d'intelligible. Mais que dire de "Je trouve que Dieu existe" ? "Je trouve que", marque de politesse très utilisés, n'est même pas ridicule, il est simplement inintelligible ici. Que Dieu existe, n'est pas une chose dont on peut dire qu'on "trouve que" c'est ainsi. Et si on poussait l'analyse, on se rendrait compte que "Je trouve que" ne fonctionne pas, ou très mal, avec des propositions qui sont ce que certains philosophes appellent des "jugements de fait" : "Je trouve que Pierre est arrivé", "Je trouve que Sarkozy est divorcé", "Je trouve que sa voiture est une Renault", etc. Cette restriction sémantique n'existe pas avec "penser que" qui fonctionne avec les jugements de faits autant qu'avec les jugements de valeurs. Il y a donc un sens épistémique dans "penser que" qu'on peut décrire et qui reste irréductible au contexte.
Je ne suis pas pour autant littéraliste. Je suis trop au courant de la force du contexte pour ça. Mais il n'en reste pas moins qu'il y a plusieurs strates sémantiques.  

Euthyphron a écrit:Ce qui m'intéresse aussi dans la question, et sur quoi tu sembles avoir quelque idée, concerne la relation entre la politesse et la valorisation du sujet, dont l'éminente dignité implique le respect de  sa liberté et de son égalité.
Pour comprendre la relation entre la politesse et la valorisation du sujet il faut, plus largement, concevoir un "sujet social". Concevoir un "sujet social", c'est d'abord articuler le sujet avec un système social.
1) Déterminisme unilatéral du social sur le sujet. Le sujet est soumis au système. C'est l'ordre du système qui explique tout comportement ou phénomène individuel, ce qui implique que le sujet ne peut en aucun cas être un acteur mais qu'il est toujours un être passif à qui le système impose des normes de comportement qu'il ne fait que reproduire. A l'extrême, on pourrait dire que ce qu'on appelle "sujet" n'existe pas et qu'il s'agit d'une illusion. Notre conscience individuelle, notre espace intérieure, ne nous appartiennent pas. Ils appartiennent au système, à la société, à l'idéologie dominante, qui les habitent pleinement.

2) Déterminisme unilatéral du sujet sur le social. Le système est le résultat dissonant ou convergent, stable ou instable (peu importe) d'actions ou de décisions isolées menées par des individus solitaires, conscients et volontaires. Les normes ne sont pas contraignantes ; elles sont même contradictoires entre elles. Les sujets sont pleinement des acteurs. Ils font constamment preuve de stratégie dans leur comportement, ce qui montre que leurs actions ne sont pas réglées par des normes mais au contraire qu'elles sont téléologiques, orientées librement après un calcul conscient des fins et des moyens.

3) Déterminisme réciproque. La première approche serait trop totalitaire, la seconde trop individualiste. Un déterminisme réciproque impliquerait un compromis dans lequel le sujet est la fois produit et producteur du social, il accepterait de "prêter" une part de lui-même au système mais il resterait maître d'une autre part. On peut imaginer des notions comme "rôle", "face", "statut", "contrat de parole", "habitus", "rituels", "schémas d'action", "programme culturel" et d'autres qui seraient, selon les cas, des médiations entre le sujet et le social, des normes négociées et renégociées dans chaque situation, des contraintes souples, etc.

Pour une théorie de la politesse comme valorisation du sujet, j'exclurais la deuxième approche. Il reste la première et la troisième qui tente de traiter plusieurs questions : a) ce qui est d'ordre social se reproduit-t-il à l'identique chez tous les individus ? ; b) tout ce qui est d'ordre social est-il nécessairement contraignant ? ; c) si le sujet possède une part sociale pour autant ses actions et ses décisions sont-elles nécessairement des produits passifs du système ? Une théorie de la politesse invite à répondre oui à cette dernière question. Si l'on admet qu'il est problématique de considérer le sujet social comme pleinement acteur de ses interventions au sein de l'ordre social, ses actions de politesses, comme sa façon de parler en général, deviennent forcément dépourvues de caractère téléologique. Et, par conséquent, on en arrive à conclure que son respect de la liberté et de l'égalité chez l'interlocuteur est la reproduction d'un comportement attendu, l'obéissance à une norme dont il n'est pas acteur et par laquelle il vise seulement à satisfaire une attente sociale généralisée. Sans doute, faudrait-il aussi ajouter que dans ce cadre d'actions de politesse très réglées, la manière dont nous respectons l'autre dans sa liberté et son égalité ressemble à la manière dont nous respectons des préjugés.
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Message par Bergame Ven 24 Juin 2016 - 22:12

poussbois a écrit:Oui, Bergame, nous disons sensiblement la même chose, et je ne t'ai personnellement jamais trouvé impoli. Agaçant, voir blessant, oui, mais on s'en était expliqué par MP de mémoire et tu fais effectivement parti de ceux qui lisent les messages pour ce qu'ils veulent (essayer de) dire. Et reconnaissons à Bergame sa forte capacité à créer des espaces de discussions ouverts.
Là où nous divergeons, c'est que je n'ai pas ton optimisme. Je constate au contraire de plus en plus d'incapacité à échanger, sans doute lié à la taille trop réduite du forum qui fait qu'on bute trop facilement et trop systématiquement sur les mêmes oppositions. Ceci dit, les autres forums ne vont pas mieux non plus donc... Je me demande de plus en plus si la place de la philosophie est bien sur internet. Je ne retrouve plus ce qui me plaisait précédemment : trouver des références, obliger à une certaine rigueur, rendre nécessaire la connaissance des auteurs qui comptent. C'est même tout le contraire, la pensée libre à la mode internet me fatigue de plus en plus. Communauté oui, mais pour faire quoi ?
D'abord merci, poussbois.

Ensuite : Je comprends. A un moment, je l'ai déjà dit, je me suis rendu compte que ces forums ne "marchaient" pas comme je l'espérais. Et je crois comprendre que nous faisons tous, peu ou prou, cette expérience.
Mais précisément, c'est une expérience. Et je pense aujourd'hui que ce n'est pas une expérience inintéressante. Dans la vie, nous sommes sans doute bien plus sélectifs, il nous est plus facile d'ignorer l'Autre.
D'abord les différences sont atténuées, non seulement -peut-être- parce qu'on prend davantage de gants, mais aussi parce que la communication non-verbale permet d'arrondir les angles, de mettre de l'intention, du sourire, etc. Ici, l'expression de la pensée est à la fois plus brutale et plus... profonde, on rentre davantage dans les détails, on analyse, on dissert. Je l'ai déjà dit : J'ai rarement, dans la "vraie vie", le genre de discussion que nous avons ici -ou en tout cas avec très peu d'interlocuteurs. Je serai d'ailleurs intéressé à savoir si c'est le cas de chacun d'entre vous, c'est le mien. Ce dont nous parlons ici ne s'expose pas dans la vraie vie, précisément parce que cela engendre le conflit. Tout le monde sait qu'entre gens de bonne compagnie, on ne discute ni politique ni religion -la philosophie n'a pas besoin d'être mentionnée.

Et puis, il me semble que nous avons tendance, dans la vraie vie, à nous retrouver entre Mêmes, à choisir, à sélectionner -c'est ca, l'amitié. On a tendance à se retrouver avec des gens qui nous ressemblent, qui pensent plus ou moins comme nous. Et ensemble, on se convainc que les autres ne sont pas seulement d'un avis différent mais qu'ils ont tort, voire pire, qu'ils sont idiots.
Ici, cela aussi est plus compliqué. Oh les tentatives sont nombreuses pour décrédibiliser un "adversaire", mais vu le niveau général, c'est plus compliqué. D'ailleurs, je pense que c'est l'une des raisons à la participation restreinte. On a souvent fait le constat que, sur Digression, l'écart était important entre le nombre de lecteurs et de participants. Franchement, je le comprends : Faut se sentir au niveau pour descendre dans l'arène !

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Message par baptiste Sam 25 Juin 2016 - 7:03

Bergame a écrit:

Et puis, il me semble que nous avons tendance, dans la vraie vie, à nous retrouver entre Mêmes, à choisir, à sélectionner -c'est ca, l'amitié. On a tendance à se retrouver avec des gens qui nous ressemblent, qui pensent plus ou moins comme nous. Et ensemble, on se convainc que les autres ne sont pas seulement d'un avis différent mais qu'ils ont tort, voire pire, qu'ils sont idiots.

Les affinités électives... ce que j'apprécie ici c'est que personne ne pense comme moi, je ne cherche à convaincre personne, je lis...je propose...j'argumente... c'est un exercice de réflexion pour moi-même, en fait je n'ai pas d'ami qui pense aussi mal que vous... lol! la vérité est là, tous mes amis sont mes amis parce qu'ils pensent peu ou prou comme moi, donc ils pensent bien Est-il impoli d'affirmer une vérité ? 2577518336 et vous vous pensez mal Est-il impoli d'affirmer une vérité ? 2528771386

A non je ne sors pas, au fait était-ce impoli de vous dire cette vérité?

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Message par kercoz Dim 26 Juin 2016 - 11:25

Ataraxie a écrit:Lorsqu'autrui énonce ce qui est pour lui une vérité – et qui n’a pas cédé à cette tentation ? – ce à quoi son interlocuteur a immédiatement accès n’est rien d’autre qu’une affirmation. Et c’est bien problématique. Car si jamais, comme je le crois, il existe une implication réciproque entre l’énonciation d’une vérité et l’acte d’affirmation, il devient impossible d’énoncer une prétendue vérité à quelqu’un sans chercher par la même occasion à agir sur lui. Il est donc légitime que, se sentant l'objet non-consentant de cette action, la personne concernée commence par résister, considérant qu’en affirmant ce que nous lui affirmons nous faisons usage du caractère contraignant de la vérité 1) pour forcer sa pensée et 2) pour le mettre en position d’ignorant face à nous. Sachant par ailleurs, que chaque jour qui passe montre que la chose la mieux partagée du monde n’est pas le bon sens mais l’orgueil, il y a toutes les chances pour que les deux interlocuteurs s’engluent, sous le faux prétexte de la discussion, dans un stérile conflit d’égo 

C'est exactement ce que j' avais tenté d'affirmer jadis. Croyant naïvement que le niveau des intervenants serait suffisant pour supporter une triste réalité, je m' étais permis de provoquer en affirmant au premier degré ce qui, pour la sociologie est une "vérité", ...même une évidence.
Le but premier de l' interaction est la valorisation ...Goffman disant plutôt ""la confirmation" de ce qu' on estime être sa valeur.
Chaque interaction est une prise de risque. Plus que de perdre la face, celle de la faire perdre à l' autre...
C'est la raison pour laquelle les interactions usuelles, suivant le niveau historique de la connaissance des interacteurs, s' amorcent par l' affirmation de "vérités" consensuelles, neutres.....sur le climat ou les misères de l' époque.....Même l'interaction avec un intime, qui pourrait se passer de ce genre de préliminaires passe par des interactions introductives en raison de possibilités conjoncturelles que des paroles pourraient heurter.

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Message par hks Dim 26 Juin 2016 - 12:16

Le but premier de l' interaction est la valorisation .

Je ne le vis pas comme ça. Ce que tu défends (et Ataraxie aussi) est un élément du comportement mais un élément seulement et plus ou moins puissant.


En fait  si je te vois agir Kercoz  ICI tu défends tes idées pas ta face. Tu es beaucoup plus pris par les idées, les arguments, les tiens /ceux des autres que par le souci d'avoir raison par n' importe quel moyen . et c'est tant mieux ainsi  à mon avis .

ICI tu es beaucoup moins crispé sur l'image (ta face) que tu pourrais donner .(je compare avec un autre forum sur lequel tu écrit aussi)
Ce forum/digression a justement  l'avantage et l'inconvénient:smile:  de sous  évaluer la face .
(et d'autre auquel je pense de la sur évaluer).

Paradoxalement c'est en sous évaluant la face qu'il atténue l'agressivité.
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Message par Bergame Dim 26 Juin 2016 - 13:00

Oui, et j'ajoute ce point : A mon avis, plus on amène d'éléments biographiques dans un forum de ce genre, plus on se "met en avant", et plus, ensuite, on aura tendance à défendre ce qu'on aura ainsi dévoilé.
Ce qui est problématique si on vient dans l'idée de fonder ou d'intégrer une communauté, de trouver des amis, en somme. Du moins, c'est ce qu'il m'apparaît.

Je l'avais déjà abordé dans un autre topic, je trouve que la manière dont les réseaux sociaux, par exemple, abordent la notion d'"amitié" est très étrange et mériterait vraiment d'être pensée. J'ai l'impression, je crois comprendre que beaucoup d'individus viennent dans ce genre de monde virtuel effectivement pour trouver de l'amitié -au sens d'affinité élective, comme le dit baptiste- et qu'ils sont souvent déçus parce qu'ils y rencontrent tout autre chose.
Or, c'est vrai -du moins, c'est ce que j'expérimente- que, dans ces mondes virtuels, on en dit, d'une certaine manière, beaucoup sur soi. Par exemple, dans mon cas et ici, on y parle de sujets qu'on n'aborde pas ou peu dans la "vraie vie". De ce point de vue, on peut avoir le sentiment d'y être plus "vrai" qu'ailleurs et que les autres y sont également plus "vrais" puisqu'on a accès à ce qu'ils pensent -pour ainsi dire et dans une certaine mesure, bien entendu.
Et néanmoins, il me semble que l'amitié, du moins au sens que je donne à ce mot, y est illusoire, précisément parce que ce qu'on y livre reste du domaine de la pensée. La virtualité manque de cœur, en somme, et les émoticônes n'y peuvent pas grand-chose.

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Message par kercoz Dim 26 Juin 2016 - 13:54

hks a écrit:
Le but premier de l' interaction est la valorisation .

Je ne le vis pas comme ça. Ce que tu défends (et Ataraxie aussi) est un élément du comportement mais un élément seulement et plus ou moins puissant.



Entendons nous bien : personne ne "le vit comme ça". Moi non plus !.....Si je viens sur un forum pour me valoriser ( comme tout le monde), c'est de façon inconsciente ( ça devient plus compliqué quand on est conscient de son inconscience).
Il y a une autre variable à prendre en compte:
-l' interaction est une nécessité vitale , du même type que l' eau ou l' air.
- il n' y a plus guère d'endroit pour effectuer des interactions ( famille , bureau, troquets ...sont des artefacts désaffectés et provisoires )...
- Les forums offrent un leurre incomplet mais suffisant, une sorte d'anti-dépresseur.
Quand à la puissance de l' élément du comportement, il n'est que de constater les réactions d' affect pour juger de l' importance de sa puissance.

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Message par hks Dim 26 Juin 2016 - 19:28

kercoz a écrit:Si je viens sur un forum pour me valoriser ( comme tout le monde),
Je ne suis pas sur cette longueur d'onde. Je viens pour discuter de questions philosophiques (ou a connotation).
bergame a écrit:Par exemple, dans mon cas et ici, on y parle de sujets qu'on n'aborde pas ou peu dans la "vraie vie".
C'est mon optique.

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Message par kercoz Dim 26 Juin 2016 - 20:34

hks a écrit:
kercoz a écrit:Si je viens sur un forum pour me valoriser ( comme tout le monde),
Je ne suis pas sur cette longueur d'onde. Je viens pour discuter de questions philosophiques

Ma parole, tu ne lis pas ce qu' on t' écrit .
Au niveau du conscient, je viens discuter pour les mêmes raisons que toi....mais au niveau inconscient tu viens, comme tout le monde chercher à te valoriser !
Le truc c'est d' en être lucide.... Tu ne vas pas sur un forum de foot pour deux raisons: Parce que tu préfère la philo, et parce que tu as plus de chance de te valoriser en parlant de science humaine.
Par rapport au troquet ou à l' arbre à palabre , il y a plusieurs différences :
- il te faudrait AUSSI avoir un avis sur le foot
- tu as plus de concurrence et moins de chance de te valoriser sur un forum dédié.

Mais il te faut être lucide : si tu crois que la première raison de ta présence est celle que tu présente, ....tu te gourres complètement. Des lectures seraient plus rentables en terme de progrès dans ce domaine....Si c'est le débat qui te branches, c'est une motivation de compétition ou du mins de valorisation qui te motive.

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Message par neopilina Dim 26 Juin 2016 - 20:56

kercoz a écrit:Si c'est le débat qui te branches, c'est une motivation de compétition ou du mins de valorisation qui te motive.

Ou encore, la recherche de la confrontation telle que définie par les Grecs ( Aristote, etc. ) au sens de " voir, savoir, vaut ce que je pense, dis ", en le soumettant à Autrui, d'autres pensées, discours. Je tiens énormément à cette précision : c'est ce pourquoi, j'ai enfin décidé fin aout 2009 à acquérir un ordinateur pour me connecter à internet.

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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
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