comment définir la vérité?
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Re: comment définir la vérité?
Si j'ai bien compris, tu dis que la possibilité de rectifier le langage par lui-même crée l'illusion d'une réalité continue ? (si c'est le cas, tu pousses le pouvoir négatif du langage à son maximum et c'est effectivement une rupture radicale)euthyphron a écrit:D'accord avec ton analyse. On peut la renforcer ainsi : d'où vient que je suppose la réalité continue, ou plus généralement inadéquate au langage? Ne serait-ce pas parce que le langage offre la possibilité de se corriger lui-même, de rectifier les formulations, de moduler ce qui est dit, de telle sorte que bien que composé de formes discrètes il peut tendre à énoncer le continu? N'est-ce pas le langage qui nous apprend qu'il faut peut-être ne pas être prisonnier du langage?Ataraxie a écrit:
Moi, je dirais que l'inadéquation entre langage et réalité (pas vérité) vient de ce qu'on utiliser des formes discrètes (mots) pour exprimer une substance continue (réalité). La question serait donc de savoir si en parlant de substance continue j'ai raison ou si au contraire la réalité nous fournit d'emblée des formes "découpées" que nous nous chargeons simplement d'étiqueter par des mots.
Il en résulterait que la croyance bergsonienne en une réalité trop vaste pour être exprimée par les mots serait elle-même un piège du langage. Pendant l'expérience mystique, les mots ne manquent pas. Ce n'est que lorsque le mystique entreprend d'en parler que les mots lui manquent, ce qui ne distingue pas la mystique du plaisir qu'il y a à boire un bon vin, mais la comparaison, après tout, est triviale.
Ataraxie- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 18/05/2012
Re: comment définir la vérité?
Je ne dis pas "l'illusion". Mais je me pose la question de savoir ce qui a pu faire penser à l'idée d'une réalité dont les caractéristiques sont telles qu'on ne peut l'exprimer adéquatement par le langage.
Si l'on pose la question : "qu'est-ce qui a pu suggérer aux hommes l'idée, par exemple, que les êtres vivants soient distingués en espèces?", personne ne s'étonnera qu'on y réponde par "le langage". Disons qu'il y a la réponse réaliste : l'idée d'espèce vient de ce qu'en réalité il y a des espèces; et la réponse nominaliste, selon laquelle il n'existe que des individus, mais notre découpage de la réalité par le langage nous fait croire en la réalité des espèces.
Maintenant, y a-t-il une différence structurelle avec la question "la réalité est-elle telle qu'on ne puisse l'exprimer?"? Soit j'ai accès à cette réalité telle qu'elle est, et j'exprime en quoi elle est inexprimable, parce qu'elle est continue disons (ceci paraît en effet fondamental), mais alors elle n'est plus inexprimable. Soit cette réalité "bergsonienne", cet au-delà du discours, ce radicalement ineffable m'est inaccessible, et son idée provient alors des possibilités du langage d'énoncer, fût-ce négativement, ce que l'on ne saurait clairement concevoir.
En résumé, j'adhère à la célèbre thèse de Wittgenstein selon laquelle "les limites du langage sont les limites de mon monde", à ceci près que le mot "limite" ne convient pas, l'expression étant illimitée. C'est pourquoi ce qu'on ne peut dire il faut bien qu'on l'ait dit d'une manière ou d'une autre. La croyance en un réel "tel qu'on ne peut le dire" est un effet de langage. Ou, autrement dit, ce qu'on ne peut dire dans un jeu de langage a été dit dans un autre pour que nous puissions en avoir l'idée.
Si l'on pose la question : "qu'est-ce qui a pu suggérer aux hommes l'idée, par exemple, que les êtres vivants soient distingués en espèces?", personne ne s'étonnera qu'on y réponde par "le langage". Disons qu'il y a la réponse réaliste : l'idée d'espèce vient de ce qu'en réalité il y a des espèces; et la réponse nominaliste, selon laquelle il n'existe que des individus, mais notre découpage de la réalité par le langage nous fait croire en la réalité des espèces.
Maintenant, y a-t-il une différence structurelle avec la question "la réalité est-elle telle qu'on ne puisse l'exprimer?"? Soit j'ai accès à cette réalité telle qu'elle est, et j'exprime en quoi elle est inexprimable, parce qu'elle est continue disons (ceci paraît en effet fondamental), mais alors elle n'est plus inexprimable. Soit cette réalité "bergsonienne", cet au-delà du discours, ce radicalement ineffable m'est inaccessible, et son idée provient alors des possibilités du langage d'énoncer, fût-ce négativement, ce que l'on ne saurait clairement concevoir.
En résumé, j'adhère à la célèbre thèse de Wittgenstein selon laquelle "les limites du langage sont les limites de mon monde", à ceci près que le mot "limite" ne convient pas, l'expression étant illimitée. C'est pourquoi ce qu'on ne peut dire il faut bien qu'on l'ait dit d'une manière ou d'une autre. La croyance en un réel "tel qu'on ne peut le dire" est un effet de langage. Ou, autrement dit, ce qu'on ne peut dire dans un jeu de langage a été dit dans un autre pour que nous puissions en avoir l'idée.
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euthyphron- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/06/2011
Re: comment définir la vérité?
Comment définir la vérité ?
A mon avis, il faut diversifier d’abord la question posée à partir de plusieurs angles de vue pour percevoir ce qu’on n’a pas envie de percevoir …
1- Comment définir une vérité relative avec une autre vérité relative ?
Exemple : comment définir un marteau avec un tournevis ?
2 - Comment définir une Vérité Universelle avec une autre vérité paradoxalement bornée ?
3 – Comment définir une VERITE ABSOLU/achevée avec une autre vérité imparfaite ?
4 – Comment définir la Raison Pure avec une raison qui déraisonne, tordu/impure ?
5 – Comment définir la Certitude avec une formation universitaire basée sur l’incertitude ?
A l’envers tout est possible d’une manière super intelligible ...
Geo Rum Phil- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 13/07/2012
Re: comment définir la vérité?
D'accord mais ça ne répond pas à l'idée de départ sur le continu et le discret. Ton point de départ (le métalangage rectificatif) est très différent du mien, le cadre exprimable/inexprimable n'était pas du tout ce que j'avais en tête.euthyphron a écrit:Je ne dis pas "l'illusion". Mais je me pose la question de savoir ce qui a pu faire penser à l'idée d'une réalité dont les caractéristiques sont telles qu'on ne peut l'exprimer adéquatement par le langage.
Si l'on pose la question : "qu'est-ce qui a pu suggérer aux hommes l'idée, par exemple, que les êtres vivants soient distingués en espèces?", personne ne s'étonnera qu'on y réponde par "le langage". Disons qu'il y a la réponse réaliste : l'idée d'espèce vient de ce qu'en réalité il y a des espèces; et la réponse nominaliste, selon laquelle il n'existe que des individus, mais notre découpage de la réalité par le langage nous fait croire en la réalité des espèces.
Maintenant, y a-t-il une différence structurelle avec la question "la réalité est-elle telle qu'on ne puisse l'exprimer?"? Soit j'ai accès à cette réalité telle qu'elle est, et j'exprime en quoi elle est inexprimable, parce qu'elle est continue disons (ceci paraît en effet fondamental), mais alors elle n'est plus inexprimable. Soit cette réalité "bergsonienne", cet au-delà du discours, ce radicalement ineffable m'est inaccessible, et son idée provient alors des possibilités du langage d'énoncer, fût-ce négativement, ce que l'on ne saurait clairement concevoir.
En résumé, j'adhère à la célèbre thèse de Wittgenstein selon laquelle "les limites du langage sont les limites de mon monde", à ceci près que le mot "limite" ne convient pas, l'expression étant illimitée. C'est pourquoi ce qu'on ne peut dire il faut bien qu'on l'ait dit d'une manière ou d'une autre. La croyance en un réel "tel qu'on ne peut le dire" est un effet de langage. Ou, autrement dit, ce qu'on ne peut dire dans un jeu de langage a été dit dans un autre pour que nous puissions en avoir l'idée.
Ataraxie- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 489
Date d'inscription : 18/05/2012
Re: comment définir la vérité?
Geo Rum Phil a écrit:A l’envers tout est possible d’une manière super intelligible ...
Bien sûr. Mais " l'endroit " depuis le cogito est " l'envers ", il faut remettre l'envers à l'endroit !! Avec ceci : " Tout Etant est le Fruit d'un Sujet, Sien, Lieu correct du cogito, il est à la fois Donné ET Suspect ". A partir de là, tout devient intelligible, est Donné à dire, a contrario, privativement. On gardera donc en tête le risque permanent d'être réducteur. Mais maintenant on peut tout dire, alors que dans la perspective du cogito, on déboule vers le néant, la stérilité, le nihilisme, et pour finir le mutisme, le mur de l'impasse, qui condamne au bavardage, fut-il des plus savants.
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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: comment définir la vérité?
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Alors pour la vérité, pas la peine de se casser l'oignon, c'est par là :
http://www.webnietzsche.fr/verite.htm
(Je me pelotonne dans mon manteau et m'éloigne à pas lents ...)
.
Alors pour la vérité, pas la peine de se casser l'oignon, c'est par là :
http://www.webnietzsche.fr/verite.htm
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Au nom de l'ART, de la SCIENCE et de la PHILOSOPHIE. (Ainsi soit-il.)
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victor.digiorgi- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2032
Date d'inscription : 23/04/2013
Re: comment définir la vérité?
La vérité, une heuristique darwinienne.
Xeroxe- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 48
Date d'inscription : 17/10/2012
Re: comment définir la vérité?
Pour moi il en va d'abord de l' objectivité.
L' objectivité c' est un peu comme le Big Bang...plus tu creuses en elle pour tenter de trouver son " noyau dur " et plus celui ci t' échappe, au point de se diluer totalement.
Il me semble qu' il n' y a qu' une forme d' objectivité possible : celle qui se situe à notre échelle. Si ma dimension était atomique je pourrais passer à travers un mur...tel que je suis le mur reste objectivement un mur.
J' ai pdonc plutôt tendance à accorder la Vérité avec la subjectivité et la Réalité avec l' Objectivité.
L' objectivité c' est un peu comme le Big Bang...plus tu creuses en elle pour tenter de trouver son " noyau dur " et plus celui ci t' échappe, au point de se diluer totalement.
Il me semble qu' il n' y a qu' une forme d' objectivité possible : celle qui se situe à notre échelle. Si ma dimension était atomique je pourrais passer à travers un mur...tel que je suis le mur reste objectivement un mur.
J' ai pdonc plutôt tendance à accorder la Vérité avec la subjectivité et la Réalité avec l' Objectivité.
Re: comment définir la vérité?
Je comprends le reste, mais je ne vois pas comment c'est envisageable, une vérité subjective.
C'était plus ou moins la thèse de hks dans cette discussion (plus ou moins, parce que c'est difficile de faire exposer une thèse par hks ) mais je ne vois pas comment ce puisse être défendable.
L'objection évidente, simple, c'est 2+3=5. Ce n'est pas vrai que pour toi, ou moi.
C'était plus ou moins la thèse de hks dans cette discussion (plus ou moins, parce que c'est difficile de faire exposer une thèse par hks ) mais je ne vois pas comment ce puisse être défendable.
L'objection évidente, simple, c'est 2+3=5. Ce n'est pas vrai que pour toi, ou moi.
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: comment définir la vérité?
Bergame a écrit:
L'objection évidente, simple, c'est 2+3=5. Ce n'est pas vrai que pour toi, ou moi.
C'est juste une réduction d'une réalité bien plus complexe qui permet une manipulation mathématique utilitariste.
5 pommes peuvent etre de races différentes, de poids idem, de maturité variable, de provenances variables , de tx carbonne etc.
Il n'y a pas 2 pommes identiques.
Kercos- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1374
Date d'inscription : 25/04/2022
Re: comment définir la vérité?
Et alors ? Hé, il faut réfléchir un peu, sur ces sujets : 2 pommes pas identiques + 3 pommes pas identiques non plus = toujours 5 pommes différentes.
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Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: comment définir la vérité?
Il me semble qu'il existe deux niveaux de la vérité.
L'un est premier et se situe au niveau de l'ouverture au monde.
Puis un second niveau, qui prend racine dans le premier, le niveau de l'énoncé théorique.
Prenons par exemple l’énoncé : « cette table est bleue ».
Que se passe-t-il ?
Nous attribuons la bleuité à cette table. Ce que cette table est, le déictique « cette » indiquant qu’elle est devant nous, est focalisé sur l’attribut qu’on lui donne de bleu.
Mais quel est l’être total de cette table ? Est-ce la somme des attributs qu’on peut lui donner ? Elle semble cette somme être infinie et sans doute qu’elle n’est pas encore connue ? En effet, cette table est composée d’atomes eux-mêmes composés de quarks dont il reste encore beaucoup de choses à découvrir.
Pourtant cette table est bien là devant nous. Au niveau ontologique elle est un étant dont on dispose. Mais là encore la somme de tout ce qu’elle peut être pour nous est infinie. Elle est une table de jeu, une table à manger, une table pour écrire etc. Lorsque nous jouons à un jeu par exemple elle est un support qui n’attire pas l’attention qui reste concentrée sur le jeu. Souvent la table est là pour nous sans se faire remarquer, modeste support, sur lequel on compte.
Le langage nous permet de dire à quoi sert la table.
Pourtant dans l’énoncé théorique cet être de la table, comme objet du monde, a tendance à disparaître au profit de la nature de la table. La nature de la table est ce qu’elle est en elle-même. Qu’elle serve à jouer aux cartes, par exemple, ce n’est pas sa nature, mais plutôt sa fonction. Comment définir la nature de la table ? C’est à partir de là que l’on peut commencer à essayer de la déterminer. Nous allons essayer de la définir totalement par le langage, comme si en définitive, le langage était capable de recréer intellectuellement la totalité de cette table.
Est-ce possible ?
Peut-être qu’un jour l’homme sera capable de comprendre totalement la composition de la table depuis ses plus petits éléments.
Il aura donc une image intellectuelle de cette table parfaitement adéquate à la table réelle.
Quelque chose est apparue sous notre plume d’un peu étrange : le terme d’« image intellectuelle ».
Quand nous disions « cette table est bleue », nous n’avions pas en vue une « image intellectuelle » de la table mais cette table réelle devant nous. Mais à partir du moment où nous avons voulu déterminer la nature de la table nous avons rompu le lien avec la table réelle. En effet, ce serait un peu facile si quelqu'un nous demandait ce qu’est cette table de répondre en la désignant : « c’est cela ».
Seul celui qui est devant la table peut comprendre ce que l’on veut dire et notre dire est un pur montrer. C’était déjà le cas dans l’énoncé « cette table est bleue ». Le sujet, « cette table », avant d’être caractérisée comme bleue, était prise comme totalité posée devant moi.
Mais ce simple montrer est insuffisant pour l’énoncé théorique qui finalement semble être uniquement du côté de l’attribut : il comprend qu’elle soit bleue, « mais encore ? » demande-t-il. Est-ce que sa couleur permet d’en définir la nature complète ?
L’image intellectuelle de la table réelle se forme peut-être ainsi.
L’énoncé se coupe de la fonction déictique du langage. Il ne s’agit plus de montrer simplement ce qui est comme dans le langage ordinaire mais de voir si d’après le seul énoncé on arrivera à représenter adéquatement la chose dont on parle. L’énoncé devient vrai quand la chose pensée est en adéquation avec la chose réelle et faux quand il est inadéquat. Le vrai et le faux naissent à l’intérieur de l’énoncé sur la nature des choses. Il n’existe pas de vraie fonction de la table. À la rigueur on parlera d’impossible : impossible de faire démarrer cette table aujourd’hui !
Il me semble qu'il est dangereux de réduire la vérité à un discours théorique sur la nature des choses. Parce que comme on le voit dans l'exemple de la table, on gomme bien des aspects de ce qu'"est" une table pour nous. Elle est d'abord un possible avant d'être un objet du monde. Ce qui signifie que le langage théorique n'est pas le seul vrai. Quand un peintre arrive à donner à une table toute sa dimension de support de moments conviviaux, il nous dit aussi une vérité sur ce qu'est une table. Cette dimension-là, il ne faut pas l'oublier, car il en va pour nous de notre être même.
Du point de vue où j'essai de me situer, il n'est pas encore question de subjectivité ni d'objectivité, mais de la donation première du monde, qui est une vérité première.
L'un est premier et se situe au niveau de l'ouverture au monde.
Puis un second niveau, qui prend racine dans le premier, le niveau de l'énoncé théorique.
Prenons par exemple l’énoncé : « cette table est bleue ».
Que se passe-t-il ?
Nous attribuons la bleuité à cette table. Ce que cette table est, le déictique « cette » indiquant qu’elle est devant nous, est focalisé sur l’attribut qu’on lui donne de bleu.
Mais quel est l’être total de cette table ? Est-ce la somme des attributs qu’on peut lui donner ? Elle semble cette somme être infinie et sans doute qu’elle n’est pas encore connue ? En effet, cette table est composée d’atomes eux-mêmes composés de quarks dont il reste encore beaucoup de choses à découvrir.
Pourtant cette table est bien là devant nous. Au niveau ontologique elle est un étant dont on dispose. Mais là encore la somme de tout ce qu’elle peut être pour nous est infinie. Elle est une table de jeu, une table à manger, une table pour écrire etc. Lorsque nous jouons à un jeu par exemple elle est un support qui n’attire pas l’attention qui reste concentrée sur le jeu. Souvent la table est là pour nous sans se faire remarquer, modeste support, sur lequel on compte.
Le langage nous permet de dire à quoi sert la table.
Pourtant dans l’énoncé théorique cet être de la table, comme objet du monde, a tendance à disparaître au profit de la nature de la table. La nature de la table est ce qu’elle est en elle-même. Qu’elle serve à jouer aux cartes, par exemple, ce n’est pas sa nature, mais plutôt sa fonction. Comment définir la nature de la table ? C’est à partir de là que l’on peut commencer à essayer de la déterminer. Nous allons essayer de la définir totalement par le langage, comme si en définitive, le langage était capable de recréer intellectuellement la totalité de cette table.
Est-ce possible ?
Peut-être qu’un jour l’homme sera capable de comprendre totalement la composition de la table depuis ses plus petits éléments.
Il aura donc une image intellectuelle de cette table parfaitement adéquate à la table réelle.
Quelque chose est apparue sous notre plume d’un peu étrange : le terme d’« image intellectuelle ».
Quand nous disions « cette table est bleue », nous n’avions pas en vue une « image intellectuelle » de la table mais cette table réelle devant nous. Mais à partir du moment où nous avons voulu déterminer la nature de la table nous avons rompu le lien avec la table réelle. En effet, ce serait un peu facile si quelqu'un nous demandait ce qu’est cette table de répondre en la désignant : « c’est cela ».
Seul celui qui est devant la table peut comprendre ce que l’on veut dire et notre dire est un pur montrer. C’était déjà le cas dans l’énoncé « cette table est bleue ». Le sujet, « cette table », avant d’être caractérisée comme bleue, était prise comme totalité posée devant moi.
Mais ce simple montrer est insuffisant pour l’énoncé théorique qui finalement semble être uniquement du côté de l’attribut : il comprend qu’elle soit bleue, « mais encore ? » demande-t-il. Est-ce que sa couleur permet d’en définir la nature complète ?
L’image intellectuelle de la table réelle se forme peut-être ainsi.
L’énoncé se coupe de la fonction déictique du langage. Il ne s’agit plus de montrer simplement ce qui est comme dans le langage ordinaire mais de voir si d’après le seul énoncé on arrivera à représenter adéquatement la chose dont on parle. L’énoncé devient vrai quand la chose pensée est en adéquation avec la chose réelle et faux quand il est inadéquat. Le vrai et le faux naissent à l’intérieur de l’énoncé sur la nature des choses. Il n’existe pas de vraie fonction de la table. À la rigueur on parlera d’impossible : impossible de faire démarrer cette table aujourd’hui !
Il me semble qu'il est dangereux de réduire la vérité à un discours théorique sur la nature des choses. Parce que comme on le voit dans l'exemple de la table, on gomme bien des aspects de ce qu'"est" une table pour nous. Elle est d'abord un possible avant d'être un objet du monde. Ce qui signifie que le langage théorique n'est pas le seul vrai. Quand un peintre arrive à donner à une table toute sa dimension de support de moments conviviaux, il nous dit aussi une vérité sur ce qu'est une table. Cette dimension-là, il ne faut pas l'oublier, car il en va pour nous de notre être même.
Du point de vue où j'essai de me situer, il n'est pas encore question de subjectivité ni d'objectivité, mais de la donation première du monde, qui est une vérité première.
Grégor- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 366
Date d'inscription : 14/04/2022
Re: comment définir la vérité?
Bergame a écrit:Je comprends le reste, mais je ne vois pas comment c'est envisageable, une vérité subjective.
C'était plus ou moins la thèse de hks dans cette discussion (plus ou moins, parce que c'est difficile de faire exposer une thèse par hks ) mais je ne vois pas comment ce puisse être défendable.
L'objection évidente, simple, c'est 2+3=5. Ce n'est pas vrai que pour toi, ou moi.
Je voulais dire en fait que la réalité se situe dans ce monde phénoménal que nous pouvons observer et qui donne accès à une objectivité, telle que, par exemple : 2 + 3 = 5
Et donc ici, la réalité s' accorde avec l' objectivité.
La vérité par contre m' apparaît plus de l' ordre de la subjectivité.
Mais le mot " vérité " n ' était pas forcément bien choisi.
Je voulais dire que, par exemple, un peintre peut donner à voir la " vérité " d' un paysage. Lorsqu' il le peint il en saisit en quelque sorte la substance qui fait que ceux qui regardent peuvent se dire : " c' est tout à fait ça ". Non pas que le peintre ait simplement reproduit les éléments du paysage mais il en a traduit également son essence. Il a fait cela avec sa subjectivité car si cent peintres dessinent le même paysage il y aura cent paysages différents. Et puis ensuite ça se passe dans l' intersubjectivité entre ceux qui regardent et celle où celui qui a peint.
Le fait est que le même paysage restera plat et sans vie s' il est peint par un amateur débutant et génial s' il est peint par Monet.
Ce que crois - cela m' est apparu en pratiquant cet art- c' est qu' il y a une forme d' objectivité dans la subjectivité. Un tableau qui est " réussi " l' est pour la majorité des gens. Les goûts et les couleurs ne sont pas simplement des émotions disparates et sans lien les unes avec les autres au petit bonheur la chance.
C' est du moins ce que je pense avoir compris, à mon petit niveau, en tant qu' artiste professionnel.
Re: comment définir la vérité?
Il n"y a de vérité que dans le domaine (ou champ selon Bourdieu) ou elle est proposée.
Kercos- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1374
Date d'inscription : 25/04/2022
Re: comment définir la vérité?
Kercos a écrit:Il n"y a de vérité que dans le domaine (ou champ selon Bourdieu) ou elle est proposée.
Ce qui revient à dire qu' il n' y a pas de vérité absolue mais que celle ci est toujours relative ?
Peut être.
Mais je ne vois pas comment vérifier cela.
Et donc, nous sommes toujours dans un a- priori qui donne libre cours à la croyance.
Pour ma part je dirais qu' il faut faire avec tous éléments dont on dispose et éviter d' être trop affirmatif dans l' absolu.
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