Karl Popper et le rationalisme critique
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Karl Popper et le rationalisme critique
Je propose, sur ce fil, d’explorer la philosophie de Karl Popper qu’il désigne lui-même comme un « rationalisme critique ».
Pour fixer les idées, je cite, au départ, un extrait de Le rationalisme critique de Karl Popper de Renée Bouveresse – Ellipses 2000
On voit déjà que tenir un fondement, même si c’est un fondement négatif et qui ne se situe pas au point de départ, rend inutile la recherche d’un fondement positif initial par Descartes (pensant l’avoir trouvé dans le cogito, cela ne l’a pas empêché de produire des théories physiques erronées basées sur ce « fondement »).
Nous verrons, plus tard, le rapport de Popper à Kant.
Pour fixer les idées, je cite, au départ, un extrait de Le rationalisme critique de Karl Popper de Renée Bouveresse – Ellipses 2000
Renée Bouveresse a écrit:Il est vrai qu’il n’y a aucun fondement positif à notre connaissance, c’est-à-dire aucun moyen d’éviter à coup sûr l’erreur, mais c’est reconnaître du même coup que l’on sait ce que c’est que l’erreur, et comment établir qu’une théorie est fausse. De fait, nous avons toujours le moyen, à défaut de trancher pour une théorie, de trancher contre elle : l’expérience ne peut pas vérifier et justifier un énoncé universel, mais elle peut l’infirmer. Nous tenons là notre fondement, même si c’est un fondement négatif et s’il ne se situe nullement au point de départ. On peut toujours séparer les théories qui sont fausses, de celles dont il n’est pas établi qu’elles le sont, et choisir les secondes. Si l’on accepte de définir ainsi la science de façon négative, et de faire de l’étonnante accumulation de ses résultats l’effet d’une simple élimination de l’erreur, la connaissance semble possible.
Il y a dès lors, et c’est l’idée essentielle de Popper, une forme de pensée rationnelle, c’est-à-dire non arbitraire : c’est la pensée critique. Le principe de celle-ci, c’est de mettre à l’épreuve toutes les idées que l’on émet : en partant du principe qu’elles ne peuvent acquérir de valeur qu’après une telle mise à l’épreuve. Quel que soit le résultat d’une mise à l’épreuve, je suis, en effet, gagnant : si ma théorie est réfutée, le nombre des théories possibles qui subsistent est diminué ; si elle a résisté à la réfutation, elle gagne en solidité. Critiquer sévèrement, par l’intermédiaire d’une confrontation à l’expérience, les théories que l’on émet, est donc la seule voie qui puisse faire progresser. (op. cit. pp. 6-7)
On voit déjà que tenir un fondement, même si c’est un fondement négatif et qui ne se situe pas au point de départ, rend inutile la recherche d’un fondement positif initial par Descartes (pensant l’avoir trouvé dans le cogito, cela ne l’a pas empêché de produire des théories physiques erronées basées sur ce « fondement »).
Nous verrons, plus tard, le rapport de Popper à Kant.
Dernière édition par Vanleers le Sam 16 Jan 2021 - 12:06, édité 1 fois
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
bonjour vanleers,
je reviens sur un petit différent qui nous avait opposé à propos de la recherche popperienne, sur le fil ontologie 2.
vous affirmiez que
dans le contexte de la recherche popperienne :
l’axiome « Il n’existe pas de réel en soi » n’est pas compatible avec les sciences et doit être rejeté.
eh bien je ne suis toujours pas convaincu d'être d'accord avec vous. pourriez-vous essayer de m'expliquer de nouveau, le plus clairement possible ? vous savez, je suis lent à comprendre dès que les problèmes sont un peu compliqués.
je reviens sur un petit différent qui nous avait opposé à propos de la recherche popperienne, sur le fil ontologie 2.
vous affirmiez que
dans le contexte de la recherche popperienne :
l’axiome « Il n’existe pas de réel en soi » n’est pas compatible avec les sciences et doit être rejeté.
eh bien je ne suis toujours pas convaincu d'être d'accord avec vous. pourriez-vous essayer de m'expliquer de nouveau, le plus clairement possible ? vous savez, je suis lent à comprendre dès que les problèmes sont un peu compliqués.
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
denis_h a écrit:
dans le contexte de la recherche popperienne :
l’axiome « Il n’existe pas de réel en soi » n’est pas compatible avec les sciences et doit être rejeté.
eh bien je ne suis toujours pas convaincu d'être d'accord avec vous. pourriez-vous essayer de m'expliquer de nouveau, le plus clairement possible ? vous savez, je suis lent à comprendre dès que les problèmes sont un peu compliqués.
Le scientifique s'il ne considère pas le donné tel a priori, ce qui selon moi est le cas aussi philosophiquement, en dehors de toutes considérations d'ordre qualitatives, ultérieures à l'expérience empirique, il fait comment pour faire de la science ? Il ne peut pas.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
j'ai retrouvé la réponse de vanleers dans le fil ontologie 2 :
vanleers a écrit :
A la suite de Popper, me semble-t-il, je soutiens la thèse que nous connaissons le monde en construisant des théories conjecturales (hypothétiques) et en les évaluant.
Ces théories se répartissent en deux grandes catégories :
Les théories scientifiques qui contiennent des propositions falsifiables (réfutables empiriquement).
Les théories métaphysiques qui, elles, ne sont pas falsifiables et que l’on évalue sur d’autres critères que les théories scientifiques.
Dire qu’une proposition est falsifiable, c’est, ipso facto, faire l’hypothèse qu’il existe un réel en soi susceptible de réfuter cette proposition.
Un système global de la connaissance qui contient des propositions scientifiques et métaphysiques serait, à l’évidence, incohérent s’il comportait l’axiome « Il n’existe pas de réel en soi ».
En termes de logique formelle, on dirait que le système est inconsistant.
vanleers a écrit :
A la suite de Popper, me semble-t-il, je soutiens la thèse que nous connaissons le monde en construisant des théories conjecturales (hypothétiques) et en les évaluant.
Ces théories se répartissent en deux grandes catégories :
Les théories scientifiques qui contiennent des propositions falsifiables (réfutables empiriquement).
Les théories métaphysiques qui, elles, ne sont pas falsifiables et que l’on évalue sur d’autres critères que les théories scientifiques.
Dire qu’une proposition est falsifiable, c’est, ipso facto, faire l’hypothèse qu’il existe un réel en soi susceptible de réfuter cette proposition.
Un système global de la connaissance qui contient des propositions scientifiques et métaphysiques serait, à l’évidence, incohérent s’il comportait l’axiome « Il n’existe pas de réel en soi ».
En termes de logique formelle, on dirait que le système est inconsistant.
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Vanleers a écrit:Je propose, sur ce fil, d’explorer la philosophie de Karl Popper qu’il désigne lui-même comme un « rationalisme critique ».
Pour fixer les idées, je cite, au départ, un extrait de Le rationalisme critique de Karl Popper de Renée Bouveresse – Ellipses 2000Renée Bouveresse a écrit:Il est vrai qu’il n’y a aucun fondement positif à notre connaissance, c’est-à-dire aucun moyen d’éviter à coup sûr l’erreur, mais c’est reconnaître du même coup que l’on sait ce que c’est que l’erreur, et comment établir qu’une théorie est fausse. De fait, nous avons toujours le moyen, à défaut de trancher pour une théorie, de trancher contre elle : l’expérience ne peut pas vérifier et justifier un énoncé universel, mais elle peut l’infirmer. Nous tenons là notre fondement, même si c’est un fondement négatif et s’il ne se situe nullement au point de départ. On peut toujours séparer les théories qui sont fausses, de celles dont il n’est pas établi qu’elles le sont, et choisir les secondes. Si l’on accepte de définir ainsi la science de façon négative, et de faire de l’étonnante accumulation de ses résultats l’effet d’une simple élimination de l’erreur, la connaissance semble possible.
Il y a dès lors, et c’est l’idée essentielle de Popper, une forme de pensée rationnelle, c’est-à-dire non arbitraire : c’est la pensée critique. Le principe de celle-ci, c’est de mettre à l’épreuve toutes les idées que l’on émet : en partant du principe qu’elles ne peuvent acquérir de valeur qu’après une telle mise à l’épreuve. Quel que soit le résultat d’une mise à l’épreuve, je suis, en effet, gagnant : si ma théorie est réfutée, le nombre des théories possibles qui subsistent est diminué ; si elle a résisté à la réfutation, elle gagne en solidité. Critiquer sévèrement, par l’intermédiaire d’une confrontation à l’expérience, les théories que l’on émet, est donc la seule voie qui puisse faire progresser. (op. cit. pp. 6-7)
On voit déjà que tenir un fondement, même si c’est un fondement négatif et qui ne se situe pas au point de départ, rend inutile la recherche d’un fondement positif initial par Descartes (pensant l’avoir trouvé dans le cogito, cela ne l’a pas empêché de produire des théories physiques erronées basées sur ce « fondement »).
Nous verrons, plus tard, le rapport de Popper à Kant.
Vanleers a écrit:Popper rend quand même hommage à Kant pour avoir ouvert la voie à ce qu’il appelle le « réalisme critique ».
J’essaierai de développer cela sur un nouveau fil.
Vanleers, avec ça n'a pas raté la cible, excellente citation : la mise en place, la théorisation, le règne, comme pierre de touche de la science : la réfutabilité. L'expérience empirique n'est que ce qu'elle est (partielle, erronée, etc.), mais sans elle, que dalle.
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C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
à vrai dire, la question qui m'intéresse , à travers les affirmations de vanleers, c'est la position de popper vis à vis de l'anti-réalisme.
et pour moi c'est loin d'être clair pour l'instant.
je pense que popper doit s'exprimer quelque part sur le sujet. je chercherai, mais peut-être vanleers a-t-il des éléments de réponse, texte à l'appui.
et pour moi c'est loin d'être clair pour l'instant.
je pense que popper doit s'exprimer quelque part sur le sujet. je chercherai, mais peut-être vanleers a-t-il des éléments de réponse, texte à l'appui.
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
denis_h a écrit:à vrai dire, la question qui m'intéresse , à travers les affirmations de vanleers, c'est la position de popper vis à vis de l'anti-réalisme.
et pour moi c'est loin d'être clair pour l'instant.
je pense que popper doit s'exprimer quelque part sur le sujet. je chercherai, mais peut-être vanleers a-t-il des éléments de réponse, texte à l'appui.
Mon avis? Popper était un réaliste métaphysique dans l'âme, qui a très ingénieusement posé cette réalité métaphysique pour fonder la science elle-même. L'idée est géniale. Mais comme toutes les bonnes idées eh bien ma foi, elle a ses points faibles traditionnels (sophisme, circularité, et on en passe). Ce n'est pas pour rien que la philosophie des sciences ne s'est pas arrêtée à Popper.
Mais Vanleers, qui semble ne pas être la moitié d'un imbécile (ne vous offusquez-point, cher Maître Vanleers, chez moi l'expression est à bien prendre !), traficote un peu avec ses propres idées et nous pond : "
Vanleers a écrit:
C’est bien pourquoi « Il existe un réel en soi » n’est qu’un axiome d’un système hypothétique de connaissance du monde.
Le système choisi, hypothétique et facultatif (ce n'est qu'un système parmi d'autres), de connaissance du monde (autrement dit un moyen de s'y retrouver), doit incorporer dans ses axiomes une réalité du monde qu'il se donne à connaître, au non de la réfutabilité, autre axiome dudit système. Autrement dit, tu sors du système hypothétique, et il n'y a plus de réel en soi.
Je reconnais bien là l'esprit jésuite (je les ai *un peu* fréquentés)
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"Let us chace our imagination to the heavens, or to the utmost limits of the universe ; we never really advance a step beyond ourselves, nor can conceive any kind of existence..." D. Hume
Crosswind- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Popper distingue les propositions scientifiques, celles qui sont falsifiables, et les propositions dites métaphysiques, celles qui ne sont pas falsifiables.
André Verdan décrit cela dans Karl Popper ou la connaissance sans certitude – Presses polytechniques et universitaires romandes 1991, en distinguant deux groupes de propositions : scientifiques et métaphysiques
Au vu de ces définitions, je soutiens que l’Ethique de Spinoza est essentiellement métaphysique.
D’une part, une grande partie de l’Ethique, sinon la totalité, n’est pas testable au sens indiqué ci-dessus.
D’autre part, il s’agit, à l’évidence, d’une théorie susceptible d’argumentation.
J’ajouterais même qu’elle est rationnellement soutenable tout en demeurant finalement indémontrable.
Il serait intéressant de se poser la même question à propos du statut d’une religion.
André Verdan décrit cela dans Karl Popper ou la connaissance sans certitude – Presses polytechniques et universitaires romandes 1991, en distinguant deux groupes de propositions : scientifiques et métaphysiques
André Verdan a écrit:Premier groupe :
1) Est TESTABLE un énoncé qui est susceptible d’être soumis à des tests empiriques, c’est-à-dire des observations ou des expériences.
2) Est, ou plutôt serait VERIFIABLE un énoncé susceptible d’être prouvé ou confirmé par des tests d’observation ou d’expérience. – On se souviendra que, pour Popper, un énoncé n’est jamais vérifiable. En revanche, il peut être corroboré, en résistant aux tests négatifs.
3) Est FALSIFIABLE un énoncé testable qui est, par là même, susceptible d’être falsifié, c’est-à-dire réfuté par des tests.
Deuxième groupe :
1) Est SUSCEPTIBLE D’ARGUMENTATION un énoncé qui, sans être testable, peut être soumis à l’épreuve d’une discussion rationnelle au sens le plus propre du terme, c’est-à-dire logique.
2) Est RATIONNELLEMENT SOUTENABLE un énoncé qui peut être défendu par une argumentation purement logique, même en l’absence de tout test, mais qui demeure finalement indémontrable.
3) Est RATIONNELLEMENT CRITIQUABLE un énoncé qui peut être contesté par une argumentation purement logique, même en l’absence de tout test, mais qui demeure finalement non réfutable.
Au vu de ces définitions, je soutiens que l’Ethique de Spinoza est essentiellement métaphysique.
D’une part, une grande partie de l’Ethique, sinon la totalité, n’est pas testable au sens indiqué ci-dessus.
D’autre part, il s’agit, à l’évidence, d’une théorie susceptible d’argumentation.
J’ajouterais même qu’elle est rationnellement soutenable tout en demeurant finalement indémontrable.
Il serait intéressant de se poser la même question à propos du statut d’une religion.
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Ce qui montre plutôt bien que l'énoncé de l'entreprise scientifique popperienne expose le testable, et donc le réfutable, au rationnellement soutenable/critiquable (les deux faces d'une même pièce).
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Crosswind- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Vanleers a écrit:
D’une part, une grande partie de l’Ethique, sinon la totalité, n’est pas testable au sens indiqué ci-dessus.
D’autre part, il s’agit, à l’évidence, d’une théorie susceptible d’argumentation.
J’ajouterais même qu’elle est rationnellement soutenable tout en demeurant finalement indémontrable.
Il serait intéressant de se poser la même question à propos du statut d’une religion.
beaucoup de choses sont "rationnellement soutenables tout en demeurant finalement indémontrables", vanleers …
...
ce qui empêche popper d'être récupéré par certains fâcheux, c'est son approche sociétale et politique des idéologies, notamment dans "la société ouverte et ses ennemis", mais aussi dans "misère de l'historicisme".
Dernière édition par denis_h le Mer 13 Jan 2021 - 15:37, édité 1 fois
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Ah oui, question intéressante.Vanleers a écrit:Il serait intéressant de se poser la même question à propos du statut d’une religion.
Au contraire, moi ça m'intéresserait que tu développes. Je suis très fâché avec "La Société Ouverte".ce qui empêche popper d'être récupéré par certains fâcheux, c'est son approche sociétale et politique des idéologies, notamment dans "la société ouverte et ses ennemis", mais aussi dans "misère de l'historicisme".
inutile de développer plus, je pense.
Qu'est-ce que tu appelles "l'anti-réalisme" ?à vrai dire, la question qui m'intéresse , à travers les affirmations de vanleers, c'est la position de popper vis à vis de l'anti-réalisme
Pour moi, la clef d'entrée chez Popper, c'est que c'est d'abord -je veux dire, de formation- un logicien. Il a "simplement" appliqué le modus tollens à la méthodologie scientifique.
Dernière édition par Bergame le Mer 13 Jan 2021 - 15:45, édité 1 fois
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
je n'ai pas lu "la société ouverte". juste des résumés et morceaux choisis.
pourquoi êtes vous fâché par ce livre ?
pourquoi êtes vous fâché par ce livre ?
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
A Crosswind
A mon point de vue, tout système de connaissance, qu’il soit scientifique ou métaphysique au sens de Popper est hypothétique, je dirais même axiomatique.
En définissant un système de connaissance scientifique comme falsifiable, Popper pose implicitement que ce système comporte l’axiome : « Il existe un réel en soi » car quel sens pourrait encore avoir le mot « falsifiable » si n’existait pas un réel en soi ?
On peut, bien évidemment, refuser la définition des sciences selon Popper mais il faudrait alors en proposer une autre et montrer sa pertinence.
A mon point de vue, tout système de connaissance, qu’il soit scientifique ou métaphysique au sens de Popper est hypothétique, je dirais même axiomatique.
En définissant un système de connaissance scientifique comme falsifiable, Popper pose implicitement que ce système comporte l’axiome : « Il existe un réel en soi » car quel sens pourrait encore avoir le mot « falsifiable » si n’existait pas un réel en soi ?
On peut, bien évidemment, refuser la définition des sciences selon Popper mais il faudrait alors en proposer une autre et montrer sa pertinence.
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Parce que sa réinterprétation de Platon est honteuse, par exemple. Ce n'est pas de la philosophie, c'est un pamphlet politique.denis_h a écrit:je n'ai pas lu "la société ouverte". juste des résumés et morceaux choisis.
pourquoi êtes vous fâché par ce livre ?
Popper est un épistémologue très intéressant, et les prolongements de son oeuvre, en la matière, sont très féconds -on ignore souvent que Feyerabend était l'un de ses assistants, par exemple. Mais idéologiquement, c'était un libéral pur sucre, et ce n'est pas ma tasse de thé.
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Bergame- Persona
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Bergame a écrit:Mais idéologiquement, c'était un libéral pur sucre, et ce n'est pas ma tasse de thé.
l'ultra-libéralisme n'est pas non plus ma tasse de thé.
[ mon avis perso et rien de plus :
l'anti-totalitarisme affiché par popper
est nécessaire, mais pas suffisant.
je lui ajouterais, par exemple, ellul. ]
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Vanleers a écrit:
A mon point de vue, tout système de connaissance, qu’il soit scientifique ou métaphysique au sens de Popper est hypothétique, je dirais même axiomatique.
En définissant un système de connaissance scientifique comme falsifiable, Popper pose implicitement que ce système comporte l’axiome : « Il existe un réel en soi » car quel sens pourrait encore avoir le mot « falsifiable » si n’existait pas un réel en soi ?
Lorsque je signai votre proposition, "C’est bien pourquoi « Il existe un réel en soi » n’est qu’un axiome d’un système hypothétique de connaissance du monde", je ne l'ai pas fait parce que vous auriez démontré l'existence d'un tel réel en soi, mais parce que vous l'aviez incorporée en tant qu'hypothèse au sein d'un contexte épistémologique. J'ai retenu le caractère hypothétique (qu'il conserve logiquement, puisque le système qui l'englobe est dit hypothétique) pour me décider.
Pour autant, au sein même de ce système hypothétique de connaissance, nul n'est besoin de cet axiome. La falsification n'est que le reflet de notre finitude éprouvée, nul ne peut prédire son lendemain (ni d'ailleurs s'assurer de son passé). Ce n'est pas pour autant qu'il faille en déduire une quelconque chose en soi à l'œuvre derrière cette incertitude.
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Crosswind- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Bergame a écrit:Qu'est-ce que tu appelles "l'anti-réalisme" ?à vrai dire, la question qui m'intéresse , à travers les affirmations de vanleers, c'est la position de popper vis à vis de l'anti-réalisme
Pour moi, la clef d'entrée chez Popper, c'est que c'est d'abord -je veux dire, de formation- un logicien. Il a "simplement" appliqué le modus tollens à la méthodologie scientifique.
i. popper a d'abord été un grand admirateur de schopenhaueur.
ii. l'anti-réalisme, dans le contexte de cette discussion, c'est affirmer : "Il n'existe pas de réel de soi", ou une variante : "si il existe, on n'y a de toutes façons pas accès".
Dernière édition par denis_h le Jeu 14 Jan 2021 - 10:56, édité 1 fois
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Bergame a écrit:Mais idéologiquement, c'était un libéral pur sucre, et ce n'est pas ma tasse de thé.
sans vouloir être indiscret, quelle est-elle, alors, votre tasse de thé ?
...
[il est bientôt 16h30. je vais rentrer chez moi. donc pas d'internet avant vendredi...]
denis_h- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Crosswind a écrit: La falsification n'est que le reflet de notre finitude éprouvée, nul ne peut prédire son lendemain (ni d'ailleurs s'assurer de son passé). Ce n'est pas pour autant qu'il faille en déduire une quelconque chose en soi à l'œuvre derrière cette incertitude.
Quel sens précis donnez-vous au concept de "falsification" dans la définition de la science selon Popper (système conjectural falsifiable) ?
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Eh bien, le triptyque (classique oserais-je dire) : logique (logiquement réfutable, autrement dit il exige une continuité du sens, ce qui semble évident) - empirique (il exige que la logique soit confirmée par les faits) et reproductible (universel, quelle valeur attribuer aux deux premiers critères si l'on est seul à les vivre?).
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Crosswind- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
La finitude éprouvée c’est que nous n’avons « aucun moyen d’éviter à coup sûr l’erreur » (Renée Bouveresse, citée dans le premier post) mais, toutefois, « nous avons toujours le moyen, à défaut de trancher pour une théorie, de trancher contre elle : l’expérience ne peut pas vérifier et justifier un énoncé universel, mais elle peut l’infirmer. » (ibid.)
Comment expliquer que l’expérience puisse infirmer un énoncé sans faire l’hypothèse de l’existence d’un réel indépendant de nos énoncés ?
Comment expliquer que l’expérience puisse infirmer un énoncé sans faire l’hypothèse de l’existence d’un réel indépendant de nos énoncés ?
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Re: Karl Popper et le rationalisme critique
L’Ethique de Spinoza propose au lecteur une éthique, c’est-à-dire un art de vivre fondé sur une vision du monde que j’ai qualifiée plus haut d’essentiellement métaphysique au sens de Popper (non testable mais susceptible d’argumentation et même rationnellement soutenable tout en demeurant finalement indémontrable).
Qu’en est-il d’une religion qui, elle aussi, est une éthique, un art de vivre fondé sur une certaine vision du monde ?
Je dirai d’abord que, comme pour l’Ethique, une telle vision du monde n’est pas scientifique car non testable.
Mais est-elle métaphysique ?
Avant de répondre à cette question, je préciserai, avec André Verdan, la différence entre métaphysiques et pseudo-métaphysiques (op. cit. p. 52).
Les métaphysiques se caractérisent comme suit :
- rationnellement discutables
- non réfutables mais rationnellement critiquables
- non démontrables mais rationnellement soutenables
Les pseudo-métaphysiques se caractérisent comme suit :
- rationnellement non discutables
- non réfutables et rationnellement non critiquables
- non démontrables et rationnellement non soutenables
Il existe de nombreuses religions et une religion donnée peut donner lieu à de multiples interprétations et visions du monde.
Je ne pense pas que l’on puisse dire, à coup sûr, que telle vision religieuse du monde relève plus de la métaphysique que de la pseudo-métaphysique, ou inversement.
C’est à chacun de se faire une religion à ce sujet.
Qu’en est-il d’une religion qui, elle aussi, est une éthique, un art de vivre fondé sur une certaine vision du monde ?
Je dirai d’abord que, comme pour l’Ethique, une telle vision du monde n’est pas scientifique car non testable.
Mais est-elle métaphysique ?
Avant de répondre à cette question, je préciserai, avec André Verdan, la différence entre métaphysiques et pseudo-métaphysiques (op. cit. p. 52).
Les métaphysiques se caractérisent comme suit :
- rationnellement discutables
- non réfutables mais rationnellement critiquables
- non démontrables mais rationnellement soutenables
Les pseudo-métaphysiques se caractérisent comme suit :
- rationnellement non discutables
- non réfutables et rationnellement non critiquables
- non démontrables et rationnellement non soutenables
Il existe de nombreuses religions et une religion donnée peut donner lieu à de multiples interprétations et visions du monde.
Je ne pense pas que l’on puisse dire, à coup sûr, que telle vision religieuse du monde relève plus de la métaphysique que de la pseudo-métaphysique, ou inversement.
C’est à chacun de se faire une religion à ce sujet.
Vanleers- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4215
Date d'inscription : 15/01/2017
Re: Karl Popper et le rationalisme critique
vanleers, pour plus de clarté, il faudrait donner un exemple pour chaque catégorie de métaphysique et pseudo-métaphysique dont vous parlez. parce que là, c'est flou.
denis_h- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 682
Date d'inscription : 24/11/2020
Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Vanleers a écrit:
Comment expliquer que l’expérience puisse infirmer un énoncé sans faire l’hypothèse de l’existence d’un réel indépendant de nos énoncés ?
C'est la question qui a fait le succès du réalisme scientifique. Tant qu'aucune alternative valable ne pouvait être opposée à la puissance de ce constat, il fallait bien reconnaître le poids de l'argument et se résoudre à considérer la science comme le reflet nécessaire d'une forme ou l'autre de réalité sous-jacente intrinsèquement portée par une nature que l'expérimentateur avait pour tâche de dévoiler. Tout juste pouvait-on noter, timidement, que cette explication n'était toujours qu'une explication relative à notre propre mode de pensée, l'objection était de facto rendue inaudible par l'argument de l'inférence vers la meilleure explication.
Mais depuis, une alternative s'est dessinée sous la forme d'un neo-pragmatisme transcendantal, qui réduit la vision réaliste traditionnelle au rang du possible, et non plus du certain. Cassirer, Cohen, Hermann, Pickering, tous ont travaillé à actualiser, puis moderniser, les thèses de Kant pour aboutir à une thèse toujours incertaine, certes, mais tout aussi recevable que celle du réalisme métaphysique, et probablement moins spéculative (paradoxalement).
Très succinctement, car je n'ai pas le courage de pondre une synthèse étudiée sur la question ce matin, cette approche incorpore l'agir prescriptif au sein du système transcendantal, une pratique de recherche, une dynamique qui co-stabilise et co-engendre les objets et les sujet dans une immanence (pas de sujet sans objet et pas d'objet sans sujet, où nous rejoignons la déduction transcendantale par la bande), les théories et les processus, de sorte qu'ils puissent être traités comme s'ils relevaient d'un monde indépendant. Autrement dit, les obstacles/contraintes relevées au cours des actes de recherches ne sont plus que le reflet d'une certaine grille de lecture imposée par l'intégration dans l'instrument de mesure lui-même des structures théoriques. Les lois de la nature ainsi dictées ne sont donc ni imposées par une subjectivité préalablement existante, ni dévoilées d'un monde préstructuré, mais traduisent une efficacité de l'agir d'un sujet-dans-le-monde. La survenance des phénomènes et leur légalisation sont dans cette optique parfaitement intriqués l'un dans l'autre. Le "non" de la "nature" n'est intelligible que dans le contexte d'une question, d'un questionnement précis, et la question elle-même est subordonnée à l'architecture de l'instrument. En somme, les obstacles sont formés en tant que pôle négatif d'une certaine mise en œuvre, nous faisons autant partie du non que le phénomène, puisque ce dernier est irrémédiablement "collé" à "nous". Pickering estime même qu'il faudrait se passer de la mention "résister" pour adopter "résistance", suggérant là mieux la réciprocité d'une réaction à une action. A l'instar de la résistance de l'eau à l'action du navire.
Cette approche pragmatico-transcendantale est capable de justifier absolument toutes les dimensions de structures et de prévision des théories scientifiques. La seule chose qui lui échappe, c'est la survenance contingente d'un résultat. Autrement dit, pourquoi "cela".
Mais ça, on l'a vu sur le fil ontologie 2, personne ne pourra jamais montrer pourquoi (si tant est que la question fasse sens).
Bien sûr, tout ceci est étayé en long et en large, bien mieux que ce que je viens de faire et ne pourrai jamais faire. Mais il faut reconnaître que, si cette façon de voir les choses ne peut bien sûr pas être démontrée conformément aux conclusions de la critique transcendantale de Kant, la vision purement réaliste de la réponse à votre question initiale conservant par là son statut d'hypothèse recevable, elle y répond tout de même pleinement, de sorte que l'on ne peut plus, par cet argument, prétendre accéder à la nature de l'être.
J'ajoute encore, une fois de plus, que c'est pour ces raisons que j'ai signé votre proposition axiomatique au sein d'une pratique hypothétique de connaissance. "IL existe un monde en soi" peut parfaitement être pris pour axiome, dans ce cadre là.
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"Let us chace our imagination to the heavens, or to the utmost limits of the universe ; we never really advance a step beyond ourselves, nor can conceive any kind of existence..." D. Hume
Crosswind- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2711
Date d'inscription : 29/07/2014
Re: Karl Popper et le rationalisme critique
Je souligne la perle :
Pourtant, même un " amateur " nommé Albert Einstein relève que si le réel n'était pas intrinsèquement sensé, il ne pourrait pas être, et donc, a fortiori, étudié, connu. Ce qui permet de comprendre, le plus simplement du monde, le résultat de l'expérience, quel qu'il soit (en incluant bien sûr les défaillances de l'expérimentateur)
Crosswind a écrit:Cette approche pragmatico-transcendantale est capable de justifier absolument toutes les dimensions de structures et de prévision des théories scientifiques. La seule chose qui lui échappe, c'est la survenance contingente d'un résultat. Autrement dit, pourquoi "cela".
Mais ça, on l'a vu sur le fil ontologie 2, personne ne pourra jamais montrer pourquoi (si tant est que la question fasse sens).
Pourtant, même un " amateur " nommé Albert Einstein relève que si le réel n'était pas intrinsèquement sensé, il ne pourrait pas être, et donc, a fortiori, étudié, connu. Ce qui permet de comprendre, le plus simplement du monde, le résultat de l'expérience, quel qu'il soit (en incluant bien sûr les défaillances de l'expérimentateur)
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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
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