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Message par Grégor Mar 4 Juil 2023 - 20:50

Qu’est-ce qui fait qu’une personne est elle-même ?
Existe-t-il un moi irréductible aux qualités qui soutiendrait celles-ci ?
Cela semble peu probable.
Le moi donc n’existe pas en ce sens-là.
Pourtant, les différentes qualités d’une personne ne sont pas seulement en situation de coexistence, sans rapport les unes aux autres. La meilleure preuve en est la cessation de tout rapport, quand une personne cesse d’être, qu’elle meure ou qu’elle devienne à ce point étrangère à elle-même qu’on ne puisse plus prétendre qu’un même rapport a perduré entre ses diverses qualités.
Nous voyons que la définition d’une personne ressemble à celle d’une chose.
Nous essayons d’identifier quelqu’un.
Pour ce faire il nous faut envisager certaines qualités reliées entre elles selon un certain rapport qui conserve une certaine identité à travers le temps.
Ce rapport est donc à la fois un lien spatial et temporel entre des qualités.
Toute identité suppose des différences et à plusieurs niveaux.
L’unité spatiale se fait entre diverses qualités réunies dans un seul individu. Par exemple j’ai deux bras et deux jambes. Mais si je les perdais je ne cesserais pas d’être moi, je pourrais survivre à une telle perte. Donc le lien temporel entre celui que j’étais lorsque j’avais tous mes membres et celui que je serais en en étant privé, maintiendrait l’unicité du moi.
Nous voyons que certaines qualités sont essentielles à notre survie et d’autres non.
Pourtant nous pouvons nous demander si dans certaines situations nous ne mourons pas avant notre mort biologique, lorsque nous devenons complétement fous ou amnésiques, incapables de penser ou de reconnaître des êtres chers.
A contrario, le fait que nous puissions perdre un bras, sans cesser d’être nous-mêmes, ne doit pas nous induire à penser qu’un bras est une qualité inessentielle. Parce qu’avec un tel genre de raisonnement, on pourrait priver une personne de pratiquement tous ses attributs, sans qu’elle ne soit totalement supprimée. Ce qui est absurde, puisque tant que je possède mes deux bras, ces deux membres font partie de moi, de la totalité que je suis et que l’on ne peut démembrer sans la priver de son sens. Sinon le moindre de mes gestes deviendrait inessentiel, puisque ayant utilisé un membre non essentiel, on pourrait le supprimer et ce serait supprimer, par un raisonnement analogue, pratiquement chacun de mes gestes, qui pourtant me définissent.
Si j’étais privé d’un de mes membres, je ne pourrais plus accomplir certains gestes, qui ne pourraient plus me définir mais je n’en manquerais pas plus qu’une pierre ne manque du sens de la vue, comme disait Spinoza.
Nous sommes donc cette union totale de nos qualités et nous n’avons pas à nous désolidariser d’une partie plutôt que d’une autre, chacune faisant partie de nous et de notre identité.

Le moi est donc un concept.
Du moins tant que l’on fait du moi ou de la personnalité, une chose extérieure, mais que se passe-t-il si nous essayons de saisir la conscience en tant que conscience ?
Cela semble impossible directement.
En effet, si nous comparons la conscience à une ouverture sur le monde, cette ouverture semble se retirer afin que le monde puisse prendre place. Et si nous essayons de retourner l’objectif vers lui-même, nous ne respectons plus l’essence de cette ouverture qui est de manifester le monde.
Alors comment peut-on envisager de démasquer cette conscience, si l’on considère qu’elle est une part essentielle de notre identité et de notre personnalité ?
Si nous nous contentons du ici et du maintenant, nous n’aurons aucun moyen de mettre à jour le travail de la conscience, mais si nous nous rendons attentifs à la manière dont les divers ici et maintenant sont organisés et reliés entre eux, alors nous pouvons comprendre la logique même de notre conscience et son œuvre cachée.
Cette synthèse du divers suffit-elle à faire éclore le moi et la personnalité ?
Peut-être allons-nous trop vite en besogne.
Tout d’abord, cherchons ce qui est l’essentiel de cette synthèse du divers.
Comment les différents moments sont-ils soudés entre eux ?
Que se passerait-il si cette synthèse n’avait pas lieu ?
Sans doute que les choses s’évanouiraient en tant que choses et que plus rien ne serait identifiable.
Ce qui fait l’unité des choses, c’est la synthèse du divers par la conscience.
Ainsi nous pouvons identifier des choses.

Nous voyons que les deux chemins empruntés, l’un extérieur et l’autre tourné vers l’intérieur, reviennent à envisager le même problème, celui de l’identité de la chose, et cela parce que nous n’avons que des traces indirectes de l’action de notre conscience sur le monde.
Une chose, pour être, doit être une synthèse de diverses qualités. Or, comment ces qualités pourraient-elle être soudées sans temporalité ? J’imagine que le mouvement des choses joue un rôle important dans la manière dont nous les identifions. Car même un rocher inamovible est pris comme une chose, justement parce qu’il a ce caractère de ne pas être mû facilement. Si nous pouvons voir une chose en tant que chose, c’est que nous lions à travers le temps les diverses représentations que nous en avons. Si nous disons qu’une chose est identique, c’est qu’elle demeure. Or, demeurer ce n’est pas être totalement identique, sinon cette identification entre une chose et elle-même serait tautologique, mais demeurer signifie que malgré le temps qui passe, la chose se maintient, une identité donc dans la différence, ici temporelle.
Nous avons avec cette identité dans la différence, peut-être touché le noyau de la logique de la conscience. Toute identité repose sur la différence. Différence des moments de la chose que la conscience réunit en une seule chose identifiable comme nous venons de le voir. Mais aussi différence, tout aussi cruciale, entre la chose identifiée et les autres choses qui en sont séparées. Cette séparation, ou limite, permet aussi d’identifier une chose, qui sinon deviendrait n’importe quelle autre chose. Or, cette différence en tant que limite, est si essentielle à l’être de la chose qu’on ne peut définir une chose sans l’envisager. La manière de l’envisager peut être simplement un moyen d’identifier une chose : le sel est blanc, le poivre est noir par exemple. Cela ne nous indique pas la véritable nature des choses. Mais les liens entre les choses, les différences considérées comme rapports essentiels entre elles, peuvent devenir scientifiquement fondés et révéler ainsi la vérité du Concept.
Nous avions dit que le moi était un concept, dans le sens où il pouvait être une synthèse de diverses qualités à travers le temps.
Mais ici nous rencontrons le Concept total, en tant qu’il est le Tout qui se manifeste dans les rapports entre les choses.
Le moi possède cette particularité en tant que conscience, d’avoir conscience de lui-même. Et cette conscience de soi est souvent naturellement un concept, une chose : la synthèse de diverses qualités.
Mais nous avons vu que le moi peut être compris autrement, c’est-à-dire comme la logique sous-jacente des phénomènes, qui les lie et leur donne un sens : comme Esprit du monde. Or, il ne faut pas seulement comprendre cette logique sous l’angle de la connaissance objective pure et désintéressée, nous sommes avant tout mus par l’action et intéressés par notre propre sort. Ce que, je crois, Heidegger essayait de dégager dans Être et Temps. La logique même de notre monde est organisée en vue de notre intérêt, parce que nous nous soucions de nous-mêmes, de nos proches et de notre monde ambiant. La connaissance, notamment scientifique, nous permet de dégager les lois objectives des phénomènes, ainsi nous comprenons la logique même de l’univers, tel qu’il est, indépendamment de notre intérêt. La connaissance scientifique s’est construite en partie contre le sentiment humain, trop humain, que le monde aurait été fait pour lui. La racine de la superstition, l’infâme selon le mot de Voltaire, étant cette idée qu’un Dieu ou une force surnaturelle, récompenserait les hommes pieux et punirait les impies, comme si rien ne pouvait se produire dans le monde qui ne puisse être interprété en termes de finalité humaine. D’où ces prêtres orgueilleux dont le rôle est d’interpréter le message divin caché dans chaque phénomène. À l’encontre de ces illusions superstitieuses la Science a montré une autre voie, celle des causes naturelles.
Mais il ne faudrait pas réduire notre conscience a une logique sous-jacente neutre et désintéressée, même si fort heureusement elle est aussi capable de telles dispositions, ce n’est pas sa seule manière d’être au monde.
La logique sous-jacente du Monde doit donc être pensée assez largement et ne pas être réduite à la seule connaissance objective des choses, même si cette connaissance est précieuse et doit être défendue contre toutes les diverses formes de superstition. Je dirais même aujourd’hui que défendre la Science est une priorité majeure.
L’identification d’une situation comme redoutable, par exemple, est profondément liée à notre situation d’être-au-monde, au souci que nous avons de nous-mêmes (en tant que nous sommes aussi être-avec-les-autres, donc aussi et surtout en tant que nous nous soucions des autres et de nos proches). Nous ne pourrions pas envisager une telle situation autrement, d’un point de vue objectif. Il n’est rien de bon ou de mauvais objectivement, donc rien de redoutable. Tout arrive selon des lois nécessaires et qui ne sont ni bonnes ni mauvaises mais qui sont la seule réalité possible. La seule exception étant celle de la liberté, avec tous les problèmes que charrie une telle hypothèse : comment une cause première est-elle possible ? Une cause sans cause, un fantôme dans la machine cérébrale…
Une personne est donc ce qu’elle est en vertu d’un pouvoir d’identification du monde : un monde advient pour elle et prend forme et sens.
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