Dictionnaire philosophique - discussion
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maraud
Rêveur
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DIGRESSION :: Littérature et arts :: Traduction, création et théories littéraires :: Expression littéraire
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Dictionnaire philosophique - discussion
Bonsoir, je vous fais une proposition.
C'est en quelque sorte un retour au Dictionnaire personnel que je vous avais proposé il y a environ un an, à ceci près qu'il s'agirait cette fois de donner les définitions qu'ont apporté les différents philosophes (voire aussi écrivains) aux différents concepts de la philosophie (dans son acception la plus large). Je vous propose ce fil-ci pour y donner vos propositions ; j'écrirai quelques autres sujets que j'aurai à tenir à jour pour y replacer, dans l'ordre alphabétique, les nouveaux mots ou nouvelles définitions. Les définitions pourront être de trois formes différentes :
- d'abord des définitions données telles quelles dans une œuvre. Celles données par Platon (ou sa tradition) dans une œuvre spécifique (à côté de ses dialogues), ainsi que celles de Spinoza sont un cas typiques. Il y a aussi par exemple les nombreuses définitions que donne Hobbes au début de son Léviathan notamment (mais aussi dans son De la nature humaine), avec les mots définis dans la marge comme repères : il n'y a pas écrit "définitions", elles s'inscrivent dans le discours, reste qu'elles sont présentées explicitement comme telles.
- ensuite des définitions que vous aurez déduit, retiré de textes, sans qu'elles y soient données explicitement, et surtout sans qu'elles y soient données d'une traite, dans une formule déjà complète. Si par exemple un auteur parle de ceci, écrit que ceci a telle propriété, puis que ça a telle autre, etc., sans les rassembler toutes à la fin, ce sera à vous de le faire (je ne dis pas qu'une définition est nécessairement l'énoncé d'un ensemble de propriétés attribuées à l'objet défini, ce n'est qu'un exemple).
- également des définitions que nous aurez déduit, mais qui ne se contenteraient pas de rassembler un ensemble de propriétés (de qualificatifs, de quoi que ce soit qui puisse participer à une définition), mais encore déduiraient à partir du texte d'un auteur comment il aurait défini tel mot. Il faudra que je vous trouve des exemples pour pouvoir marquer nettement la différence avec ce qui précède, mais j'espère que vous vous ferez déjà une idée.
- enfin des définitions que vous proposerez de vous-mêmes, sans rapport avec quelque philosophe (des définitions proposées donc par vous-mêmes "en tant que philosophes", toutes proportions gardées). Il s'agit là de ce qu'il y avait dans mon Dictionnaire personnel : à ceci près que seront accueillies des définitions d'intervenants divers et pas seulement celles d'un seul.
Qu'en pensez-vous ? des intéressés ? N'hésitez pas à proposer des définitions en messages. Je m'occuperai de l'organisation (rassembler toutes ensemble dans un fil dédié). Je compte également vous proposer déjà des définitions, notamment celles de Platon, Hobbes et Spinoza (autant commencer par le plus facile).
J'oubliais de préciser que ce fil s'ouvrira à des discussions autour de définitions spécifiques (les discussions ayant pris une place importante seront détachées pour former des fils à part).
C'est en quelque sorte un retour au Dictionnaire personnel que je vous avais proposé il y a environ un an, à ceci près qu'il s'agirait cette fois de donner les définitions qu'ont apporté les différents philosophes (voire aussi écrivains) aux différents concepts de la philosophie (dans son acception la plus large). Je vous propose ce fil-ci pour y donner vos propositions ; j'écrirai quelques autres sujets que j'aurai à tenir à jour pour y replacer, dans l'ordre alphabétique, les nouveaux mots ou nouvelles définitions. Les définitions pourront être de trois formes différentes :
- d'abord des définitions données telles quelles dans une œuvre. Celles données par Platon (ou sa tradition) dans une œuvre spécifique (à côté de ses dialogues), ainsi que celles de Spinoza sont un cas typiques. Il y a aussi par exemple les nombreuses définitions que donne Hobbes au début de son Léviathan notamment (mais aussi dans son De la nature humaine), avec les mots définis dans la marge comme repères : il n'y a pas écrit "définitions", elles s'inscrivent dans le discours, reste qu'elles sont présentées explicitement comme telles.
- ensuite des définitions que vous aurez déduit, retiré de textes, sans qu'elles y soient données explicitement, et surtout sans qu'elles y soient données d'une traite, dans une formule déjà complète. Si par exemple un auteur parle de ceci, écrit que ceci a telle propriété, puis que ça a telle autre, etc., sans les rassembler toutes à la fin, ce sera à vous de le faire (je ne dis pas qu'une définition est nécessairement l'énoncé d'un ensemble de propriétés attribuées à l'objet défini, ce n'est qu'un exemple).
- également des définitions que nous aurez déduit, mais qui ne se contenteraient pas de rassembler un ensemble de propriétés (de qualificatifs, de quoi que ce soit qui puisse participer à une définition), mais encore déduiraient à partir du texte d'un auteur comment il aurait défini tel mot. Il faudra que je vous trouve des exemples pour pouvoir marquer nettement la différence avec ce qui précède, mais j'espère que vous vous ferez déjà une idée.
- enfin des définitions que vous proposerez de vous-mêmes, sans rapport avec quelque philosophe (des définitions proposées donc par vous-mêmes "en tant que philosophes", toutes proportions gardées). Il s'agit là de ce qu'il y avait dans mon Dictionnaire personnel : à ceci près que seront accueillies des définitions d'intervenants divers et pas seulement celles d'un seul.
Qu'en pensez-vous ? des intéressés ? N'hésitez pas à proposer des définitions en messages. Je m'occuperai de l'organisation (rassembler toutes ensemble dans un fil dédié). Je compte également vous proposer déjà des définitions, notamment celles de Platon, Hobbes et Spinoza (autant commencer par le plus facile).
J'oubliais de préciser que ce fil s'ouvrira à des discussions autour de définitions spécifiques (les discussions ayant pris une place importante seront détachées pour former des fils à part).
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Le vent se lève, il faut tenter de vivre (Valéry)
For the night is long that never finds the day (Macbeth)
Rêveur- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Je ne sais pas comment va s'articuler le fil, mais j'ose une définition; puisque c'est le sujet.
Une bonne définition est celle sur laquelle on peut écraser une démonstration.
Une bonne définition est celle sur laquelle on peut écraser une démonstration.
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maraud- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Du coup c'est quoi la définition ? celle de la définition ? ou de la bonne définition ?
Merci en tout cas de participer. Je suis désolé d'avoir délaissé ce sujet, j'en ai un certain nombre d'autres prévus, mais d'ici à demain j'ai un travail très précis, en fin de semaine j'y reviendrai. Cela dit, dans l'absolu, vous pouvez vous-même faire le travail, comme tu l'as commencé maraud.
Merci en tout cas de participer. Je suis désolé d'avoir délaissé ce sujet, j'en ai un certain nombre d'autres prévus, mais d'ici à demain j'ai un travail très précis, en fin de semaine j'y reviendrai. Cela dit, dans l'absolu, vous pouvez vous-même faire le travail, comme tu l'as commencé maraud.
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Le vent se lève, il faut tenter de vivre (Valéry)
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Rêveur- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Une autre façon d' aborder ce problème, Rêveur.
Dans son superbe bouquin " L' incroyance au 16e siecle" ( qu' il faut lire pour d'autres raisons/ Il s'appuie sur Rabelais pour disséquer le concept de croyance-incroyance), on est surpris de trouver ce chapitre " Les mots qui manquent". Chapitre qui devrait interroger tout blaireau imbu de son savoir et de la vanité d' icelui.
Je mets le lien , brut de décoffrage, sans commenter:
https://books.google.fr/books?id=29dBvKsNaGoC&pg=PA328&lpg=PA328&dq=febvre+mots+qui+manquent+lucien&source=bl&ots=TTAMqywXyt&sig=LCHkjUy6PYCh79e2ydCIagbzdg8&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwijmZWkhpLTAhXMXRoKHRNNC48Q6AEIMTAE#v=onepage&q&f=false
Il évacue tres vite l' objection attendue du Latin en chap. 3.
Ces mots qui manquent sont aussi des concepts. Comment penser sans concepts?
Dans son superbe bouquin " L' incroyance au 16e siecle" ( qu' il faut lire pour d'autres raisons/ Il s'appuie sur Rabelais pour disséquer le concept de croyance-incroyance), on est surpris de trouver ce chapitre " Les mots qui manquent". Chapitre qui devrait interroger tout blaireau imbu de son savoir et de la vanité d' icelui.
Je mets le lien , brut de décoffrage, sans commenter:
https://books.google.fr/books?id=29dBvKsNaGoC&pg=PA328&lpg=PA328&dq=febvre+mots+qui+manquent+lucien&source=bl&ots=TTAMqywXyt&sig=LCHkjUy6PYCh79e2ydCIagbzdg8&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwijmZWkhpLTAhXMXRoKHRNNC48Q6AEIMTAE#v=onepage&q&f=false
Il évacue tres vite l' objection attendue du Latin en chap. 3.
Ces mots qui manquent sont aussi des concepts. Comment penser sans concepts?
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Il semble, en effet, assez sage de considérer l'histoire des idées en Occident pour engager le sujet.
Au delà du paradoxe que soulève le fait de trouver une primauté de la parole ou de la pensée ( l'une sur l'autre), il y a un problème de mots manquant lorsque de nouveaux concepts, importés, se font connaître dans une autre langue, ou dans un autre esprit. Tout comme ce problème se pose lorsque l'on a connaissance, par exemple, d'un savoir perdu: les Francs-maçons parlent, par exemple, de " parole perdue", quand ils évoquent la Tradition. Il est question aussi dans un domaine autre, mais relativement proche tout de même: de" la dernière parole" du Christ.
Un autre problème est celui du caractère adapté ou pas de la Langue pour certaines élaborations mentales. L'Orient a, par exemple, des Langues plus spécialisées dans le domaine métaphysique, et l'occident, lui, a des langues plus adaptées à la physique. Est-ce que cela suppose une prédestination ? ( difficile de répondre, puisque l'on soulève là, le même paradoxe que celui posé par la primauté éventuelle de la parole sur la pensée)
maraud- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 04/11/2012
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
maraud a écrit:
Il semble, en effet, assez sage de considérer l'histoire des idées en Occident pour engager le sujet.
....... il y a un problème de mots manquant lorsque de nouveaux concepts, importés, se font connaître dans une autre langue, ou dans un autre esprit.
Ce serait élargir le projet de rêveur et ouvrir une piste des plus passionnante dans ces broussailles sémantiques qui n' ont pas du être trop visitées. Comparer le signifiant et variantes d' un terme par différents intervenants est un projet déja ambitieux. Mais sur un mot-concept, commencer par donner le lieu et la date de son apparition....Prenons " transcendance". De mémoire mauvaise, Febvre donne 1699, dans tel texte par (x). Citer la phrase contexte permet déja d' envisager un glissement sémantique. Plus fort serait de retrouver l' utilisation seconde du terme! souvent des décennies plus tard....et les répliques ?, pour quel usage ? Y a t il, comme pour les cotations de voies d'escalade, un flou provisoire, puis un attracteur signifiant qui va se préciser ?
Après, ce concept de "transcendance", existait il sans le mot ? avec un autre mot ?, identique ou proche ? En latin ? en Arabe ? Y avait il des phrases euphémisantes ....chez les penseurs antérieurs à la naissance du terme-concept ?
Ensuite, il y a les glissements importants ou même les HS ou inversions comme pour " constructivisme" ou " Sérendipité"
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
C'est une question en soi : Pense-t-on dans une langue ? Les mots sont-ils contraignants pour la pensée, à tel point que s'ils manquent, on ne peut pas penser ce qu'ils désignent ?
Pour ma part, je ne crois pas. Les termes que Febvre cite ici sont des concepts... mineurs. "Abstrait" / "Concret", ce sont plutôt des attributs, non ? "Adéquat", c'est l'une des multiples variantes de "vrai". Etc.
En fait, les concepts majeurs eux-mêmes sont souvent confus. Leur sens est dépendant de la définition qu'on leur donne : Beau, Vrai, Juste, etc. Et néanmoins, c'est dans ces concepts-là qu'on pense. Et en fait la pensée discursive est possible, justement parce que ces concepts sont sémantiquement confus.
Je ne crois pas que ce soit si important. Même si -j'entends déjà chapati accourir à grandes enjambées - il y a quelque chose de vrai, me semble-t-il, dans la thèse deleuzienne selon laquelle le philosophe est un créateur de concepts. C'est-à-dire qu'un concept saisit quelque chose dans le flux de l'empirie, il lui donne un contour -c'est l'idée du terme Begriff, de greifen- il précise. Mais selon moi, le concept a davantage d'importance pour la discussion, pour la communication de la pensée, que pour la pensée elle-même -et il me semble que cette distinction n'est pas toujours aperçue.
Et encore : Il y a beaucoup de choses que l'on peut exprimer par périphrases. Dans ce cas, on ne parle pas le jargon, d'accord, mais on peut néanmoins penser, et on peut même se faire comprendre.
Pour ma part, je ne crois pas. Les termes que Febvre cite ici sont des concepts... mineurs. "Abstrait" / "Concret", ce sont plutôt des attributs, non ? "Adéquat", c'est l'une des multiples variantes de "vrai". Etc.
En fait, les concepts majeurs eux-mêmes sont souvent confus. Leur sens est dépendant de la définition qu'on leur donne : Beau, Vrai, Juste, etc. Et néanmoins, c'est dans ces concepts-là qu'on pense. Et en fait la pensée discursive est possible, justement parce que ces concepts sont sémantiquement confus.
Je ne crois pas que ce soit si important. Même si -j'entends déjà chapati accourir à grandes enjambées - il y a quelque chose de vrai, me semble-t-il, dans la thèse deleuzienne selon laquelle le philosophe est un créateur de concepts. C'est-à-dire qu'un concept saisit quelque chose dans le flux de l'empirie, il lui donne un contour -c'est l'idée du terme Begriff, de greifen- il précise. Mais selon moi, le concept a davantage d'importance pour la discussion, pour la communication de la pensée, que pour la pensée elle-même -et il me semble que cette distinction n'est pas toujours aperçue.
Et encore : Il y a beaucoup de choses que l'on peut exprimer par périphrases. Dans ce cas, on ne parle pas le jargon, d'accord, mais on peut néanmoins penser, et on peut même se faire comprendre.
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Il est difficile de trouver des périphrases remplaçant " immanence" ou transcendance, voire "concept". Le lien que je mets, malheureusement cache des pages qui citent bien plus de termes. C'est, je crois Crosswind qui disait que l' émergence d' un terme-concept pouvait signaler ( ou induire ?) un point d' inflexion cognitif. Pour ma part, je pense que ces termes sont une sorte de ^médicament servant à favoriser le "transit" des idées. De leur cheminement. Remplacer un vague nuage conceptuel par un terme permet de cheminer plus loin. Le problème venant de ce que ce terme est posé comme compris ( invariant) alors qu' il ne l'est pas.Bergame a écrit: Les termes que Febvre cite ici sont des concepts... mineurs. "Abstrait" / "Concret", ce sont plutôt des attributs, non ? "Adéquat", c'est l'une des multiples variantes de "vrai". Etc.
En fait, les concepts majeurs eux-mêmes sont souvent confus. Leur sens est dépendant de la définition qu'on leur donne : Beau, Vrai, Juste, etc. Et néanmoins, c'est dans ces concepts-là qu'on pense. Et en fait la pensée discursive est possible, justement parce que ces concepts sont sémantiquement confus.
Et encore : Il y a beaucoup de choses que l'on peut exprimer par périphrases. .
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
On doit pouvoir trouver une analogie entre le geste et la pensée. Un geste qui réussit et une énonciation qui réussit doivent, probablement, avoir une source commune, la gestion logique du mouvement doit avoir elle aussi sa "sémantique" et sa "syntaxe".
Les gestes que l'on n'a pas l'habitude de faire partagent-ils une analogie avec les pensées que l'on n'a pas l'habitude d'avoir ? On peut imaginer que oui ( le sourd muet doit s'appuyer sur les gestes qu'il réussit le plus aisément pour exprimer sa pensée, qui s'en trouve de fait influencée)
On sait, par exemple, qu'il est difficile de penser le son A en faisant un O avec sa bouche.
maraud- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2464
Date d'inscription : 04/11/2012
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Oui, je suis d'accord. C'est vrai que le concept précise la pensée, bien sûr, et que donc il peut ouvrir sur autre chose. Et que, par ailleurs, il véhicule l'idée.kerkoz a écrit:Pour ma part, je pense que ces termes sont une sorte de ^médicament servant à favoriser le "transit" des idées. De leur cheminement. Remplacer un vague nuage conceptuel par un terme permet de cheminer plus loin. Le problème venant de ce que ce terme est posé comme compris ( invariant) alors qu' il ne l'est pas.
Mais j'insiste, c'est une vraie question : Peut-on penser hors des mots ? Parce que c'est la thèse (radicale) que soutient Febvre ici : Puisque les mots manquaient à l'époque de Rabelais, la pensée ne pouvait être la même. C'est par exemple aussi la thèse que soutiendra Foucault, et il me semble que c'est celle dont part Deleuze.
Or, je pense qu'ils se trompent. Ce n'est en tout cas pas l'expérience que je fais. Moi, je sens quelque chose, une idée, avant de mettre des mots dessus. Ce qui me fait dire, d'ailleurs, que j'ai souvent le sentiment que les idées viennent à moi plutôt que c'est moi qui les crée ou les pense. Pour moi, il y a quelque chose au-delà, ou en-deca, des mots, quelque chose que les mots tentent d'enserrer, de circonscrire, de saisir -et toujours plus ou moins vainement.
Du reste, et pour faire le lien avec le titre du sujet, c'est bien la raison pour laquelle la discussion est possible, et même nécessaire : S'entendre sur ce que désignent les mots, et conséquemment, sur ce qu'il faut faire.
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Bergame a écrit:
Mais j'insiste, c'est une vraie question : Peut-on penser hors des mots ? Parce que c'est la thèse (radicale) que soutient Febvre ici : Puisque les mots manquaient à l'époque de Rabelais, la pensée ne pouvait être la même. C'est par exemple aussi la thèse que soutiendra Foucault, et il me semble que c'est celle dont part Deleuze.
Or, je pense qu'ils se trompent.
C'est surtout "La" bonne question. J' ai bien une piste qui peut satisfaire tout le monde:
On peut penser sans les mots. Mais on ne peut pas "stocker" les résultats de la pensée, sans les mots!
Et la spécificité organiciste de notre espèce est que c'est le groupe qui évolue, pas l' individu. L' individu va se servir dans le stock de la mémoire collective pour induire de nouvelles pensées. Le processus est cumulatif ( et itératif avec les conséquences collatérales).
Donc si l' on admet que les mots stockent des données, ils le stockent bien mieux par écrit. Entre la parole et l' écrit, je situerais la poésie ou/et la musique qui, en absence de l' écrit, peuvent stocker des information ( Noêl au balcon, Paques au tison).
Un autre problème me semble lié au couple parole -pensée.
Si la pensée nécessite les mots, on a une opposition entre la pensée qui peut travailler de façon complexe alors que la parole ne peut utiliser que le linéaire. Donc réduire les concepts complexes par des mots.
Un outil linéaire, engendre des modèles complexes qui ne pourront être rendus que simplifiés, linéarisés.
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Ben c'est bien, c'est ce que j'ai soutenu il y a quelques années ici-même...kercoz a écrit: J' ai bien une piste qui peut satisfaire tout le monde:
On peut penser sans les mots. Mais on ne peut pas "stocker" les résultats de la pensée, sans les mots!
A quoi fais-tu référence avec Deleuze (et Foucault) ?Bergame a écrit:C'est par exemple aussi la thèse que soutiendra Foucault, et il me semble que c'est celle dont part Deleuze.
Dernière édition par chapati le Lun 10 Avr 2017 - 20:05, édité 1 fois
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
EDIT : remis en ordre en dessous
Dernière édition par chapati le Mar 11 Avr 2017 - 6:49, édité 6 fois
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Kercoz a écrit:Ben, c'est-à-dire qu'il y a déjà deux niveaux différents entre la pensée et l'explication. Le niveau de l'explication ne correspond en rien avec celui de la pensée... sauf quand on sait déjà qu'on a la solution, où effectivement on a l'impression de tirer des fils d'une idée qui oui, semble "venue d'ailleurs"
On peut aussi envisager qu'avant même qu'il y ait véritablement pensée et par suite explication, un premier niveau ( probablement pas le seul, puisque l'inconscient est une hypothèse à retenir) que l'on peut dire introspectif opère une forme d'évaluation dans l'ordre de ce que l'on admet ou que l'on se refuse de penser; des "zones interdites" parce que dévalorisante, voire culpabilisante. En cela, on peut avancer que " l'on a la solution" ,comme tu dis, avant même que la pensée ne se déroule plus précisément. Ceci dit, on ne peut exclure que ce processus n'accompagne pas la totalité de nos élaborations mentales ( le surmoi de Freud, par exemple). Penser froidement et penser sans exclure l'émotion est déjà en soi un champs d'investigation énorme.
maraud- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
C'est chapati que tu cites, mais je penses de même.maraud a écrit:Kercoz a écrit:Ben, c'est-à-dire qu'il y a déjà deux niveaux différents entre la pensée et l'explication. Le niveau de l'explication ne correspond en rien avec celui de la pensée... sauf quand on sait déjà qu'on a la solution, où effectivement on a l'impression de tirer des fils d'une idée qui oui, semble "venue d'ailleurs"
On peut aussi envisager qu'avant même qu'il y ait véritablement pensée et par suite explication, un premier niveau ( probablement pas le seul, puisque l'inconscient est une hypothèse à retenir) que l'on peut dire introspectif opère une forme d'évaluation dans l'ordre de ce que l'on admet ou que l'on se refuse de penser; des "zones interdites" parce que dévalorisante, voire culpabilisante. En cela, on peut avancer que " l'on a la solution" ,comme tu dis, avant même que la pensée ne se déroule plus précisément. Ceci dit, on ne peut exclure que ce processus n'accompagne pas la totalité de nos élaborations mentales ( le surmoi de Freud, par exemple). Penser froidement et penser sans exclure l'émotion est déjà en soi un champs d'investigation énorme.
J' ai fait ailleurs l' hypothèse d' une analogie avec l' éclair. Un "traceur" fulgurant ( l' intuition qui se sert des données des expériences sur un mode complexe), dont le cheminement peut être exploité par la raison.
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Bon je remets mon texte d'hier a 19:45 complètement remanié, il était vraiment trop en vrac (désolé Bergame Maraus Kercoz)
Le niveau de l'explication ne correspond en rien avec celui de la pensée
Sauf quand on a déjà la solution, où effectivement on a l'impression de tirer des fils d'une idée qui oui, semble "venue d'ailleurs" (mais ça veut pas dire qu'elle le soit). Parce que le fait est que dans ce cas on sait déjà qu'on a la solution, je veux dire au moment où l'on tire le fil... même si il faut attendre les mots pour qu'elle s'actualise en un savoir.
... et qu'on puisse aussi la mettre en mémoire je pense (la mise en mémoire grâce aux mots, c'est l'idée que j'avais émise dans l'indifférence générale d'ailleurs, en dehors des aboiements d'habitués à ce mode de vie)
L'explication est linéaire donc (tout le contraire de penser un problème).
(et réductrice, oui Eutyphron : on n'est pas en section "maths")
Mais cette façon de faire (tirer des fils) n'est pas penser les problèmes, philosopher (puisqu'on a déjà les solutions).
C'est plus de l'ordre d'une logique récupérée d'un contenu-mémoire on dirait. Comme s'il ne manquait qu'un événement extérieur pour nous rappeler un fil (collatéral) qu'on n'a pas tiré jusqu'au bout, mais qui fait/ferait déjà sens dans l'agencement de nos représentations : on extrairait alors des mots depuis le sens (pitié, rien à voir avec la recognition).
(je pense que cette expérience, Bergame, n'est en rien une pensée de bout en bout sans mot, telle qu'on pourrait l'attribuer a des animaux par exemple. Sinon dire si les animaux pensent, ça dépend déjà de la définition que chacun a de la pensée... bref c'est pas simple)
Ben, c'est-à-dire qu'il y a déjà deux niveaux différents entre la pensée et l'explication.Bergame a écrit: Moi, je sens quelque chose, une idée, avant de mettre des mots dessus. Ce qui me fait dire, d'ailleurs, que j'ai souvent le sentiment que les idées viennent à moi plutôt que c'est moi qui les crée ou les pense. Pour moi, il y a quelque chose au-delà, ou en-deca, des mots, quelque chose que les mots tentent d'enserrer, de circonscrire, de saisir -et toujours plus ou moins vainement.
Le niveau de l'explication ne correspond en rien avec celui de la pensée
Sauf quand on a déjà la solution, où effectivement on a l'impression de tirer des fils d'une idée qui oui, semble "venue d'ailleurs" (mais ça veut pas dire qu'elle le soit). Parce que le fait est que dans ce cas on sait déjà qu'on a la solution, je veux dire au moment où l'on tire le fil... même si il faut attendre les mots pour qu'elle s'actualise en un savoir.
... et qu'on puisse aussi la mettre en mémoire je pense (la mise en mémoire grâce aux mots, c'est l'idée que j'avais émise dans l'indifférence générale d'ailleurs, en dehors des aboiements d'habitués à ce mode de vie)
L'explication est linéaire donc (tout le contraire de penser un problème).
(et réductrice, oui Eutyphron : on n'est pas en section "maths")
Mais cette façon de faire (tirer des fils) n'est pas penser les problèmes, philosopher (puisqu'on a déjà les solutions).
C'est plus de l'ordre d'une logique récupérée d'un contenu-mémoire on dirait. Comme s'il ne manquait qu'un événement extérieur pour nous rappeler un fil (collatéral) qu'on n'a pas tiré jusqu'au bout, mais qui fait/ferait déjà sens dans l'agencement de nos représentations : on extrairait alors des mots depuis le sens (pitié, rien à voir avec la recognition).
(je pense que cette expérience, Bergame, n'est en rien une pensée de bout en bout sans mot, telle qu'on pourrait l'attribuer a des animaux par exemple. Sinon dire si les animaux pensent, ça dépend déjà de la définition que chacun a de la pensée... bref c'est pas simple)
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Ce qui est intéressant dans l'histoire, c'est cette idée d'extraire des mots depuis le sens.
Là on est bien dans la différenciation et non l'identité : les mots eux-mêmes ne prennent sens qu'à partir du sens qu'au départ on voulait exprimer.
Et c'est la tâche de l'explication que d'agencer des mots de façon d'abord que la raison puisse s'y retrouver : de façon la plus "linéaire" possible. Bref c'est la raison qui ordonne les termes de l'explication suivant une toute autre logique que celle de la pensée qui précède, dans un processus entièrement distinct.
Alors que la pensée elle, dès lors qu'il fut question de problème et non de simple déduction, s'est débattue au sein d'intensités propres au sens, à mille lieux d'une raison triomphante ; d'intensités dont aucun mot ne peut rendre la part sensible par laquelle l'expérience l'a faite passer, à laquelle elle a été confrontée (les mots aussi, dans l'expérience de penser, on les extrait depuis des émotions intensives de sens, de sens qu'on expérimente... et non depuis un machin pseudo représentatif).
Bref les mots peuvent parfois suffire à exprimer le sens, ils ne peuvent aussi que rater les intensités : le sens que les mots ratent, c'est le sens du sensible.
Et c'est toute l'escroquerie de la raison qui fait savoir en Occident.
Là on est bien dans la différenciation et non l'identité : les mots eux-mêmes ne prennent sens qu'à partir du sens qu'au départ on voulait exprimer.
Et c'est la tâche de l'explication que d'agencer des mots de façon d'abord que la raison puisse s'y retrouver : de façon la plus "linéaire" possible. Bref c'est la raison qui ordonne les termes de l'explication suivant une toute autre logique que celle de la pensée qui précède, dans un processus entièrement distinct.
Alors que la pensée elle, dès lors qu'il fut question de problème et non de simple déduction, s'est débattue au sein d'intensités propres au sens, à mille lieux d'une raison triomphante ; d'intensités dont aucun mot ne peut rendre la part sensible par laquelle l'expérience l'a faite passer, à laquelle elle a été confrontée (les mots aussi, dans l'expérience de penser, on les extrait depuis des émotions intensives de sens, de sens qu'on expérimente... et non depuis un machin pseudo représentatif).
Bref les mots peuvent parfois suffire à exprimer le sens, ils ne peuvent aussi que rater les intensités : le sens que les mots ratent, c'est le sens du sensible.
Et c'est toute l'escroquerie de la raison qui fait savoir en Occident.
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Sur ton dernier post, je suis pleinement en accord. La réduction de la pensée à la raison est évidemment une erreur, mais une erreur qui est part de la philosophie occidentale.
C'est d'ailleurs là où la philosophie telle qu'on l'entend communément, telle qu'elle s'enseigne dans les lycées, trouve l'une de ses limites : C'est une discipline particulièrement tournée vers le passé, une discipline singulière qui prétend continuer à ériger des érudits morts depuis plusieurs siècles au rang de maitres à penser contemporains. La philosophie, c'est un peu devenu la gardienne du Temple -pour le meilleur et pour le pire, car il en faut aussi, des chiens de garde de la Tradition.
Mais bon, voila, on admet aisément que la physique aristotélicienne est dépassée, on n'admet pas encore aussi aisément que la psychologie aristotélicienne est obsolète. Pas grave, c'est le cas néanmoins, et les sciences cognitives nous apportent aujourd'hui un autre regard sur la pensée, qui ne se réduit effectivement pas à la raison.
Si je suis donc pleinement en accord avec ta dernière thèse, je m'interroge sur la première. Les mots engramment les idées dans la mémoire, en somme ? Pourquoi pas, c'est une thèse intéressante. Mais je vois deux objections :
- Les individus qui ont une forte compétence mnésique, lorsqu'ils décrivent leur méthode, tendent plutôt à dire l'inverse : Ils associent les mots qu'ils retiennent à des couleurs, des lieux, des situations etc.
- Après avoir enterré Aristote, célébrons Platon. Il y a une thèse de Platon qui m'a toujours impressionnée, c'est l'idée selon laquelle la réflexion, la pensée dialectique naît du manque de mémoire. Il me semble que c'est un argument très logique : Si nous nous souvenions de tout ce que nous avons appris, senti, expérimenté, etc. nous n'aurions pas besoin de réfléchir, ou du moins ce type de pensée n'aurait peut-être pas connu le développement cognitif qu'il a connu dans notre espèce. Aussi, dans cette perspective, la philosophie -si tant est qu'elle emprunte au moins en partie à la pensée dialectique- consiste effectivement à retrouver un chemin logique, en quelque sorte, à se remémorer.
Je passe sur les conséquences que tire Platon de cette thèse, l'esclave du Ménon et la réminiscence, mais je pense qu'en elle-même, elle a une force convaincante. Je veux dire, encore une fois, que ca correspond à l'expérience que je fais. Moi, j'ai le sentiment que l'idée me vient, d'abord, et que ma pensée construit ensuite un édifice logique qui vise tout a la fois à atteindre l'idée, la désigner par un ou des mots, et l'étayer logiquement par des arguments -y compris à mon propre usage.
Comment vois-tu la chose, toi ?
C'est d'ailleurs là où la philosophie telle qu'on l'entend communément, telle qu'elle s'enseigne dans les lycées, trouve l'une de ses limites : C'est une discipline particulièrement tournée vers le passé, une discipline singulière qui prétend continuer à ériger des érudits morts depuis plusieurs siècles au rang de maitres à penser contemporains. La philosophie, c'est un peu devenu la gardienne du Temple -pour le meilleur et pour le pire, car il en faut aussi, des chiens de garde de la Tradition.
Mais bon, voila, on admet aisément que la physique aristotélicienne est dépassée, on n'admet pas encore aussi aisément que la psychologie aristotélicienne est obsolète. Pas grave, c'est le cas néanmoins, et les sciences cognitives nous apportent aujourd'hui un autre regard sur la pensée, qui ne se réduit effectivement pas à la raison.
Si je suis donc pleinement en accord avec ta dernière thèse, je m'interroge sur la première. Les mots engramment les idées dans la mémoire, en somme ? Pourquoi pas, c'est une thèse intéressante. Mais je vois deux objections :
- Les individus qui ont une forte compétence mnésique, lorsqu'ils décrivent leur méthode, tendent plutôt à dire l'inverse : Ils associent les mots qu'ils retiennent à des couleurs, des lieux, des situations etc.
- Après avoir enterré Aristote, célébrons Platon. Il y a une thèse de Platon qui m'a toujours impressionnée, c'est l'idée selon laquelle la réflexion, la pensée dialectique naît du manque de mémoire. Il me semble que c'est un argument très logique : Si nous nous souvenions de tout ce que nous avons appris, senti, expérimenté, etc. nous n'aurions pas besoin de réfléchir, ou du moins ce type de pensée n'aurait peut-être pas connu le développement cognitif qu'il a connu dans notre espèce. Aussi, dans cette perspective, la philosophie -si tant est qu'elle emprunte au moins en partie à la pensée dialectique- consiste effectivement à retrouver un chemin logique, en quelque sorte, à se remémorer.
Je passe sur les conséquences que tire Platon de cette thèse, l'esclave du Ménon et la réminiscence, mais je pense qu'en elle-même, elle a une force convaincante. Je veux dire, encore une fois, que ca correspond à l'expérience que je fais. Moi, j'ai le sentiment que l'idée me vient, d'abord, et que ma pensée construit ensuite un édifice logique qui vise tout a la fois à atteindre l'idée, la désigner par un ou des mots, et l'étayer logiquement par des arguments -y compris à mon propre usage.
Comment vois-tu la chose, toi ?
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Comme c'est aussi un peu la mienne de thèse, je la défends:Bergame a écrit:
Si je suis donc pleinement en accord avec ta dernière thèse, je m'interroge sur la première. Les mots engramment les idées dans la mémoire, en somme ? Pourquoi pas, c'est une thèse intéressante. Mais je vois deux objections :
- Les individus qui ont une forte compétence mnésique, lorsqu'ils décrivent leur méthode, tendent plutôt à dire l'inverse : Ils associent les mots qu'ils retiennent à des couleurs, des lieux, des situations etc.
Sans écriture qui puisse stocker des informations, il ne reste que la poésie utilitariste qui s'appuie sur le rythme et la versification de façon à aider la mémorisation, ....et les mythes, les récits fantasmés, l' important étant, non la réalité du message, mais la rigidité d'un comportement.
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
Non c'est pas ça que je dis.Bergame a écrit:Les mots engramment les idées dans la mémoire, en somme ?
Pour moi c'est pas les mots qui laissent des traces, c'est le sens.
Et ce qui m'intéresse dans cette histoire, c'est que ce soit à partir du sens qu'on retrouve les choses : à partir d'entre les mots donc et non des mots-identités eux-mêmes.
Hier je me suis emberlificoté les pinceaux. Vérifions d'abord qu'on parle de la même chose :
D’où nous viennent les idées ?
Souvent, quand un problème est posé, on a la sensation de savoir le résoudre, sans pour autant être capable d’y répondre aussitôt, donc sans que sa résolution fasse partie de notre savoir conscient.
On sait qu’on a quelque chose à dire et, en partant de la question, on suit un fil de logique comme si on l’avait vu dépasser d’une bobine... un fil qui, au cours de son développement, semble extraire au fur et à mesure des idées qui s’y rallient, pour l’amener logiquement jusqu’à la solution du problème.
Et là on est comme surpris d’être arrivé aussi facilement à cette résolution. C’est qu’en fait on énonce ce dont on n’avait jusqu’alors jamais pris conscience : un savoir dont on ne se savait pas porteur.
Du coup on s’aperçoit qu’il fallait attendre les mots pour que l’idée "s’imprime" en nous., pour qu’elle fasse partie de notre mémoire, comme si celle-ci avait attendu ce fil de sens pour s’approprier le savoir en l’enregistrant.
C'est bien de ça dont tu parles ?
(donc là je l'ai dit : c'est qu'on avait déjà la réponse de par notre compréhension des choses, mais qu'on n'avait jamais pensé cette question spécifique)
Je reprends quand même l'essentiel (arrangé) :
Pour expliquer les choses, on va choisir des mots, non pas tant pour abouter le sens dont les uns et les autres sont porteurs de façon identitaire que pour s'en servir comme des outils pour arriver au sens qu'on veut faire comprendre. C'est-à-dire que chaque mot est censé modifier celui d'avant (le préciser, l'affiner) en même temps qu'il est lui-même modifié par ce qui précède : le sens est "entre les mots"... comme en survol. Et ce jusqu'à ce que cette logique explicative / logique de mots, fasse sens à nos yeux. Le langage retrouve ainsi sa fonction symbolique au lieu de se limiter à l'identité plus ou moins figée des mots.
Mais avant cela, il était question de la compréhension du problème. Et pour moi là encore c'est depuis le sens qu'on va chercher des mots. Mais plus comme dans l'explication : l'auteur qui tentait de tracer le chemin le plus linéaire possible pour donner de la clarté à son propos, c'est le sens et non la logique des mots qui ici le dirige.
C'est complètement différent.
C'est le sens qui dirige les opérations (celui que l'auteur en trouve, ça va de soi). Sans cette fois trop s'avancer dans le processus, disons qu'on aboute des éléments de réponse qui pour nous font sens, et ce jusqu'à ce que ça se répercute dans un sens final qui exprime de ce qu'on a compris ou cru comprendre... bref, qui fasse sens pour nous.
On voit donc que l'explication est réductrice, quand bien même on y serait réceptif. Elle met en quelque sorte "à plat" les mots en tant qu'éléments d'explication, pour "dévoiler" ce qui est en jeu... et le diktat de la logique des mots rapproche ainsi du zéro les intensités produites par l'agencements des choses, le réduit forcément vers le sens commun, où la communication relègue les mots à une identité qui en fige le sens : si la rigueur fait qu'elle peut au mieux garder encore un peu du mouvement des choses, elle aplatit forcément ceux de la pensée, et ainsi les intensités du sensible relatives aux choses, intensités qui ont ponctué la démarche de recherche de compréhension.
Dernière édition par chapati le Mer 12 Avr 2017 - 7:47, édité 2 fois
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
PS : ce qui est gênant dans la dialectique, c'est qu'elle présuppose une compréhension en forme d'explication, ce qui déforme des questions et génère un tas de faux problèmes.
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
chapati a écrit:Non c'est pas ça que je dis.Bergame a écrit:Les mots engramment les idées dans la mémoire, en somme ?
Pour moi c'est pas les mots qui laissent des traces, c'est le sens.
J' insiste. Ca me semble important.
Ce qui caractérise notre espèce ce n'est pas l'invention, mais la capacité de stocker un progrès individuel, un acquis, dans une mémoire.
Les mots sont ce premier outil qui permet de stocker une information dans un lieu de stockage. Ce lieu peut être le mythe, le récit. La poésie permet de stocker plus d' informations.
Quand vient l' écrit, on multiplie les données stockées.
Seule la culture ou civilisation évolue, pas l' individu. L' individu croit utiliser ces informations alors qu' il est probable que c'est le système qui l' utilise en tant qu' outil pouvant accroitre cette évolution.
Je pousse le trait pour montrer que les apparences peuvent cacher des usages collatéraux.
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TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
J'entends bien Kercoz, et on est d'accord sur un point. Enfin il me semble aussi que les mots servent de racourci au sein de la mémoire (c'est bien ce que tu dis, je crois).
Là où je vais plus loin, c'est quand on sort de la représentation.
Et là je dis que quand on pense, sérieusement... c'est-à-dire qu'on cherche à comprendre (et non à savoir), c'est le sens qui nous dirige et non les mots et leur logique.
C'est vraiment ça l'important de l'histoire.
Et je crois que ce sens est aussi prégnant au sein de la mémoire que les mots habituels : en fait je me demande s'il ne l'est bien plus ! C'est peut-être le sens qui par exemple nous aide à retrouver les mots quand ils sont "sur le bout de la langue"... parce que justement il se trouve qu'on les a perdus parce qu'on a interrompu un flux de réflexion qui faisait sens pour nous (c'est juste un exemple qui me vient en tête).
C'est tout à fait passionnant...
C'est peut-être le point le plus important de la pensée deleuzienne, que le sens remplace les mots de la représentation, et ce dès qu'on est réellement impliqués dans la compréhension d'un problème, que le sens soit l'aiguillon qui nous pousse, qui pousse la pensée... en lieu et place d'une logique de mots identitaires, telle qu'on la déroule au moment de l'explication par exemple.
Au est au cœur de Deleuze ici, à mon sens.
(content que ce fil reprenne vie )
Là où je vais plus loin, c'est quand on sort de la représentation.
Et là je dis que quand on pense, sérieusement... c'est-à-dire qu'on cherche à comprendre (et non à savoir), c'est le sens qui nous dirige et non les mots et leur logique.
C'est vraiment ça l'important de l'histoire.
Et je crois que ce sens est aussi prégnant au sein de la mémoire que les mots habituels : en fait je me demande s'il ne l'est bien plus ! C'est peut-être le sens qui par exemple nous aide à retrouver les mots quand ils sont "sur le bout de la langue"... parce que justement il se trouve qu'on les a perdus parce qu'on a interrompu un flux de réflexion qui faisait sens pour nous (c'est juste un exemple qui me vient en tête).
C'est tout à fait passionnant...
C'est peut-être le point le plus important de la pensée deleuzienne, que le sens remplace les mots de la représentation, et ce dès qu'on est réellement impliqués dans la compréhension d'un problème, que le sens soit l'aiguillon qui nous pousse, qui pousse la pensée... en lieu et place d'une logique de mots identitaires, telle qu'on la déroule au moment de l'explication par exemple.
Au est au cœur de Deleuze ici, à mon sens.
(content que ce fil reprenne vie )
Re: Dictionnaire philosophique - discussion
kercoz a écrit:J' insiste. Ca me semble important.
Ce qui caractérise notre espèce ce n'est pas l'invention, mais la capacité de stocker un progrès individuel, un acquis, dans une mémoire.
et toujours chez toi cette dévalorisation de la créativité individuelle... et survalorisation du groupe.
Mais ce courant de pensée surfe dans les sondages et il semble en mesure de l'emporter à tout le moins de disputer la domination à l' esprit des lumières (esprit libéral et individualiste diraient certains ).
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12509
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
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