Méthode du discours
+5
kercoz
hks
Ataraxie
poussbois
Courtial
9 participants
Page 1 sur 2
Page 1 sur 2 • 1, 2
Méthode du discours
Ceci m'est suggéré par le sujet sur le "matérialisme", qui devient très touffu et part dans plusieurs directions : quid de la méthode ? Faut-il avoir une méthode ? Que peut-on en attendre (comme bienfait ou méfait) ? En avez-vous une vous-même etc.
Je ne songe pas naturellement aux activités techniques : on devrait pouvoir s'entendre sur le fait que le cuisinier doit bien avoir une recette et le plombier des manières d'agir précises. Mais qu'en est-il dans l'ordre de la pensée, de la connaissance et du discours ?
Je vais me livrer à un exercice que je réprouve - mais si on ne peut plus interdire aux autres ce qu'on se permet soi-même, où sera le plaisir d'interdire, je vous le demande ? - et présenter une fresque cavalière de l'histoire de la philo.
La planète philosophique a trois grands contintents : la pensée grecque, la pensée classique, et la pensée contemporaine. On peut situer en gros dans chacune une capitale et des provinces ou, pour changer de métaphore : un noyau et des electrons (chargés négativement) qui tournent autour.
Pour la première période, disons Platon, pour la seconde Descartes et pour la dernière Kant, disons.
Or j'observe que les oppositions tournent beaucoup autour de la question de la méthode. Les trois auteurs que j'ai cités se préoccupent beaucoup des questions de méthode. Ce sont des philosophes précautionneux. Leurs successeurs et critiques immédiats, savoir respectivement Aristote, Spinoza et Hegel, le leur "reprochent" : ils trouvent globalement qu'on s'entoure trop de précautions avant (voire au lieu) de s'intéresser à la chose même.
On ne voit bien chez Platon, par exemple : on va discuter de la question de savoir si la vertu s'enseigne, et Socrate commence par poser des tas de questions méthodologiques, si bien qu'il ne reste plus de temps, à fin, pour traiter le sujet, qui sera renvoyé à plus tard et qui n'aura pas de solution. Même chose chez Descartes, qui a écrit deux bouquins sur la seule question de la méthode (Le Discours, bien sûr, et aussi les Règles pour la direction de l'esprit).
Leurs successeurs (et réfutateurs) ont sans doute une méthode, mais ils ne croient pas bon de s'y attarder longuement, ils préfèrent passer rapidement à la suite. Spinoza, en particulier, a certainement une méthode (très lourde, très ...méthodique), mais il ne prend pas la peine de s'en expliquer, tout se passe comme si la méthode géométrique allait de soi. Il parle bien de la méthode dans le Traité de la réforme de l'entendement, mais on ne trouve pas dans ce livre une justification de la méthode des géomètres (mais surtout une critique de la façon dont Descartes et bien d'autres entendent cette fameuse méthode).
Même chose chez Hegel, on y reviendra plus tard, je ne veux pas trop allonger (j'indique juste que le texte essentiel est la Phénoménologie de l'esprit, préface et surtout l'introduction).
On peut ajouter du reste qu'on retrouverait la même chose dans le rapport Husserl/Heidegger : Husserl n'arrête pas de ramer sur les questions de méthode (à tel point qu'on a pu croire que la phénoménologie n'était qu'une méthode) alors que si on ouvre Sein und Zeit, on voit que Heidegger se débarasse de la question en un petit paragraphe (§ 7), où il dit que sa méthode, c'est la phénoménologie et basta ! C'est agrémenté de quelques idées certes intéressantes, mais pas très "méthodologiques".
Je ne songe pas naturellement aux activités techniques : on devrait pouvoir s'entendre sur le fait que le cuisinier doit bien avoir une recette et le plombier des manières d'agir précises. Mais qu'en est-il dans l'ordre de la pensée, de la connaissance et du discours ?
Je vais me livrer à un exercice que je réprouve - mais si on ne peut plus interdire aux autres ce qu'on se permet soi-même, où sera le plaisir d'interdire, je vous le demande ? - et présenter une fresque cavalière de l'histoire de la philo.
La planète philosophique a trois grands contintents : la pensée grecque, la pensée classique, et la pensée contemporaine. On peut situer en gros dans chacune une capitale et des provinces ou, pour changer de métaphore : un noyau et des electrons (chargés négativement) qui tournent autour.
Pour la première période, disons Platon, pour la seconde Descartes et pour la dernière Kant, disons.
Or j'observe que les oppositions tournent beaucoup autour de la question de la méthode. Les trois auteurs que j'ai cités se préoccupent beaucoup des questions de méthode. Ce sont des philosophes précautionneux. Leurs successeurs et critiques immédiats, savoir respectivement Aristote, Spinoza et Hegel, le leur "reprochent" : ils trouvent globalement qu'on s'entoure trop de précautions avant (voire au lieu) de s'intéresser à la chose même.
On ne voit bien chez Platon, par exemple : on va discuter de la question de savoir si la vertu s'enseigne, et Socrate commence par poser des tas de questions méthodologiques, si bien qu'il ne reste plus de temps, à fin, pour traiter le sujet, qui sera renvoyé à plus tard et qui n'aura pas de solution. Même chose chez Descartes, qui a écrit deux bouquins sur la seule question de la méthode (Le Discours, bien sûr, et aussi les Règles pour la direction de l'esprit).
Leurs successeurs (et réfutateurs) ont sans doute une méthode, mais ils ne croient pas bon de s'y attarder longuement, ils préfèrent passer rapidement à la suite. Spinoza, en particulier, a certainement une méthode (très lourde, très ...méthodique), mais il ne prend pas la peine de s'en expliquer, tout se passe comme si la méthode géométrique allait de soi. Il parle bien de la méthode dans le Traité de la réforme de l'entendement, mais on ne trouve pas dans ce livre une justification de la méthode des géomètres (mais surtout une critique de la façon dont Descartes et bien d'autres entendent cette fameuse méthode).
Même chose chez Hegel, on y reviendra plus tard, je ne veux pas trop allonger (j'indique juste que le texte essentiel est la Phénoménologie de l'esprit, préface et surtout l'introduction).
On peut ajouter du reste qu'on retrouverait la même chose dans le rapport Husserl/Heidegger : Husserl n'arrête pas de ramer sur les questions de méthode (à tel point qu'on a pu croire que la phénoménologie n'était qu'une méthode) alors que si on ouvre Sein und Zeit, on voit que Heidegger se débarasse de la question en un petit paragraphe (§ 7), où il dit que sa méthode, c'est la phénoménologie et basta ! C'est agrémenté de quelques idées certes intéressantes, mais pas très "méthodologiques".
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
Tu parles de suivre une méthode, ou de justifier qu'on la suive ? Pour la phénoménologie, dire qu'on l'applique, si on l'applique vraiment, se suffit à soi-même, non. Cette méthode a été suffisamment documentée pour qu'on en connaisse les qualités et les défauts... heu pardon, les immenses qualités et les mérites supérieurs.
Je ne sais pas si j'ai une méthode ou si, plus modestement, il faudrait parler de trucs. Ce qui est certain, c'est que j'ai de plus en plus de mal avec ceux qui n'en ont pas (qu'ils le justifient ou non). Je suis en train de lire "le Gai Savoir" de Nietzsche... c'est loin de la façon géométrique de Spinoza et ça me tombe des mains en continu. Assertions, opinions, dissertations côtoient quelques passages un peu plus étayés. C'est illisible dans son ensemble, à mon niveau du moins. Du coup, je n'en retire pas grand-chose.
Le seul cas où j'estime faire preuve de méthode, c'est dans mes lectures, ou un de mes amis m'avait dit il y a longtemps qu'il fallait faire preuve de modestie, et ne pas succomber aux chants des sirènes, ne pas chercher dans les autres ce qui renforcera son opinion, mais bien plutôt ce qui enrichira la réflexion. Ne pas jouer à Narcisse, et ne pas rechercher à toute force ses propres idées dans les idées des autres. Le lecteur n'est pas là pour renforcer ses propres fondations, mais pour visiter le château qu'un autre a construit.
C'est le même ami qui me disait que quand je ne comprends pas un auteur, et que dans une proposition il y deux interprétations possibles, une stupide et une intéressante, il fallait toujours choisir l'intéressante dans un premier temps et voir où elle nous mène.
Pour en revenir à Nietzsche, même si ça me ramène à des lectures douloureuses, si les lecteurs avaient cette attitude neutre et bienveillante, on arrêterait définitivement avec cette légende d'un nietzschéisme précurseur du nazisme, qui me paraît depuis toujours une étrangeté. La bêtise crasse et violente du nazisme, son dictat autoritaire sur les arts et sur la pensée, l'absorption des individus dans cette masse mécanique, c'est précisément l'antithèse du nietzschéisme qui défend l'intelligence, l'art, l'individu, la liberté de penser et de créer.
Petit aparté pour dire que, des fois, avoir un peu de méthode, ça évite de nombreux contresens.
J'ai parlé de méthodes ou de trucs, plus haut. Voici celle (ou celui) qui me tient le plus à coeur, c'est le bon usage des références.
Se targuer de parler sans références, comme une pensée libre, est un leurre. Nous sommes tous les héritiers d'une pensée, d'une filiation, d'une transmission qui construit notre philosophie propre. Croire qu'on peut être une pensée pure et libre détachée des références, cela permet surtout de ne pas savoir ni comprendre d'où nous viennent nos arguments. Rechercher ses références, c'est un acte de conscience philosophique.
L'usage des références est une chose, leur bon usage en est un autre. Il y a également de formidables exemples sur les forums et notamment ici même, où la citation d'un auteur est tellement détournée qu'on lui fait dire l'inverse de son idée initiale. Et ça renvoie à la modestie réclamée plus haut : ne pas faire dire ce qu'on a envie à un auteur qui dit toute autre chose.
Les quelques contrevenants qui ont succombé à ce piège perdent généralement, pour moi, toute crédibilité dans leur discours.
Je ne sais pas si j'ai une méthode ou si, plus modestement, il faudrait parler de trucs. Ce qui est certain, c'est que j'ai de plus en plus de mal avec ceux qui n'en ont pas (qu'ils le justifient ou non). Je suis en train de lire "le Gai Savoir" de Nietzsche... c'est loin de la façon géométrique de Spinoza et ça me tombe des mains en continu. Assertions, opinions, dissertations côtoient quelques passages un peu plus étayés. C'est illisible dans son ensemble, à mon niveau du moins. Du coup, je n'en retire pas grand-chose.
Le seul cas où j'estime faire preuve de méthode, c'est dans mes lectures, ou un de mes amis m'avait dit il y a longtemps qu'il fallait faire preuve de modestie, et ne pas succomber aux chants des sirènes, ne pas chercher dans les autres ce qui renforcera son opinion, mais bien plutôt ce qui enrichira la réflexion. Ne pas jouer à Narcisse, et ne pas rechercher à toute force ses propres idées dans les idées des autres. Le lecteur n'est pas là pour renforcer ses propres fondations, mais pour visiter le château qu'un autre a construit.
C'est le même ami qui me disait que quand je ne comprends pas un auteur, et que dans une proposition il y deux interprétations possibles, une stupide et une intéressante, il fallait toujours choisir l'intéressante dans un premier temps et voir où elle nous mène.
Pour en revenir à Nietzsche, même si ça me ramène à des lectures douloureuses, si les lecteurs avaient cette attitude neutre et bienveillante, on arrêterait définitivement avec cette légende d'un nietzschéisme précurseur du nazisme, qui me paraît depuis toujours une étrangeté. La bêtise crasse et violente du nazisme, son dictat autoritaire sur les arts et sur la pensée, l'absorption des individus dans cette masse mécanique, c'est précisément l'antithèse du nietzschéisme qui défend l'intelligence, l'art, l'individu, la liberté de penser et de créer.
Petit aparté pour dire que, des fois, avoir un peu de méthode, ça évite de nombreux contresens.
J'ai parlé de méthodes ou de trucs, plus haut. Voici celle (ou celui) qui me tient le plus à coeur, c'est le bon usage des références.
Se targuer de parler sans références, comme une pensée libre, est un leurre. Nous sommes tous les héritiers d'une pensée, d'une filiation, d'une transmission qui construit notre philosophie propre. Croire qu'on peut être une pensée pure et libre détachée des références, cela permet surtout de ne pas savoir ni comprendre d'où nous viennent nos arguments. Rechercher ses références, c'est un acte de conscience philosophique.
L'usage des références est une chose, leur bon usage en est un autre. Il y a également de formidables exemples sur les forums et notamment ici même, où la citation d'un auteur est tellement détournée qu'on lui fait dire l'inverse de son idée initiale. Et ça renvoie à la modestie réclamée plus haut : ne pas faire dire ce qu'on a envie à un auteur qui dit toute autre chose.
Les quelques contrevenants qui ont succombé à ce piège perdent généralement, pour moi, toute crédibilité dans leur discours.
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: Méthode du discours
Je vois dans vos interventions la question de savoir si on peut être rigoureux sans avoir une méthode. Ma réponse est a priori non. Mais je ne dirais pas non plus qu'il faille, par principe, toujours exposer en détail une méthode. Quant au fait de prendre la méthode elle-même comme objet, c'est profitable au philosophe parce que cela lui permet de réfléchir à un savoir-faire philosophique, en l'occurrence savoir maîtriser la conduite de sa pensée. C'est une des choses qui font la différence entre une discipline et un loisir.
Ataraxie- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 489
Date d'inscription : 18/05/2012
Re: Méthode du discours
poussbois a écrit:Tu parles de suivre une méthode, ou de justifier qu'on la suive ? Pour la phénoménologie, dire qu'on l'applique, si on l'applique vraiment, se suffit à soi-même, non. Cette méthode a été suffisamment documentée pour qu'on en connaisse les qualités et les défauts... heu pardon, les immenses qualités et les mérites supérieurs.
Les deux mon Général, mais un peu plus le second : le fait que la méthode n'est pas seulement utilisée, mais est réellement thématisée, devient en tant que telle une question essentielle.
Mais ceci touche à la philosophie. D'une manière plus large, on peut se demander aussi si l'usage d'une méthode est une bonne chose (et si on le fait effectivement).
J'en profite pour indiquer que j'ai réduit un peu vite la question (ce qui n'est pas malin...méthodologiquement, je propose une sorte d'introduction et au lieu d'ouvrir la question, je la ferme) touchant à la technique. Je rectifie donc : je n'exclus pas la technique. On peut se demander si en art, l'application d'une méthode est une bonne chose et sur quoi cela se fonde. A l'Actor's Studio, on enseigne, par exemple, une méthode, qui est appelée comme cela (the method, method of acting), la "méthode" Stanislavksy- Adler, disons, c'est intéressant, donc oubliez la réduction pas très sérieuse de la technique.
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
Poussbois a écrit:Le seul cas où j'estime faire preuve de méthode, c'est dans mes lectures, ou un de mes amis m'avait dit il y a longtemps qu'il fallait faire preuve de modestie, et ne pas succomber aux chants des sirènes, ne pas chercher dans les autres ce qui renforcera son opinion, mais bien plutôt ce qui enrichira la réflexion. Ne pas jouer à Narcisse, et ne pas rechercher à toute force ses propres idées dans les idées des autres. Le lecteur n'est pas là pour renforcer ses propres fondations, mais pour visiter le château qu'un autre a construit.
C'est le même ami qui me disait que quand je ne comprends pas un auteur, et que dans une proposition il y deux interprétations possibles, une stupide et une intéressante, il fallait toujours choisir l'intéressante dans un premier temps et voir où elle nous mène.
Cette règle est excellente et on n'en voit pas d'autres possibles, au moins pour les lectures philosophiques : le texte est parfait, cohérent et intelligent (c'est un principe, sans discussion ni preuve) et si j'ai une autre impression, c'est parce que moi je suis un con.
Une fois que j'ai fait sincèrement tout ce que je peux pour donner un sens pertinent et intelligent au texte, si ça ne marche vraiment pas, je peux commencer à partir de moi et de dire que le texte est nul.
Mais ici nous avons affaire à un exercice qui relève de la réceptivité : il faut d'abord recueillir le message et, comme tu le dis, il n'y a pas de place pour Narcisse dans ce mythe-là, faut pas de friture sur la ligne, ou, comme on sait qu'il y en a forcément, il faut qu'il y en ait le moins possible.
Particulièrement indispensable en philosophie et en poésie, où l'on nous présente tant et tant de contenus apparemment bizarres, voire parfois absurdes au moins en apparence, que si on n'a pas ce principe, on ne peut pas pratiquer l'activité.
"Ce qui est rationnel est réel, ce qui est réel est rationnel" (Hegel), ça a l'air d'être une débilité, au départ. C'en est peut-être une aussi in fine, mais il faut surtout savoir pourquoi, ce qui commence par fermer sa gueule et comprendre ce que veut dire la phrase.
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
Ataraxie a écrit:Je vois dans vos interventions la question de savoir si on peut être rigoureux sans avoir une méthode. Ma réponse est a priori non. Mais je ne dirais pas non plus qu'il faille, par principe, toujours exposer en détail une méthode. Quant au fait de prendre la méthode elle-même comme objet, c'est profitable au philosophe parce que cela lui permet de réfléchir à un savoir-faire philosophique, en l'occurrence savoir maîtriser la conduite de sa pensée. C'est une des choses qui font la différence entre une discipline et un loisir.
Je suis d'accord sur la réponse pour l'instant (la conversation qui suivra peut-être peut me faire changer d'avis) : on ne peut pas être rigoureux sans méthode, celle-ci ayant comme trait principal une exigence de rigueur, je pense.
Mais on peut aussi considérer qu'il n'y a pas besoin d'être rigoureux. La rigueur, on peut aussi la voir comme un défaut, dans certains cas ; cela peut être perçu comme un systématisme ou un automatisme outrancier, asséchant.
D'autant qu'en philosophie, la "rigueur" peut avoir différentes guises et différents étages. On peut noter qu'elle a été beaucoup pensée à partir de la sphère des mathématiques, avec des considérations mathématiques, par exemple la non-contradiction (être rigoureux a souvent le sens de ne pas se contredire et de tirer les conséquences qui se déduisent effectivement, etc.), modèle mathématique auquel on peut opposer d'autres formes de "rigueur".
Poussbois a lâché le mot, ou le nom, plutôt : on ne pourra pas faire l'économie de Nietzsche, dans cette affaire.
Mais la philosophie est une chose, essayons d'être plus pluridisciplinaires, Najat exige, et ce forum, najatiste par essence, devrait être l'avant-garde de la Réforme. Durkheim s'est intéressé aux règles de la méthode sociologique, on peut s'interroger sur les "méthodes" en psychologie, avec tous leurs rayons, qui vont des idées générales aux recettes thérapeutiques jusqu'aux éléments dégradés jusqu'à l'insignifiance des "méthodes" de remise en forme, de développement personnel dans les magazines à deux balles, etc. Méthodes pour arrêter de fumer, pour sauver son couple, pour bien passer en entretien d'embauche usw.
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
Je vais donner quelques billes.
On va commencer par les meilleures, et même la meilleure. On peut commencer par le génial (pour finir par le ridicule), c'est une méthode.
A noter : Descartes appelle "lettres", selon l'usage de l'époque, les études (littéraires ou pas). C'est l'état de l'érudit, du "lettré", qui est pluridisciplinaire et najatiste dans l'âme.
Noter aussi que la métaphore est particulièrement bien choisie, au point que ce n'est presque plus une métaphore. La "méthode", c'est en grec meta+hodos, hodos étant un chemin, une voie, une route. Cela veut dire "mise en route" ou quelque chose comme cela, en grec.
On va commencer par les meilleures, et même la meilleure. On peut commencer par le génial (pour finir par le ridicule), c'est une méthode.
Descartes, Regulae 4 a écrit:Les Mortels sont possédés d'une curiosité si aveugle que souvent ils engagent leur esprit dans des voies inconnues, sans aucun espoir raisonnable, uniquement pour courir le risque d'y rencontrer ce qu'ils cherchent. Il en est d'eux comme d'un homme qui brûlerait d'un désir si stupide de trouver un trésor qu'il serait sans cesse à errer sur les places publiques pour chercher si par hasard il n'en trouverait pas quelqu'un de perdu par un voyageur. C'est ainsi qu'étudient presque tous les Chimistes, la plupart des Géomètres et un grand nombre de Philosophes. Certes, je ne nie pas qu'ils n'aient parfois assez de chance dans leurs errements pour trouver quelque vérité ; néanmoins, je ne leur accorde pas pour cela d'être plus habiles, mais seulement d'être plus heureux. Or, il vaut beaucoup mieux ne jamais penser à chercher la vérité d'aucune chose plutôt que de le faire sans méthode : il est tout à fait certain, en effet, que les études de cette sorte faites sans ordre et les méditations confuses obscurcissent la lumière naturelle et aveuglent les esprits. Quiconque s'accoutume à marcher ainsi dans les ténèbres s'affaiblit tellement l'acuité du regard que dans la suite il ne peut supporter le grand jour. C'est même un fait d'expérience : nous voyons le plus souvent ceux qui ne se sont jamais consacrés aux lettres juger de ce qui se présente à eux avec beaucoup plus de solidité et de clarté que ceux qui ont toujours fréquenté les écoles. Quant à la méthode, j'entends par là des règles certaines et faciles dont l'exacte observation fera que n'importe qui ne prendra jamais rien de faux pour vrai, et que, sans dépenser inutilement aucun effort d'intelligence, il parviendra, par un accroissement graduel et continu de science, à la véritable connaissance de tout ce qu'il sera capable de connaître.
A noter : Descartes appelle "lettres", selon l'usage de l'époque, les études (littéraires ou pas). C'est l'état de l'érudit, du "lettré", qui est pluridisciplinaire et najatiste dans l'âme.
Noter aussi que la métaphore est particulièrement bien choisie, au point que ce n'est presque plus une métaphore. La "méthode", c'est en grec meta+hodos, hodos étant un chemin, une voie, une route. Cela veut dire "mise en route" ou quelque chose comme cela, en grec.
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
Une méthode c'est un outil. Non?
De fabrication( montage- démontage- remontage)
ou de découverte (dé- couvrement ) ou de création ( invention).
Ce n' est pas simplement une manière de faire (on a toujours une manière de faire), c'est une manière réglée.
On doit donc connaitre la/les règles.
Si on cherche ou si on adopte une méthodes, c'est qu'on croit à la valeur des règles.
(Dans le cas de la méthode philosophique), une règle ce n'est pas seulement ce qu'il faut suivre (aspect moral)
c'est surtout ce qui oblige un ordre ( aspect technique ).
Une pensée doit être suivie d'une autre d' un certain genre, selon ce que prescrit la règle.
Si je fais ceci, il suit que je fais cela.
( exemple de règle: l'addition est suivi de l'énoncé de la somme…ou bien l'observation multiple est suivi d'une induction
ou bien une hypothèse est suivi d'une démonstration …ou autres règles.
les règles de la logique ... évidemment)
La règle est préalable, elle est le rail qu'on ne doit pas quitter.
Il y a donc auto- surveillance du philosophe qui a une méthode (il se discipline ).
Disons qu'il croit à la vertu de la discipline en tant que valeur technique.
Certains croient aussi aux vertus de l'indiscipline.
Mais les mêmes qui croient à une méthode peuvent néanmoins reconnaitre aussi pour eux mêmes des vertus à l'en dehors de leur méthode et y dérogent parfois.
Donc savoir pourquoi ils l' ont adoptée sous condition.
Car j' adopte une méthode à condition que ...
Que ça me donne à la fin ce que je voulais au début ... et qui était autre chose qu'une méthode .
Et chacuns de produire quelque chose "en son genre".
De fabrication( montage- démontage- remontage)
ou de découverte (dé- couvrement ) ou de création ( invention).
Ce n' est pas simplement une manière de faire (on a toujours une manière de faire), c'est une manière réglée.
On doit donc connaitre la/les règles.
Si on cherche ou si on adopte une méthodes, c'est qu'on croit à la valeur des règles.
(Dans le cas de la méthode philosophique), une règle ce n'est pas seulement ce qu'il faut suivre (aspect moral)
c'est surtout ce qui oblige un ordre ( aspect technique ).
Une pensée doit être suivie d'une autre d' un certain genre, selon ce que prescrit la règle.
Si je fais ceci, il suit que je fais cela.
( exemple de règle: l'addition est suivi de l'énoncé de la somme…ou bien l'observation multiple est suivi d'une induction
ou bien une hypothèse est suivi d'une démonstration …ou autres règles.
les règles de la logique ... évidemment)
La règle est préalable, elle est le rail qu'on ne doit pas quitter.
Il y a donc auto- surveillance du philosophe qui a une méthode (il se discipline ).
Disons qu'il croit à la vertu de la discipline en tant que valeur technique.
Certains croient aussi aux vertus de l'indiscipline.
Mais les mêmes qui croient à une méthode peuvent néanmoins reconnaitre aussi pour eux mêmes des vertus à l'en dehors de leur méthode et y dérogent parfois.
Donc savoir pourquoi ils l' ont adoptée sous condition.
Car j' adopte une méthode à condition que ...
Que ça me donne à la fin ce que je voulais au début ... et qui était autre chose qu'une méthode .
Et chacuns de produire quelque chose "en son genre".
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
hks a écrit:Une méthode c'est un outil. Non?
.................
Car j' adopte une méthode à condition que ...
Que ça me donne à la fin ce que je voulais au début ...
Ce serait donc plutot une stratégie....Ce qui implique une notion de pouvoir.
_________________
TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Méthode du discours
Bien joué Kercoz.
En effet, cet excellent sujet parle d'une méthode pour bien conduire sa pensée. Or, bien conduire sa pensée implique de l'emmener au-delà de ce que l'on sait déjà, sinon il ne s'agit pas de conduire sa pensée, mais de trouver une méthode d'exposition, et on peut y voir en effet une stratégie de pouvoir.
Donc, à rebours de ce que dit hks, je tiens qu'une méthode n'est rigoureuse que si elle donne à la fin autre chose que ce que l'on attendait au début.
Remarquons d'ailleurs que l'absence de méthode, lorsqu'elle est voulue, est une méthode. L'écriture automatique est un procédé d'écriture.
Ceci n'empêche pas certaines questions de se poser. On peut être, comme hks, sensible aux risques de sclérose que produit la manie méthodologique, si répandue dans les lycées et collèges. Je le suis aussi, mais mon rejet porte sur les méthodes pour se dispenser de penser, et l'on voit aisément qu'il y a une différence entre une méthode pour faire avec (pour bien penser) et une méthode pour faire sans (se dispenser de penser). Pour ma part, c'est parce que je rejette la seconde que je suis désireux de la première.
Un critère paradoxal de la bonne méthode est que l'on peut s'en passer (et choisir une autre méthode). C'est ce que nous disent l'étymologie (methodos = chemin, comme Courtial l'explique ci-dessus), et le bon sens : tous les chemins mènent à Rome.
En effet, cet excellent sujet parle d'une méthode pour bien conduire sa pensée. Or, bien conduire sa pensée implique de l'emmener au-delà de ce que l'on sait déjà, sinon il ne s'agit pas de conduire sa pensée, mais de trouver une méthode d'exposition, et on peut y voir en effet une stratégie de pouvoir.
Donc, à rebours de ce que dit hks, je tiens qu'une méthode n'est rigoureuse que si elle donne à la fin autre chose que ce que l'on attendait au début.
Remarquons d'ailleurs que l'absence de méthode, lorsqu'elle est voulue, est une méthode. L'écriture automatique est un procédé d'écriture.
Ceci n'empêche pas certaines questions de se poser. On peut être, comme hks, sensible aux risques de sclérose que produit la manie méthodologique, si répandue dans les lycées et collèges. Je le suis aussi, mais mon rejet porte sur les méthodes pour se dispenser de penser, et l'on voit aisément qu'il y a une différence entre une méthode pour faire avec (pour bien penser) et une méthode pour faire sans (se dispenser de penser). Pour ma part, c'est parce que je rejette la seconde que je suis désireux de la première.
Un critère paradoxal de la bonne méthode est que l'on peut s'en passer (et choisir une autre méthode). C'est ce que nous disent l'étymologie (methodos = chemin, comme Courtial l'explique ci-dessus), et le bon sens : tous les chemins mènent à Rome.
_________________
amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1505
Date d'inscription : 01/06/2011
Re: Méthode du discours
Très rapidement, je retiens qu'une méthode se doit d'être composée" "de règles certaines et faciles". Ce point est sans doute à discuter, notamment sur la certitude et sur la facilité, pour comprendre ce que cela recouvre. J'espère qu'on y reviendra
Quant à la méthode, effectivement euthyphron, elle doit permettre d'aller au-delà, si on est dans une démarche de recherche. Le bombardement méthodique de kercoz n'en manque pas, de méthodes. Ce sont les objectifs recherchés qui ne sont pas les mêmes. Il correspond aux géomètres et chimistes cités plus haut qui savent déjà ce qu'ils cherchent.
En philosophie, comme je le vois et l'ai appris, l'idée est d'aller au-delà de l'idée justement, d'où la surprise permanente. C'est un objectif.
La méthode n'est qu'un outil, il dépend de nous d'en faire quelque chose de philosophique, et effectivement il y en a de tout ordre. J'aime les méthodes qui permettent une bonne articulation du discours et une évolution de l'argumentation qui soit conséquente.
La méthode nietzschéenne, basée sur la poésie, le lyrisme, une forme d'enthousiaste, et le désintérêt pour la structuration articulée complète du texte me déplait et me perd. Mais je m'y accroche et fidèle aux conseils amicaux, je cherche à lui donner du sens, mais c'est bien difficile. Le plus difficile étant de ne pas se fixer QUE sur "ce qui me parle", de ne pas retenir QUE les passages avec lesquels je suis naturellement d'accord, mais d'aller chercher ce que je ne comprends pas. Et cette "méthode" est une des premières difficultés et incompréhension.
Quant à la méthode, effectivement euthyphron, elle doit permettre d'aller au-delà, si on est dans une démarche de recherche. Le bombardement méthodique de kercoz n'en manque pas, de méthodes. Ce sont les objectifs recherchés qui ne sont pas les mêmes. Il correspond aux géomètres et chimistes cités plus haut qui savent déjà ce qu'ils cherchent.
En philosophie, comme je le vois et l'ai appris, l'idée est d'aller au-delà de l'idée justement, d'où la surprise permanente. C'est un objectif.
La méthode n'est qu'un outil, il dépend de nous d'en faire quelque chose de philosophique, et effectivement il y en a de tout ordre. J'aime les méthodes qui permettent une bonne articulation du discours et une évolution de l'argumentation qui soit conséquente.
La méthode nietzschéenne, basée sur la poésie, le lyrisme, une forme d'enthousiaste, et le désintérêt pour la structuration articulée complète du texte me déplait et me perd. Mais je m'y accroche et fidèle aux conseils amicaux, je cherche à lui donner du sens, mais c'est bien difficile. Le plus difficile étant de ne pas se fixer QUE sur "ce qui me parle", de ne pas retenir QUE les passages avec lesquels je suis naturellement d'accord, mais d'aller chercher ce que je ne comprends pas. Et cette "méthode" est une des premières difficultés et incompréhension.
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: Méthode du discours
à euthyphron le sujet est intéressant
La rigueur tient dans l'attitude face à la règle, pas à la règle.
Une règle en soi n'a pas plus de rigueur qu'une autre.
En revanche on la suit drastiquement
ou bien on se permet des privautés.
La règle du jeu d'échec peut effectivement produire autre chose qu'une partie normale si on se permet un laxisme sur la marche du cavalier.
En philosophie si on respecte le principe de contradiction, ça produit un genre de discours ... mais si chemin faisant on ne le respecte plus, effectivement ça va produire autre chose.
.................
Personnellement(donc "pour moi" comme on dit ) la philosophie est trop importante comme enjeu de vie, pour imaginer même me poser des contrainte préalables. Je fais feu de tout bois .
C' est ce qui est produit qui subjectivement jugé, pas la méthode. La méthode n'est pas le but fixé, elle est un outil choisi.
Si j'atteins une certitude peu importe la méthode.
J' adopte la méthode après coup .
.................................
je m'explique un peu
quand je dis
C'est ce qui est visé c' est la certitude ...pas la méthode.
Celle ci est posée ultérieurement en vue de .
Il y a donc préalablement une pensée de la certitude et de comment elle est advenue .
Mais pour penser la certitude il faut au moins en avoir connu une .
Antérieurement à toute méthode délibérément assumée.
Car je peux atteindre une certitude par exemple en étant logique.
Certes, mais ce n'est pas encore une méthode.
Ça ne devient une méthode (la logique par ex ) que si c'est délibérément assumé pour d'autres cheminements.
Telle démarche n'apparait comme méthode à suivre qu'après des expériences concluantes sur la certitude, pas avant.
Comment sinon en choisir une ? Sur quels critères ?
.........................................
Pour moi mais je fais peut être erreur Descartes ne pose son doute méthodique que parce qu'il sait qu'il est concluant.
C'est parce qu'il a la certitude d'une chose dont il ne peut douter qu'il se permet de poser le doute comme méthode.
Quelle curieuse idée sinon de poser comme méthode ce "doute" plutôt qu'autre chose, lequel ne pourrait bien mener à rien du tout et surtout pas à ce qu'il cherche ( la certitude ).
euthyphron a écrit:Donc, à rebours de ce que dit hks, je tiens qu'une méthode n'est rigoureuse que si elle donne à la fin autre chose que ce que l'on attendait au début.
La rigueur tient dans l'attitude face à la règle, pas à la règle.
Une règle en soi n'a pas plus de rigueur qu'une autre.
En revanche on la suit drastiquement
ou bien on se permet des privautés.
La règle du jeu d'échec peut effectivement produire autre chose qu'une partie normale si on se permet un laxisme sur la marche du cavalier.
En philosophie si on respecte le principe de contradiction, ça produit un genre de discours ... mais si chemin faisant on ne le respecte plus, effectivement ça va produire autre chose.
.................
Personnellement(donc "pour moi" comme on dit ) la philosophie est trop importante comme enjeu de vie, pour imaginer même me poser des contrainte préalables. Je fais feu de tout bois .
C' est ce qui est produit qui subjectivement jugé, pas la méthode. La méthode n'est pas le but fixé, elle est un outil choisi.
Si j'atteins une certitude peu importe la méthode.
J' adopte la méthode après coup .
.................................
je m'explique un peu
quand je dis
La condition est que doit se produire quelque chose sinon de certain du moins de proche de la certitude.hks a écrit:Donc savoir pourquoi ils l' ont adoptée sous condition.
C'est ce qui est visé c' est la certitude ...pas la méthode.
Celle ci est posée ultérieurement en vue de .
Il y a donc préalablement une pensée de la certitude et de comment elle est advenue .
Mais pour penser la certitude il faut au moins en avoir connu une .
Antérieurement à toute méthode délibérément assumée.
Car je peux atteindre une certitude par exemple en étant logique.
Certes, mais ce n'est pas encore une méthode.
Ça ne devient une méthode (la logique par ex ) que si c'est délibérément assumé pour d'autres cheminements.
Telle démarche n'apparait comme méthode à suivre qu'après des expériences concluantes sur la certitude, pas avant.
Comment sinon en choisir une ? Sur quels critères ?
.........................................
Pour moi mais je fais peut être erreur Descartes ne pose son doute méthodique que parce qu'il sait qu'il est concluant.
C'est parce qu'il a la certitude d'une chose dont il ne peut douter qu'il se permet de poser le doute comme méthode.
Quelle curieuse idée sinon de poser comme méthode ce "doute" plutôt qu'autre chose, lequel ne pourrait bien mener à rien du tout et surtout pas à ce qu'il cherche ( la certitude ).
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
à kercoz
J' adopte la stratégie qui a porté ses fruits sans que j' ai décidé au préalable de l'employer.
Non que je sois arrivé à une certitude sans méthode mais que ce n'était pas encore une méthode.
Pour moi Husserl ( pas exemple) pose l' époché comme méthode parce qu'il a expérimenté spontanément ( sans décision méthodologique préalable ) une certitude liée à la mise entre parenthèse des jugements.
Il en prend conscience et décide d'une méthode à suivre, vu que ce comment il a spontanément fait lui a donné une certitude.
J' adopte la stratégie qui a porté ses fruits sans que j' ai décidé au préalable de l'employer.
Non que je sois arrivé à une certitude sans méthode mais que ce n'était pas encore une méthode.
Pour moi Husserl ( pas exemple) pose l' époché comme méthode parce qu'il a expérimenté spontanément ( sans décision méthodologique préalable ) une certitude liée à la mise entre parenthèse des jugements.
Il en prend conscience et décide d'une méthode à suivre, vu que ce comment il a spontanément fait lui a donné une certitude.
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
Poussbois,
ce que tu décris de Nietzsche, il me semble, relève plus de l'écriture que de la méthode. Il y a certes un lien, je pense même que c'est parce que Nietzsche a trouvé une écriture adaptée à sa méthode qu'il fascine autant.
Car on lui reconnaît d'avoir rendu féconde la méthode dite après lui généalogique. Cela consiste, en gros, à ne pas se demander si une thèse est vraie, mais de quoi elle est le symptôme. Non pas se demander s'il y a une justice en soi, ni ce que cela veut dire, mais quel est le motif qui peut pousser à vouloir qu'il y en ait une.
En un sens, c'est exactement l'inverse de la méthode de lecture que tu préconises, qu'on appelle parfois "principe de charité"et qui s'impose à tout esprit désireux de pratiquer la philosophie).
Hks,
je ne suis pas d'accord pour admettre a priori que le but est la certitude.
Mais si cela était, encore faudrait-il savoir reconnaître ce qui est vraiment certain de ce qui n'est qu'illusion. C'est ceci qui impose le doute. Le doute ne fait pas découvrir le sentiment de certitude, mais il oblige à l'assumer, ce qui conduit la plupart du temps à reconnaître que l'on prenait pour certitude une simple conviction.
ce que tu décris de Nietzsche, il me semble, relève plus de l'écriture que de la méthode. Il y a certes un lien, je pense même que c'est parce que Nietzsche a trouvé une écriture adaptée à sa méthode qu'il fascine autant.
Car on lui reconnaît d'avoir rendu féconde la méthode dite après lui généalogique. Cela consiste, en gros, à ne pas se demander si une thèse est vraie, mais de quoi elle est le symptôme. Non pas se demander s'il y a une justice en soi, ni ce que cela veut dire, mais quel est le motif qui peut pousser à vouloir qu'il y en ait une.
En un sens, c'est exactement l'inverse de la méthode de lecture que tu préconises, qu'on appelle parfois "principe de charité"et qui s'impose à tout esprit désireux de pratiquer la philosophie).
Hks,
je ne suis pas d'accord pour admettre a priori que le but est la certitude.
Mais si cela était, encore faudrait-il savoir reconnaître ce qui est vraiment certain de ce qui n'est qu'illusion. C'est ceci qui impose le doute. Le doute ne fait pas découvrir le sentiment de certitude, mais il oblige à l'assumer, ce qui conduit la plupart du temps à reconnaître que l'on prenait pour certitude une simple conviction.
_________________
amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1505
Date d'inscription : 01/06/2011
Re: Méthode du discours
euthyphron a écrit:En effet, cet excellent sujet parle d'une méthode pour bien conduire sa pensée. Or, bien conduire sa pensée implique de l'emmener au-delà de ce que l'on sait déjà, sinon il ne s'agit pas de conduire sa pensée, mais de trouver une méthode d'exposition, et on peut y voir en effet une stratégie de pouvoir.
Si fait. Ce qui explique la déclaration de Descartes, qui peut sembler étrange à l'abord, quand il met au nombre de ceux qui travaillent sans méthode les géométres. Alors qu'il est le mieux placé pour savoir qu'il y a une méthode des géomètres, qu'on appelle d'ailleurs ainsi.(1) Mais cette méthode n'est pas une méthode de découverte de vérités encore inconnues, mais seulement une méthode de présentation, ou d'exposition d'une vérité déjà connue (et connue autrement qu'avec cette méthode).
Cette méthode est donc inféconde et ne sert qu'à démontrer ce que l'on sait déjà. Sa force n'est pas là (découvrir du nouveau) mais dans le fait que, comme dit Descartes ailleurs, elle arrache le consentement du lecteur. C'est donc bien une puissance (elle force l'adhésion, la conviction).
(1) Techniquement, c'est une méthode de "composition", c'est pourquoi on l'appelle aussi méthode synthétique. Descartes prône en géométrie une méthode analytique, inspirée des travaux de Pappus et de Diophante reprise et améliorée par Viète, etc.
Courtial- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 2030
Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Méthode du discours
euthyphron a écrit:
je ne suis pas d'accord pour admettre a priori que le but est la certitude.
Mais si cela était, encore faudrait-il savoir reconnaître ce qui est vraiment certain de ce qui n'est qu'illusion. C'est ceci qui impose le doute. Le doute ne fait pas découvrir le sentiment de certitude, mais il oblige à l'assumer, ce qui conduit la plupart du temps à reconnaître que l'on prenait pour certitude une simple conviction.
Tout a fait. Il est suffisamment satisfaisant de changer de doute. Nul besoin de certitudes. Je dirais plutot que la certitude doit être crainte comme une peste : s'en approcher mais ne pas y toucher.
_________________
TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Méthode du discours
Courtial a écrit:
(1) Techniquement, c'est une méthode de "composition", c'est pourquoi on l'appelle aussi méthode synthétique. Descartes prône en géométrie une méthode analytique, inspirée des travaux de Pappus et de Diophante reprise et améliorée par Viète, etc.
Une belle anticipation sur l'opposition à venir avec Spinoza en tout cas, qui se retrouve jusque dans la forme.
Quoi qu'il en soit, qu'elle soit synthétique ou analytique, la méthode géométrique reste attirante, même pour Descartes. Selon Pascal, elle est bien loin d'être réduite à une méthode d'exposition, mais bien une méthode pour résoudre des problèmes complexes, en procédant pas à pas et en vérifiant que chaque étape du raisonnement est validée avant de passer à la suivante. Einstein n'a pas voulu démontrer que E=mC², il a juste chercher de façon mathématique s'il y avait des relations entre la masse et l'énergie dans une dimension relativiste. Pascal admet cependant lui-même que cette méthode est délicate hors de son propos d'origine, les mathématiques, mais propose cependant de conserver le principe de la validation itérative, et des axiomes, pour permettre d'avoir un langage commun.
C'est peut-être effectivement son application nécessairement incomplète au domaine des humanités qui transforme la démonstration more geometrico en méthode d'exposition. En géométrique pure, ça reste toutefois une méthode de recherche.
aparté : c'est peut-être la démarche pas à pas qui donne l'impression que le géomètre cherche une réponse qu'il connaît déjà. Par exemple, le concept de parallèlisme est très difficile à comprendre si on n'a pas défini ce qu'est une droite. Inversement, dès qu'on a défini cette droite, il vient naturellement à l'idée que deux droites peuvent être sécantes ou non. On avance ainsi d'évidence en évidence, chaque démonstration apportant son lot de prolongements qu'il n'était pas possible d'envisager avant...
Dernière édition par poussbois le Mer 10 Juin 2015 - 20:00, édité 1 fois
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: Méthode du discours
Courtial a écrit:
Ce qui explique la déclaration de Descartes, qui peut sembler étrange à l'abord, quand il met au nombre de ceux qui travaillent sans méthode les géométres. Alors qu'il est le mieux placé pour savoir qu'il y a une méthode des géomètres, qu'on appelle d'ailleurs ainsi.(1)
...
(1) Techniquement, c'est une méthode de "composition", c'est pourquoi on l'appelle aussi méthode synthétique. Descartes prône en géométrie une méthode analytique, inspirée des travaux de Pappus et de Diophante reprise et améliorée par Viète, etc.
Vu que je ne comprenais pas trop de quoi on était en train de parler, j'ai fait une petite recherche : "méthode de composition ou synthétique"
Et je suis tombé là dessus ; je partage : http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=3703
quid- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1080
Date d'inscription : 04/08/2012
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: Méthode du discours
hks a écrit:
La rigueur tient dans l'attitude face à la règle, pas à la règle.
Une règle en soi n'a pas plus de rigueur qu'une autre.
En revanche on la suit drastiquement
Là c'est intéressant. C'est un excellent exercice que la rigueur.
Plus jeune et pas du tout porté sur la conjecturation intellectuelle ( désolé de raconter ma vie...je commence apres la communion !), sortant d' une banlieue ou la question d' étude "classiques" aurait fait rire tout le quartier, me souvient d' un camp d'ado rando kayak vers treignac, ou j' ai inaugurer une pratique sophistique ( le terme m' était inconnu). lors des discussions de soirées qui versaient dans l' ennui, je balançais une incongruité provocatrice du style " le cinéma n'est pas un art" ...."J'aime pas Brel" ou mieux " le communisme est contraire a nos intérets" ( on était vers 66/68). Ca réveillait tout le monde et animait la soirée de poncifs véhéments qui m' émerveillaient.
Le jeu était de paraitre suffisamment sincère et d'arriver à argumenter.
Les premières fois je pensais aller à la cata ( le groupe était mixte). Mais en fait je me suis trouvé le plus surpris de l' aisance relative a argumenter de façon pertinente une cause dans laquelle je ne croyais pas ....jusqu' à prendre mes arguments suffisamment au sérieux pour douter de ma certitude initiale.
En y réfléchissant il semble que c'était quand même apres avoir lu "Mystère" de Knut Hamsun....le premier bouquin a m' avoir réellement marqué.
_________________
TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Re: Méthode du discours
C'est un exercice rhétorique pratiqué dans pas mal d'écoles. C'est ce qu'on avait proposé ici-même dans le philo-fight club. Dommage que ce soit si peu utilisé.
C'est effectivement un exercice troublant, où j'ai pu retrouver les sensations que j'avais quand je faisais de la boxe sur le ring, bien au-delà de ce qu'on attend d'une discussion sincère ; c'est un combat. Ca n'empêche pas la rigueur, mais comme méthode, ça a ses limites : celle de l'honnêteté comme tu le signales.
C'est effectivement un exercice troublant, où j'ai pu retrouver les sensations que j'avais quand je faisais de la boxe sur le ring, bien au-delà de ce qu'on attend d'une discussion sincère ; c'est un combat. Ca n'empêche pas la rigueur, mais comme méthode, ça a ses limites : celle de l'honnêteté comme tu le signales.
_________________
Le Nord, c'est par là.
poussbois- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1616
Localisation : Petites Antilles
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: Méthode du discours
à euthyphron
Le meilleur moyens de marcher droit vers cette confusion mentale serait en fait de ne pas penser du tout et cela nous le comprenons d' emblée.
Le but me parait être d' avoir au moins un peu plus de certitude à la fin qu'au début.
.....................
Sinon on a aussi le training mental : penser pour entretenir notre cognitivité. C'est défendable mais ce n'est pas mon intention ( pas en première instance).
Je ne fais pas de la philosophie pour lutter conte la menace d'un alzheimer.
bon disons qu'on ne commence pas à penser avec l'intention d' être plus dans le flou à la fin qu'au début.Hks,
je ne suis pas d'accord pour admettre a priori que le but est la certitude.
Le meilleur moyens de marcher droit vers cette confusion mentale serait en fait de ne pas penser du tout et cela nous le comprenons d' emblée.
Le but me parait être d' avoir au moins un peu plus de certitude à la fin qu'au début.
.....................
Sinon on a aussi le training mental : penser pour entretenir notre cognitivité. C'est défendable mais ce n'est pas mon intention ( pas en première instance).
Je ne fais pas de la philosophie pour lutter conte la menace d'un alzheimer.
Dernière édition par hks le Mer 10 Juin 2015 - 23:16, édité 1 fois
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
c'est de l'ironie ...ou je rêve.kercoz a écrit: Nul besoin de certitudes. Je dirais plutôt que la certitude doit être crainte comme une peste : s'en approcher mais ne pas y toucher.
Toi qui es ici le plus imbibé de certitudes.
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
Spinoza procède ainsi avec Euclide comme modèle. Spinoza en plus d être "méthodique" au sens commun, est systématique .( ce qui n'est pas exactement la même chose).poussbois a écrit:aparté : c'est peut-être la démarche pas à pas qui donne l'impression que le géomètre cherche une réponse qu'il connaît déjà. Par exemple, le concept de parallèlisme est très difficile à comprendre si on n'a pas défini ce qu'est une droite. Inversement, dès qu'on a défini cette droite, il vient naturellement à l'idée que deux droites peuvent être sécantes ou non. On avance ainsi d'évidence en évidence, chaque démonstration apportant son lot de prolongements qu'il n'était pas possible d'envisager avant...
Les scolies sont beaucoup moins euclidiens.
La question de la méthode est intéressante parce que pas évidente du tout.
Wittgensetin est méthodique ( il s' est donné une règle sur ce à quoi il doit penser et sur comment il doit le faire...il suit des manières de faire ) mais il n'est pas du tout systématique.( je ne voudrais pas confondre méthode et systéme )
Nietzsche n'est pas méthodique. Il suit non pas une règle mais son instinct, ou son intuition, ou l'inspiration du moment, mais est assez systématique (tout se tient en un système général de la nature).
Kant et Hegel sont méthodiques ET systématiques, mais Bergson est méthodique sans être vraiment systématique.
Bien des méthodiques n' ont pourtant pas énoncé de méthode ...on la repère, on repère des manières récurrentes/ou permanentes de penser ...on suppose qu'ils avaient conscience de leur méthode .
En science on a une méthode expérimentale dûment explicitée.
En philosophie on a des manières de faire, fluctuantes selon les époques ou/et les auteurs, et parfois fluctuante chez les mêmes individus.
Mais j'en reste à mon interrogation première : pourquoi tel ou tel prefèrent- ils telle ou telle manière de faire?
hks- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 12512
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007
Re: Méthode du discours
Imbibé toi même !hks a écrit:c'est de l'ironie ...ou je rêve.kercoz a écrit: Nul besoin de certitudes. Je dirais plutôt que la certitude doit être crainte comme une peste : s'en approcher mais ne pas y toucher.
Toi qui es ici le plus imbibé de certitudes.
Si je suis imbibé , ce n' est malheureusement pas de certitudes. Heureux ceux qui le sont. Ils peuvent agir sans vergognes métaphysiques et jouer leur numéro de voiture au tiercé.
Quand a ma position, à la "méthode" utilisée pour mon discours elle suit un fil rouge: quitte à etre de toute les façons condamné à la subjectivité,....autant la choisir. Du moins sait on d' ou l' on parle. C'est, je crois, une procédure mathématique que de partir d'un résultat "imaginé" plausible pour calculer grace à cette hypothèse l' écart d'avec cette hypothèse.....L' ennui c'est qu'il faut sans cesse recommencer pour réduire cet écart.
Pour revenir à la méthode du discours, il me semble qu' il faut distinguer 2 choses bien différentes:
- la mise en mot ( pour sois même) d' un cheminement accessible à la raison , d' une intuition que la pensée a fait émerger.
- la communication de ce cheminement à l' autre.
Le fait que ces 2 chemins divergent ( et dix verges c'est beaucoup / Desproges) ...semble etre la question du fil.
_________________
TIMSHEL
kercoz- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 4784
Date d'inscription : 01/07/2014
Page 1 sur 2 • 1, 2
Sujets similaires
» Descartes, Discours de la Méthode
» Discours d'intronisation
» Islam: Discours historique du terrible EL HAJJAJ
» Descartes : La méthode
» La méthode cartésienne.
» Discours d'intronisation
» Islam: Discours historique du terrible EL HAJJAJ
» Descartes : La méthode
» La méthode cartésienne.
Page 1 sur 2
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum