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Quel est le problème avec la philosophie ?

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Quel est le problème avec la philosophie ? - Page 8 Empty Re: Quel est le problème avec la philosophie ?

Message par baptiste Dim 5 Jan 2014 - 9:22

euthyphron a écrit:
Ce n'est pas qu'elle dérange en apportant des vérités subversives, il n'est même pas sûr qu'elle apporte des vérités. Mais elle travaille au démantèlement des illusions rien qu'en commençant par  mettre ses opinions entre parenthèses, les illusions que l'on se fait sur soi-même par amour-propre, comme celles dont ont besoin les tyrans et les tyranneaux par goût du pouvoir. C'est ceci, et rien d'autre, le « problème avec la philosophie ».

J’avais  une tentative de définition du verbe philosopher «  philosopher est une activité critique qui découle de la capacité de penser le discours et la réalité pour en former des représentations intelligibles »

Je partage assez ton point de vue avec une réserve une question et un problème.

La réserve, c’est cette distinction à l’opinion. Il y a dans l’usage du mot une volonté de distinction, un cursus élitiste à mon sens pas nécessairement justifié et certainement source de la critique dont fait l'objet " la philosophie". Beaucoup de considérations dites philosophiques ne sont que de vulgaires opinions mal déguisées d’où le florilège de « philosophies » alors que ce que les « philosophes » classent dans la catégorie opinion est parfois porteur de plus de sens que certaines de ces cogitations insuffisamment fondées. L’usage, sans de multiples précautions, de ce mot contribue à perpétuer les pesanteurs et les contraintes de la « raison scolastique » qui selon le mot de Pascal pousse à une philosophie qui “se moque de la philosophie” .

Une question quid de la place de la pratique et de l'exemplarité ? Je cite Hadot « Toutes les écoles ont dénoncé en effet le danger que court le philosophe, s’il s’imagine que son discours philosophique peut se suffire à lui-même sans être en accord avec la vie philosophique. Elles ont constamment attaqué pour reprendre les termes du Platonicien Polémo, ceux qui cherchent à se faire admirer pour leur habileté stylistique, mais se contredisent dans la conduite de leur vie…ceux qui, comme le dit le stoïcien Epictéte, sur l’art de parler en homme plutôt que de vivre en hommes, qui font selon l’expression de Sénèque, de l’amour de la sagesse (philosophia) un amour de la parole (philologia). Traditionnellement, ceux qui développent un discours apparemment philosophique, sans chercher à mettre leur vie en rapport à leur discours et sans que leur discours émane de leur expérience et de leur vie, sont appelé des « sophistes » depuis Platon et Aristote jusqu’à Plutarque, qui déclare qu’une fois que ces sophistes se sont levés de leur chaires, et ont posé leur livres et leur manuels, ils ne sont pas meilleurs que les autres hommes « dans les actes réels de la vie ». »
Pierre Hadot Qu’est ce que la philosophie antique.(p268-269)
Peut-on appeler philosophe quelqu'un qui pour écrire à besoin de boire l'équivalent d'un litre d'alcool  par jour plus une quantité invraisemblable d’amphétamines?

Enfin un problème, la tradition philosophique occidentale est porteuse elle aussi d’un "péché originel". Platon et Aristote ont rationnellement justifié l’esclavage, « la machine humaine », d’où un soupçon que l'attitude des dits "philosophes" de l'époque récente n'a pas permis de lever, sur la capacité de cette tradition à distinguer le bien du mal.

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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 11:33

Je ne me prononcerai pas sur les qualités morales des philosophes. Pour le coup, c'est cela qui serait élitiste : proclamer qu'un philosophe vaut forcément mieux que les autres hommes, sinon on lui retirerait ce titre. Je reconnais que la pratique de la philosophie, parce qu'elle implique le désir de vérité et le renoncement au combat d'opinions, a de ce fait une dimension éthique. Mais la vertu, ça ne marche pas comme ça. "Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais" est décevant sans doute, surtout si l'on est assoiffé de modèles, mais ce n'est pas contradictoire. J'ajouterai que la défense aristotélicienne de l'esclavage a le mérite d'exposer clairement les raisons d'approuver l'esclavage, ce qui facilite la critique, voir Rousseau (Contrat social, I, 2). Et ça ne prouve pas qu'Aristote était un salaud, juste qu'il manquait d'imagination, comme tout le monde.
Il est cependant exact que le désir de vérité passe nécessairement par la confrontation au réel. Dans la mesure où le philosophe tient un discours à prétention éthique (ce qui n'a rien d'obligatoire) il est donc normal qu'il prenne en compte sa propre expérience, éventuellement à titre d'objection. Pour le reste, qui peut juger? Ce serait une folie, ou au moins une forme d'idolâtrie, que de faire d'un philosophe son guide suprême.
Pour le reste, quand tu dis
baptiste a écrit:La réserve, c’est cette distinction à l’opinion. Il y a dans l’usage du mot une volonté de distinction, un cursus élitiste à mon sens pas nécessairement justifié et certainement source de la critique dont fait l'objet " la philosophie". Beaucoup de considérations dites philosophiques ne sont que de vulgaires opinions mal déguisées d’où le florilège de « philosophies » alors que ce que les « philosophes » classent dans la catégorie opinion est parfois porteur de plus de sens que certaines de ces cogitations insuffisamment fondées. L’usage, sans de multiples précautions, de ce mot contribue à perpétuer les pesanteurs et les contraintes de la « raison scolastique » qui selon le mot de Pascal pousse à une philosophie qui “se moque de la philosophie”
Il faut bien comprendre que l'opinion n'est pas une infra-philosophie pas plus que la philosophie n'est une super-opinion. Ce sont deux démarches totalement différentes, et même opposées. L'accusation d'élitisme n'a donc pas lieu d'être. Une démarche d'opinion vise à faire triompher ce que l'on voudrait qui soit cru (par soi ou par autrui). Une démarche philosophique commence par le renoncement à ce type de compétition, et donc par la mise entre parenthèses de tout jugement non élucidé.
Qu'il y ait des philosophes qui, en réalité, ne font que défendre une opinion, il est probable que cela arrive. Il n'y a pas de jeux sans possibilité de tricher. A qui penses-tu cependant? Car j'ai beau chercher, cela ne me paraît pas si fréquent. Des philosophes qui se trompent, oui, c'est fréquent. Mais par malhonnêteté intellectuelle?
Quant à ce que les philosophes classent comme opinion et qui aurait du sens, là encore je me demande à quoi tu fais allusion. Mais la caractéristique d'une opinion n'est pas de n'avoir aucun sens, c'est de vouloir être cru, au détriment de la vérité s'il le faut (et il le faut!). Une opinion peut donc être pleine d'intérêt, et aucun philosophe ne renoncera à l'analyser. Par exemple, l'opinion selon laquelle l'esclavage est un mal est un très bon tremplin pour réfléchir à la dignité de l'homme.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 11:54

à Victor  
Ouvre les yeux et regarde bien ce qui réunit Vargas, Bergame et Courtial.
Il y a un lien objectif puisqu'il sont tout trois  admin.
Oui mais après ça ?

Sur l'ensemble des participants ( y compris les admin ) je vois plutôt des accords et des désaccords alterner. Des affinités partielles. Accord sur tel point ou telle manière de penser et désaccord avec les mêmes sur d'autres sujets.
On se ressemble par certains aspects et on diffère sous d'autres.
Sans que ni l'accord ni le désaccord soient destinés à perdurer éternellement.
C'est toi qui instaure une frontière franche entre ta manière de penser et les autres.
Objectivement il n y a pas deux camps retranchés.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 12:40

à baptiste

Peut-on appeler philosophe quelqu'un qui pour écrire à besoin de boire l'équivalent d'un litre d'alcool  par jour plus une quantité invraisemblable d’amphétamines?
Tu ré-enfonces le clou ..

question : La recherche d'une  définition (de la définition de la philosophie en l'occurrence ).
Par la définition on a une activité "sauvage" qu'on veut réglementer ( en fait c'est ça )
Ce qui se voit très bien dans ce que je cite plus haut.

Le problème et le seul est que pour les régles on a pas de règles pour les poser. Elles s'imposent et  on les impose.

Une règle c'est par exemple ne pas être contradictoire...ou bien écrire à jeun..ou bien respecter la grammaire de la langue , ou bien éviter les métaphores , l'analogie , le symbole ou les  figures du rêve.
Ce sont des règles de bonne conduite imposées par les philosophes.
Imposées parce qu'elles s' imposent à lui comme une évidence.

Ainsi le "philosophe" ne peux s' extraire de sa sphère régulatrice. Il est celui qui  trace une frontière entre l'opinion et le savoir. Ce dernier étant  ce qui se produit dans les règles de l' art.

soit par exemple  Nietzsche ou Kierkegaard : on voit très bien comment des penseurs qui bousculent les règles sont  à peine considéré en leur temps comme  "philosophe".
Giordano Bruno , Montaigne  et même Pascal? Est- ce que Cioran est considéré comme un philosophe ...et Dostoyevsky voire Camus
et je dirais aussi la pensée orientale ?

 Non il faut donner des gages. En passer donc par une certaine forme  logique  et grammaticale d 'expression.

Camus jugé philosophe pour classes terminales !!! C'est tout un symbole.

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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 13:15

hks a écrit:Le problème et le seul est que pour les régles on a pas de règles pour les poser. Elles s'imposent et  on les impose.
Si, il y a une règle de formation des règles, elle est fournie par la finalité de l'activité philosophique. Est donc "interdit" tout ce qui empêche de dialoguer en vue de la vérité, et seulement cela. Même la souplesse de cette règle de toutes les règles est donnée par la finalité. Ainsi Socrate dans Gorgias propose-t-il comme règle de s'abstenir des longs discours (qui font qu'on ne sait plus quel est le sujet). Gorgias lui fait remarquer que certaines réponses exigent un long développement, ce que Socrate concède, et par la suite Socrate en donne lui-même l'exemple en s'excusant d'avoir été si long. Une règle souple (faite pour faciliter la discussion) est appliquée avec souplesse.
hks a écrit:Une règle c'est par exemple ne pas être contradictoire...ou bien écrire à jeun..ou bien respecter la grammaire de la langue , ou bien éviter les métaphores , l'analogie , le symbole ou les  figures du rêve.
Ce sont des règles de bonne conduite imposées par les philosophes.
Imposées parce qu'elles s' imposent à lui comme une évidence.
Ces règles ne sont absolument pas sur le même plan.
1) Ne pas être contradictoire est une règle impérative, car si l'on s'autorise à l'être on devient incompréhensible.
2) Ecrire à jeun n'est absolument pas une règle. Chacun agira en fonction de son propre confort.
3) Respecter la grammaire de la langue relève de l'effort pour être audible (ou lisible). Ce n'est une règle que subordonnée à cette fin. L'oubli d'une négation ("je pense pas"), par exemple, n'est une faute que contre la grammaire, pas contre la philosophie.
4) Il n'y a aucune raison d'interdire métaphores, analogies, et d'une manière générale toutes les figures que permet la langue. Il faut simplement, et il suffit, qu'elles soient repérées comme telles. Marx a le droit de dire que la religion est l'opium du peuple, car tout le monde comprend que c'est une image (mais il va de soi qu'une image n'est pas une preuve).
hks a écrit:soit par exemple  Nietzsche ou Kierkegaard : on voit très bien comment des penseurs qui bousculent les règles sont  à peine considéré en leur temps comme  "philosophe".
Ces deux-ci posent parfois problème, en effet. Ce n'est une question ni de talent ni d'originalité. Ils ont choisi, l'un et l'autre, d'utiliser différents registres de discours, dont parfois le registre philosophique. Là encore, du moment qu'on le sait cela ne pose pas problème.
hks a écrit:Giordano Bruno , Montaigne  et même Pascal?
Je ne vois pas le problème en ce qui les concerne. A part qu'il arrive à tout philosophe de cesser de l'être. Nul n'est tenu de ne pratiquer que la philosophie
hks a écrit: Est- ce que Cioran est considéré comme un philosophe ...et Dostoyevsky voire Camus
Ce sont de grands écrivains qui donnent à penser (quoique... Cioran..., mais ne discutons pas des goûts et des couleurs). Camus s'est parfois essayé à la philosophie, comme chacun sait.
hks a écrit:et je dirais aussi la pensée orientale ?
Cela dépend laquelle. Il est clair qu'il ya des philosophes orientaux, oui. Ils ne sont pas au programme des classes terminales parce qu'ils sont orientaux, c'est vrai. C'est le choix de l'inspection de limiter l'enseignement à la philosophie occidentale. Cela changera peut-être un jour.
hks a écrit:Camus jugé philosophe pour classes terminales !!! C'est tout un symbole.
Symbole de quoi? Du mépris que l'on a pour les classes terminales (où Camus n'est pas enseigné!)? De toute façon, quel que soit le jugement que l'on porte sur Camus, c'est comme la mauvaise cuisine, la mauvaise philosophie reste de la philosophie.

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Message par neopilina Dim 5 Jan 2014 - 13:42

Baptiste a écrit : " Peut-on appeler philosophe quelqu'un qui pour écrire à besoin de boire l'équivalent d'un litre d'alcool  par jour plus une quantité invraisemblable d’amphétamines? "

C'est en ex-alcoolique chevronné que je vais répondre. Fut un temps je déjeunais avec un robuste whisky-vallium avant d'abattre sans sourciller mes 8 heures de taf. J'ai appris plus tard que le mélange est mortel. Oups. D'ailleurs, pour Sartre, tu as oublié le tabac, c'est à dire la nicotine, une drogue très en vogue chez les intellectuels : elle stimule l'activité cérébrale.
Cette petite saillie est très largement en dessous de ce à quoi tu nous as habitué.
Le drogué, l'addict, ne se drogue pas pour pouvoir écrire ou autre, il le fait pour combler un manque abyssal remarquablement présent chez tout Sujet humain d'où très précisément un risque majeur, pernicieux, toujours là, avec les drogues. Une fois ce vide un tant soit peu comblé par une quelconque addiction, et il n'y a pas que les drogues ( L'Amour et/ou le Sexe, c'est pas mal non plus. ), il va être très difficile pour notre Sujet de vivre, de survivre, sans. Enfin bref, si tu retranche de l'histoire de la pensée, de la science, des arts, de l'histoire tout court, tout les addicts, de toute sorte, je crois qu'on va être mal. En fait, l'histoire, l'humanité, se considèrent de prime abord aussi avec les addictions.

P.S. Par respect pour mes interlocuteurs, je cessais de forumer quand les effets de l'alcool devenaient manifestes. Mais je continuais à écrire. On peut faire le tri le lendemain et ça peut être intéressant.

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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
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Message par victor.digiorgi Dim 5 Jan 2014 - 17:06

baptiste a écrit:
euthyphron a écrit:
Ce n'est pas qu'elle dérange en apportant des vérités subversives, il n'est même pas sûr qu'elle apporte des vérités. Mais elle travaille au démantèlement des illusions rien qu'en commençant par  mettre ses opinions entre parenthèses, les illusions que l'on se fait sur soi-même par amour-propre, comme celles dont ont besoin les tyrans et les tyranneaux par goût du pouvoir. C'est ceci, et rien d'autre, le « problème avec la philosophie ».

J’avais  une tentative de définition du verbe philosopher «  philosopher est une activité critique qui découle de la capacité de penser le discours et la réalité pour en former des représentations intelligibles »

Je partage assez ton point de vue avec une réserve une question et un problème.

La réserve, c’est cette distinction à l’opinion. Il y a dans l’usage du mot une volonté de distinction, un cursus élitiste à mon sens pas nécessairement justifié et certainement source de la critique dont fait l'objet " la philosophie". Beaucoup de considérations dites philosophiques ne sont que de vulgaires opinions mal déguisées d’où le florilège de « philosophies » alors que ce que les « philosophes » classent dans la catégorie opinion est parfois porteur de plus de sens que certaines de ces cogitations insuffisamment fondées. L’usage, sans de multiples précautions, de ce mot contribue à perpétuer les pesanteurs et les contraintes de la « raison scolastique » qui selon le mot de Pascal pousse à une philosophie qui “se moque de la philosophie” .

Une question quid de la place de la pratique et de l'exemplarité ? Je cite Hadot « Toutes les écoles ont dénoncé en effet le danger que court le philosophe, s’il s’imagine que son discours philosophique peut se suffire à lui-même sans être en accord avec la vie philosophique. Elles ont constamment attaqué pour reprendre les termes du Platonicien Polémo, ceux qui cherchent à se faire admirer pour leur habileté stylistique, mais se contredisent dans la conduite de leur vie…ceux qui, comme le dit le stoïcien Epictéte, sur l’art de parler en homme plutôt que de vivre en hommes, qui font selon l’expression de Sénèque, de l’amour de la sagesse (philosophia) un amour de la parole (philologia). Traditionnellement, ceux qui développent un discours apparemment philosophique, sans chercher à mettre leur vie en rapport à leur discours et sans que leur discours émane de leur expérience et de leur vie, sont appelé des « sophistes » depuis Platon et Aristote jusqu’à Plutarque, qui déclare qu’une fois que ces sophistes se sont levés de leur chaires, et ont posé leur livres et leur manuels, ils ne sont pas meilleurs que les autres hommes « dans les actes réels de la vie ». »
Pierre Hadot Qu’est ce que la philosophie antique.(p268-269)
Peut-on appeler philosophe quelqu'un qui pour écrire à besoin de boire l'équivalent d'un litre d'alcool  par jour plus une quantité invraisemblable d’amphétamines?

Enfin un problème, la tradition philosophique occidentale est porteuse elle aussi d’un "péché originel". Platon et Aristote ont rationnellement justifié l’esclavage, « la machine humaine », d’où un soupçon que l'attitude des dits "philosophes" de l'époque récente n'a pas permis de lever, sur la capacité de cette tradition à distinguer le bien du mal.

Tu dis avec beaucoup de politesse et de précautions ce que je pense et tente de dire en chienpanzé cherchant à foutre le bordel dans une bibliothèque de zinges penzants.

Bravo !

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Message par Bergame Dim 5 Jan 2014 - 17:45

baptiste a écrit:Enfin un problème, la tradition philosophique occidentale est porteuse elle aussi d’un "péché originel". Platon et Aristote ont rationnellement justifié l’esclavage, « la machine humaine », d’où un soupçon que l'attitude des dits "philosophes" de l'époque récente n'a pas permis de lever, sur la capacité de cette tradition à distinguer le bien du mal.
Absolument. Tu mets le doigt sur un point important, le fait qu'il existe une tradition matérialiste au sein de la pensée occidentale, qui a tendance à considérer l'homme comme une "machine". Evidemment, une machine n'est pas capable de jugement, elle ne peut être autonome. Elle est nécessairement hétéronome. Elle est destinée à servir. C'est en effet peu ou prou l'argument d'Aristote pour justifier l'esclavage.

Aujourd'hui, c'est clairement par exemple le problème que pose les mères porteuses "professionnelles", celles qui, dans les pays en développement en particulier, vivent de cette "activité" : Réduire une femme à sa matrice, en faire une machine à procréer, n'est-ce pas la réduire en esclavage ?
Question à laquelle les cyniques répondent : "Mais pas du tout puisqu'elle est libre, c'est tout à fait librement qu'elle a choisi d'exercer cette activité pour vivre." Argument qui fait étrangement écho à celui des Grecs : L'esclave, à l'origine, est un homme libre, à qui il a été donné de choisir librement entre vivre (en esclavage) et mourir.

Etonnant, tout de même, l'actualité toujours renouvelée de ces vieilles analyses, et comme elles apportent une lumière bienvenue, et sans doute nécessaire, sur les problèmes contemporains -et même futurs.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 17:50

à euthyphron

Si, il y a une règle de formation des règles, elle est fournie par la finalité de l'activité philosophique. Est donc "interdit" tout ce qui empêche de dialoguer en vue de la vérité, et seulement cela.
Il me semble que pour toi poser une finalité implique de régler son comportement en fonction d'elle. On cherche une méthode ou à réformer l'entendement ou à réglementer le dialogue .
Ce qui est tout à fait normal si on a un but on cherche les moyens de l'atteindre . On ne laisse pas ça au hasard. On se donne des règles qui semble favoriser l' atteinte du but .
Mais quelle est la méthode qui  permet de poser la méthode ? Quelle est la règle qui permet de poser la règle de la formation des règles ....ad infinitum.

..........

Bon je cesse parce que  la recherche de la définition de la philosophie est pour moi une question mineure. Chacun cherchant à imposer la sienne et à gendarmer l' autre .

Personnellement je retire des enseignements des textes.
Cela dit j'aime bien discuter.
Mais Je n'attends pas de la discussion plus que de la lecture solitaire des grands textes .( je n'ai pas attendu ).

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Message par Bergame Dim 5 Jan 2014 - 18:10

hks a écrit:Ce qui est tout à fait normal si on a un but on cherche les moyens de l'atteindre . On ne laisse pas ça au hasard. On se donne des règles qui semble favoriser l' atteinte du but .
Mais quelle est la méthode qui  permet de poser la méthode ? Quelle est la règle qui permet de poser la règle de la formation des règles ....ad infinitum.
Oui, personnellement je suis d'accord avec cela. Je l'ai dit, j'ai fait l'expérience des forums de discussion justement -à l'origine- pour tester la thèse selon laquelle la situation de discussion elle-même était normative. Ma conclusion est que c'est peut-être le cas à très long terme. Mais à court et moyen terme, le "nietzschéen" peut effectivement "foutre le bordel" et endommager gravement ce que les autres tentent patiemment, et maladroitement, de construire.
Donc je crois qu'il faut savoir se résoudre à imposer des règles et des contraintes. Qui, bien sûr, sont arbitraires, disons qui ne se justifient -comme tu le dis, euthyphron- que de la finalité, et encore : A condition que ce soit effectivement la fin que poursuivent ceux qui participent positivement à la situation de discussion. Et en assumant que ces règles ne sont valables que pour un espace, délimité, et non pas "en droit" ni universellement.

La justification de la justification, disait H.Albert, n'aboutit pas seulement à une option, hks, mais à 3 possibles :
- La régression à l'infini, en effet.
- La circularité, ou la tautologie.
- La position arbitraire, l'arrêt de la régression à un niveau choisi arbitrairement. Bien souvent, ce choix n'est pas conscient, continuait-il, mais c'est ainsi que sont constitués tous les systèmes philosophiques : Ils reposent sur des prémisses.

Pour ma part, j'ajoute pourtant que cet arrêt n'est pas si arbitraire, aussi longtemps qu'il est reconnu, admis, accepté par les autres. En l'occurrence et par exemple, s'il existe effectivement un consensus sur la finalité d'un espace parmi les occupants de cet espace, sur la finalité d'une activité parmi les participants à cette activité, alors l'arrêt arbitraire de la régression à un niveau qui les satisfait est pleinement justifié, justifié pour ces individus. Plus concrètement : Des règles, valables pour un espace donné, et qui rencontrent le consensus des occupants de cet espace, sont des règles légitimes pour ces individus. Et quiconque contrevient à ces règles au sein de cet espace peut alors être sanctionné.

Encore une fois, à mon avis, il n'y a pas d'universel, il n'y a (potentiellement) que de l'unanime -et atteindre à l'unanimité est déjà un objectif bien élevé.

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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 18:21

Ce qui est arbitraire, c'est la prétention d'exhaustivité. C'est-à-dire la prétention d'écrire le règlement définitif de toute discussion philosophique possible.
Rien à voir avec l'acceptation de la fin, et d'accorder son comportement à cette fin. Il est clair que c'est un work in progress, que l'abus en tel lieu (par exemple, sur digression, l'abus des allusions pour faire savant) va motiver l'insistance sur telle règle, à laquelle on n'aurait pas pensé en tel autre lieu. C'est l'insatisfaction qui motive l'écriture de la règle. Or, l'insatisfaction n'est pas universelle, elle n'est pas la même partout et en tous temps.
En revanche, qu'il y ait plaisir et profit à chercher la vérité par le dialogue, et que pour cela il soit nécessaire d'adapter son comportement, c'est valable en toute culture.

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Message par Bergame Dim 5 Jan 2014 - 18:23

Pour toute culture, admettons -de toutes façons, ce serait difficile à justifier. Mais pour tout individu ? Qu'en penses-tu ?

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 18:27

à bergame

on est en phase là dessus.

mais c'est ainsi que sont constitués tous les systèmes philosophiques : Ils reposent sur des prémisses.
Pas que les systèmes!( je relève parce qu'ils vont se sentir dédouanés) .
La philosophie par et dans le dialogue n'est pas sans prémisses (implicites ).
Le feu nourri quoiqu' en ordre dispersé contre la philosophie des lettrés est injuste. Il y a une expression pour ça,  à base de soupe et de salive.

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Message par neopilina Dim 5 Jan 2014 - 18:34

Et les prémisses doivent être constamment travaillées au corps. Si on a quelques talents, on ne philosophe pas impunément ( Voir Descartes, Marx, Heidegger, ... ). Cette recherche, c'est proprement la métaphysique.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 18:35

à euthyphron

Ce qui est arbitraire, c'est la prétention d'exhaustivité. C'est-à-dire la prétention d'écrire le règlement définitif de toute discussion philosophique possible.

Alors là je re- re- tombe de ma chaise !!! Parce qu'il m'avait bien semblé que toi tu avais la prétention d'écrire le règlement définitif de toute philosophie...laquelle ne pouvant être bonne dans et par le dialogue.

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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 18:52

Dis-moi j'ai pu écrire quelque chose qui a pu te faire penser cela, que j'édite!

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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 19:00

Bergame a écrit:Pour toute culture, admettons -de toutes façons, ce serait difficile à justifier. Mais pour tout individu ? Qu'en penses-tu ?
Je vois un double sens dans ta question.
Version 1: Y a-t-il des individus que le dialogue n'intéresse pas, ni d'une façon générale la recherche de la vérité?
Eternelle question dont je n'ai pas la réponse. Je vois bien autour de moi qu'il y a des gens qui ont l'air abrutis et fiers de l'être en plus, d'ailleurs Sarkozy a été élu en 2007, mais qu'est-ce que j'en sais au fond? Sans parler des gens que ça intéresserait mais qui sont trop intimidés par leur rang social.
Version 2: l'individu a-t-il le droit d'imposer ses propres règles?
Dans le Gorgias, Socrate demande à Polos d'éviter les longs discours à sa manière (sous-entendu: creux). Polos revendique alors le droit de s'exprimer comme il le souhaite. A quoi Socrate répond qu'il est lui-même libre de ne pas écouter. La moralité est facile à tirer : si tu veux discuter, fais-le à deux (ou plus)!

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Message par quid Dim 5 Jan 2014 - 19:22

Alors voici quelques considérations supplémentaires, en parti en réponse à euthyphron sur la possibilité d'une critique hors opinion, mais aussi pour pour appuyer la considération de s'accorder à soi-même et d'accorder soi-même.

N.B : Il se peut que de la sophistique se soit glissée dans ces considérations, veuillez m'en excuser, ceci est indépendant de ma volonté  Quel est le problème avec la philosophie ? - Page 8 2838363678 .

Si la philosophie est de s'abstraire de l'opinion jusqu'à sa propre opinion même, afin d'exercer une critique absolue, je me demande d'où s'exerce cette critique. J'entends là donc un lieu de la critique, qui serait immunisé contre l'erreur. Qui ne serait donc pas un fondement possiblement erroné d'où le discours parle, qui serait un lieu non critiquable, mais qui existerait tout de même. Ce lieu peut alors en quelque sorte être vu comme le fondement de la vérité, celui duquel on peut s'élancer pour atteindre un objectif, celui de la Vérité. Ce lieu présuppose la finalité : la Vérité ; et ceci déjà en présupposant que ce lieu est exempt d'erreurs et qu'à la fois on peut discourir depuis ce lieu, qu'il existe.

Alors que chacun recherchant la vérité prétend parler depuis ce lieu, il est alors surprenant que ceux-là ne puissent se mettre d'accord quand ils discourent. Cela est peut être dû au fait que certains, à un moment, soient sortis quelque peu de ce lieu privilégié. Mais aussi peut-être tout simplement que ce lieu n'existe pas.

Je dirais alors qu'il y a, a minima, un lieu d'où l'on parle et qui n'est pas neutre. Ce lieu je dirais que c'est celui de l'entendement. Il n'est pas neutre, pas parce-qu'il serait critiquable dans l'absolu, car la critique ne peut être absolue, sinon il y aurait un lieu d'où elle peut s'exercer absolument, il n'est pas neutre parce-qu'il est donné.

Ainsi lorsque l'on discourt, on discourt depuis un lieu qui suppose des enjeux et par là induisent une finalité, où une visée. En tant que finalité non réalisée, ces enjeux restent flous et imprécis ; c'est pourquoi ils sont plus une visée. Mais si le lieu n'existe pas, pourquoi la visée existerait ? Viser la vérité est un objectif qui n'a pas de fondement ; ou alors, la vérité pour soi, pour son propre entendement.

Mais lorsque l'on parle d'entendement, au sein d'une subjectivité, il y a, il me semble, un présupposé  que cet entendement serait partagé par différentes subjectivités. Et si une subjectivité ne peut correspondre exactement à une autre, l'entendement lui, sera ce qui est commun à toutes les subjectivités, mais ayant aussi l'incongruité de rester flou et non circonscrit.

La frontière est mince entre l'entendement et la subjectivité et d'aucun pourraient nous accuser de la franchir, même involontairement. Il est cependant curieux qu'ils le fassent au nom de la vérité.

Mais l'on atteint là une considération notable à mon avis. En quoi faudrait-il s'entendre réciproquement et absolument ? En quoi faudrait-il ébavurer et considérer comme bavure la part de subjectivité n'entrant pas dans l'entendement conventionné ? Pourquoi faut-il circonscrire un entendement et par là être, au moins temporairement, restrictif ?
Lorsque l'on aura cette démarche, afin de ne rien voir dépasser, on aura sans doute la tentation de faire coller, on aura parfois le mépris du paradoxe, de la contrariété, on le laissera sur le bord du chemin comme négligeable. On reléguera son intégration à plus tard, il finira bien par entrer dans le puzzle. Puzzle qu'on a décrété comme étant tel.
On pense parler depuis un lieu neutre alors qu'il ne l'est pas. Et lorsque l'on veut s'en abstraire, on parle depuis un lieu qui n'existe pas, échafaudant des cathédrales (sic. neo.) de cristal où tout peut bien entrer, il suffira de construire un nouvel étage ou une nouvelle annexe.

Or on peut aussi avoir une autre démarche, celle de ne pas considérer ce qui dépasse comme une bavure. Voir plutôt peut-être, en quoi la bavure est nécessaire, même si elle semble nous gêner de prime abord. La visée dans ce qu'elle a d'approximatif, ne vise plus un absolu, car elle parle depuis un lieu en parti incertain et non circonscrit et du coup vise un autre lieu de même genre.

La bataille de l'entendement est une bataille perdue d'avance, car elle suppose de nier une partie de la subjectivité. La sienne ou celle de l'autre. La sienne pour adhérer et se conformer , celle de l'autre en tant que conformiste qui s'ignore. Ici le mot conformiste n'est pas un gros mot, mais une manière de signifier qu'on l'est presque inévitablement, que ce soit en niant que l'on parle d'un lieu qui n'existe pas et que ce qu'on édicte, n'est qu'une réduction de la subjectivité et de toutes les subjectivités, soit que l'on parle depuis un entendement dont la circonscription restera incertaine et d'où débordera sa propre subjectivité.

Je ne dis pas qu'il faut succomber à l'opinion pure et simple, mais qu'il ne faut pas espérer mettre d'accord par des effets de formalisation purs. La formalisation n'étant que des outils qui ne convaincrons que ceux qui les maîtrises le mieux. Celui qui se verra mis en défaut ne sera pas pour autant convaincu, à moins de voir une nouvelle mise en lumière de quelque chose qu'il n'avait pas entrevu jusqu'à lors ; mais d'autres discours moins formels auraient également portés leurs fruits. Le discours formel et désincarné n'est pas le garant de la proclamation d'une vérité, loin s'en faut. Tout discours ou événement est en quelque sorte une vérité, s'il contribue par résonance, à éclairer une subjectivité. Et cette éclaircissement ne peut être qu'en considération de cette subjectivité. Trouver des accords, des vrais, est toutefois il me semble, source de joie, d'où sans doute la promptitude et la propension à convaincre, source également de frustration.

Frustration qui peut alors aller jusqu'à un dialogue avec soi-même, en se retranchant afin d'affûter ses arguments, allant parfois jusqu'à ne plus vouloir considérer l'autre, mais le posséder, l'absorber, et finalement le nier. Et qui viendra nous déranger là, dans les tréfonds de notre retranchement ? Bien sûr que cela permet de s'extraire quelque peu du bruit parasite, mais attention à revenir de temps en temps respirer à la surface, voir si l'on ne s'éloigne pas de l'objectif : Partager, se rejoindre,  et non pas imposer ou s'effacer.

Je ne fais pas une critique de la philosophie, j'essaye juste de développer certaines considérations où d'autres plus positives pourraient sans doute être mises en évidence.


À baptiste.

Si l'accord avec soi-même est à mon avis incontournable, il peut ne l'être que dans l'optique d'une visée. En ce sens, il peut ne pas édulcorer certains aspects de sa propre subjectivité, ne pas s'imposer un idéal sans fondement, ne pas s'imposer des limites qui n'ont pas lieu d'être. Mais également, comme visée il n'est pas une application stricte et immédiates de règles, mais une adhésion qui se veut un parcours ou une persévérance. La visée n'est pas réalisée d'emblée et ne le sera sans doute jamais.

Petit extrait de Nietzsche, non pas que ce soit un maître à penser pour moi, mais que l'on peut tout de même trouver quelques résonances, même partielles.
Ainsi parlait Zarathoustra - De l'arbre sur la montagne - Nietzsche a écrit:
Zarathoustra mit son bras autour de l'arbre contre lequel le jeune
homme était assis et il parla ainsi:

"Si je voulais secouer cet arbre avec mes mains, je ne le pourrais pas.

Mais le vent que nous ne voyons pas l'agite et le courbe comme il veut.
De même nous sommes courbes et agites par des mains invisibles.

Alors le jeune homme se leva stupéfait et il dit: "J'entends
Zarathoustra et justement je pensais à lui." Zarathoustra répondit:

"Pourquoi t'effrayes-tu? - Il est de l'homme comme de l'arbre.

Plus il veut s'élever vers les hauteurs et la clarté, plus profondément
aussi ses racines s'enfoncent dans la terre, dans les ténèbres et
l'abîme, - dans le mal?"

" Oui, dans le mal! s'écria le jeune homme. Comment est-il possible
que tu aies découvert mon âme?"

Zarathoustra se prit a sourire et dit: "Il y a des âmes qu'on ne
découvrira jamais, a moins que l'on ne commence par les inventer."

"Oui, dans le mal! s'écria derechef le jeune homme.

Tu disais la vérité, Zarathoustra. Je n'ai plus confiance en moi-même,
depuis que je veux monter dans les hauteurs, et personne n'a plus
confiance en moi, - d'où cela peut-il donc venir?

Je me transforme trop vite: mon présent réfute mon passé. Je saute
souvent des marches quand je monte, - c'est ce que les marches ne me
pardonnent pas.

Quand je suis en haut je me trouve toujours seul. Personne ne me
parle, le froid de la solitude me fait trembler. Qu'est-ce que je veux
donc dans les hauteurs?

Mon mépris et mon désir grandissent ensemble; plus je m'élève, plus je
méprise celui qui s'élève. Que veut-il donc dans les hauteurs?
...
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Message par euthyphron Dim 5 Jan 2014 - 19:43

Il y a quelque chose que je ne comprends pas dans ce que tu écris. Le problème, c'est qu'apparemment tout ton texte suppose qu'on l'ait compris.
C'est l'idée d'un lieu de la critique immunisé contre l'erreur.
Je comprends bien que "lieu" est une métaphore. Mais peu importe, comme je l'ai déjà dit je ne vois pas pourquoi on interdirait les figures de style.
Mais que veut dire cette aspiration à une immunité contre l'erreur? C'est exactement le contraire, non? C'est parce que l'esprit humain (probable pléonasme) ne peut pas ne pas se tromper que le dialogue est intéressant.
Je ne peux pas commenter la suite, car elle me paraît étroitement solidaire de ce point.

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Message par neopilina Dim 5 Jan 2014 - 20:22

La contribution de quid est effectivement très dense et cohérente.

Je maltraite le cogito, oui, mais il ne faut pas oublier que je le conserve, mieux, je lui permets de mettre la main sur le Monde, sur tout : un Monde est toujours celui d'un Sujet : cogito.

Et c'est donc toujours un Sujet qui philosophe, il trainera ça comme un boulet dans son combat, sans fin, vers l'objectivité. Le cogito est devenu historiquement un point de départ convenu, en tout cas pour beaucoup de philosophes et pas des moindres. Sartre épinglant le Dasein : " Nous voilà renvoyés au cogito, quelques soient ses inconvénients, c'est de là qu'il faut partir ". Je l'ai pris au pied de la lettre ! En rouvrant, retrouvant, la porte du poêle cartésien par où arrive l'imprudent expérimentateur du cogito et qui s'évanouit de facto avec cette expérience ( La fameuse Envolée de Murailles. ), le philosophe renouait le contact ainsi rompu ( D'où de fabuleuses cathédrales ... construites sur des nuages. ), par la démarche du doute radical, avec le Donné, et ce faisant le cogito prend la clef des champs, s'abat pleinement sur le Monde du Sujet : le doute devient la première règle.
Pour des raisons d'ordre pratique, éviter l'éparpillement, on peut convenir d'un point de départ, mais a contrario, bien sûr, pas question d'en faire une Loi intangible. Tout un chacun peut, à le droit, de le remettre en cause, il le faut même : c'est le propre de la métaphysique. L'attitude inverse, c'est rien de moins que s'interdire celle-ci.

Je termine mon abrégé par : " On peut reprendre ". Mégalo ? Peut être. Mais si j'ai effectivement rétablis et pour se faire dit ce Lien a priori entre le Sujet et Son Monde, c'est le cas.

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Message par quid Dim 5 Jan 2014 - 20:40

à euthyphron.

euthyphron a écrit:Il y a quelque chose que je ne comprends pas dans ce que tu écris.
C'est l'idée d'un lieu de la critique immunisé contre l'erreur.
Mais que veut dire cette aspiration à une immunité contre l'erreur? C'est exactement le contraire, non? C'est parce que l'esprit humain (probable pléonasme) ne peut pas ne pas se tromper que le dialogue est intéressant.

Merci euthyphron de ton effort de lecture, je me disais bien que rien ne me garantissait que je sois compris, mais normalement je me comprends :

Le lieu de la critique c'est d'« où » métaphoriquement, dans le sens d'  « où le discours prend sa source », sur quoi repose-t-il, qu'il soit plus ou moins formalisé d'ailleurs.

Et je dis donc que l'on peut lire dans la finalité, son origine.

Mon exemple précédent d'un choix d'embranchement lors d'une ballade en groupe est circonscrit par des considérations qui sont limitées à la ballade. L'accord est relatif à un certain enjeu. Je ne sais pas, par exemple la dangerosité du parcours, la nuit qui vient, …

C'est un peu peut-être la cause finale d'Aristote. Donc des considérations, quelles soient explicites ou implicites entre en jeu dans l'accord.

Maintenant si l'on suppose que l'accord de la discussion porte sur une vérité générale, déjà je remarque qu'une vérité générale est subordonnée à la Vérité, sinon cette vérité serait relative et ne serait plus générale ; et donc que la discussion présuppose l'existence de cette vérité elle présuppose qu'il peut y avoir un accord sur une vérité.

Or l'argumentation reposant sur de la subjectivité puisque émanent d'un sujet, l'argumentation ne peut se prévaloir d'accéder à une vérité, mais seulement à un accord. L'accord étant subordonné à des considérations explicites ou implicites qui n'empruntent rien à une quelconque vérité en soi.

Mais si l'on s'accorde que la discussion porte bien sur de la vérité, on suppose que l'on est capable de parler depuis un lieu qui permet d'édicter des vérités en soi. Or je remarque que personne n'est capable d'affirmer qu'un tel lieu existe, qu'une telle position existe, en tout qu'à qu'un interlocuteur puisse se prévaloir de parler depuis une telle position.

Je dis également que dans ce contexte, une telle position n'existe pas et est créée quelque peu artificiellement par l'insinuation de pouvoir être dans l'erreur. Si l'on est dans l'erreur, c'est par rapport à des considérations toute relatives à un enjeu. Il n'y a pas erreur et vérité en soi.

Si je reprends mon exemple de mon cours d'auto-école expliqué précédemment, l'enjeu de la réponse juste, et de l'accord entre moi et le moniteur école, était le danger. Que l'on soit bien d'accord sur ce qui pouvait être dangereux et qu'elle mesure était dans notre jugement la plus adéquate à une situation en considération de cet enjeu.

La vérité n'est pas un enjeu en soi, un discours qui parle de cette enjeu ne parle de nulle part, n'a pas de réalité. En fait le discours part de quelque part qui est en soi critiquable, ce n'est pas une affaire d'erreur ou de vérité, mais d'accord.

Je poursuis ensuite sur les modalités de cette accord, et en quoi cet accord est un vrai accord, en faisant entrer en jeu le présupposé de l'entendement qui a lui-même des contours un peu flous.

Edit : Bon je ne sais pas si c'est plus clair, mais j'avoue que j'ai du mal à faire mieux pour l'instant.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 21:55

à euthyphron

Dis-moi où j'ai pu écrire quelque chose qui a pu te faire penser cela, que j'édite!


Ce que tu dis ensuite me confirme dans ma conviction. Tu estimes le dialogue nécessaire /indispensable à la bonne philosophie. Il n'en est pas hors du dialogue.

pour la raison suivante :
C'est parce que l'esprit humain (probable pléonasme) ne peut pas ne pas se tromper que le dialogue est intéressant.

 Et moi je ne vois pas qu'en confrontant deux erreurs on puisse en faire sortir la vérité.

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Message par hks Dim 5 Jan 2014 - 22:01

NB
ce que  dit  Quid va dans mon sens

Or l'argumentation reposant sur de la subjectivité puisque émanent d'un sujet, l'argumentation ne peut se prévaloir d'accéder à une vérité, mais seulement à un accord. L'accord étant subordonné à des considérations explicites ou implicites qui n'empruntent rien à une quelconque vérité en soi.
(remarque subtile !)

Deux esprits qui se trompent ne peuvent obtenir un accord que sur une erreur .

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Message par neopilina Dim 5 Jan 2014 - 22:19

à quid,

C'est avec la plus grande attention, comme d'habitude, que je t'ai lu. Même si je n'ai répondu qu'en partie. Somme toute, ma réaction était prévisible. Quant à l'accord obtenu, supposons-le, j'ai toujours dit qu'il était toujours perfectible, provisoire, devait être toujours sur le feu. Puisque émanant de Sujets. Le doctrinal est intrinsèquement contraire à la métaphysique.

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Message par quid Dim 5 Jan 2014 - 22:49

à neo.

Je sais que mes considérations rejoignent parfois grandement ta métaphysique  Quel est le problème avec la philosophie ? - Page 8 3438808084 

à hks.

hks a écrit:Et moi je ne vois pas qu'en confrontant deux erreurs on puisse en faire sortir la vérité.

Voilà une manière brève et très compréhensible d'exprimer la problématique que j'essaye d'exprimer par ailleurs.

Maintenant il faut voir qu'un discours peut contenir ce que l'on associerait à une vérité, dans la limite d'un entendement commun et restreint que partagerait chacun. Ce périmètre qui permettrait d'accorder un grand nombre, confinerait des vérités qui nous (en commun) seraient propres, relatives à nous-même dans ce que l'on a de commun. Encore faudrait-il qu'elles n'étouffent pas trop les subjectivités individuelles, qui inévitablement sont en lien et relativisent ces vérités. Ce groupe de vérités relatives ne peut être considéré comme tautologique en soi et se suffisant à lui même.

PS : De plus il ne me semble pas qu'il soit tellement extensible. Re-structurable oui, mais pas tellement extensible au sens d'un élargissement inconsidéré du champ de l'entendement qui nous est commun. Un élargissement inconsidéré revient à un émargement une "marginalisation" inconsidérée de subjectivités. C'est là semble-t-il, dans le contour de l'entendement que se situe l'enjeu. Le contour de l'entendement ne devrait rien émarger du tout concernant la subjectivité. Il suppose donc un commun sinon il y aurait des subjectivités inconciliables.


Dernière édition par quid le Lun 6 Jan 2014 - 0:54, édité 3 fois
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Message par baptiste Lun 6 Jan 2014 - 0:12

Néo,
Je ne juge pas un homme victime d’une addiction, je questionne la valeur d’un discours prétendument rationnel écrit sous l’emprise de psychotropes ou hallucinogènes, je questionne la capacité d’émettre des jugements dans ces conditions. Je questionne le statut de ces écrits et la qualification sociale de leur auteur pas la personne.

Euthyphron.
Enseigner des valeurs auxquelles on ne se soumet pas soi-même, c’est traditionnellement sous l’appellation de gourou ou charlatan que l’on dénomme ceux qui se livrent à cette manière d’être. Je ne vois pas ou est l'appel à l’élitisme de demander à quelqu'un de se conformer à son enseignement, un moniteur d’auto-école perd sa capacité à enseigner si on lui retire son permis de conduire, cela ne te choque pas je présume. Et si Aristote explique si clairement la justification de l’esclavage, c’est justement ce qui me pose problème, la réfutation par Rousseau n’apporte aucune réponse à mon interrogation. Pour Aristote il y a l’esclave par nature mais aussi le droit du vainqueur à soumettre celui qui se rend, Rousseau réfute l’esclavage par nature soit, mais au droit du vainqueur  il oppose le contrat social, le seul problème c’est que pour contracter il faut être deux, ceux ne sont donc pas les institutions comme le prétend Rousseau mais l’homme qui est en cause. Les institutions non seulement ne sont pas le problème mais au contraire elles peuvent être la solution, seulement voila, compte tenu de ses a priori Rousseau pouvait-il aboutir à une autre « opinion philosophique ».

En ce qui concerne l’opinion justement, oublions les raisons triviales, non qu’elles ne soient pas importantes mais juste parce qu’elles sont triviales. Et si la « malhonnêteté » intellectuelle n’était le système lui-même. Produit de l’histoire, même si  la raison conserve par rapport à lui une indépendance relative, l’académisme crée une distance entre l’environnement de la réflexion et le réel que le philosophe est censé cerner. Cette distance ne donne pas nécessairement à l’ « opinion philosophique » une vision plus juste que l’opinion ordinaire qui peut se fonder dans une tradition, un affect mais aussi une réaction biologique. Lorsque Bachelard dit « L’opinion pense mal » car elle ne peut se fonder rationnellement, il perpétue un message historique que les sciences cognitives infirment aujourd’hui dans certain cas. L’opinion ne pense pas « nécessairement » mal, il se peut qu’elle soit juste tandis que « l’opinion philosophique » peut être erronée. La définition de l'opinion est fausse.

HKS

Le livre « Camus philosophe de classe terminale » n’a discrédité que son auteur. Les références à cette revendication de non philosophe dans l’œuvre de Camus sont nombreuses, juste quelques une relevées dans le Mythe de Sisyphe «  Exception faites pour les rationalistes de profession, on désespère aujourd’hui de la vrai connaissance. S’il fallait écrire la seule histoire significative de la pensée humaine il faudrait faire celle de ses repentir successifs et de ses impuissances » « Etranger à moi-même et à ce monde, armé pour tout secours d’une pensée qui se nie elle-même dés quelle affirme… »  il cite Nietzsche « L’art et rien que l’art, nous avons l’art pour ne point mourir de la vérité » ou appliquer à lui-même ce qu’il dit de Dostoïevski «  Si Dostoïevski se contentait de cet examen il serait philosophe. Mais il illustre les conséquences que ces jeux de l’esprit peuvent avoir dans une vie d’homme »

Bergame

Camus disait que la seule question philosophique c’est celle du suicide, il me semble que la seule question soit plutôt l’altérité.

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