la beauté de la tyrannie
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la beauté de la tyrannie
Lorsque les pères s'habituent à laisser faire les enfants,
lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles,
lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter,
lorsque finalement les jeunes gens méprisent les lois, parce qu'ils ne reconnaissent plus au-dessus d'eux l'autorité de rien ni de personne,
alors c'est là, en toute beauté et en toute jeunesse,
le début de la tyrannie.
Platon, République, VIII, 562b-563e.
Je suis intrigué par cette idée que la tyrannie puisse être belle.
Toute réserve quant à la traduction.
Google que je convoque me propose d'inverser la proposition en guise de réponse,la tyrannie de la beauté (pour les premières occurences) .
Convaincu qu'il se trouvera bien quelques éclaireurs (platoniciens ou non) pour indiquer une piste.....
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Soyez patient envers tout ce qui n'est pas résolu dans votre cœur et essayez d'aimer les questions elles-mêmes
lanK- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
J'ai deux traductions chez moi, Baccou et Leroux, et je viens de regarder. Toutes deux contredisent la traduction que tu nous soumets.
Baccou : "c'est ce gouvernement si beau et si juvénile (ironie visant la démocratie) qui donne naissance à la tyrannie" (qui n'est donc pas qualifiée de belle).
Leroux, plus lourdement, va dans le même sens : "Tel (sic) est donc l'amorce belle et juvénile, à partir de laquelle se développe selon moi la tyrannie".
Baccou : "c'est ce gouvernement si beau et si juvénile (ironie visant la démocratie) qui donne naissance à la tyrannie" (qui n'est donc pas qualifiée de belle).
Leroux, plus lourdement, va dans le même sens : "Tel (sic) est donc l'amorce belle et juvénile, à partir de laquelle se développe selon moi la tyrannie".
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amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
Devant un "splendide" gadin du frimeur, sans conséquence fâcheuse, l'un des deux compères témoins malgré eux, pourra s'exprimer ainsi, moqueur : " De toute beauté ! "
Même si le mot "belle" apparait, je vais donc dans le sens d'Euthyphron, même avec la traduction dont tu disposes.
Et puis j'ai bien "peur" que Platon après son expérience sicilienne avec Denys soit devenu un peu plus circonspect avec la tyrannie, soi-disant éclairée, ou pas.
Même si le mot "belle" apparait, je vais donc dans le sens d'Euthyphron, même avec la traduction dont tu disposes.
Et puis j'ai bien "peur" que Platon après son expérience sicilienne avec Denys soit devenu un peu plus circonspect avec la tyrannie, soi-disant éclairée, ou pas.
neopilina- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
lanK a écrit:
Je suis intrigué par cette idée que la tyrannie puisse être belle.
Toute réserve quant à la traduction.
Google que je convoque me propose d'inverser la proposition en guise de réponse,la tyrannie de la beauté (pour les premières occurences) .
Convaincu qu'il se trouvera bien quelques éclaireurs (platoniciens ou non) pour indiquer une piste.....
Je ne comprends pas ce qui te choque. Pour Platon la démocratie est fondamentalement démagogique. C'est la domination de l'opinion c'est-à-dire du langage des préjugés, de l'incompétence. La tyrannie antique qu’il ne faut pas confondre avec le despotisme convenait mieux à la mise en œuvre de ces idéalités dont il avait le secret. Mais Platon n’est pas un exemple isolé, il y eu certainement moins de philosophes pour vanter les mérites de la démocratie que pour venter les mérites de régimes autoritaires, les uns sont légions les autres se comptent sur les doigts de la main, peut-être deux mains, mais je n'en suis pas sûr.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
Dans le passage cité, "tyrannie" a manifestement un sens péjoratif.
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euthyphron- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
Ben oui, c'est l'évidence. La tyrannie, Baptiste, ce n'est justement pas un régime autoritaire, pour Platon, les exemples choisis te le disent suffisamment : Lorsque les fils ne tiennent plus compte de l'avis des pères, lorsque les maitres tremblent devant les élèves, lorsque, précisément, l'autorité n'est plus respectée. La tyrannie, c'est le contraire de l'autorité.
Dernière édition par Bergame le Mar 4 Juin 2013 - 9:46, édité 1 fois
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Bergame- Persona
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Re: la beauté de la tyrannie
Non plus, désolé, mais le passage cité par notre ami est coupé. La première partie, celle que tu évoques, parle de la démocratie. Il s'agit dans le livre VIII d'imaginer un processus de décadence, par lequel les régimes politiques s'engendrent les uns les autres. Ainsi, la démocratie conduit à la tyrannie, idée qui n'est pas sans intérêt ni commentaires possibles ma foi.
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euthyphron- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
Exact, au temps pour moi, idée bien connue pourtant. A la relecture, Platon parle d'ailleurs de cette période comme de l'"anarchie", peut-être le stade où l'idée de liberté, qui irrigue l'espace public dans la phase de "démocratie", pénètre jusque dans la sphère privée.
Il n'en reste pas moins que Platon est aussi critique de la tyrannie qu'il est critique de la démocratie, la suite du texte le dit suffisamment. La tyrannie, ce n'est pas non plus un gouvernement fondé sur l'autorité, mais sur la force et la violence.
Du coup, je lis une autre traduction du passage en question, sans doute plus claire : "C'est ce gouvernement si beau et si juvénile qui donne naissance à la tyrannie."
Il n'en reste pas moins que Platon est aussi critique de la tyrannie qu'il est critique de la démocratie, la suite du texte le dit suffisamment. La tyrannie, ce n'est pas non plus un gouvernement fondé sur l'autorité, mais sur la force et la violence.
Du coup, je lis une autre traduction du passage en question, sans doute plus claire : "C'est ce gouvernement si beau et si juvénile qui donne naissance à la tyrannie."
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Bergame- Persona
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Re: la beauté de la tyrannie
le début de la tyrannie
si les spécialistes de Platon pouvait développer ce que Platon entend par "tyrannie"dans la République ( apparemment là c 'est péjoratif ) et /ou ailleurs
Est- ce tel que le dit Baptiste
La tyrannie antique qu’il ne faut pas confondre avec le despotisme ( et qui ) convenait mieux à la mise en œuvre de ces idéalités dont il avait le secret.
Platon avait-il le désir de tout refonder à partir du chaos ? Ainsi l' espérance de ce chaos qui accoucherait d' une republique philosophique ?
Je ne sais.
hks- Digressi(f/ve)
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Re: la beauté de la tyrannie
Bergame a écrit:Exact, au temps pour moi, idée bien connue pourtant.
Pourquoi employer cette forme, autant d'erreur que l'on peut mettre à mon actif peut se justifier, mais quel en serait le sens? :?:
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: la beauté de la tyrannie
Un petit résumé personnel, quant aux relations entre démocratie et tyrannie chez Platon.
La question de la démocratie est envisagée de trois points de vue différents dans l'oeuvre de Platon, qui conduisent à trois conclusions très différentes. Inutile d'ailleurs de se demander laquelle représente la "vraie" pensée de Platon. Les trois, bien entendu.
Dans le Gorgias, la démocratie est présentée comme une des formes de la tyrannie, celle qui advient lorsque le pouvoir réel appartient aux communicants, qui l'utilisent en fonction de ce qu'ils croient être leurs intérêts.
Dans la République, la démocratie est une étape d'un processus de décadence qui conduit à la tyrannie. Celle-ci est engendrée par la démocratie.
Dans le Politique, la démocratie est présentée comme le moins bon des bons régimes, et le moins mauvais des régimes corrompus.
Jamais la démocratie n'est envisagée comme ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie. Ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie, c'est le gouvernement de l'intelligence tournée vers le Bien. La tyrannie commence donc dès que le gouvernement se moque comme d'une guigne du Vrai et du Bien, et ne s'exerce qu'en vue de son propre pouvoir. C'est la force qui au lieu de se soumettre à ce qui est plus digne qu'elle se prend elle-même pour objet de vénération.
La question de la démocratie est envisagée de trois points de vue différents dans l'oeuvre de Platon, qui conduisent à trois conclusions très différentes. Inutile d'ailleurs de se demander laquelle représente la "vraie" pensée de Platon. Les trois, bien entendu.
Dans le Gorgias, la démocratie est présentée comme une des formes de la tyrannie, celle qui advient lorsque le pouvoir réel appartient aux communicants, qui l'utilisent en fonction de ce qu'ils croient être leurs intérêts.
Dans la République, la démocratie est une étape d'un processus de décadence qui conduit à la tyrannie. Celle-ci est engendrée par la démocratie.
Dans le Politique, la démocratie est présentée comme le moins bon des bons régimes, et le moins mauvais des régimes corrompus.
Jamais la démocratie n'est envisagée comme ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie. Ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie, c'est le gouvernement de l'intelligence tournée vers le Bien. La tyrannie commence donc dès que le gouvernement se moque comme d'une guigne du Vrai et du Bien, et ne s'exerce qu'en vue de son propre pouvoir. C'est la force qui au lieu de se soumettre à ce qui est plus digne qu'elle se prend elle-même pour objet de vénération.
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amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/06/2011
Re: la beauté de la tyrannie
( Autant pour moi, au temps pour moi : les deux sont acceptés. L'étymologie de l'expression étant incertaine. http://fr.wikipedia.org/wiki/Au_temps_pour_moi )
neopilina- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 31/10/2009
Re: la beauté de la tyrannie
euthyphron a écrit:Jamais la démocratie n'est envisagée comme ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie. Ce qui s'oppose diamétralement à la tyrannie, c'est le gouvernement de l'intelligence tournée vers le Bien. La tyrannie commence donc dès que le gouvernement se moque comme d'une guigne du Vrai et du Bien, et ne s'exerce qu'en vue de son propre pouvoir. C'est la force qui au lieu de se soumettre à ce qui est plus digne qu'elle se prend elle-même pour objet de vénération.
Oui, mais je crois que tu euphémises.
Car dans la procession des systèmes de gouvernement, la tyrannie succède (empiriquement au moins) à la démocratie. Et la tyrannie ne peut résulter que d'une démocratie. Les tyrans sont mis au pouvoir par le peuple, pas par un complot de l'aristocratie ou une dégénrescence monarchie (je veux dire : de la royauté).
Le tyran, c'est d'abord un démagogue.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 03/07/2008
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