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Message par Moi Sam 19 Avr 2008 - 14:21

Bonjour. Voilà je viens juste de m'inscrire après avoir été enthousiasmé parce que j'ai pu lire ici. C'est donc mon tout premier sujet (quelle émotion!). Je vous demande juste d'être indulgents. Je suis en effet bien jeune, et je pense qu'au niveau de la réflexion, je suis bien loin d'avoir votre niveau :D

Donc voilà, je pose une question. L'être humain est-il réellement libre? Si oui, en quoi consiste sa liberté? Voilà c'est quelque chose qui m'intéresse. J'attends avec impatience vos pensées sur ce sujet. J'ai moi même une petite idée sur la question mais je préfère attendre de voir vos opinions avant d'exposer ma vision des choses.

P.S. : J'ose venir ici, sur ce forum, afin de m'améliorer en quelque sorte. Je le répète, je ne vous vaux pas, mais c'est avec le contact du meilleur qu'on s'améliore.

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Message par Bergame Dim 20 Avr 2008 - 11:09

Quel enthousiasme, cela fait plaisir à lire ! Bienvenue, Moi.
Mais maintenant que tu t'es lancé, tu devrais aller au bout des choses et nous livrer tes propres réflexions sur le sujet. La question de la liberté est vraiment un sujet trop vaste, il me semble que tu devrais commencer tout de suite à aiguiller la discussion en précisant dans quel sens tu l'envisages.
Et n'hésite pas, je pense qu'ici, on essaie de comprendre ce qui est dit avant de juger qui le dit -je pense Wink
Tu te lances ?
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Message par lekhan Dim 20 Avr 2008 - 11:13

Bienvenue et pour t'aiguiller nous avions déjà un peu discuté de ce sujet si ça t'intéresse:

https://digression.forum-actif.net/actualite-et-pensees-politiques-f22/qu-est-ce-que-la-liberte-t170.htm
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Message par Moi Dim 20 Avr 2008 - 11:45

D'accord je me lance. . J'ai commencé à m'intéresser à la philosophie cette année (Terminale oblige), et c'est pour cela que je me considère comme un "débutant".

J'ai vu que vous en aviez déjà parlé mais j'avoue que je n'ai pas eu le courage de tout lire :D

Donc voilà le sujet de liberté m'intéresse au plus haut point.

Tout d'abord il y a l'impression de liberté que "tout le monde" peut ressentir. Par exemple, manger une banane, entrer dans un magasin, regarder la télévision, tout cela nous le faisons librement apparemment sans aucune contrainte extérieure. "J'entre dans cette boutique parce que je le veux. Si j'en fait le choix je peux ne pas y entrer". Ainsi notre liberté apparaît dans le fait que nos actes peuvent être libres de toute détermination extérieure. Je peux par exemple décider comme cela, sans aucune raison, de tuer quelqu'un.
Ainsi la liberté humaine apparaît au premier abord comme existant réellement.

Mais on peut trouver plusieurs objections.
Tout d'abord, si je choisis d'entrer dans ce magasin précis, c'est pour une cause précise. Et cette cause a une cause également, qui en a une aussi, etc... On peut remarquer que là, le choix de rentrer dans le magasin n'est pas vraiment fait en toute liberté puisqu'on peut déterminer des causes indéfiniment. (pas sûr que ce soit vraiment français mais tant pis Razz).
Ensuite, il y a le grand argument de la détermination de nos comportements par la société et la culture auxquelles nous appartenons (il me semble qu'on donne le nom de structuralisme à cela mais je n'en suis pas sûr renseignez moi svp). Ainsi tous nos goûts, nos repères, notre façon même de penser sont dépendants de notre culture ou civilisation... L'humain ne pourrait ainsi se défaire de cette culture dans le sens où elle le constitue pleinement. Il n'est donc pas réellement libre.
Puis vient le destin. Chaque personne serait déterminée, et vouée à une destinée précise. Le fait de choisir n'influerait aucunement sur cela. Et peut-être même que ces choix sont déjà écrit quelque part. Je dois dire que c'est une chose en quoi je ne crois pas vraiment, mais il est évidemment possible que je me trompe :) .
Il y sans aucun doute d'autres objections à la liberté humaine, mais celles-ci me viennent à l'esprit naturellement.

Enfin pour moi, la liberté peut être définie comme un choix. L'être humain est libre car il a une capacité de choix. Il se différencie ainsi des autres animaux (car il en est un, il ne faut pas l'oublier). Pourquoi ces animaux n'auraient-ils pas de choix? Sans doute parce qu'ils n'ont pas la capacité "intellectuelle" nécessaire pour comprendre et maîtriser leurs désirs.
Mais le choix humain est-il réel ou n'est-ce qu'une illusion? On peut se poser la question de libre-choix. (cf objections).
Je pense que chaque être humain a la capacité de "s'extérioriser" en quelque sorte, de se contempler entièrement, en prenant en compte ses désirs, sa nature-culture (nature créée par sa culture). En fin de compte la liberté humaine consisterait à rencontrer des obstacles et à les dépasser ensuite. Je me disais que l'on pouvait le faire car on a conscience de tout. Par exemple, la passion aveuglante qui asservirait l'humain n'est qu'une illusion dans le sens où l'humain a conscience de cette passion, la connait et même la désire.

Mais je me pose alors une question. Existe-t-il vraiment des obstacles à la liberté humaine? En effet si l'humain connait ces obstacles, en sont-ils réellement? Je me dis que oui mais seulement dans sa pensée.... Je veux dire que non en fin de compte, mais que l'être humain apeuré par sa liberté, se construit des obstacles pour se dédouaner....


Voilà à peu près ce que j'en pense Liberté... 3980187607


P.S. : j'ai lu quelques bouts de Platon et de Sartre. j'aime bien Sartre.

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Message par Vargas Dim 20 Avr 2008 - 14:07

Salut !
Aucun de nous n'est spécialiste de philo, je te rassure Laughing

Ton cheminement est intéressant.

1) A la base je fais ce que je veux.

2) En même temps, ce que je fais librement a peut-être des causes qui prècèdent mon acte.
Bref, la liberté totale, inconditionnelle rencontre le réel, la pensée, la logique, etc..
Il y a une part de déterminisme dans les actes humains aussi. On ne sort pas du néant.
On s'inscrit dans une culture, il y a des codes, des normes, des habitudes, etc...
(le structuralisme ne correspond pas à ceci et est postérieur, mais il permet de mieux poser le problème : comment les structures nous travaillent, comment sont agencées des multiplicités -une structure, un ensemble de personnes, un pays... - donc tu as raison d'associer ce courant dans la façon dont tu poses la question).

3) allant jusqu'au bout du déterminisme, vient la pensée qu'il y a peut-être un destin.
Les choses sont peut-être déjà décidées par des forces supérieures, etc...

4) Changement d'échelle avec la liberté comme choix.
Rien n'est entièrement indéterminé, rien déjà écrit. Surtout pas tant qu'on n'a pas choisi. On pourrait aussi dire et "puis même si c'est ainsi il faut choisir, on a la liberté de son choix."

L'instant du choix, ç'est à la fois la plus petite échelle de la liberté d'un certain point de vue. Mais c'est aussi là où elle se condense.
On peut décider de ne pas choisir car on ne se croit pas libre, car on considère que le choix qu'on a ne vaut pas la peine d'être pris (mourir fusillé avec un bandeau sur les yeux ou mourir fusillé en clamant une dernière fois un message), voire qu'il est illusoire (avoir à choisir de voter entre le PS et l'UMP si on considère que les 2 ne méritent pas d'être cautionnés par un bulletin dans l'urne.
Donc le risque que la liberté soit illusoire.

5) Ce qui fait obstacle, problème à, ce qui réduit la liberté existe-t-il vraiment ?
Bref, se poser la question en se demandant si ce n'est pas en tant qu'attitude à avoir à l'égard de sa propre liberté, que ces obstacles prennent forme, ou au moins perdurent.


Quelques pistes :
- sur liberté, destin et fatalité, le stoïcisme et l'épicurisme sont très intéressant.
Notamment en en ce qui concernes les distinctions entre besoin et désir, entre nécessaire et non-nécessaire.
Mais aussi parce que liberté et fatalité sont les 2 faces d'un même terme.
- Sur la question de la détermination, il y a l'extrème du déterminisme absolu de Laplace.
Et Bergson : être libre comme centre d"indétermination. Mais aussi du point de vue des actions physiques et des activités mentales.
- Il y a aussi Rousseau : Discours sur l'inégalité entre les hommes.
Le vieux thème nature-culture. Mais plus que celà c'est un bon point de départ pour reposer la question de la liberté et du potentiel.
- Sur l'illusion de la liberté, de certains choix : Nietzsche et le thème de l'illusion vitale.

Quant à Sartre, il a ce mérite de casser des limites inutiles à un moment donné.
Je pense notamment à sa phrase sur le fait qu'un juif est avant tout quelqu'un considéré par d'autre comme juif.
Et Deleuze parlant d'un devenir-femme de l'homme différent d'un devenir-femme féminin.

Bref, il y a l'attitude qu'on a et qu'on se donne, l'identité qu'on nous colle, les actes face auxquels il y a à réagir, le choix comme expérience, un projet d'existence qui est NOTRE déterminisme.

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Message par Moi Dim 20 Avr 2008 - 16:18

Lorsque tu dis
un projet d'existence qui est NOTRE déterminisme
est ce que tu veux dire que nos actions, notre vie est déterminée mais seulement par un choix qui nous appartiens?

J'ai retrouvé un passage de L'existentialisme est un humanisme où Sartre dit :
"L'homme est d'abord un projet qui se vit subjectivement, au lieu d'être une mousse, une pourriture ou un chou-fleur ; rien n'existe préalablement à ce projet ; rien n'est au ciel intelligible, et l'homme sera d'abord ce qu'il aura projeté d'être. Non pas ce qu'il voudra être. Car ce que nous entendons ordinairement par vouloir, c'est une décision consciente, et qui est pour la plupart d'entre nous postérieure à ce qu'il s'est fait lui-même."

Voilà, moi je le comprends par : l'homme se fait un projet pour lui-même, et ce projet est antérieur à toute chose dans le sens où il sera "ce qu'il aura projeté d'être". Cependant, Sartre dit que l'homme n'est pas ce qu'il "voudra être" car selon lui vouloir est une "décision consciente". Je n'ai pas très bien compris cela. Veut-il dire que le projet est inconscient?

Maintenant, il y a une autre interrogation.
Sommes-nous libre de la même façon dans un régime dictatorial et dans une démocratie? En effet le choix peut être fait de la même manière sous les deux régimes.
Voilà un point qui me pose problème. C'est en effet assez "bizarre" (on va dire ça comme ça) d'affirmer que l'humain est aussi libre lorsqu'il est opprimé que quand il est "libre" ...

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Message par Vargas Dim 20 Avr 2008 - 17:51

Oui, on peut l'entendre au sens sartrien.
On peut aussi l'entendre au sens de volonté, par-delà la distinction que fait Sartre.
On peut enfin rejoindre cela, avec la notion d'attitude, de style.
On se donne une manière d'agir, de se projeter, de se penser libre. En se construisant ainsi, on dépasse les termes de conscience, inconscience. Et surtout d'antérieur/postérieur.
On est selon la sensation de la liberté qu'on a.

Et on ne peut pas en avoir la même sensation à Auschwitz en 1943 et aujourd'hui en Angleterre, par exemple.
C'est la limite de l'expression de Sartre : " on n'a jamais été aussi libre que sous l'Occupation ".
On ne peut pas se permettre d'être dans une situation extrême, d'attendre de voir des libertés collectives réduites pour se demander ce qu'il en est de la liberté.

En même temps, la comparaison entre dictature et démocratie sert trop souvent à contenter ceux qui vivent dans la seconde en leur pointant du "moins bien" (la Chine depuis une décennie).
Aucun pays n'est entièrement démocratique.

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Message par Moi Dim 20 Avr 2008 - 18:42

Je pense qu'il faut différencier deux sortes de liberté.

1) La liberté humaine au sens large, comme possibilité de choisir

2) La liberté "individuelle" dans le sens où elle peut varier selon les individus

Elles ont une différence majeure. La liberté humaine ne varie pas selon les situations ou les individus.
La liberté dite "individuelle" varie. Elle est en fait, l'expression de la liberté humaine.
Si on prend l'exemple d'un camp nazi. Le prisonnier est libre car l'humain est libre par définition. Mais on pourra dire que lui ne l'est pas car il ne peut exprimer sa liberté.

C'est il me semble l'idée que tu voulais exprimer en disant

Et on ne peut pas en avoir la même sensation à Auschwitz en 1943 et aujourd'hui en Angleterre, par exemple.

Ensuite je suis assez d'accord sur le fait qu'aucun pays n'est réellement démocratique.
Mais il faudrait définir un état démocratique.

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Message par Vargas Dim 20 Avr 2008 - 20:47

Le problème, c'est que ça donnerait une liberté conceptuelle, pure, l'archétype "liberté" et une autre relative, contextuelle ou situationnelle pour continuer avec Sartre.

Ca semble faciliter le problème, mais au fond, ça ne fait pas beaucoup avancer les choses.

Au contraire, dans la phrase que tu cites, je voulais dire qu' il n'y a pas 2 expériences identiques de la liberté.
Bref, la liberté individuelle précède la liberté humaine Wink
Et de cette dernière, il existe des multitudes de représentation.

je prends un exemple très con : je suis myope.
Je pense à comment des myopes vivaient, percevaient la réalité avant que l'optique n'émerge.
Leur liberté n'est pas la même.
Il n'y pas de liberté, de droits universaux qui soient concrets. (ce qui n'a rien à voir avec le fait de défendre ou non des principes).

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Message par Pierre Rivière Dim 20 Avr 2008 - 21:46

Puisque c'est intéressant ici, laissez-moi ajouter mon grain de sel.

Il y a énormément de choses à dire sur ce sujet, mais je vais commencer par une seule idée et on pourra développer par la suite.

Malheureusement, je fais parti de ceux qui pleurent pendant 2 jours lorsqu'on tente de réduire la liberté à la possibilité de choix.
Voici mon argument:
La nécessité est une dialectique entre la possibilité et l'existence (voir les catégorie de modalité dans La critique de la raison pure de Kant). Je m'explique

Comme Moi l'a bien dit, la première objection à la liberté conçue comme choix est le principe de raison suffisante. Mon choix n'est qu'une illusion car il est en fait déterminée à se produire par une raison suffisante, celle-ci par une autre raison, et ce ad infinitum ou jusqu'à une hypothétique cause première indéterminé (à elle-même sa propre cause).

Donc, dans ce schéma, on pose l'existence d'un objet (par mon acte de choisir), puis on le réfère à un ensemble de possibilités qui sont un entrelacement de relations (substance et accidens, causalité et communauté selon Kant), pour conclure que cet objet qui existe ne peut pas être conçu indépendamment des autres objets avec lesquels il est en relation et donc, étant dépendant des autres objets avec lesquels il est en relation, il n'est pas libre car être dépendant c'est avoir sa cause dans un autre ou non pas être la cause de ses propre actes.

Remarquez que c'est aussi la forme logique du syllogisme.
Si A, alors B (relation ou possibilité)
Or, A existe (existence)
Donc, nécessairement B (nécessité)

Ce que je veux vous faire apercevoir est que la liberté conçue comme choix n'est que la liberté d'opter pour des possibilités pré-établie par le système de relations. C'est une liberté conditionnée, donc une liberté aliénée et pas une véritable liberté. Si j'opte soit pour le Parti Québécois, soit pour le Parti Libéral, soit pour l'Action Démocratique du Québec (relation de communauté = ou bien, ou bien, ou bien, etc.), alors j'exerce mon choix dans le cadre d'un système de relations finies. Je suis québécois soit dit en passant.

En conclusion, la liberté véritable (ou ce que nous concevons comme étant la liberté jusqu'à maintenant) est la capacité d'établir des systèmes de relations et non d'être condamné à se mouvoir en eux. Même les animaux peuvent "choisir" entre diverses possibilités qui leur sont offertes dans leur monde. Il apparaît pourtant que seul l'homme peut modifier les systèmes de possibilités (relationnels) de son monde.

Réponse boni: Ceci amenait Hegel à affirmer que la vérité est l'ensemble des relations constitutives d'un Tout. La vérité, c'est le Tout.
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Message par Moi Dim 20 Avr 2008 - 21:53

Je suis désolé mais je n'arrive pas à saisir.
D'abord tu dis que la liberté individuelle précède la liberté humaine. Ce qui me pose un problème ici, c'est qu'il me semble que cela revient à faire précéder le "fini" à l'infini. C'est-à-dire l'expérience individuelle d'une vérité plus générale.
En effet n'existe-t-il pas une liberté humaine commune à tous et qui serait vécue, ressentie de différentes manières selon les individus et les situations?
Tu me diras peut-être que je n'avance pas, mais je dois dire que je ne comprends pas comment la liberté individuelle peut précéder la liberté humaine...

Ensuite pour ton exemple, qu'entends-tu par liberté du myope?

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Message par Moi Dim 20 Avr 2008 - 22:04

Donc, si j'ai bien compris, la liberté serait la capacité de se créer des possibilités?
Et choisir ne serait pas une vraie liberté?
Mais ne peut-on pas choisir de se créer des possibilités?

Cependant j'ai du mal à comprendre. Serait-ce possible d'avoir une explication plus simple stp?
(ça va commencer à me dépasser là Razz )

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Message par Vargas Lun 21 Avr 2008 - 9:32

Moi a écrit:Je suis désolé mais je n'arrive pas à saisir.
D'abord tu dis que la liberté individuelle précède la liberté humaine. Ce qui me pose un problème ici, c'est qu'il me semble que cela revient à faire précéder le "fini" à l'infini.


Oui, c'est suivre la logique sartrienne : l'existence précède l'essence.
Ce qui était à moitié ironique (l'oeuf ou la poule).
Sauf pour une chose : la liberté humaine, séparée de la liberté individuelle perd toute sa profondeur, sa texture.
En exprimant celà, on dit juste que chacun est libre suivant un système social, politique, etc...
mais que la liberté humaine est ceci, inaltérable, renvoie à des principes, aux droits de l'homme et ainsi de suite.
Mais ce sur quoi on fait reposer ce caractère inaltérable ne l'est pas tant que ça.

En lisant une définition de liberté, on se rend tout de suite compte que le terme est défini par opposition :
par opposition à des contraintes, à l'état d'enfermement, à la puissance, à la soumission d'autrui et ainsi de suite.
Le risque de ses baser sur une liberté humaine de l'ordre de l'infini ou d'une vérité plus générale, qui dépasserait les situations et les personnes, c'est de recréer ceci de façon positive : on se contente d'aménager.
D'autant que ces oppositions changent, ne sont pas les mêmes d'un contexte à l'autre.

Moi a écrit:Ensuite pour ton exemple, qu'entends-tu par liberté du myope?
C'était une façon de poser la question : en fonction de quoi pense-t-on la liberté.
Si on en reste à une dimension de droit, de société, on se réfère nécessairement à la définition de ceux avec lesquels on vit.
Si on va plus loin et qu'on pose la liberté comme expérience, bien des choses entrent en compte.
Une façon aussi de sortir de son époque, de son contexte socio-historique pour sentir d'autres expressions de la liberté, et se demander si tout n'entre pas en ligne de compte.
Là-dessus, le Discours sur l'inégalité entre les hommes de Rousseau offre une bonne analyse.

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Message par Moi Lun 21 Avr 2008 - 15:13

Je n'arrive pas à saisir le risque d'une liberté qui "transcenderait" l'individu si l'on peut dire ainsi. Tu dis que
c'est de recréer ceci de façon positive : on se contente d'aménager.
- Créer de façon positive : c'est-à-dire qu'on élabore une définition plutôt à l'avantage de l'homme? Si c'est ce que tu veux dire, alors oui je suis d'accord. Mais je ne saisis pas le problème.
- Quand tu dis "on se contente d'aménager", c'est aménager quoi?

Evidemment, cette liberté humaine générale n'a aucun sens sans une liberté individuelle.

J'ai également besoin d'une aide concernant la formule sartrienne de l'existence précède l'essence. J'avais, pour ma part, compris que l'être humain n'ayant pas de nature propre, alors il existe d'abord et ensuite se construit suivant un projet et que donc son essence serait ce qu'il est devenu par ce projet. Ai-je bien compris?

Je voudrais revenir sur la notion de choix. Ce n'est pas, me semble-t-il, un simple choix entre différentes possibilités déjà existantes. (voter pour tel ou tel parti politique par exemple). C'est plutôt celui de se créer ou non d'autres possibilités, d'autres voies. Et c'est en cela que le choix humain diffère du choix animal.


P.S. : Pas de chance, je vais être coupé d'internet pendant une semaine. J'espère que cette "discussion" avancera beaucoup durant mon absence. :D Je vais pour ma part lire un peu pour, peut-être, avoir d'autres choses à dire. Razz

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Message par Vargas Lun 21 Avr 2008 - 15:56

Moi a écrit:Je n'arrive pas à saisir le risque d'une liberté qui "transcenderait" l'individu si l'on peut dire ainsi. Tu dis que
c'est de recréer ceci de façon positive : on se contente d'aménager.
- Créer de façon positive : c'est-à-dire qu'on élabore une définition plutôt à l'avantage de l'homme? Si c'est ce que tu veux dire, alors oui je suis d'accord. Mais je ne saisis pas le problème.
- Quand tu dis "on se contente d'aménager", c'est aménager quoi?

Evidemment, cette liberté humaine générale n'a aucun sens sans une liberté individuelle.

Petit piège dans cette formule, en effet.
Creer de façon positive des contraintes : droits et devoirs civiques. Je disais cela dans la continuité des définitions de la liberté qui se font par opposition.
Se contenter de les aménager, c'est cela le risque.

Le droits de l'homme n'ont jamais empêché une guerre de se déclencher.
C'est en cela qu'en rester à une idée de la liberté humaine, ou qui servirait aveuglément à la conduite des libertés individuelles est insuffisante.
Encore une fois, indépendamment du bien-fondé de défendre des principes.
Seulement, il y a aussi à réfléchir sur ce qu'on appelle "l'homme".
(cette tension entre principe et action, Sartre l'a d'ailleurs mis en scène dans Les mains sales).
Ne serait-ce que l'histoire de l'article sur le droit de propriété permet de regarder les choses en face.
Ceci, le cheminement que tu a exprimé au début le reflète déjà.

Moi a écrit:J'ai également besoin d'une aide concernant la formule sartrienne de l'existence précède l'essence. J'avais, pour ma part, compris que l'être humain n'ayant pas de nature propre, alors il existe d'abord et ensuite se construit suivant un projet et que donc son essence serait ce qu'il est devenu par ce projet. Ai-je bien compris?

Oui.

Moi a écrit:
Je voudrais revenir sur la notion de choix. Ce n'est pas, me semble-t-il, un simple choix entre différentes possibilités déjà existantes. (voter pour tel ou tel parti politique par exemple). C'est plutôt celui de se créer ou non d'autres possibilités, d'autres voies. Et c'est en cela que le choix humain diffère du choix animal.

Pierre, tu es accusé de ne pas avoir lu Moi , ou plutôt de n'avoir lu que ce qui t'intéressait. Wink On fait tous ça.

Plus sérieusement, ton intervention tombait au bon moment en analysant quelque chose autour duquel on tournait (et que Moi avait commencé à exprimer).
Seulement, il ne suffit pas d'établir des systèmes de relation. Bien que ce soit capital pour ne pas tomber sur des choix illusoires.
Quelqu'un emprisonné injustement peut très bien les établir, ces systèmes, dans sa cellule.
Seulement, une fois qu'on a fait ça, ça ne dédouane pas de choisir.

Croire que ça vaut la peine ou non d'agir. Même choisir ou non de choisir.
Mais c'est une étape qui ne s'esquive pas. (Une puissance qui ne s'exprime pas s'évide).
Et qui vient après, ou plutôt pendant, qu'on décortique ce qui est possible, illusoire, etc
La-dessus, je te rejoins quant au fait qu'on ne peut pas réduire la liberté au choix.

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Message par Pierre Rivière Lun 21 Avr 2008 - 19:38

Vargas a écrit:
Moi a écrit:
Je voudrais revenir sur la notion de choix. Ce n'est pas, me semble-t-il, un simple choix entre différentes possibilités déjà existantes. (voter pour tel ou tel parti politique par exemple). C'est plutôt celui de se créer ou non d'autres possibilités, d'autres voies. Et c'est en cela que le choix humain diffère du choix animal.

Pierre, tu es accusé de ne pas avoir lu Moi , ou plutôt de n'avoir lu que ce qui t'intéressait. Wink On fait tous ça.

Il a écrit cela après mon message, mais j'avais bien compris. C'est monsieur demi-dieu de la Sorbonne qui reparaît (Sartre). L'existence précède l'essence...

Je reviendrai probablement faire une intervention plus développée prochainement, mais pour l'instant je vais juste répondre à cela.

Disons que la liberté est la possibilité de se créer ou non d'autres possibilités, d'autres voies. Pour Sartre, la liberté consiste à avoir plus qu'une possibilité d'action. Si l'homme n'avait toujours qu'une possibilité d'action, alors il serait un être nécessaire. Ainsi, le fait que l'existence précède l'essence signifie, comme Moi l'a bien compris, que l'homme peut agir indépendant d'une nature qui contraindrait son action à être conforme à sa nature. L'exemple de Sartre est le coupe-papier. L'essence du coupe-papier est de couper du papier. L'essence de l'homme n'est pas dans sa fonction, mais dans l'action, dans son existence.

Le problème est que Sartre fait de l'homme le centre du monde. Toutes les choses sont saisies dans leur rapport à l'homme et, dès lors, leur essence est leur fonction pour l'homme. Vous savez probablement que Sartre croit s'inspirer d'Heidegger dans son existentialisme athée. Or, dans son développement sur les rapports entre Monde et Terre, Heidegger expose les rapports de co-substantialité entre l'homme (le dasein dans la terminologie d'Heidegger) et le monde. Le monde tire son sens de son usage pour l'homme et c'est dans la faillite de cet usage que l'outil se révèle comme terre, comme simple matière construite par l'homme selon ses propres fins.

Ainsi, Sartre prend un exemple de quelque chose qui est fonction d'autre chose et qui tire donc son essence de ce dont il est fonction pour marquer la différence d'avec l'homme. Si l'essence du coupe-papier est de couper du papier c'est à cause de sa relation d'objet à l'homme. Ce n'est pas une propriété spécifique du coupe-papier. En tant que terre au sens d'Heidegger, ou simple matière, le coupe-papier n'a pas plus d'essence que l'homme.

Donc, l'essence est fonction de son usage pour (ou, plus précisément, de sa relation avec) une totalité supérieure. La signification, c'est l'usage disait Wittgenstein. Or, Sartre affirme que la totalité supérieure à l'homme est le Néant. "L'homme est un être par qui le Néant vient à l'être". C'est la liberté humaine qui permet de justifier son affirmation, mais la liberté découle de ce que l'homme est Néant. Il y a une certaine circularité dans sa démonstration, il présuppose ce qu'il doit démontrer. Donc, subordonner l'homme au néant est plutôt une affirmation de l'ordre de l'intuition plutôt qu'une conclusion. Or, je ne crois pas que l'homme doivent être subordonné au Néant. Heidegger non plus n'était pas d'accord, puisqu'il subordonnait l'homme à l'Être; et sa logique est beaucoup plus cohérente et sensée.

La liberté de Sartre est la liberté de celui qui a perdu le sens d'un être supérieur et qui, dans la "lucide" impossibilité de retrouver cette agréable soumission, vit dans la révolte de refuser de se subordonner à quoi que ce soit. "Le garçon de café n'est jamais pleinement garçon de café. Il n'est pas ce qu'il est et est ce qu'il n'est pas."

Je suis tout simplement contre l'idée que le sentiment existentiel de l'homme doit s'abreuver de néant.
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Message par lekhan Mar 22 Avr 2008 - 12:08

Je me pose une autre question que celle du choix quand je pense à la liberté. D'autant que vous parlez de liberté individuelle. La liberté individuelle posée comme choix, ou possibilité d'en créer relève seulement à mon avis d'une capacité d'agencement. Or je crois qu'on se pose mal le problème.
On sait maintenant avec le développement de la sociologie, de la psychologie, qu'il y a le problème de l'inconscient dans celui de cette liberté posée en choix.
C'est un problème auquel Sartre ne fait pas vraiment face. Je ne suis pas spécialiste de Sartre, pas de philosophie non plus soit dit en passant, mais il me semble que l'entrée en jeu de La mauvaise foi pour débouté l'inconscient est assez superficielle. Goffman, lui, parle de théâtre social, ce qui met en évidence l'interdépendance entre le milieu et l'homme. A chaque situation son acte type, son raisonnement type, son comportement type, etc.
J'ai l'air de m'éloigner du problème mais je crois qu'on y arrive.

L'homme interagi avec son environnement, il en découle des relations et des possibilités de relations. On sait maintenant que le choix quel qu'il soit est explicable, justifiable. Ce qui annihilerait en partie la réduction de la liberté au choix, ou à des créations de possibilités de choix.

Mais le problème est plus vaste. Il faut postuler pour croire en cette liberté dans un individu conscient certes, mais déjà il faut croire en la notion d'individu. Je ne dis pas qu'il n'existe pas une singularité. Seulement, scientifiquement parlant, et dans l'absolue tout individu est reproductible. Même si les possibilités sont minimes, très proche de l'inexistant, une combinaison génétique peu être reproduite.
On revient ici au problème du contexte. Qu'est qui fait l'individu? C'est l'expérience, un agrégat d'expérience. Tout acte peut alors être vu comme reflétant un contexte, une histoire, une expérience. L'acte est alors unique. Il reflète un contexte, un état donné dans un moment donné.

L'acte n'est pas reproductible. Il sera peut être explicable a posteriori mais il est l'agencement unique de l'être dans le mouvement, la parole, l'agissant à un moment T (ça postule encore d'une fragmentation du temps mais bon...). On peut partir de l'idée que nous sommes en partie de conscient de notre rapport au monde, et de nos actes futurs. Mais conscient en partie de notre "habitus" et de notre "théâtre social" la liberté doit se trouver ailleurs. La liberté à mon sens est fondamentalement l'acte. L'acte en tant qu'unique, en tant d'expression de l'être. Et c'est cette expression de l'être qui m'apparaît importante. L'individu n'est pas une entité autonome évoluant dans un espace stérile et clos (auquel cas il y aurait encore diverses relations). L'individu passe par le reflet, la résonnance sur l'autre, l'environnement, le contexte, le temps, l'espace. L'individu est à lui seul un agencement. Ce qui n'est pas le cas de l'être.


Alors j'aimerai citer Lavelle qui pose encore le problème différent:

Grâce : mouvement accordé avec ce qui s'offre et qui se refuse un instant pour montrer qu'il s'y accorde.
Presque toute la volonté est appliquée à résister à la grâce. La grâce est un autre nom de la liberté. Mais la volonté est tout le contraire. C'est ce que Sartre n'a pas su voir.
La différence entre la nature et la grâce, c'est à nous à l'effectuer à chaque instant, comme celle de l'âme et du corps, et à faire que la puissance créatrice en nous devienne nature ou grâce.
La chance qui n'est qu'un autre nom de la grâce (ceux qui le nient ne parlent que du déterminisme, qui ne règne pas dans le même monde, et qui en est pourtant l'expression).
La grâce et la liberté c'est la même chose, mais on confond la liberté avec le libre arbitre qui permet seulement le détachement à l'égard du sensible.

On peut bien dire que l'homme est l'image de la liberté : c'est participant qu'il faudrait dire (réalité ou absence de la participation, c'est toute la différence avec Sartre qui n'a pas de métaphysique).

L'expérience de l'infini, c'est l'expérience de la liberté. C'est l'expérience primitive plus encore que celle du Cogito. C'est l'expérience même de l'infini qui est transférée ensuite à l'espace et au temps définis comme les chemins ou les moyens de la liberté. C'est là l'expérience de l'infini en puissance qui n'a de sens qu'à condition que je puisse l'appuyer sur l'infini en acte qui n'est jamais un infini chose. C'est là qu'est la difficulté. Le problème métaphysique c'est le problème de l'expérience de la liberté et des conditions qu'elle implique par opposition à l'expérience scientifique qui est l'expérience de l'objet. Il était naturel d'exclure l'expérience de la liberté aussi longtemps que l'on prenait l'expérience des choses comme modèle de l'expérience tout court.
La liberté ne peut pas être pour nous un moyen de nier l'existence d'un univers spirituel dans lequel il nous appartient au contraire de nous établir.
La liberté intériorité infinie et dépassement infini de soi (et dont les œuvres sont la limitation) ou qui ne crée rien et s'épuise dans le consentement ou le refus.
La liberté est une acquisition. Elle est la participation assumée. Autrement elle n'est que subie ; impossibilité de ne pas exercer la liberté par laquelle nous posons notre être propre.
Elle ne réside pas dans la séparation, mais dans l'accord.
Chercher le point où la liberté et l'amour coïncident. Ce point justement qu'ignore Sartre.
Le propre de la liberté n'est pas seulement de me faire choisir entre des possibles dans le temps, mais de me faire choisir entre le temps et l'éternité, ou plutôt de me permettre de préférer toujours l'éternité au temps.


J'aimerai qu'on s'interroge sur la possibilité d'une métaphysique dans une liberté réduite à des possibilités d'objets physiques ou immatériels.
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Message par Came Mar 22 Avr 2008 - 15:33

Pierre Rivière a écrit:
La nécessité est une dialectique entre la possibilité et l'existence (voir les catégorie de modalité dans La critique de la raison pure de Kant).

Donc, dans ce schéma, on pose l'existence d'un objet (par mon acte de choisir), puis on le réfère à un ensemble de possibilités qui sont un entrelacement de relations (substance et accidens, causalité et communauté selon Kant), pour conclure que cet objet qui existe ne peut pas être conçu indépendamment des autres objets avec lesquels il est en relation et donc, étant dépendant des autres objets avec lesquels il est en relation, il n'est pas libre car être dépendant c'est avoir sa cause dans un autre ou non pas être la cause de ses propre actes.

Remarquez que c'est aussi la forme logique du syllogisme.
Si A, alors B (relation ou possibilité)
Or, A existe (existence)
Donc, nécessairement B (nécessité)

En conclusion, la liberté véritable (ou ce que nous concevons comme étant la liberté jusqu'à maintenant) est la capacité d'établir des systèmes de relations et non d'être condamné à se mouvoir en eux. Même les animaux peuvent "choisir" entre diverses possibilités qui leur sont offertes dans leur monde. Il apparaît pourtant que seul l'homme peut modifier les systèmes de possibilités (relationnels) de son monde.

Réponse boni: Ceci amenait Hegel à affirmer que la vérité est l'ensemble des relations constitutives d'un Tout. La vérité, c'est le Tout.

Puis-je me permettre de spécifier que Kant, avec ses concepts fondamentaux soit les catégories, n'appréhendait que les phénomènes, c'est-à-dire que les objets de nos sens, nos sensations. Dit moi où exactement dans la critique il fait de la causalité une condition de possibilité de nos actions. Je crois que tu fais fausse route lorsque tu confonds l’action humaine et le phénomène. Bien entendu la causalité fait souvent œuvre de justification, mais tout cela n’est que méprise. Dans une morale d’œil pour œil, c’est exactement cette causalité qui fait œuvre, une morale destructrice. Nous devons justement mettre fait à cette tendance, sans quoi nous finirons dans une uniformisation générale où la peur sera portée à son paroxysme. C'est exactement sur ce dernier homme, celui qui conçoit ses actes sur les bases de la causalité, que Nietzsche nous mettait en garde.
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Message par Pierre Rivière Mer 23 Avr 2008 - 1:58

Came a écrit:Puis-je me permettre de spécifier que Kant, avec ses concepts fondamentaux soit les catégories, n'appréhendait que les phénomènes, c'est-à-dire que les objets de nos sens, nos sensations. Dit moi où exactement dans la critique il fait de la causalité une condition de possibilité de nos actions. Je crois que tu fais fausse route lorsque tu confonds l’action humaine et le phénomène. Bien entendu la causalité fait souvent œuvre de justification, mais tout cela n’est que méprise.

Je n'ai jamais voulu proposer une interprétation de Kant. À partir de Kant, j'ai seulement montré comment se dévoilait le concept de nécessité. Le reste, au sujet de la liberté, n'est aucunement lié à Kant. Nul part Kant ne fait de la causalité une condition de possibilité de nos actions, ni moi d'ailleurs. Ce qui se rapproche le plus de l'idée que j'ai voulu exposer au sujet de la liberté serait dans la distinction que fait Heidegger entre l'homme créateur de monde et l'animal pauvre en monde. Peut-être que je n'étais pas clair en utilisant un exemple de choix politiques (bien que c'était évidemment un contre-exemple), mais les systèmes de relations ne sont pas nécessairement de nouvelles possibilités de choix. J'y voyais plutôt la possibilité d'une connaissance "intellectuelle" du monde et de la faculté de créativité qui lui est co-extensive. Je place la liberté du côté de la créativité.
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Message par Moi Ven 25 Avr 2008 - 23:36

J'ai donc lu un peu, du Sartre je l'avoue.

Tout d'abord, L'Existentialisme est un humanisme, et puis la première partie de L'Etre et le néant (c'est-à-dire 100 pages environ). J'avoue que je n'ai pas tout à fait compris le second ouvrage (sans doute un peu compliqué pour moi

J'ai effectivement trouvé que Sartre envisageait la liberté comme un choix, mais sans vraiment prendre en compte la "détermination" sociale. En fin de compte, le passé de l'individu n'aurait aucune conséquence sur lui-même, et donc ses choix.

Pourtant c'est évidemment un facteur important de l'humain.
Si l'on considère que l'être humain est le résultat de son histoire personnelle, alors on va effectivement considérer que chacun de ses actes à un quelconque moment sera unique, mais comme l' "agencement de son histoire".

Ainsi l'acte "unique" serait la liberté. Mais je trouve qu'on peut se poser une question.
L'humain étant le résultat de son histoire, et ainsi ses actes étant explicables par cette histoire, ne peut-on pas estimer que l'acte, bien qu'il soit unique, est déterminé par l'histoire? L'homme est-il réellement libre?

Je voudrais tout de même revenir sur l'idée que l'être humain est construit par son parcours personnel.
J'ai fait, il n'y a pas longtemps, une dissertation pour la philosophie au lycée Razz . Le sujet était "Puis-je juger la culture à laquelle j'appartiens?". Je trouve que ça peut aider dans le raisonnement.
J'ai répondu par l'affirmative, en disant que je devais faire un effort d' "extériorisation" de ma culture afin de pouvoir la juger objectivement. Il me semble que l'on peut faire de même pour notre histoire. Si l'on fait abstraction de notre passé en le rejetant en arrière, en nous éloignant de lui, ne peut-on pas en être indépendant? Et alors, nos choix sont-ils donc réellement uniques?
Par contre, il semble que l'on fasse cet acte en toute conscience. Serait-ce là la liberté?
Mais alors, ne peut-on pas envisager cet acte comme pouvant être inconscient?

Par contre j'avoue ne pas avoir compris la Grâce. Je vais faire un effort pour tenter de comprendre quelque chose et pouvoir réagir à cela par la suite.

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Message par Pierre Rivière Sam 26 Avr 2008 - 0:39

Aujourd'hui, j'ai pensé que l'acte libre par excellence est la prise de conscience.

Je viens de lire le texte de Lekhan. J'aime beaucoup Louis Lavelle et j'apprécierais avoir la référence de cette citation. Par ailleurs, la réduction du monde à la connaissance scientifique est illustrée par toute philosophie qui, comme celle de Kant (CRP), définit l'expérience comme la connaissance empirique.

De plus, lorsque je parle de relations ce n'est pas des relations de possibilités de choix. La relation est le développement dans l'ordre du fini, et donc du multiple, de ce qui est unité dans l'ordre de l'infini. D'une certaine façon, la science physico-mathématique tente, par le système unifié des lois de l'univers, d'atteindre à partir de l'ordre du fini ce qui serait unité simple pour un être infini. Toutefois, l'unité qu'elle atteint ne peut pas être véritablement simple, elle n'est qu'une synthèse du divers sensible et non une simplicité qui serait plénitude. Toutefois, la philosophie universitaire (par cela je veux dire officielle - les grosses têtes) du XXe siècle est plus que sceptique quant à savoir si un être fini, l'homme, peut atteindre le sens complet de concepts de l'ordre de l'infini, ainsi que ses corrélats (la notion d'être par exemple). Mais c'est un débat qui dure depuis l'aube des temps: la connaissance doit-elle nécessairement passer par la raison discursive pour atteindre la vérité (ce qui rend à première vu la saisi des concepts de l'ordre de l'infini impossible) ou peut-elle le faire directement par l'intuition intellectuelle (ce qui la rendrait possible)?
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Message par Moi Sam 26 Avr 2008 - 12:44

Je suis désolé mais je n'arrive toujours pas à saisir le sens de la Grâce.

Mais je voudrais revenir sur les actes.
Peut-être que je n'ai pas compris ce que tu voulais dire par acte.
Mais tu dis
Il sera peut être explicable a posteriori mais il est l'agencement unique de l'être dans le mouvement, la parole, l'agissant à un moment T
en parlant de l'acte.
Si je comprends bien, l'acte est la réponse de l'individu à son "environnement". Mais alors, je ne vois pas en quoi le choix est supprimé. Ne peut-on pas choisir l'acte à faire? Evidemment ce choix peut être expliqué et/ou déterminé "a posteriori". C'est là, je trouve, que se pose le problème. Peut-on échapper à notre histoire personnelle afin d'avoir une réelle possibilité de choix?

Et pour échapper à cette "histoire", ne faut-il pas prendre conscience de son importance afin de mieux nous comprendre et éviter d'être enfermé dans son déterminisme? Par ailleurs, cette conscience de l'histoire ne peut-elle pas être "naturelle"? (c'est-à-dire que nous avons par nature conscience de l'histoire)

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Message par Vargas Sam 26 Avr 2008 - 13:19

Moi a écrit:Evidemment ce choix peut être expliqué et/ou déterminé "a posteriori". C'est là, je trouve, que se pose le problème. Peut-on échapper à notre histoire personnelle afin d'avoir une réelle possibilité de choix?

Et pour échapper à cette "histoire", ne faut-il pas prendre conscience de son importance afin de mieux nous comprendre et éviter d'être enfermé dans son déterminisme? Par ailleurs, cette conscience de l'histoire ne peut-elle pas être "naturelle"? (c'est-à-dire que nous avons par nature conscience de l'histoire)

Sur ce point, on peut invoquer Deleuze, ou même Alain au sujet du spectre créé par un certain déterminisme psychologique.

L'histoire personnelle c'est une dimension. mais on ne part pas seulement de soi pour penser le monde.
On divague sur des tribus, des castes, des complots, des agencements.
On pense l'histoire, la société, le monde dans des constructions parfois farfelues, plus ou moins cohérentes.
C'est de l'ordre de l'historico-mondial.
Et il n'y pas besoin de revenir constamment à une histoire personnelle, à des sales petits secrets, à une main invisible qui régirait a priori des comportements.

Par exemple, quand je pense à la façon dont est évoqué le parcours de la flamme olympique, à tout ce que ça soulève comme enjeux, coup monté, enchère médiatique, manipulation politique, inintérêt fondamental, résistance, croyance ou occasion de visibilité, etc...

Je réagis, je me positionne, j'envisage des systèmes de relation qui n'ont pas à voir qu'avoir des histoires personnelles, avec chaque point, chaque représentation culturelle qui se trouve associé à cette schizo-démarche et la part-proportion-poids de détermination qu'y s'y trouve à chaque fois.

J'affabule, j'invente, je superpose, et tout ceci est dépassé par ce qu'est en train de devenir l'évènement que je réfléchis.

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Message par lekhan Sam 26 Avr 2008 - 14:26

Vargas a écrit:
J'affabule, j'invente, je superpose, et tout ceci est dépassé par ce qu'est en train de devenir l'évènement que je réfléchis.

On trouve ça dans Bergson, au moins en substance, dans la première introduction de la pensée et le mouvant d'ailleurs.
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Message par Moi Mar 29 Avr 2008 - 22:51

Lekhan peux-tu m'expliquer la Grâce stp? (désolé je n'ai pas encore compris Razz )

J'ai l'intuition (car je n'ai pas compris, ça ne peut être qu'une intuition) que c'est ce qui réfute le mieux la définition de la liberté comme un choix.

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