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Notes sur la poésie

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joseph curwan
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Message par joseph curwan Sam 22 Fév 2014 - 18:40

HAINE DE LA POESIE ( CONTEMPORAINE FRANÇAISE )








« Lisez le moins possible d’ouvrages critiques ou esthétiques. Ce sont, ou bien des produits de l’esprit de chapelle, pétrifiés, privés de sens dans leur durcissement sans vie, ou bien d’habiles jeux verbaux ; un jour une opinion y fait loi, un autre jour c’est l’opinion contraire. Les œuvres d’art sont d’une infinie solitude ; rien n’est pire que la critique pour les aborder. »   - RILKE




i. Il n’est pas nécessaire, ni même souhaitable, de décider pour autrui de ce que devrait être la poésie, ou de ce qu’elle ne devrait pas être. L’usage même du mot poésie, précédé de l’article défini et sans précision de contexte, semble tendancieux et problématique.




ii. Tout ce dont on peut parler, c’est de la poésie de tel ou tel auteur, au cas par cas, mais pas de quelque chose d’unique, d’immuable et d’essentiel qui s’appellerait poésie et qui existerait en soi et pour soi, indépendamment du reste.




iii. En l’absence de référent  stable, comment distinguer ce qui est poésie de ce qui ne l’est pas ? Et peut-on dire d’un poème qu’il est « bon » ou « mauvais », comme on dit d’une proposition qu’elle est « vraie » ou « fausse » ?




iv. Dans une lettre à Franz Xavier Kappus, Rilke exprime un scepticisme presque brutal vis-à-vis des ouvrages critiques et théoriques traitant de poéticité. Attitude paradoxale, puisque les lettres de Rilke à Kappus prétendent justement expliciter la notion de poéticité.




v. Les ouvrages critiques et théoriques sur la poésie que j’ai pu lire ces dix dernières années ont-ils modifié ma façon de lire la poésie ? Ont-ils modifié ma façon de l’écrire ? Je ne le crois pas, et pourtant ces ouvrages ne sont pas sans intérêt.




vi. Si je réfléchi à ma pratique de la poésie, je m’aperçois que les mots qui me viennent à l’esprit ne s’appliquent pas strictement au domaine de la littérature, mais couvrent un champ bien plus vaste : celui de l’existence toute entière, de la vie même.







vii. Solitude et urgence.


viii. Si être poète signifie refuser tous les refuges des académismes, anciens et nouveaux, on voit à quel point l’expression d’Hölderlin « habiter poétiquement le monde » peut être trompeuse. Car alors, être poète, c’est justement n’habiter nulle part, ne pas avoir d’abris.




ix. Deux tendances simultanées, contradictoires et irréconciliables : d’une part la volonté de maîtrise, d’autre part le désir d’émerveillement. Amertume du maître s’apercevant qu’il a perdu l’émerveillement. Angoisse de l’émerveillé réalisant qu’il ne maîtrise pas sa création.




x. S’il me faut considérer mon écriture d’un œil objectif, je constate que ma démarche s’apparente à une forme d’ art brut, portée non par un soucis de perfection formelle ou d’homogénéité, mais plutôt par une sédimentation chaotique des climats, s’opérant lentement au fil du temps, et dont le résultat,  hétérogène et rugueux, donnerait à voir, d’une façon quasi-microscopique, le développement imprévisible d’une pensée en lutte avec le réel.




xi. On m'a souvent reproché d'écrire des textes hermétiques, et plus précisément des textes à clefs, codés, que seuls certains élus pourraient déchiffrer. Sur ce point le malentendu est complet : non, je n'ai jamais écrit de textes à clefs, il n'y a aucun code qui permettrait d'accéder à une vérité cachée. Tout est là, sous les yeux du lecteur, exactement comme les couleurs et les formes d'un tableau ne renvoient à rien d'autre qu'à elles- mêmes.




xii. Il doit y avoir un sens, une direction à ce que je fais ; mais je n’en vois pas la destination.




[Février 2005]
LETTRE A CHRISTIAN PRIGENT
Paris, le 28/10/07

Cher Monsieur Prigent,

J’ai récemment terminé la lecture de votre essai, que vous m’aviez recommandé, intitulé « Ceux qui merdrent ». J’en ai particulièrement apprécié la substance, qui m’a stimulé intellectuellement et émotionnellement. Vous avez su décrire dans un style goûteux et efficace votre propre démarche poétique, ainsi que votre passion pour la littérature. Le plus remarquable étant que même lorsque vous parlez d’écrivains que je n’aime pas, vos descriptions et interprétations restent pertinentes et passionnantes.

Je ne dirais pas que la lecture de votre livre m’a fait changer d’avis sur la manière de lire ou d’écrire de la poésie, car cela nécessiterait une transformation intégrale de l’intériorité, une véritable transfiguration au sens religieux du terme, mais enfin, j’ai appris des choses, et je l’ai lu avec plaisir, ce qui est déjà beaucoup.

Je dois vous avouer que ce fut un rude coup pour moi d’apprendre que vous trouviez mes derniers poèmes très faibles « formellement et idéologiquement », car ces textes étaient le résultat d’une évolution entamée il y a bientôt huit ans, et je vois en vous quelqu’un de sérieux et de lucide, peut-être un père spirituel, dont le jugement ne saurait être pris à la légère.

Vraiment je regrette que ma poésie ne vous intéresse pas. J’y vois comme une sorte d’échec personnel. Je ne crois pas que la lecture de votre essai parvienne à rectifier la situation, mais au moins puis-je tenter de l’expliquer et de la dédramatiser à la lumière de vos écrits théoriques confrontés à mes propres convictions.

Vous insistez beaucoup sur deux notions dans votre essai : celle de transgression (notamment par le truchement de la scatologie et de l’érotisme, où l’on voit l’ombre tutélaire de Georges Bataille) et celle de réalisme (au sens philosophique de saisie du réel débarrassé des déguisements de la pseudo-réalité spectaculaire). Ces deux notions sont liées car la transgression, pour être valable, ne saurait être une simple régression pulsionnelle pathologique, mais se doit de constituer un véritable outil de connaissance du réel. Or les notions de transgression et de réalisme posent problème pour moi, et c’est précisément là que nos deux gestes poétiques divergent. Permettez-moi de tenter d’expliquer pourquoi.

Si vous lisez mes derniers poèmes, vous constaterez qu’ils ne transgressent apparemment pas grand chose : pas de scatologie, pas d’érotisme, pas de prise de position idéologique déviante, pas d’expérimentations formelles osées. La vérité est qu’étant un pur autodidacte, je n’ai jamais cherché à aller contre un dogme ou un autre que l’on m’aurait inculqué, ma seule exigence étant la nécessité d’écrire ce que j’écris, plutôt qu’autre chose.

Certains écrivains crient et tapent du front contre les murs de leur cellule capitonnée. Ce n’est pas mon cas. Je préfère pour ma part rester prostré dans un coin de la cellule en appréciant l’effet des antidépresseurs et des neuroleptiques. Pour parodier Joyce, je dirais que la sexualité est un cauchemar dont j’essaie de me réveiller. Pour moi la course à la transgression n’a jamais été à l’ordre du jour, et moins encore aujourd’hui, où je parviens à peine à mener une existence normale : sans sexualité et dans des conditions matérielles loin d’être exceptionnelles, cela va sans dire.

Dans « Eloge de la fuite », Henri Laborit écrit : « se révolter, c’est courir à sa perte, car la révolte, si elle se réalise en groupe, retrouve aussitôt une échelle hiérarchique de soumission à l’intérieur du groupe, et la révolte, seule, aboutit rapidement à la soumission du révolté. Il ne reste que la fuite. ». Tout est dit, en ce qui me concerne. Je laisse à d’autres l’affrontement par la révolte transgressive avant-gardiste, destinée de toute façon à dégénérer en nouvelle norme, et je choisis la fuite, pour autant que l’on puisse parler de choix. Je ne pourrai donc jamais être qualifié de poète « moderne » au sens où vous l’entendez dans votre essai, si ce n’est contre mon propre gré.

Passons maintenant à la question du réalisme. J’ai longtemps été un disciple de Schopenhauer, pour qui l’essence ultime de toute existence réside dans la volonté, et par là-même la souffrance, la mission de l’art et donc entre autre de la poésie étant de rendre perceptible cette vérité par le moyen des idées, ou archétypes platoniciens.

Il y a quelques années, et probablement à la suite d’une longue dépression nerveuse, je n’ai plus pu adhérer à cette position réaliste, et me suis converti au point de vue pragmatiste tel que le développent par exemple William James ou plus récemment Richard Rorty, à savoir, grossièrement : la question de l’essence ultime de la réalité doit être abandonnée, seuls comptent les résultats pratiques à l’usage pour estimer la validité d’une conception. Dans ces conditions, il m’est apparu que l’idée que la poésie offrirait une conception plus « réelle » de la réalité ultime que n’importe quelle autre forme d’expression, artistique ou pas, était une absurdité. Le simple fait d’écrire un poème exige de la part du poète une découpe subjective de la réalité perçue. La poésie objective n’existe littéralement pas. Fini, donc, le poète « voyant », et fini aussi l’idée d’un réalisme de la poésie.

Voilà, Monsieur Prigent. J’espère avoir été assez clair et ne pas avoir défiguré vos pensées. J’ai bien conscience de la blessure narcissique que j’inflige à la poésie en abandonnant les idées de transgression et de réalisme, mais tel est le sens qu’a pris mon travail, et je ne n’ai ni la force ni la volonté d’aller contre cette tendance. A vrai dire, je n’ai rien écrit depuis presque trois mois, et je ne sais si j’aurai le courage de reprendre mon ouvrage.

Pourquoi écrire de la poésie ? Simplement parce qu’elle m’a beaucoup apporté, et m’a probablement permis, en rendant ma vie un peu moins absurde, d’échapper au suicide, à la folie, à la drogue ou à l’alcoolisme et que, par un juste retour des choses, je souhaiterais moi aussi, aussi fou et désespéré que cela paraisse, apporter par cette forme d’expression à ceux qui en ont besoin ce que Stig Dagerman appelait : « une raison de vivre ».

LETTRE A JEAN-MICHEL MAULPOIX
Paris, le 29/11/2007

Cher Monsieur Maulpoix,

Je vous remercie d’avoir lu mes derniers poèmes. Merci également pour vos encouragements et vos critiques, pleines de perspicacité. Vous me dites que je gagnerais à « introduire parfois des éléments plus concrets et à faire davantage la chasse aux dérives irréalisantes et aux vocables trop "impollués". » Ces observations me semblent pertinentes, mais il me paraît difficile d’y remédier en l’état actuel des choses.  Pour dire cela grossièrement, je fais partie des 1% de la population française cliniquement reconnue comme psychotique. Il est évident que la consommation régulière de psychotropes (légaux) entraîne chez moi une distorsion du rapport à la réalité et qu’inévitablement mon écriture en porte la marque. Je ne sais si cela est un défaut ou une qualité mais je préfère penser, comme Nietzsche dans son Zarathoustra, qu’ « Il faut avoir un chaos en soi-même pour accoucher d’une étoile qui danse. » D’autre part, il me semble que vous vous faites vous-même l’avocat d’un certain irréalisme lorsque vous écrivez : « Toute la rigueur du travail poétique conduit là : à la proclamation d’une idéalité dont on sait qu’elle n’est pas. »

J’ai particulièrement apprécié la lecture de votre bel essai « Adieux au poème ». Dans une prose puissamment structurée, vous décrivez avec subtilité votre conception de la poésie et dressez un portrait du poète, en ces temps de détresse. Patience, espérance, humilité, lucidité, courage, persévérance, telles sont les vertus cardinales que vous lui attribuez. Sur cela je suis d’accord avec vous. J’ajouterais seulement deux dimensions ontologiques qui me semblent incontournables, peut-être liées à ma propre histoire : l’Ennui et l’Angoisse. Sans ces deux sentiments, je n’aurais probablement jamais rien écrit. Je les tiens donc pour inséparables de la notion même de poéticité. Par ailleurs, j’ai goûté avec plaisir les nombreuses citations qui ornent votre ouvrage et qui constituent, plutôt qu’une simple compilation, un étonnant palimpseste de votre vie littéraire.

Je souscris pleinement à votre concept de « lyrisme critique », véritable synthèse dialectique de l’Apollinien et du Dionysiaque,  équilibre enfin retrouvé entre l’intellect critique et le lyrisme émotionnel qui caractérise, je le crois, des poètes tels que vous ou Lionel Ray. En musique aussi, je pense que les compositeurs américains minimalistes du vingtième siècle tels que Morton Feldman, Steve Reich, Philip Glass, John Adams, Gavin Bryars, Michael Nyman et d’autres ont déjà bien avancé dans cette direction. Les connaissez-vous ?

La thèse principale qui introduit et donne la tonalité générale de votre livre est l’affirmation d’une fin imminente de la poésie et plus largement, en sous-entendu, de toute forme d’art. Cette thèse, défendue aussi par Michel Thévoz dans son « Esthétique du suicide », est extrêmement séduisante, puisqu’un créateur aussi considérable que Glenn Gould y adhérait, lui qui déclarait dans son auto-interview : « Il faut donner à l’art la chance de sa propre disparition. Il nous faut accepter que l’art n’est pas forcément quelque chose d’innocent, qu’il est même quelquefois potentiellement destructeur. On devrait analyser les domaines ou il est le moins nocif, les utiliser comme ligne de conduite, et ajouter à l’art une composante qui lui permette de présider à sa propre désuétude… »

Ce n’est pas vraiment à l’aide d’un résonnement rationnel que je tenterai de vous contredire, car il s’agit là d’une question de conviction intime. Simplement mon sentiment est différent du vôtre. L’idée d’hypostasier la poésie, et plus généralement l’art, au rang d’un organisme doté d’une espérance de vie limitée me parait relever d’un réductionnisme inacceptable. La poésie est un formidable outil de survie qui permet de répondre à l’aliénation ambiante par autre chose que la violence ou l’autodestruction. Ainsi puis-je dire, en pastichant Schopenhauer, que si la poésie ne m'a jamais rien rapporté, elle m'a en revanche beaucoup épargné. Tant qu’il y aura inadaptation, décalage, disfonctionnement, frustration, il y aura des poètes. Du moins est-ce ce que j’espère.

Certains seront peut-être déçus et mécontents de ne voir en la poésie qu'un simple dérivatif à la souffrance, particulièrement ceux qui la pensaient comme réalisation d’un processus transcendant,  organisé et rationnel, à la manière de Hegel, ou ceux qui espéraient de sa part une contribution à des transformations massives de la société capitaliste. Mais je ne crois pas que la poésie ait partie liée avec l’Histoire, ou alors de façon très indirecte et anecdotique. Je pense que l’individu ne saurait être réduit à un simple rouage de la machine sociale, fut-elle économique, culturelle ou biologique, et je crois que la poésie est une chance pour l’individu de s’exprimer et ainsi d’augmenter sa marge de manœuvre, faible, mais réelle.

L’écriture de poèmes est ce que le regretté Gilles Châtelet, dans son essai capital « Vivre et penser comme des porcs », appelait un « travail-patience » : « Le travail est écartelé entre le travail-corvée de la survie et le travail-performance de la Surclasse. C’est négliger que seul le travail-patience engage une amplification inouïe de la liberté, à la fois en extension, par le biais d’un développement de la puissance d’agir de chacun, et en intensité, par la découverte d’une plasticité propre à l’individuation humaine. »

En 1891, Mallarmé déclarait : « J’abomine les écoles et tout ce qui y ressemble ; je répugne à tout ce qui est professoral appliqué à la littérature qui, elle, au contraire, est tout à fait individuelle. » J’approuve cette vision des choses et pour cela, Monsieur Maulpoix, je souhaiterais que l’on vît dans chacun de mes poèmes, non le reflet d’une époque ou d’une école, mais plutôt un témoignage de confiance accordé en la valeur intrinsèque de l’existence humaine et, pourquoi pas, un geste d’amour.




poésie et progrès











Dans sa préface aux écrits posthumes de Tarkos, Christian Prigent dit à propos de l'écriture poétique : « … car si sensation il y a d'un phénomène neuf, c'est précisément parce qu'il rend obsolète les codes de lectures plus anciens. » Nous avons là en quelques mots le résumé d'une conception erronée qui gangrène et paralyse une bonne partie de la critique poétique actuelle, qu’elle soit institutionnelle ou indépendante.

En quoi consiste l'erreur de cette conception ? Simplement en ceci qu'elle considère la poésie comme si elle était une science. En science, un paradigme chasse l'autre. Chaque nouvelle découverte rend caduque la précédente dans l'acheminement infini vers la vérité objective. Certains esprits baignés de scientisme et d’historicisme aimeraient qu'il en soit de même pour ce qui concerne la poésie. Or ce n'est pas le cas. Mallarmé ne rend pas obsolète Villon, Tarkos ne rend pas obsolète Char.

Il n'y a littéralement pas de progrès diachronique en poésie. Seulement une synchronicité totale, chaque auteur étant à lui-même son propre paradigme de vérité et de fausseté, de valeurs et de non-valeurs. Ecrire de la poésie en toute connaissance de cause, c'est renoncer à l'idée de perfectibilité d'une chose transcendante appelée Poésie. Renoncer, mais écrire quand même.


Notes sur les notions de poésie et révolution






Ce n’est pas la poésie qui doit être au service de la révolution, mais au contraire la révolution qui doit être au service de la poésie.

Ce que l’on est en droit d’attendre de la poésie, c’est qu’elle nous apporte de la beauté, à savoir : premièrement, une consolation ; deuxièmement, un espoir.

Certains verront dans la beauté un nouvel avatar de l’opium du peuple, une translation de la religion déclinante adaptée au goût du jour. Ce n’est pas totalement faux, mais sans beauté, c’est à dire sans consolation ni espoir, aucun progrès esthétique ou moral n‘est possible.

Tant que l’on ne prendra pas en compte la pluralité consubstantielle à la notion de poésie, toutes les discussions tendant à légiférer dans l’abstrait sur ce qu’elle doit ou ne doit pas être n’aboutiront qu’à la satisfaction de quelques égos et au versement de quelques subventions, à savoir, sur le plan artistique, au néant.

Ce n’est pas le lyrisme, fût-il critique, ou l’anti-lyrisme en qui réside l’avenir de la poésie, mais la conflagration de ces deux modes d’expression, le champ de bataille qui en résulte avec pour horizon inatteignable une impossible Aufhebung, un au-delà de la poésie.

La seule véritable révolution est celle que chacun opère sur soi-même.

La volonté d’échapper à toute forme d’influence (volonté d’autonomie totale) est à la fois une illusion sans issue et une (la seule ?) motivation forte pour écrire de la poésie.  Pour paraphraser Sartre, la poésie est une passion vaine.
La soi-disant « poésie publique », surnommée récemment « vroum vroum » par Roubaud, n’est que la manifestation de l’annexion du vocable « poésie » par les forces institutionnelles du divertissement spectaculaire.

La poésie est individuelle, aristocratique et privée. Elle ne saurait avoir une portée autre qu’individuelle sans se déliter en spectacle de propagande publicitaire destinée à une micro élite ultra favorisée socialement et culturellement, et ne pouvant rivaliser efficacement avec l’industrie du divertissement de masse.

La façon dont nous décrivons le monde montre notre façon d’interpréter le monde. Notre façon d’interpréter le monde détermine notre façon d’y participer. Comment nous participons au monde le transforme.



Paris, le 4 mars 2011





Catrine Godin, vers une poésie de la rédemption

« l'infini
est mon miroir
c'est toi c'est moi
l'infini »
- Meschonnic



Les deux recueils de poèmes de Catrine Godin parus au Noroît se complètent parfaitement. Dans les deux livres le thème principal est l’altérité, principalement telle que l’on peut la vivre dans la famille et dans le couple. « Les ailes closes » propose une vision plutôt douloureuse et inquiétante du rapport à l’autre, philosophiquement proche de celle du Sartre de « Huis-clos » et de « l' Etre et le néant ».




elles crient

les fils
les pères
violent
les filles
les mères castrent
toutes engeances

nous mentons
pour mieux respirer
l'ère
assassinée

… (Les ailes closes, p,31)



« Les chairs étranges », livre plus apaisé et lumineux, peint la relation à l’autre comme condition de possibilité de la spiritualité et de l’accomplissement de soi, se rapprochant ainsi des conceptions de Lévinas dans « Totalité et infini ».





j'avance parmi toi

et tu parfais
les élans
vers
cette transparence
des fleurs sonores

où tout nous transpire

… (Les chairs étranges, p.87)



D’un point de vue stylistique l’auteur pose ses mots avec parcimonie et sûreté, comme un joueur de go aguerri poserait ses pierres sur le go-ban, créant ainsi des espaces et  des zones de force.




vois
son opprobre
ton sourire

nul ne convainc la culpabilité
d'être coupable


le ciel tremble tes yeux

les membres vrillent la peur
te bande

… (Les ailes closes, p.33)



L’écueil du minimalisme ennuyeux et insipide (Garron, Tellerman, Dreyfus) est évité grâce à la force émotionnelle de chaque mot et groupe de mots, presque comparables par leur intensité aux notes de piano d’un Paul Bley interprétant avec ferveur les thèmes très aériens composés par ses deux ex-femmes Carla et Annette (CD « Open to love », chez ECM).




effervescence
fulgure

ouvre

depuis le centre
liquide
tout autour
tout autour un encerclement approfondit

… (Les chairs étranges, p.30)



Cette « sobriété émotionnelle » discrètement, mais incurablement romantique et lyrique permet à Catrine Godin de ne jamais sombrer dans les artifices de la transgression épate-bourgeois (Quintane, Giraudon) ou du carnavalesque festif (Rouzeau) qui cachent mal l’indigence, voire la nullité des sujets traités par ces auteurs à la mode.

Alors que les deux recueils évoquent essentiellement le rapport à autrui, le dernier chapitre des « Chairs étranges » s’adresse directement au lecteur sur le mode du « vous », décrivant un voyage initiatique et métaphorique proche de l’expérience mystique.

La lecture se confond avec un mouvement et une ascension, sans connotation religieuse mais plutôt comme une méditation athée ouvrant la perspective d’un apaisement et d’une lucidité proche des sagesses orientales dans lesquelles le corps est réconcilié avec l’esprit et le monde.

A la fin, le livre s'achève, non pas, comme on aurait pu le penser, sur une apothéose de lumière, mais plus simplement, plus humainement, sur un sourire.

Les deux livres de Catrine Godin sont parus au Québec en 2006 et 2012. Ils sont trouvables à la librairie du Québec, Paris 5ème. On peut légitimement se poser la question de savoir si, étant donné l’état souvent confiné, nécrosé et platement matérialiste de l’édition poétique en France, ils y eussent là-aussi trouvé un éditeur conscient de leur valeur.


( Novembre 2012 )




VINAU LA VINASSE


Depuis quelques années déjà, on voit le nom de Thomas Vinau fleurir dans les sommaires des revues poétiques. On trouve de plus en plus facilement ses livres en librairie. On voit sa photo un peu partout, bref Thomas Vinau plait. Comment expliquer ce succès ? Il faut dire premièrement que Thomas Vinau est jeune et qu'il écrit une poésie consensuelle et fédératrice. Thomas Vinau : le poète bio préféré des bobos. Thomas Vinau a quitté la ville et s'est installé à la campagne avec sa petite famille. Depuis qu'il vit à la campagne Thomas Vinau s'est littéralement métamorphosé : il est devenu gentil, humaniste, philanthrope, altruiste. Dans sa maison de campagne, Thomas Vinau ne s'ennuie jamais : il cultive son jardin potager, il fait tous les petits travaux de maintenance, il parle aux oiseaux et aux lapins : c'est Jean de Florette, c'est Tom Bombadil, c'est saint François d'Assise. Car Thomas Vinau est avant tout gentil et modeste. Comme son ami Charles Pennequin, Thomas Vinau aime le peuple. Thomas Vinau aime les pauvres. Thomas Vinau aime les marginaux et les accidentés de la vie, car pour Thomas Vinau l'homme est fondamentalement bon et c'est la méchante société qui a tout gâché. C'est pour ça que Thomas Vinau est parti vivre à la campagne, avec sa petite famille. La vie à la campagne est le thème principal des poèmes et petites proses atrophiées de Thomas Vinau : quand Thomas Vinau fait pousser des tomates, il en fait un poème, quand son sanibroyeur est en panne il en fait un poème, quand un lapin mange une carotte, il en fait un poème. Le résultat de tout ceci est une poésie modeste du micro-évènement, un nivellement par le bas de toutes les émotions et réflexions ramenées à quelques petits énoncés anecdotiques dans la plus pure tradition d'un Philippe Delerm ou d'un Prévert sous xanax : petits plaisirs, petites émotions, petites déprimes, petites joies. Thomas Vinau : poète normal pour un président normal. Mais attention, il y a aussi une dimension dramatique chez Thomas Vinau, car cet homme a une vraie faille en lui, une vraie révolte : Thomas Vinau est contre les méchants, Thomas Vinau est contre la misère, Thomas Vinau est contre la tristesse. Toujours avec une retenue, une modestie et une générosité exemplaire, Thomas Vinau sait tirer les larmes au lecteur insensible et le plonger dans un état de méditation semi catatonique proche de l'extase écologico-religieuse. Merci Thomas Vinau pour ces petits moments de bonheur tranquilles et modestes qui contribuent à rendre le monde meilleur et moins cruel. N'en doutons pas, on verra bientôt la photo de Thomas Vinau avec sa petite famille dans les pages de Libération, on entendra bientôt sa voix sur France-Inter. L'immense talent de Thomas Vinau sera bientôt, espérons-le, reconnu à sa juste valeur.





Notes sur le concept de matérialisme langagier



1 Prolégomènes :

1.1 J'emploie les mots signifiant et signifié dans un sens large :

1.2 ignifiant = le signe + le son, à l'intérieur d'une certaine communauté linguistique.

1.3 signifié = le substrat conceptuel de base à peu prêt commun à tous dans une communauté + la résonance et les connotations propres à chacun suivant sa culture, son imagination, sa sensibilité.

1.4 Le signifié est au signifiant ce que la valeur d’usage est à la valeur d’échange.


2 Développement :

2.1 Le matérialisme métaphysique affirme le primat de la matière sur l'esprit.

2.2 Le matérialisme dialectique, ou matérialisme historique affirme que les constructions intellectuelles et culturelles sont la résultante, ou superstructure, des formes de productions industrielles (techno structure, ressources naturelles)

2.3 Le matérialisme langagier affirme le primat du signifiant sur le signifié.

2.4 Les raisons de cette affirmation tiennent essentiellement à une solidité, une matérialité objectale, public et valable pour tous du signifiant, par opposition au caractère non délimité, flou, privé, individuel et subjectif du signifié.

2.5 L'idée que le signifiant ne puisse être qu'un outil chargé de désigner une vérité qui ne soit pas exactement la même pour tous est précisément ce que combat le matérialisme langagier, dans lequel un mot doit renvoyer à la même chose pour tous.

2.6 D'où une volonté de "limiter" le plus possible l'extension du signifié et de favoriser la normalisation du dispositif langagier (signifiant + signifié).





3 Conséquences :

3.1 la conséquence du matérialisme langagier est l'appauvrissement extrême du sens des énoncés au profit du signifiant (son+signe). Ce dispositif a pour but de frapper l'esprit comme à l'aide de slogans festifs et ludiques et de couper la réflexion qui proviendrait d'une intellection plus profonde du sens.

3.2 on voit donc que le but du matérialisme langagier, bien que provenant d'une idéologie post-marxisante est identique à celui de la nov-langue du capitalisme ultra libéral. Dans les deux cas l'objectif est d'aliéner le lecteur-auditeur à la volonté de la puissance émettrice du message.

3.3 cette conjonction de buts des forces post-marxistes dégénérées et du capitalisme ultra libéral est ce que Guy Debord appelait dans son livre « commentaire su la société du spectacle » : le spectaculaire intégré.




Lettre à  Pierre Saunier



Paris, le 20/11/2012


Mon cher Pierre,

Tu me demandes ce que je pense de la poésie française contemporaine et c'est assez difficile de répondre brièvement : autant vider un océan avec une petite cuillère. Et puis c'est une question en apparence assez polémique dans laquelle il est difficile de rester neutre et de ne pas prendre parti. Je te dirais que le poète français contemporain doit faire face à deux périls : d'une part l'État, d'autre part le Marché. La pseudo-poésie actuellement mis en valeur par les médias de masse et institutionnels est donc de deux types : pseudo-poésie de Marché et pseudo-poésie d'État.

La pseudo-poésie de Marché s'adresse au grand public. On la trouve dans les best-sellers, les films à grand spectacle, les jeux vidéos, les ouvrages de développement personnel et d'ésotérisme, la chansonnette de hit-parade, la publicité. Son but est de procurer un divertissement, une évasion de la routine du réel qui soit accessible à tous pour un coût modique et se perpétue en pseudo-besoins. : magie ; effets spéciaux ;  prestidigitation ; rêve en promotion ; pseudo-beauté kitsch ;  industrie du divertissement ; consumérisme ;  produits dérivés …

La pseudo-poésie d'État s'adresse à un public plus restreint et élitaire. Financée et mise en place par l'État, son but est de procurer un sentiment d'appartenance à une caste privilégiée, présumée dotée d'une compréhension plus exacte de la réalité et motivée par un désir de pseudo-révolte. On peut donc la comparer à ce qu'Althusser appelait : Appareil Idéologique d'État. : réalisme socialiste des années 40 ; gloire du Prolétariat ; formalisme dogmatique et sectaire ; dégénérescence du marxisme en folklore pour bobos branchés ;  carnavalesque festif pour homo-festivus ...


L'erreur serait de considérer que ces deux types de poésie sont antagonistes et cherchent mutuellement à se détruire, car tel les marionnettes de Guignol et Gnafron dans les théâtres pour enfants, les deux tendances se complètent mutuellement et trouvent leur raison d'être dans la continuation d'un spectacle de domination et de désinformation qui ne pourrait pas fonctionner sans les deux protagonistes. C'est ce que Debord appelait : Spectaculaire Intégré.


Difficile donc, quand on prétend aimer la poésie à notre époque, de ne pas tomber dans les pièges du consumérisme d'une part, de la pseudo révolte institutionnelle d'État d'autre part. Je crois qu'internet pourrait ouvrir des perspectives intéressantes et permettre au poète de faire connaître son travail à une échelle modeste, tout en gardant son indépendance.


Voilà, Pierre, excuse-moi pour ces quelques notes un peu brouillonnes jetées à la va vite : cela demanderait à être argumenté et étayé d'exemples, mais je laisse à chacun le soin de relier ces remarques à son expérience de la présence de la poésie dans la société actuelle.


Une étrange histoire





Une après-midi de printemps, c’était vers 1993, je me rendis à Versailles par le train de banlieue de la ligne Plaisir-Paris. J’avais alors vingt ans, peut-être un peu plus ou un peu moins, et j’avais décidé de commencer à lire de la philosophie. Dans l’introduction  à son œuvre maîtresse le monde comme volonté et comme représentation, Schopenhauer recommandait à ses futurs lecteurs de lire d’abord Platon, Kant et quelques textes de la Bhagavad Gita. Je m’étais procuré la critique de la raison pure et comptais bien profiter de mon voyage pour avancer dans cette lecture difficile. Je progressais alors très péniblement dans le livre de Kant, ne comprenant qu’une phrase sur trois et ne voyant pas très bien où tout cela pouvait conduire. D’ailleurs le préfacier, un éminent universitaire, ne disait-il pas que la théorie de la connaissance kantienne était rendue caduque par les dernières avancées de la science moderne ? Quoi qu’il en soit, je m’obstinai dans ma laborieuse lecture.
J’étais quasiment seul dans le wagon et ce n’est pas sans surprise que j’entendis soudain une voix très proche, très aiguë et plaintive s’adresser à moi : « Bonjour » Levant la tête de mon livre je vis que mon interlocuteur était un petit homme tout gris, chétif et d’aspect misérable, peut-être un sans-abri. Sans doute allait-il me demander une pièce. Voyant que je le regardais il  continua : « Je suis à la rue et j’écris des poèmes que je vends pour gagner un peu d’argent. Voulez-vous m’acheter un poème ? » Sa voix était vraiment très aiguë, comme celle d’un châtré et je lui fis signe de la tête que non, puis me replongeai dans ma lecture, assez incommodé par cette diversion. A l’époque, seule la musique et la philosophie étaient d’importance pour moi, et la poésie me semblait un jeu précieux et futile destiné à quelques esthètes et autres originaux.
Mais, contrairement à ce que j’espérais, l’homme ne continua pas son chemin dans le wagon. Il resta planté devant moi d’une façon presque menaçante : « Alors, vous ne voulez pas mes poèmes ? » Dit-il cette fois sur un ton ouvertement agressif. Il y avait quelque chose de méchant et de perçant dans son regard et je compris qu’il ne renoncerait pas avant d’avoir obtenu quelque chose. Aussi, de fort mauvaise grâce, je pris un peu de monnaie qui traînait dans ma poche, deux pièces de cinquante centimes, et les lui tendis. Il prit les pièces sans rien dire et me donna une feuille de papier à petits carreaux sur laquelle était écrit un poème au stylo-bille. Puis il partit et disparut. J’étais à présent totalement déconcentré, ne parvenant pas à reprendre ma lecture de Kant et passais la fin du voyage à regarder le paysage défiler, pris d’un sentiment oscillant entre l’irritation et l’inquiétude. Arrivé en gare de Versailles-Chantier, je jetai la feuille dans une poubelle sans même en avoir lu le contenu et pris la direction du château.
Toute cette histoire est vraie. Environ sept ans plus tard, je commençai à produire mes premières tentatives d’écriture poétique.


[Paris, décembre 2012]
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Message par elbaid Sam 22 Fév 2014 - 21:00

Notes sur la poésie 4017359721  dommage tu aurais du proposer à ton bonhomme de lire sa poésie à haute voix , ensuite tu aurais sortie 1 euros de ta poche et lui aurait fait teinté le sou à son oreille .

la douce harmonie d'une poésie vaut bien le tintement d'une pièce .

tiens je te vend une poésie , combien tu m'en donne ?

Le couloir et sa raison. 
au fond de mon dépit
affronte mon être sa vie
draps bleu dans mon lit
enveloppent mon esprit

Le couloir , son obsession  .
au matin qui passe en traine
s'ouvrent les yeux à peine
que l'oreille écoute la plainte
des lèvres en craintes

ce couloir et son ennuie .
seuls en habit de vestige
déambulent sans prestige
guenilles et chausses se figent 
en tête et couronne d'épine
 
Mon couloir....
un reste d'homme
un reste d'oiseau
la femme frêle
au manteau sans forme
la pâle fresque
de blancs uniformes
au couloir qui s'allonge
au couloir qui s'étire
d'aile aux coeurs
un reste de bonheur
un reste d'homme
un reste d'oiseau
d'acier
de fer
de sangs
la vie au dépend
le coeur en tourment
le corps en survie
mon couloir lui...se retrécie.

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Message par elbaid Sam 22 Fév 2014 - 21:06

Le rire est le propre de l'homme.
Mais l'humour est un sacrifice à son préjudice
Quand le rire efface la peine
Que le coeur tisse sa haine
Un replis au coin des lèvres
Un rictus en guise d'anateme
Le visage en panoplie , la volupté .
Et l'humour ma concubine , si mal soignée .
Diamantant le ravissement erroné
D'un zygomatique à la côte déployée.

Ce rire qui nous veut du bien
Au silence complet ,
La contagion vient ,
En déploiement sonore
Que la bouche saccade sans borne .

Une expression tangible
Aussitôt que le rire fragile
En soubressaut , le bastion du corps
Quand broyé sous les dents du remord
Avec le sarcastique , L'humour se tord
De couleur en vertue du bon sens
Que le sens ne déploie jamais à tort .

A quoi bon ce riche élément
Que ce rire qui nous ment
Sa vertu au tout venant
D'être ici-bas au passant
Un visage éblouissant .

Ci-Gît le mourir d'en rire
Dort d'une paix profonde
Fit son lit en ce monde
Qui pour plus de sécurité
Le monde l'ayant enterrer
Pris le parti d'en pleurer...de rire .

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Message par elbaid Sam 22 Fév 2014 - 21:08

Cette apparence generale des choses que l'on trouve ds le tube cathodique
Devenue idée et idole , sont dans l'abstrait sans aucun outil cerebral pourtant fourni d'un language
language qui se repete qui se repete qui se repete..pete.... pete.....
Moi Toujours le tube cathodique qui s'en impose en essence en vertue de la chose
Qui se mue en idée , en principe , en fond de verre gris
A tous ces cons rivaient devant le dictateur cathodique
Qui précisément abstraction faite , en marche comme une déité
Un dialogue de sourd entre le "con tenant" et le "con tenue"
Vire au drame de l'imparfaite vie spontanée
en vie de film jusqu'à trépasse la mort orienté
la nuit de lune en parfum de pareil
que soumet le temps au fond du canapé
le cul mal usé et son assise d'infortuné
on mange on vie on dors au devant de l'appareil .

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Message par elbaid Sam 22 Fév 2014 - 21:14

Ce matin là , dans mon école
Il y eut un rêve d'enfant
Que les virgules ne s'y collent
En cet art contraignant

Le Maître de classe nous disait
Respecter ligne et pointillés
Points de tâches et soignée
En parfaite grâce la dictée

Mr le Maître Clément
Qui habité rue de l'église
Le livre ouvert sur sa chemise
En eut perdu son régiment...!!

Qu'elle ne fut pas sa surprise
Quand le livre enfin dévoilé
Eut égaré ses ponctués

Plus aucun point
Plus aucune virgules
Plus rien de Majuscules
Encore moins de minuscules

Il en interogat la Mule   
Qui gloussait dans son coin
Bien heureux du ridicule
D'en avoir perdu les point

Ne vous en prenez point au livre 
Sont les accents et virgules libres
Qui prenant la clef des champs
Sont envolés tout simplement 

Voulant écrire au printemps
A la nature au soleil au printemps
Ont perçus fenêtre ouverte
A tire d'aille se sont fait la belle

Regardez bien Mr Clément
La fortune de vos accents
L'infortune de nos dépend
Sont lasse de vos tourments

Laissez donc l'accent libre
La virgule de vivre
Le point de sourire
Laissez donc le vers libre
Sans prison en leur dire
Sans rancune en se livre
La virgule ainsi libre





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Message par joseph curwan Lun 24 Fév 2014 - 12:40

Monsieur,

Je trouve vos "poèmes" consternants et nuls et je vous signale que vos conseils et vos leçons de savoir-vivre, vous pouvez vous les garder.

Allez donc voir ailleurs si j'y suis.

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Message par elbaid Lun 24 Fév 2014 - 13:18

Monsieur , Notes sur la poésie 4017359721 

J'y suis.... ailleurs et d'ailleurs que j'y reste ... avec grand plaisir je vous y attend le cœur vaillant et l'esprit ouvert . et si d'aventure ne vous y trouve point c'est avec une immense joie que j'en reviendrais . 

ma poésie est nulle oui j'en conviens....oui .
 
oui mais moi j'ai été lu par François Beaulieu , et Robin Renucci , dans des spectacles poético musical sur une musique de Debussy interprété par Romain Hervé... et toc ! 

 Notes sur la poésie 1876476522
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Message par Bergame Mar 4 Mar 2014 - 9:42

Joseph Curwan a écrit:xi. On m'a souvent reproché d'écrire des textes hermétiques, et plus précisément des textes à clefs, codés, que seuls certains élus pourraient déchiffrer. Sur ce point le malentendu est complet : non, je n'ai jamais écrit de textes à clefs, il n'y a aucun code qui permettrait d'accéder à une vérité cachée. Tout est là, sous les yeux du lecteur, exactement comme les couleurs et les formes d'un tableau ne renvoient à rien d'autre qu'à elles- mêmes.

xii. Il doit y avoir un sens, une direction à ce que je fais ; mais je n’en vois pas la destination.
A moi, ce n'est donc pas tellement le sens comme direction qui me manque -donc- mais plutôt le sens comme signification. Effectivement, j'ai tendance à chercher le sens d'un poème ; s'il n'y en a pas, j'avoue que je ne vois pas trop l'intérêt.
D'ailleurs, je ne crois pas à l'idée qu'un texte, qu'un acte de langage, de communication quelconque, puisse ne pas avoir de sens. Je pense plutôt que lorsqu'un auteur dit : "Mes textes n'ont pas de sens", ou variante : "Chacun comprend dans mes textes le sens qu'il veut y trouver", il témoigne simplement du fait qu'il n'est pas conscient du sens de son texte. Ce qui signifie qu'il ne maitrise pas son œuvre, qu'à proprement parler, il ne sait pas ce qu'il dit. Or, à mon sens, la problématique centrale d'une œuvre d'art, comme de toute œuvre du reste, c'est -effectivement, comme on le lit dans tes notes- la maitrise.
Le monde est gavé de mots, malade de mots. En revanche, ce qui manque infiniment, c'est le sens.

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Message par joseph curwan Mar 4 Mar 2014 - 11:01

bonjour bergame, et merci pour ta réponse

je ne dis pas que mes poèmes n'ont pas de sens, mais plutôt qu'ils n'ont pas de sens univoque qui serait caché.

deuxièmement, quand je commence à écrire un poème, je ne sais pas de quoi je vais parler, rien n'est planifié. il n'y a donc pas de signification univoque du poème à priori, au sens ou il s'inscrirait dans un processus de pensée rationnelle, calculante et mesurante.

je dirais que la signification se construit au fur et à mesure que le poème se construit. pour cela je fais confiance à la possibilité d'existence et de viabilité d'énoncés certes non rationnels, mais non dénués de valeur.

bien sûr tu peux considérer que pour qu'un énoncé ait de la valeur il faut qu'il soit rationnel, mais ce n'est pas ce que je crois.

enfin je ne crois pas que notre société soit saturée de mots, mais d'images, ce qui est tout autre chose.
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Message par Bergame Mar 4 Mar 2014 - 12:35

joseph curwan a écrit:je dirais que la signification se construit au fur et à mesure que le poème se construit. pour cela je fais confiance à la possibilité d'existence et de viabilité d'énoncés certes non rationnels, mais non dénués de valeur.
bien sûr tu peux considérer que pour qu'un énoncé ait de la valeur il faut qu'il soit rationnel, mais ce n'est pas ce que je crois.
Ah non, là-dessus, je suis parfaitement d'accord : Le sens se construit au moins partiellement indépendamment de notre volonté, et sans doute que l'intérêt d'une œuvre réside, au moins partiellement toujours, dans ce lâcher-prise. Mais un lâcher-prise qui doit, ou au moins qui peut ensuite laisser place à un travail de maitrise, ne serait-ce que sur le plan formel. Je pense également qu'on peut prendre conscience du sens, ou de l'un des sens, ou d'une part du sens, ultérieurement. Mais enfin, il faut que quelque chose soit dit, autrement c'est vain, voire pire, c'est ajouter au malheur du monde comme disait à peu près Camus.
Non mais je crois que nous sommes d'accord. Selon moi, un poète doit quand même avoir une idée, au moins après coup, de ce qu'il a voulu dire. Il doit être capable d'en exposer le sens, ou au moins l'un des sens. Même si, bien entendu, il y rechignera voire il s'en défendra becs et ongles, car toute la beauté de la poésie réside précisément dans ce qui n'est pas dit et qui, pourtant, est là.

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Message par hks Mar 4 Mar 2014 - 13:07

Excuse- moi Joseph, mais où puis -je lire tes poèmes ? J' ai peut -être mal cherché ...

Tu commences par Rilke « Lisez le moins possible d’ouvrages critiques ou esthétiques" et puis tu nous assènes ce qui ne me semble pas le moins possible .

Rilke lit le moins possible d’ouvrages critiques ou esthétiques ( ce qui est aussi mon cas soi dit en passant )... Rilke n'a peut -être pas tout à fait raison mais il faudrait le montrer sans doute plus succinctement, en première approche ... histoire de donner envi.

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Message par joseph curwan Mar 4 Mar 2014 - 13:15

je poste mes poèmes récents dans une rubrique de ce forum.

je prépare aussi un recueil qui devrait sortir en septembre prochain.

enfin, on peut me lire dans une revue papier à tirage confidentiel qui s'appelle les citadelles.

dans le contexte actuel, et déjà dans celui de Rilke, un poète ne peut pas être pris au sérieux si il ne théorise pas sur l'écriture. à tel point que les textes théoriques deviennent presque plus importants que les poèmes en eux-même. je crois que c'est cette dérive que cherchait à mettre en lumière Rilke, bien qu'il ait lui même théorisé sur la poésie.
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Message par hks Mar 4 Mar 2014 - 20:55

à Joseph Curwan

à tel point que les textes théoriques deviennent presque plus importants que les poèmes en eux-même.

 Idem en art plastiques. Je ne suis pas très convaincu de la nécessité de "théoriser".
Alors donc qui ne saurait pas "théoriser" serait un mauvais poète ou un poète susceptible de ne pas être pris au sérieux ... quelle dérive!!!
Encore faut- il s'entendre sur le sens du mot "théorie ".
On le sait très bien qu'il y a un monde de la théorie à la pratique. Alors en quoi  la pratique a -t -elle besoin de théorie?
Vouloir être pris au sérieux n'est pas un argument suffisant.

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Message par Bergame Mar 4 Mar 2014 - 21:08

Le sens ! Je répète : Le sens !   Notes sur la poésie 4017359721 
L'art -restons sur la poésie- a évolué vers un formalisme quasi-intégral. L'art pour l'art -je ne parle pas pour toi, Joseph Curwan, mais en général : Je jette des mots sur le papier, comme ils viennent, ça sonne bien, c'est joli, j'ai écrit un poème. Ca ne peut pas suffire. Il faut donner du sens. Si celui-ci n'est pas accessible dans l'œuvre elle-même, alors il faut le faire apparaître dans et par le commentaire.

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Message par Courtial Mar 4 Mar 2014 - 22:19

Je ne sais pas si j'exprime bien ta pensée, Bergame, mais tu pourras toi-même indiquer jusqu'à quel point je le fais et jusqu'à quel point, au contraire, je m'en écarte, mais pour dire les choses à ma façon, c'est un peu le problème de la transcendance, qui se pose ici, non ?
Pour la question du sens, une fois rappelé ce qu'on a dit, savoir que ce terme avait une double entente, sémiologique et téléologique (sens comme signification et sens comme direction, nul n'ayant dit jusqu'ici que ceci s'excluait, par exemple une conduite, un comportement dont je ne comprends pas le sens est aussi bien ce dont je ne vois pas ce que cela veut dire que ce dont la finalité m'échappe), il reste à dire que "le sens" renvoie à un horizon transcendant.
Le mot n'est pas seulement le mot, la phrase n'est pas la phrase, mais elle fait signe vers un autre, qui n'est pas elle, et qui est un horizon de significations, càd de renvois.
Quand j'ai écrit le mot "pierre", j'ai renvoyé au-delà à quelque chose qui n'est pas un mot , qui est une idée (un "signifié" dans le langage savant, un sémainoménon pour faire carrément cuistre, ceci pour éloigner les pékins qui voudraient prendre part à la conversation : à leurs yeux, ce n'est pas le sens, ce sont juste les mots qui leur font peur).
Dit un petit peu autrement : le signifiant (sémainon) est bien quelque chose de réel, mais il vaut comme n'étant pas ce qu'il est. L'étant, il est, et c'est l'identité, le signifiant, il signifie, et il est, d'emblée, différence, il n'est pas ce qu'il est, ou si on préfère,  il s'abolit comme signifiant s'il est seulement ce qu'il est. Par exemple, blitiri, (mot inventé par les Stoiciens et qui ne veut rien dire) est sans doute un complexe phonique, et si on veut, un "mot", mais il n'a pas de sens et n'est donc rien d'autre que lui-même. Le sens ne peut pas être une pure identité et aucune identité, comme telle, ne signifie.

Il y a une métaphore intéressante dans Sartre (L'imaginaire ? Peut-être son Baudelaire, je ne sais plus, c'est peut-être tout bêtement dans l'Etre et le Néant, si vous le savez...) où il compare le langage au pare-brise de ta bagnole (1) Sans pare-brise, on ne roule pas, et on ne voit rien. Mais en revanche, si tu regardes ton pare-brise et pas la route, tu te plantes,parce que le pare-brise est là pour laisser voir, mais pas pour être vu. Et en général, tu vois la route et pas ton pare-brise.
Evidemment, quand une merde d'oiseau ou un insecte vient s'y exploser, là tu vois le pare-brise.

La question, avec une certaine forme de poésie contemporaine, c'est qu'on ne voit plus que les chiures de pigeons et pas la route.
Ou dit plus élégamment, qu'on se meut dans une sphère de l'immanence pure.

Là, je suis un peu moins traditionnel que toi : les poèmes qui ne veulent rien dire, mais qui sont bons seulement parce que les mots vont bien, je les kiffe aussi.

Mais je suis d'accord avec toi (ou ce que je crois comprendre, cf ma clause initiale), il faut tout de même qu'il y ait un horizon minimal de sens, même obscur, même pluriel, même à réviser, etc.
Est-ce que je comprends tout, dans une totale transparence du pare-brises revisité par Carglass, dans ces vers sublimes (à mon avis ) de Mallarmé :

Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
Va t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui ?





(1) Je l'ai déjà signalé je crois : Sartre est le plus grand philosophe des exemples. On connaît le garçon de café  "de mauvaise foi" de l'Etre et le Néant, mais ce n'est qu'un échantillon de ses talents. Il en prend toujours des rigolos, des surprenants - pas comme Platon et Aristote, toujours avec leurs histoires de médecins, de mathématicien, de marchands, des trucs chiants. Et toujours avec un usage de ces exemples proprement éblouissant.

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Message par hks Mar 4 Mar 2014 - 23:52

Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
Va t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui


 Bel exemple. On est au bord du chavirement... ou du ravissement ( au sens du rapt mystique). On y voit quelque chose qu 'on serait bien incapable d'emblée de décrire. Bien sûr qu'on peut ex-pliquer mais l'effet n'y est plus.
En revanche, (il faudrait ) m' expliquer pourquoi, à beaucoup, ça ne fait aucun effet du tout.


Dernière édition par hks le Mer 5 Mar 2014 - 0:56, édité 1 fois

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Message par Courtial Mer 5 Mar 2014 - 1:21

joseph curwan citant Rilke a écrit:« Lisez le moins possible d’ouvrages critiques ou esthétiques. Ce sont, ou bien des produits de l’esprit de chapelle, pétrifiés, privés de sens dans leur durcissement sans vie, ou bien d’habiles jeux verbaux ; un jour une opinion y fait loi, un autre jour c’est l’opinion contraire. Les œuvres d’art sont d’une infinie solitude ; rien n’est pire que la critique pour les aborder. » - RILKE

J'aurais bien aimé que tu expliques pourquoi tu as fourni cette longue série de textes, sur lesquels tu ne dis rien, et avec un titre pour moi complètement incompréhensible, et par lui-même et par rapport au contenu de ce qu'il présente.

C'est une question, j'ai cru remarquer - à ta manière de les traiter - que tu n'aimais pas trop les questions, mais si tu veux un avis, tu pourras pas faire de longs jours sur ce forum (j'ignore si tu le souhaites) avec ce genre de dispositions.
Non pas qu'il soit interdit de ne pas se poser de questions, mais que sur ce genre de forum, ça va être compliqué, comme on dit aujourd'hui.

Je prends juste cette considération de Rilke (sans me prononcer sur le reste, qui sont des citations sans rapport entre elles, même si entrelardées d'intertitres qui donnent, mais à qui ? , l'illusion de l'unité).

Elle peut passer pour une critique de la critique.
Mais en réalité, la critique est un art à part. Il a ses propres chef d'oeuvre. Barthes n'a créé aucune oeuvre, mais c'est un délice de le lire sur Racine, sur Camus, sur Sade, sur Proust, etc.
Mais Rilke parle non de la manière de considérer une oeuvre déjà lue et qui, comme je viens de dire, peut susciter toute une littérature non seulement magnifique, mais utile, mais il parle de la façon d'aborder une oeuvre (si la citation est exacte). Alors bien sûr, si je n'ai jamais vu de tableau de Rembrandt, mais que j'ai lu 50 critiques là-dessus, pour m'armer, et que je me mets à aborder Rembrandt après avoir lu toutes les critiques, il est probable que ce ne sera pas très intéressant.

Aborder, c'est très bien, mais il y a la pensée, aussi.

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Message par Bergame Mer 5 Mar 2014 - 15:33

Ah ben évidemment, si tu me sors Mallarmé...  Notes sur la poésie 2101236583 

Oui, c'est ça, sauf que tu le dis mieux et plus précisément que moi. Et sauf que, en réalité, je ne pense pas que l'immanence pure existe. A moins de créer des mots qui n'ont aucun sens pour personne -comme le "blitiri" donc- il y a toujours un sens, il y a toujours un signifié, il y a toujours au moins un ensemble connotatif qui contribue à créer le "climat" dont parle Joseph.
Même l'écriture automatique, par exemple, recèle un sens. Il se trouve que, incidemment, je me suis adonné à cet exercice dans ce forum même -une expérience très intéressante, très forte pour moi- j'ai été stupéfait de la puissance sémantique -si je puis dire- de ce qui en résultait -au moins à mes yeux !
Et même chez Mallarmé, même dans cette recherche purement formelle, est-ce que, véritablement, il n'y a pas de sens ? Je m'avance sans doute beaucoup, puisque, à ma faible connaissance, c'est ce que Mallarmé lui-même revendiquait. Mais j'ai plutôt l'impression que le problème réside dans le fait que les mots sont restrictifs, contraignants, qu'ils n'expriment jamais véritablement, ou jamais pleinement, ce qu'on voudrait dire, et qu'il faut trouver un autre moyen de le dire. Je comprends Mallarmé, ainsi du reste que tous les poètes, comme quelqu'un qui essaie de dire l'indicible. Peut-être que je me trompe. Mais je crois qu'il y a toujours quelque chose qu'on veut dire -et qu'on ne peut pas.
Sinon, je pense qu'on passerait son temps à autre chose qu'à écrire.

Et donc, si ce qui précède a... du sens, que signifie le fait de dire que ce qu'on a écrit n'a pas de sens ? Hé bien, je vois deux grandes possibilités : Une sorte de pudeur, un dégoût à replacer dans des mots ce qu'on a réussi à exprimer autrement, et de manière bien plus satisfaisante ; ou bien une inconscience, un "je-ne-sais-pas-ce-que-je-fais-mais-je-le-fais-quand-même" stérile, inutile et polluant.

C'est compliqué, parce qu'à mon avis, et comme tous les êtres inspirés, le poète doit savoir devenir une enveloppe vide, un réceptacle, à proprement parler il ne sait pas ce qu'il fait. Seulement la parole de l'oracle a une finalité et elle a un sens, ô combien importants, et ce même si, effectivement, c'est transcendant, ça le dépasse et largement -non, précisément parce que ça le dépasse, bien sûr.
Mouais. C'est compliqué.

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Message par joseph curwan Jeu 6 Mar 2014 - 14:30

courtial a écrit :

>>>c'est un peu le problème de la transcendance, qui se pose ici, non ? >>>

franchement courtial, je n'aime pas beaucoup le terme de transcendance appliqué à la poésie. Je crois qu'il ne faut pas confondre la poésie avec la religion. un poème n'est pas une prière. quand on lit un poème, on est pas mis en relation avec quelque chose de transcendant qui dépasserait l'humanité. non. je pense que la poésie n'est pas "au dessus" du monde. par contre elle peut changer la façon dont on regarde le monde. pour les bouddhistes originaux du petit véhicule, samsara et nirvana sont en fait rigoureusement la même chose. seule la façon de voir à changé.

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Message par joseph curwan Jeu 6 Mar 2014 - 15:18

et puis, je viens de penser à ça : pour moi ça ne va pas de dire que le signifiant est l'immanent et le signifié le transcendant. comme si le signifiant était le phénomène et le signifié la chose en soi. comme si le signifiant était prosaïque et concret, et le signifié éthéré et noble. non. pour moi signifiant et signifié sont plus comme le yin et le yang des chinois : deux forces complémentaires qui s'interpénètrent et ne peuvent être l'une sans l'autre. le signifiant est la graine. le signifié la fleur. le signifiant est au signifié ce que la valeur d'échange est à la valeur d'usage. c'est comme ça que je vois les choses.
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Message par lanK Jeu 6 Mar 2014 - 17:21

bergame a écrit:Mais je crois qu'il y a toujours quelque chose qu'on veut dire -et qu'on ne peut pas.

"Le tout est de tout dire et je manque de mots
Et je manque de temps et je manque d'audace
Je rêve et je dévide au hasard mes images
J'ai mal vécu et mal appris à parler clair

Je veux montrer la foule et chaque homme en détail
Avec ce qui l'anime et qui le désespère
Et toutes ses saisons d'homme tout ce qu'il éclaire
Son espoir et son sang son histoire et sa peine".
Paul Eluard

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Message par Courtial Jeu 6 Mar 2014 - 20:00

joseph curwan a écrit:courtial a écrit :

>>>c'est un peu le problème de la transcendance, qui se pose ici, non ? >>>

franchement courtial, je n'aime pas beaucoup le terme de transcendance appliqué à la poésie. Je crois qu'il ne faut pas confondre la poésie avec la religion. un poème n'est pas une prière. quand on lit un poème, on est pas mis en relation avec quelque chose de transcendant qui dépasserait l'humanité. non. je pense que la poésie n'est pas "au dessus" du monde. par contre elle peut changer la façon dont on regarde le monde. pour les bouddhistes originaux du petit véhicule, samsara et nirvana sont en fait rigoureusement la même chose. seule la façon de voir à changé.

joseph

Libre à toi d'aimer ou de ne pas aimer un mot (si cela veut dire quelque chose), mais il convient d'abord d'en comprendre la définition.
Ce que j'ai dit n'a rien à voir avec la religion.
J'ai expliqué que la notion de "sens" impliquait qu'il y avait une différence. Si le mot "pierre" a un sens, c'est qu'il renvoie à autre chose que ce que tu vois sur ton écran ou les ondes captées par ton oreille quand tu l'entends, il renvoie à quelque chose qui n'est pas lui, qui est un dehors.
En disant cela, je n'ai fait encore preuve d'aucun prosélytisme religieux, fut-il bouddhiste.
Mais je rappelais cet élément au sujet de la poésie et d'une partie du débat, parce que l'on a pu soutenir que la poésie pouvait se débarrasser complètement de la question du sens : les mots ont leur propre réalité: ce sont des sons, donc ils ont une "musique", on peut les choisir pour leur sonorité en se foutant du sens. Le point extrême de cela (c'est-à-dire de l'immanence, de l'auto-suffisance) serait le lettrisme : j'aligne des lettres :
brrnnnl avoynct aja aja

voilà un vers lettriste, quitte à se libérer du sens ou à tout ce qui assignerait la poésie à un "extérieur", à "un autre" (mais encore une fois, je n'ai nullement besoin de l'appeler dieu, je peux l'appeler "le monde", "la réalité", ce ne sera pas moins "transcendant", je vais dire : il faut que le poète parle d'une réalité ou dise quelque chose sur le monde, etc.c'est-à-dire qu'elle chose qui n'est pas un mot ni un poème).

A Bergame : bien sûr que le poème de Mallarmé veut dire quelque chose ! En l'occurrence, celui-ci est peu obscur et peut être facilement renvoyé à une dénotation évidente, il met juste le sujet à la fin du poème, et l'on comprend qu'il parle d'un cygne. Vu en hiver, qui est  pris dans la glace du lac, et là où je dirais : "il aurait pu se tirer avant, ce con", Mallarmé parle du "transparent glacier des vols qui n'ont pas fui", ce qui a quand même une autre gueule, t'avoueras. De même que quand je pense à ce qu'on va se faire chier quand arrive l'hiver, c'est moins classe que "quand du stérile hiver a resplendi l'ennui", non ?

Je le donne quand même en entier :


Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
Va-t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui !

Un cygne d'autrefois se souvient que c'est lui
Magnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n'avoir pas chanté la région où vivre
Quand du stérile hiver a resplendi l'ennui.

Tout son col secouera cette blanche agonie
Par l'espace infligée à l'oiseau qui le nie,
Mais non l'horreur du sol où le plumage est pris.

Fantôme qu'à ce lieu son pur éclat assigne,
Il s'immobilise au songe froid de mépris
Que vêt parmi l'exil inutile le Cygne.

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Message par joseph curwan Ven 7 Mar 2014 - 11:00

courtial,

à mon sens le lettrisme relève plus de l'art conceptuel que de la poésie au sens classique du terme. ce n'est pas le résultat artistique qui est important, mais la démarche intellectuelle qui a amené ce résultat.

je ne suis pas d'accord avec toi quand tu dis que le poète doit parler de la réalité. cela voudrait dire que le poète, avec ses mots, peut nous mettre en contact avec la soi-disant réalité. c'est par exemple la thèse du réalisme socialiste et au point de vue artistique, cela donne des œuvres très conventionnelles, conservatrices, et ennuyeuses.

mais cela peut aussi être le cas de philosophe comme schopenhauer, qui pense que la contemplation d’œuvre d'art peut permettre de dépasser le dualisme sujet/objet et ainsi d'accéder aux fameuse "Idées". j'y ai cru. je n'y crois plus.

l'important à mon sens n'est pas que le poète parle ou non de la réalité ou de la vérité, mais qu'il propose de nouvelles valeurs et de nouvelles formes d'expérience. pour cela il doit avoir le désir, la nécessité intérieure, comme dirait Kandinsky, de s'exprimer, sans lesquels la poésie n'est pas possible.

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Message par Courtial Ven 7 Mar 2014 - 18:45

Joseph curwan a écrit:je ne suis pas d'accord avec toi quand tu dis que le poète doit parler de la réalité. cela voudrait dire que le poète, avec ses mots, peut nous mettre en contact avec la soi-disant réalité. c'est par exemple la thèse du réalisme socialiste et au point de vue artistique, cela donne des œuvres très conventionnelles, conservatrices, et ennuyeuses.

Voilà, tu as tout compris : en fait, je plaidais pour le réalisme socialiste, mais comme j'ai bien noté que c'était une forme d'art assez chiante, je voulais le réhausser avec un peu de religion.
J'ai d'ailleurs écrit moi-même des Odes à la gloire de Staline, mais que je présentais comme la réincarnation du Christ. Beria devenait Paul, Molotov en Jean, Trotski en Judas, etc. A la fin, mon héros mourait crucifié par des Romains en blouses blanches.  Sans me vanter, c'était superbe Notes sur la poésie 4017359721

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