Critique du visage chez Lévinas
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Critique du visage chez Lévinas
CRITIQUE DU VISAGE CHEZ LÉVINAS
La philosophie de Lévinas sacralise le visage, qui a remplacé l'âme dans la théologie classique. Alors que l'âme est invisible et que son existence ne peut pas être prouvée, le visage est visible et convient donc à la phénoménologie aussi bien qu'au positivisme. Le visage, selon Lévinas, a une autorité et une dignité naturelles, une fragile innocence qui impose le respect et commande de ne pas tuer. La visage serait donc le principe visible de la morale.
Mais en sacralisant le visage, Lévinas délaisse et rabaisse tous les êtres dépourvus de visage, comme les animaux (qu'il serait légitime de tuer parce qu'ils n'ont pas de visage, tout comme la théologie classique justifiait l'abattage des animaux par le fait qu'ils n'ont pas d'âme), ainsi que les personnes qui pour des raisons religieuses se voilent le visage.
Le visage est devenu un fétiche contemporain et une obsession, liée d'une part au culte narcissique de soi, d'autre part à la société du contrôle, où tout le monde doit être en permanence visible, identifiable et en règle. En France, la loi contre la burqa a été justifiée selon ce principe. La philosophie de Lévinas justifie donc involontairement les tendances totalitaires et narcissiques de nos sociétés.
La philosophie de Lévinas exclut de la morale non seulement les animaux et les croyantes au visage voilé, mais aussi, théoriquement, les intelligences extraterrestres, qui n'auraient pas nécessairement, comme on le pense, une forme humanoïde avec un visage. Il n'est pourtant pas saugrenu d'envisager cette question, car Kant et Heidegger eux-mêmes ont construit leur morale d'un point de vue universel et potentiellement extraterrestre. L'universel ne doit pas être limité à l'humain, qui est une fausse universalité.
Lévinas a tenté avec le concept phénoménologique de visage, de proposer une morale universelle qui transcenderait et précéderait les différences culturelles et les discours. Mais le visage manifeste les différences ethniques, qui furent utilisées dans la théorisation du racisme contre les Noirs aux Etats-Unis au XIXe siècle. Le visage ne manifeste pas seulement l'humanité de l'autre, mais aussi sa différence, qui remet subjectivement en question cette humanité (dans le racisme contre les Noirs, par exemple, le visage du Noir était rapproché du primate).
Il est donc dangereux de caractériser l'humanité par le visage, car on peut alors exclure théoriquement puis politiquement certains peuples de l'humanité, en soutenant que leur visage n'est pas humain ou pas assez humain. Cela concerne aussi les personnes ayant un visage difforme à cause d'une malformation ou d'un trouble neurologique.
La persécution actuelle des musulmanes suit le même principe: parce qu'elles se couvrent le visage ou les cheveux et qu'elles n'ont donc pas la même "tête" que les autres, on les exclut de la société. Le visage est une définition équivoque et réductrice de l'humanité. Il ne faut pas respecter l'autre parce qu'il est visible et semble physiquement humain, mais simplement parce qu'il est. Le principe de la morale n'est pas le visage, mais la vie, l'être et l’eccéité (le fait d'exister, d'être présent).
Kokof- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 157
Date d'inscription : 07/03/2019
Re: Critique du visage chez Lévinas
La mauvaise foi de ce message est hallucinante ... les bras m'en tombent.
Pour une information sérieuse lire : http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Levinas_Visage.htm
Pour une information sérieuse lire : http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Levinas_Visage.htm
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12511
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Critique du visage chez Lévinas
On ne peut nier que Kokof déploie bien des efforts au service de sa rhétorique.
Mais parfois, j'ai le sentiment qu'il en dit plus qu'il ne voudrait. Par exemple :
Or, comme le suggère en creux ta comparaison, elles sont ainsi rabaissées au rang d'animal, en quelque sorte. En les voilant, on masque leur individualité, leur personnalité, bref leur humanité, et elles deviennent, aux yeux d'Autrui, des choses indifférenciées, des amas de tissus, des ombres.
Je vais te dire franchement, je n'y avais encore jamais pensé ainsi…
C'est assez monstrueux, en fait. Autant le voile sur les cheveux peut s'apparenter à, disons un uniforme. Non seulement il couvre les "appâts", mais il signale l'appartenance communautaire et religieuse, d'accord. En cela, il n'est peut-être pas différent des uniformes qui caractérisaient les régimes totalitaires, supposés égaliser les conditions -et les physiques- et manifester l'adhésion à l'idéologie et l'intégration dans la communauté.
Mais la burka et toutes les formes de voile intégral, c'est vrai que c'est autre chose, c'est un cran plus loin. Là, il y n'y a pas seulement une égalisation, il y a une négation.
Mais parfois, j'ai le sentiment qu'il en dit plus qu'il ne voudrait. Par exemple :
C'est assez terrible, ce que tu dis là, Kokof, si on y réfléchit. Parce que les femmes qui se voilent pour des raisons religieuses -notons au passage la justification invoquée- n'en ont pas moins un visage. Ce n'est pas parce qu'elles le cachent que leur visage disparaît effectivement, il n'est que soustrait au regard.Mais en sacralisant le visage, Lévinas délaisse et rabaisse tous les êtres dépourvus de visage, comme les animaux (qu'il serait légitime de tuer parce qu'ils n'ont pas de visage, tout comme la théologie classique justifiait l'abattage des animaux par le fait qu'ils n'ont pas d'âme), ainsi que les personnes qui pour des raisons religieuses se voilent le visage.
Or, comme le suggère en creux ta comparaison, elles sont ainsi rabaissées au rang d'animal, en quelque sorte. En les voilant, on masque leur individualité, leur personnalité, bref leur humanité, et elles deviennent, aux yeux d'Autrui, des choses indifférenciées, des amas de tissus, des ombres.
Je vais te dire franchement, je n'y avais encore jamais pensé ainsi…
C'est assez monstrueux, en fait. Autant le voile sur les cheveux peut s'apparenter à, disons un uniforme. Non seulement il couvre les "appâts", mais il signale l'appartenance communautaire et religieuse, d'accord. En cela, il n'est peut-être pas différent des uniformes qui caractérisaient les régimes totalitaires, supposés égaliser les conditions -et les physiques- et manifester l'adhésion à l'idéologie et l'intégration dans la communauté.
Mais la burka et toutes les formes de voile intégral, c'est vrai que c'est autre chose, c'est un cran plus loin. Là, il y n'y a pas seulement une égalisation, il y a une négation.
_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
- Nombre de messages : 5358
Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Critique du visage chez Lévinas
hks a écrit:La mauvaise foi de ce message est hallucinante ... les bras m'en tombent.
Pour une information sérieuse lire : http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Levinas_Visage.htm
Ton article confirme bien ce que je dis. Il se termine par:" l'homme est l'être qui a déjà entendu et compris le commandement de la sainteté dans le visage de l'autre homme." Le visage est sacralisé, et exclut de la morale les êtres sans visage comme les animaux.
Kokof- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 157
Date d'inscription : 07/03/2019
Re: Critique du visage chez Lévinas
Si tu veux dire que l'analyse phénoménologique de Levinas ne concerne pas le monde animal, ni le végétal, ni le réchauffement climatique ou le poids de la dette ... c'est exact.kokof a écrit:" Le visage est sacralisé, et exclut de la morale les êtres sans visage comme les animaux.
Mais dans ce cas pourquoi partir de Levinas.
Lévinas ne délaisse ni ne rabaisse tous les êtres dépourvus de visage, (comme les animaux) non, il n'en parle pas. Ce n'est du moins pas du visage des animaux dont il parle quand il écrit quelque chose sur le chien.
Car il a écrit sur un chien.
https://www.cairn.info/revue-litterature-2012-4-page-71.htmCette fois ( versus Hegel) l’esclave, le prisonnier du camp ou les Juifs d’Égypte ne sont plus reconnus par leur maître mais par un chien. Ce n’est donc plus autrui, mais l’animal dans sa différence spécifique qui peut fonder l’humanité.
..............................
Ton refus de lier l'éthique à ce qui pourrait être vu de la personne et notamment le visage est dans le fil de l'iconoclastie musulmane. Le prophète n'a pas de visage.
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12511
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Critique du visage chez Lévinas
hks a écrit:La mauvaise foi de ce message est hallucinante, les bras m'en tombent.
Moi, une fois que j'ai eu terminé la lecture du message qui débute ce fil, j'étais tellement pantois, que j'ai renoncé à réagir. J'aime follement Lévinas : son immense humanité. Les élucubrations de Kokof, qui montrent qu'il a si peu compris Lévinas m'ont blessé. Le visage de Lévinas, c'est le visage, l'incarnation suprême, de l'être humain, de l'humanité, qui devrait empêcher un être humain d'en brutaliser, d'en tuer, un autre.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: Critique du visage chez Lévinas
neopilina a écrit:hks a écrit:La mauvaise foi de ce message est hallucinante, les bras m'en tombent.
Moi, une fois que j'ai eu terminé la lecture du message qui débute ce fil, j'étais tellement pantois, que j'ai renoncé à réagir. J'aime follement Lévinas : son immense humanité. Les élucubrations de Kokof, qui montrent qu'il a si peu compris Lévinas m'ont blessé. Le visage de Lévinas, c'est le visage, l'incarnation suprême, de l'être humain, de l'humanité, qui devrait empêcher un être humain d'en brutaliser, d'en tuer, un autre.
J'aime et admire aussi l'humanisme de Lévinas, mais comme tout humanisme, sa morale a des limites, d'abord parce qu'elle est limitée par définition à l'homme, ensuite parce qu'elle se fonde sur la visibilité et la physionomie de l'autre.
Kokof- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 157
Date d'inscription : 07/03/2019
Re: Critique du visage chez Lévinas
kokof a écrit:parce qu'elle se fonde sur la visibilité et la physionomie de l'autre.
non, pas sur la "physionomie" .
Levinas a écrit:"Je ne sais si l'on peut parler de "phénoménologie" du visage, puisque la
phénoménologie décrit ce qui apparaît. De même, je me demande si l'on peut
parler d'un regard tourné vers le visage, car le regard est connaissance,
perception. Je pense plutôt que l'accès au visage est d'emblée éthique. C'est
lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front, un menton, et que vous pouvez
les décrire, que vous vous tournez vers autrui comme vers un objet. La meilleure
manière de rencontrer autrui, c'est de ne pas même remarquer la couleur de ses
yeux ! Quand on observe la couleur des yeux, on n'est pas en relation sociale
avec autrui. La relation avec le visage peut certes être dominée par la
perception, mais ce qui est spécifiquement visage, c'est ce qui ne s'y réduit pas.
[url= http://lyc-sevres.ac-versailles.fr/projet-eee.levinasPhFtxt.pdf]http://lyc-sevres.ac-versailles.fr/projet-eee.levinasPhFtxt.pdf[/url]
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12511
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Critique du visage chez Lévinas
Intéressant. Mais Lévinas reconnaît que "la relation avec le visage peut être dominée par la perception". Dans le racisme, la physionomie, comme je l'explique dans mon essai, est importante. Lévinas voudrait évidemment qu'on respecte le visage abstrait de l'autre, mais en pratique ce n'est pas si simple, parce que c'est la différence de l'autre que manifeste aussi le visage de l'autre. Comme tous les humanistes, Lévinas veut trouver un facteur commun pour égaliser les relations humaines, mais ce faisant la relation à la différence de l'autre n'est pas abordée.
Kokof- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 157
Date d'inscription : 07/03/2019
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