Professionnels de la profession
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Professionnels de la profession
Godard les a vus, Sarko les a sanctifiés.
Il a défendu son ministre (Woerth) en mauvaise posture en vantant son "professionalisme" (sic). Il parlait naguère de son "collaborateur" François Fillon. Nous sommes assaillis, depuis trois décennies par l'envahissement du discours de l'entreprise, des pros, des décideurs, dans tous les champs de l'activité. On n'ose plus parler, en politique, de gouvernement des hommes, mais de "gouvernance", qui semble aussi (je n'en suis pas sûr, si vous avez des infos sur l'origine de ce nouveau terme, je suis preneur, et même entrepreneur) une contamination managériale du champ politique.
Arendt mentionnait déjà ce danger : la politique est vécue aujourd'hui, nous dit-elle, comme un travail, aux yeux mêmes de ceux qui la font. Pas simplement technè - ce n'est pas exactement la technocratie que je veux pointer ici - mais un travail (ponos, ergon), une activité destinée à gagner sa vie . (La gagner un peu trop largement, en plus, mais ceci n'est qu'un détail, dont je ne souhaite pas parler ici).
La question est de savoir comment on explique cette dérive du politique dans le productif - en termes arendtiens : le glissement de l'action vers l'oeuvre - et quelles sont les conséquences qui en résultent. Et s'agit-il là d'un processus sans intention?
Il a défendu son ministre (Woerth) en mauvaise posture en vantant son "professionalisme" (sic). Il parlait naguère de son "collaborateur" François Fillon. Nous sommes assaillis, depuis trois décennies par l'envahissement du discours de l'entreprise, des pros, des décideurs, dans tous les champs de l'activité. On n'ose plus parler, en politique, de gouvernement des hommes, mais de "gouvernance", qui semble aussi (je n'en suis pas sûr, si vous avez des infos sur l'origine de ce nouveau terme, je suis preneur, et même entrepreneur) une contamination managériale du champ politique.
Arendt mentionnait déjà ce danger : la politique est vécue aujourd'hui, nous dit-elle, comme un travail, aux yeux mêmes de ceux qui la font. Pas simplement technè - ce n'est pas exactement la technocratie que je veux pointer ici - mais un travail (ponos, ergon), une activité destinée à gagner sa vie . (La gagner un peu trop largement, en plus, mais ceci n'est qu'un détail, dont je ne souhaite pas parler ici).
La question est de savoir comment on explique cette dérive du politique dans le productif - en termes arendtiens : le glissement de l'action vers l'oeuvre - et quelles sont les conséquences qui en résultent. Et s'agit-il là d'un processus sans intention?
Courtial- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Professionnels de la profession
Première réflexion quasi-réflexe (tiens, c'est amusant, ça, jamais fait gaffe) : Si l'Etat -ou le système politique, bref- est constitué sur le modèle de l'entreprise, qui sont les actionnaires et qui sont les clients ?
Autrement dit, je brûle les étapes, mais j'ai peur qu'il ne s'agisse même pas de n'importe quelle entreprise. Il s'agit de l'entreprise telle qu'elle est conçue aujourd"hui, càd dont le capital est tellement dilué qu'elle appartient à une caste de managers cooptés et non à des actionnaires identifiables et responsables ; qui pensent en termes d'offre -ou de non-offre d'ailleurs !- plutôt que de demande ; dont l'action est orientée en dernière instance par des valeurs de type utilitaristes envisagées comme universalisables : Le bien-être et la paix, essentiellement.
Depuis quelques années se diffuse une théorie très intéressante, venue du monde anglo-saxon bien sûr, qui est celle de la "politique post-parlementaire". L'idée générale étant que les objets politiques -Etats, etc.- sont des entités de plus en plus autonomes vis-à-vis de "leurs" opinions publiques, et doivent l'être, car c'est en fait un gage d'indépendance vis-à-vis des intérêts particularistes -mais oui !-, et la meilleure garantie que ces objets oeuvrent au bien public -tels que définis plus haut, bien-être et paix prioritairement. Dans cette perspective, à l'interférence du "people" et de ses représentants se substitue une "accountability" -voila un terme du lexique managérial- qui consiste concrètement à pousser le principe de séparation des pouvoirs jusqu'au bout : Les organes gouvernementaux sont des agences, indépendantes les unes des autres, qui sont engagées dans des processus mi-concurrentiels mi-collaboratifs, qui se résolvent par la négociation au cas par cas -sur le modèle du marché. Evidemment, les théoriciens concernés prennent rarement soin de préciser à ce moment-là comment ces agences doivent être financées -on dira donc que, de ce point de vue, l'avantage du modèle est sa souplesse : On sait que dans l'UE, la plus belle réalisation concrète du modèle, les agences qui gravitent autour de la Commission émanent essentiellement du monde économique ; en France, des organes tel que le Conseil Constitutionnel sont financés sur fonds publics. Si le lien entre les lobbys européens et le Conseil Constitutionnel n'apparaît pas immédiatement, ils ont pour point commun d'être des entités influant sur la génération des décisions contraignantes dans l'espace public, sans pour autant justifier de quelque mandat électif que ce soit. Voila quelques aspects de ce que recouvre le concept de "gouvernance".
Autrement dit, je brûle les étapes, mais j'ai peur qu'il ne s'agisse même pas de n'importe quelle entreprise. Il s'agit de l'entreprise telle qu'elle est conçue aujourd"hui, càd dont le capital est tellement dilué qu'elle appartient à une caste de managers cooptés et non à des actionnaires identifiables et responsables ; qui pensent en termes d'offre -ou de non-offre d'ailleurs !- plutôt que de demande ; dont l'action est orientée en dernière instance par des valeurs de type utilitaristes envisagées comme universalisables : Le bien-être et la paix, essentiellement.
Depuis quelques années se diffuse une théorie très intéressante, venue du monde anglo-saxon bien sûr, qui est celle de la "politique post-parlementaire". L'idée générale étant que les objets politiques -Etats, etc.- sont des entités de plus en plus autonomes vis-à-vis de "leurs" opinions publiques, et doivent l'être, car c'est en fait un gage d'indépendance vis-à-vis des intérêts particularistes -mais oui !-, et la meilleure garantie que ces objets oeuvrent au bien public -tels que définis plus haut, bien-être et paix prioritairement. Dans cette perspective, à l'interférence du "people" et de ses représentants se substitue une "accountability" -voila un terme du lexique managérial- qui consiste concrètement à pousser le principe de séparation des pouvoirs jusqu'au bout : Les organes gouvernementaux sont des agences, indépendantes les unes des autres, qui sont engagées dans des processus mi-concurrentiels mi-collaboratifs, qui se résolvent par la négociation au cas par cas -sur le modèle du marché. Evidemment, les théoriciens concernés prennent rarement soin de préciser à ce moment-là comment ces agences doivent être financées -on dira donc que, de ce point de vue, l'avantage du modèle est sa souplesse : On sait que dans l'UE, la plus belle réalisation concrète du modèle, les agences qui gravitent autour de la Commission émanent essentiellement du monde économique ; en France, des organes tel que le Conseil Constitutionnel sont financés sur fonds publics. Si le lien entre les lobbys européens et le Conseil Constitutionnel n'apparaît pas immédiatement, ils ont pour point commun d'être des entités influant sur la génération des décisions contraignantes dans l'espace public, sans pour autant justifier de quelque mandat électif que ce soit. Voila quelques aspects de ce que recouvre le concept de "gouvernance".
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Le souci est qu'il y a toujours plusieurs niveaux.
En temps normal, l'unique actionnaire-client du politique est celui qui vit dans la Cité, c'est-à-dire le citoyen. Ce citoyen a un rôle, une voix, un métier (réel ou potentiel dans ce jeu de représentation) mais ceci est secondaire à sa citoyenneté (si les déclarations de 1789 sont appliquées :p).
Là, le secondaire ne l'est plus.
Ainsi le discours à la Cité s'est composé en niveau basé sur l'appartenance à une corporation de métier et sur le système bien français de charges.
Sur les intentions, l'État n'étant pas le décideur unique dans un système libéraliste, il lui faut employer le vocabulaire du modèle économique à la fois pour se faire reconnaitre (parler la langue de l'autre et la première étape pour se faire accepter), se faire entendre, persuader (employer les armes conceptuelles, donc les termes et les représentations de son interlocuteur).
Mais surtout pour se faire considérer comme un acteur de la partie, un travailleur.
Pas pour rien qu'on a vu Mr le président avant son élection prôner aux travailleurs l'héritage de Jaurès le matin, et tailler des cravates à des PDG l'après-midi.
Peut-être même que certains idéalistes pensent qu'il s'agit après tout de rassembler les têtes et les mains autour des valeurs partagées du modèle politique actuel : le travail, la production, l'argent.
En temps normal, l'unique actionnaire-client du politique est celui qui vit dans la Cité, c'est-à-dire le citoyen. Ce citoyen a un rôle, une voix, un métier (réel ou potentiel dans ce jeu de représentation) mais ceci est secondaire à sa citoyenneté (si les déclarations de 1789 sont appliquées :p).
Là, le secondaire ne l'est plus.
Ainsi le discours à la Cité s'est composé en niveau basé sur l'appartenance à une corporation de métier et sur le système bien français de charges.
Sur les intentions, l'État n'étant pas le décideur unique dans un système libéraliste, il lui faut employer le vocabulaire du modèle économique à la fois pour se faire reconnaitre (parler la langue de l'autre et la première étape pour se faire accepter), se faire entendre, persuader (employer les armes conceptuelles, donc les termes et les représentations de son interlocuteur).
Mais surtout pour se faire considérer comme un acteur de la partie, un travailleur.
Pas pour rien qu'on a vu Mr le président avant son élection prôner aux travailleurs l'héritage de Jaurès le matin, et tailler des cravates à des PDG l'après-midi.
Peut-être même que certains idéalistes pensent qu'il s'agit après tout de rassembler les têtes et les mains autour des valeurs partagées du modèle politique actuel : le travail, la production, l'argent.
- Spoiler:
- Alors qu'entre la tête et les mains, le médiateur doit être le coeur, bien entendu
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L'effet dévore la cause, la fin en a absorbé le moyen.
Paul Valéry, Poésie et pensées abstraites
(cité par Herbert Marcuse, in L'homme unidimensionnel)
hks : On le sait bien, une fois que un tel est parti (faché) on se retrouve seuls comme des imbéciles.
Re: Professionnels de la profession
Je continue pour ma part sur la notion de "gouvernance" -mais je crois qu'en effet, c'est un aspect du sujet.
Je viens de tomber sur une controverse récente et tout à fait intéressante dans le Journal of Politics (une revue universitaire américaine). Elle oppose deux politistes (chercheurs en sciences politiques) à une équipe d’économistes de la Banque Mondiale.
A quoi réfère exactement la "gouvernance", voila en effet une question peu évidente. C'est un concept parfois employé avec des significations manifestement assez divergentes. Pourtant, à la Banque Mondiale, ce concept est aujourd'hui central. Il est compris comme, globalement, la « qualité des gouvernements », et a un effet pratique clair : D’ores et déjà, les subsides américains aux « pays moins développés » sont fonction de leur évaluation en termes de gouvernance. « Officiellement » -ou disons, « rationnellement »- le focus est placé sur deux facteurs : D’une part la transparence, c'est-à-dire au fond la porosité de l’administration à la corruption ; et d’autre part, l’efficacité du service public. Mais ce qui constitue l'objet de la controverse, c'est la manière dont les variables sensées mesurer empiriquement ces deux facteurs sont construites.
Le problème de fond, il est connu : Comment passer du qualitatif au quantitatif ? C’est un problème épistémologique central pour toute science humaine et sociale. Le fait est qu’en économie, c’est un problème qu’on se pose moins qu’ailleurs. Ou qu’on ne veut pas se poser.
En l’occurrence, et pour le dire d'une phrase, ce que montrent les chercheurs, c’est que ce que la Banque Mondiale appelle « qualité du gouvernement » est déterminé à partir du point de vue des investisseurs. Tout simplement parce que les données collectées dans chaque pays pour mesurer les deux variables proviennent essentiellement d'enquêtes auprès des acteurs économiques ou d'études d'agences d'évaluation du risque financier. Ainsi, disent les politistes, lorsqu’on parle de « qualité » ou d’ « efficacité » du service public, à la Banque Mondiale ou dans les agences internationales du même type, il ne s’agit pas tant de mesurer les délais de réaction de l’administration, de déterminer quels genres de services elle propose à direction de sa population civile, quelles infrastructures elle priorise, quelle est sa politique d'allocation des budgets, et encore moins, quelle est son efficience dans la collecte d'impôts ou l'implémentation de mesures régulatoires du type législation du travail ou normes bancaires. Non, il s’agit de savoir si elle correspond aux standards des investisseurs internationaux, essentiellement en termes de garantie des droits de propriété (= de retour sur investissement), de respect de l’environnement contractuel, et de politique fiscale. Comme l'admet avec clarté l'équipe d'économistes dans son article en réponse, il s'agit d'identifier la présence ou non de « normes limitant le gouvernement et protégeant la propriété privée de la prédation par l’Etat ».
Nos deux critiques ont même été assez vicieux pour aller jusqu’à remettre en cause la variable « transparence » : Si l’évaluation du service public dépend in fine du déclaratif des investisseurs, on peut supposer que ceux qui sont restés suffisamment longtemps dans un pays en développement pour faire partie des sujets interrogés, ont peut-être réussi à se maintenir précisément parce qu’ils ont su user de corruption. En revanche, les enquêtes passent sans doute à côté de bien des acteurs économiques qui ne sont plus présents dans le pays précisément parce qu’ils se sont fait exproprier pour n’avoir pas assez versé dans la corbeille –ou pas dans la bonne. C’est vicieux, mais quand on a vu comment marche le business en Afrique sub-saharienne par exemple, on ne peut que trouver que ça ait un peu de sens.
En tous cas, cette controverse permet de soulever un pan du voile qui recouvre le concept de « bonne gouvernance » : C’est le bon gouvernement du point de vue des acteurs économiques. Le hiatus, comme disent nos amis politistes, c’est qu’il y a des chances pour que ce « bon » gouvernement-là, ce soit un gouvernement qui ne dispose pas de moyens trop importants (= rentrées fiscales), et donc, paradoxalement, qui ne soit pas trop efficace. Autrement dit, peut-être que les investisseurs internationaux et les populations civiles nationales ne définiraient pas l’ « efficacité » du service public de la même manière. Tout le problème, là comme ailleurs, étant donc de savoir qui parle.
Je viens de tomber sur une controverse récente et tout à fait intéressante dans le Journal of Politics (une revue universitaire américaine). Elle oppose deux politistes (chercheurs en sciences politiques) à une équipe d’économistes de la Banque Mondiale.
A quoi réfère exactement la "gouvernance", voila en effet une question peu évidente. C'est un concept parfois employé avec des significations manifestement assez divergentes. Pourtant, à la Banque Mondiale, ce concept est aujourd'hui central. Il est compris comme, globalement, la « qualité des gouvernements », et a un effet pratique clair : D’ores et déjà, les subsides américains aux « pays moins développés » sont fonction de leur évaluation en termes de gouvernance. « Officiellement » -ou disons, « rationnellement »- le focus est placé sur deux facteurs : D’une part la transparence, c'est-à-dire au fond la porosité de l’administration à la corruption ; et d’autre part, l’efficacité du service public. Mais ce qui constitue l'objet de la controverse, c'est la manière dont les variables sensées mesurer empiriquement ces deux facteurs sont construites.
Le problème de fond, il est connu : Comment passer du qualitatif au quantitatif ? C’est un problème épistémologique central pour toute science humaine et sociale. Le fait est qu’en économie, c’est un problème qu’on se pose moins qu’ailleurs. Ou qu’on ne veut pas se poser.
En l’occurrence, et pour le dire d'une phrase, ce que montrent les chercheurs, c’est que ce que la Banque Mondiale appelle « qualité du gouvernement » est déterminé à partir du point de vue des investisseurs. Tout simplement parce que les données collectées dans chaque pays pour mesurer les deux variables proviennent essentiellement d'enquêtes auprès des acteurs économiques ou d'études d'agences d'évaluation du risque financier. Ainsi, disent les politistes, lorsqu’on parle de « qualité » ou d’ « efficacité » du service public, à la Banque Mondiale ou dans les agences internationales du même type, il ne s’agit pas tant de mesurer les délais de réaction de l’administration, de déterminer quels genres de services elle propose à direction de sa population civile, quelles infrastructures elle priorise, quelle est sa politique d'allocation des budgets, et encore moins, quelle est son efficience dans la collecte d'impôts ou l'implémentation de mesures régulatoires du type législation du travail ou normes bancaires. Non, il s’agit de savoir si elle correspond aux standards des investisseurs internationaux, essentiellement en termes de garantie des droits de propriété (= de retour sur investissement), de respect de l’environnement contractuel, et de politique fiscale. Comme l'admet avec clarté l'équipe d'économistes dans son article en réponse, il s'agit d'identifier la présence ou non de « normes limitant le gouvernement et protégeant la propriété privée de la prédation par l’Etat ».
Nos deux critiques ont même été assez vicieux pour aller jusqu’à remettre en cause la variable « transparence » : Si l’évaluation du service public dépend in fine du déclaratif des investisseurs, on peut supposer que ceux qui sont restés suffisamment longtemps dans un pays en développement pour faire partie des sujets interrogés, ont peut-être réussi à se maintenir précisément parce qu’ils ont su user de corruption. En revanche, les enquêtes passent sans doute à côté de bien des acteurs économiques qui ne sont plus présents dans le pays précisément parce qu’ils se sont fait exproprier pour n’avoir pas assez versé dans la corbeille –ou pas dans la bonne. C’est vicieux, mais quand on a vu comment marche le business en Afrique sub-saharienne par exemple, on ne peut que trouver que ça ait un peu de sens.
En tous cas, cette controverse permet de soulever un pan du voile qui recouvre le concept de « bonne gouvernance » : C’est le bon gouvernement du point de vue des acteurs économiques. Le hiatus, comme disent nos amis politistes, c’est qu’il y a des chances pour que ce « bon » gouvernement-là, ce soit un gouvernement qui ne dispose pas de moyens trop importants (= rentrées fiscales), et donc, paradoxalement, qui ne soit pas trop efficace. Autrement dit, peut-être que les investisseurs internationaux et les populations civiles nationales ne définiraient pas l’ « efficacité » du service public de la même manière. Tout le problème, là comme ailleurs, étant donc de savoir qui parle.
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Bergame a écrit:Depuis quelques années se diffuse une théorie très intéressante, venue du monde anglo-saxon bien sûr, qui est celle de la "politique post-parlementaire". L'idée générale étant que les objets politiques -Etats, etc.- sont des entités de plus en plus autonomes vis-à-vis de "leurs" opinions publiques, et doivent l'être, car c'est en fait un gage d'indépendance vis-à-vis des intérêts particularistes -mais oui !-, et la meilleure garantie que ces objets oeuvrent au bien public -tels que définis plus haut, bien-être et paix prioritairement.
Tiens, je ne résiste pas au plaisir de citer la plus belle formulation que je connaisse de ce paradoxe, la plus synthétique et la plus esthétique. C'est signé Andrew Moravcsik, un américain il est vrai, sommité des "european studies", professeur à Harvard puis Princeton, pour situer. A propos de l'Union Européenne, donc, l'ami Andrew écrivait :
- "L’UE est d'autant plus représentative des préférences des citoyens [européens] qu’elle est moins directement démocratique."
C'est pas beau, ça ?
La démocratie, le seul et l'éternel combat.
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Re: Professionnels de la profession
Bergamme à écrit
Tiens, je ne résiste pas au plaisir de citer la plus belle formulation que je connaisse de ce paradoxe, la plus synthétique et la plus esthétique. C'est signé Andrew Moravcsik, un américain il est vrai, sommité des "european studies", professeur à Harvard puis Princeton, pour situer. A propos de l'Union Européenne, donc, l'ami Andrew écrivait :
C'est pas beau, ça ?
La démocratie, le seul et l'éternel combat.
Pourquoi est ce un paradoxe? Que signifie le mot "démocratie". N'est ce pas le peuple souverain qui a élu les plus sanglantes dictatures, en quoi les masses ignorantes seraient-elles les mieux à même de prendre les décisions les plus appropriées? La légitimité républicaine doit-elle tout soumettre à l'approbation des masses ignorantes?
Les mots démocratie et peuple ont connu dans l'histoire bien des vicissitudes avec pour point d'orgue les "démocraties populaires". Demander au peuple de s'exprimer sur un traité comme celui de Maastricht, n'est ce pas quelque part une mascarade de démocratie? Combien ont été voter sans l'avoir lu, combien l'on lu sans le comprendre, combien l'on lu en le comprenant mais sans pouvoir anticiper ses effets?
Le rapport des forces aujourd'hui s'établi entre lobbys marchands et associations activistes au sein d'institution internationales en préalable aux discussions des grands accords internationaux, les assemblés et sénats nationaux ne sont plus que des chambres d'enregistrements lorsque ces accords sont transcrit ensuite en droit national.
Pourquoi la désaffection pour les urnes? Les associations activistes sont elles anti-démocratiques, leurs membres ont au moins le mérite de s’intéresser au fond des questions, ils ne se contentent pas d'exprimer une "opinion", tant que la liberté d'association est respectée un système peut-il être considéré non démocratique. La gouvernance est-elle illégitime face à la complexité des situations?
Tiens, je ne résiste pas au plaisir de citer la plus belle formulation que je connaisse de ce paradoxe, la plus synthétique et la plus esthétique. C'est signé Andrew Moravcsik, un américain il est vrai, sommité des "european studies", professeur à Harvard puis Princeton, pour situer. A propos de l'Union Européenne, donc, l'ami Andrew écrivait :
- "L’UE est d'autant plus représentative des préférences des citoyens [européens] qu’elle est moins directement démocratique."
C'est pas beau, ça ?
La démocratie, le seul et l'éternel combat.
Pourquoi est ce un paradoxe? Que signifie le mot "démocratie". N'est ce pas le peuple souverain qui a élu les plus sanglantes dictatures, en quoi les masses ignorantes seraient-elles les mieux à même de prendre les décisions les plus appropriées? La légitimité républicaine doit-elle tout soumettre à l'approbation des masses ignorantes?
Les mots démocratie et peuple ont connu dans l'histoire bien des vicissitudes avec pour point d'orgue les "démocraties populaires". Demander au peuple de s'exprimer sur un traité comme celui de Maastricht, n'est ce pas quelque part une mascarade de démocratie? Combien ont été voter sans l'avoir lu, combien l'on lu sans le comprendre, combien l'on lu en le comprenant mais sans pouvoir anticiper ses effets?
Le rapport des forces aujourd'hui s'établi entre lobbys marchands et associations activistes au sein d'institution internationales en préalable aux discussions des grands accords internationaux, les assemblés et sénats nationaux ne sont plus que des chambres d'enregistrements lorsque ces accords sont transcrit ensuite en droit national.
Pourquoi la désaffection pour les urnes? Les associations activistes sont elles anti-démocratiques, leurs membres ont au moins le mérite de s’intéresser au fond des questions, ils ne se contentent pas d'exprimer une "opinion", tant que la liberté d'association est respectée un système peut-il être considéré non démocratique. La gouvernance est-elle illégitime face à la complexité des situations?
baptiste- Digressi(f/ve)
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Re: Professionnels de la profession
Très certainement. Mais poursuivons. Ca nous conduit à quoi ?
"Démocratie", si j'en crois mon Bailly, c'est le "pouvoir du peuple". Mais c'est quoi, le peuple ? Pourquoi ce ne serait pas trois types qui prennent des décisions, etc. ?Donc ce qu'on a de mieux c'est : le peuple, c'est le plus grand nombre.
(Encore une fois, je veux bien que ce soit grossier, pas subtil et tout ça, mais qu'est-ce qu'on a d'autre ?). Il veut quoi, le plus grand nombre, quand il n'est que le plus grand nombre ? Bousiller ceux qui sont moins nombreux. On ne s'étonnera donc pas de voir les "démocraties arabes" ou autres tourner au simple réglement de compte par lequel la majorité en finit avec la minorité (copte, kurde, shiite, etc., je vous laisse remplir pour les autres, c'est tellement attendu et répétitif que cela en devient écoeurant).
Combien de Juifs y avait-il en Allemagne en 1930 ? Allez disons 5 % (sans doute beaucoup moins, en fait, même en comptant les étrangers) : mais si 95 % de la population (ce n'était pas le cas, bien sûr) désire les exterminer, la mesure devient "démocratique" parce qu'elle est voulue par la majorité ?
Ou bien on répond : oui, et l'on est dans ce que j'appellerais, pour faire court, le jean-marisme - et je dis bonsoir!, ou bien on essaie de trouver quelque chose d'un peu plus compliqué - et comme j'aime bien la philosophie, je suis pour participer à la réflexion et faire quelques propositions.
J'entends que certains veulent "dépasser" (comme on dit) cette difficulté en parlant de la "République" - une manière de sortir de là par le haut, dans leur esprit, si j'ai bien compris. Je ne serais convaincu que lorsqu'ils auront donné un contenu plus consistant à cette prétention.
Par "plus consistant", je n'entends pas une fondation théorique mieux étayée (les concepts comme le bien public, l'intérêt général, etc. représentent des bases solides, au moins à ce que je crois), mais l'idée de pouvoir s'appuyer sur des éléments plus concrets, et plus particulièrement ceux qui pourraient relever d'une pratique effective et par là présenter un sens dans l'activité des gens et pas seulement des théories brillantes
"Démocratie", si j'en crois mon Bailly, c'est le "pouvoir du peuple". Mais c'est quoi, le peuple ? Pourquoi ce ne serait pas trois types qui prennent des décisions, etc. ?Donc ce qu'on a de mieux c'est : le peuple, c'est le plus grand nombre.
(Encore une fois, je veux bien que ce soit grossier, pas subtil et tout ça, mais qu'est-ce qu'on a d'autre ?). Il veut quoi, le plus grand nombre, quand il n'est que le plus grand nombre ? Bousiller ceux qui sont moins nombreux. On ne s'étonnera donc pas de voir les "démocraties arabes" ou autres tourner au simple réglement de compte par lequel la majorité en finit avec la minorité (copte, kurde, shiite, etc., je vous laisse remplir pour les autres, c'est tellement attendu et répétitif que cela en devient écoeurant).
Combien de Juifs y avait-il en Allemagne en 1930 ? Allez disons 5 % (sans doute beaucoup moins, en fait, même en comptant les étrangers) : mais si 95 % de la population (ce n'était pas le cas, bien sûr) désire les exterminer, la mesure devient "démocratique" parce qu'elle est voulue par la majorité ?
Ou bien on répond : oui, et l'on est dans ce que j'appellerais, pour faire court, le jean-marisme - et je dis bonsoir!, ou bien on essaie de trouver quelque chose d'un peu plus compliqué - et comme j'aime bien la philosophie, je suis pour participer à la réflexion et faire quelques propositions.
J'entends que certains veulent "dépasser" (comme on dit) cette difficulté en parlant de la "République" - une manière de sortir de là par le haut, dans leur esprit, si j'ai bien compris. Je ne serais convaincu que lorsqu'ils auront donné un contenu plus consistant à cette prétention.
Par "plus consistant", je n'entends pas une fondation théorique mieux étayée (les concepts comme le bien public, l'intérêt général, etc. représentent des bases solides, au moins à ce que je crois), mais l'idée de pouvoir s'appuyer sur des éléments plus concrets, et plus particulièrement ceux qui pourraient relever d'une pratique effective et par là présenter un sens dans l'activité des gens et pas seulement des théories brillantes
Courtial- Digressi(f/ve)
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Re: Professionnels de la profession
Baptiste, tu es parfait ! En quelques lignes, tu nous as récité tout le catéchisme, et il me semble que tu n'as rien oublié :
- L'assimilation de la démocratie à la dictature -une merveille de novlangue, on ne le souligne pas assez : La paix c'est la guerre, l'amour c'est la haine, et la démocratie c'est la dictature
- L'assimilation de la démocratie au marxisme -ça se comprend à partir du premier argument : Les "démocraties populaires" étaient marxistes, et le marxisme est dictatorial, donc il n'y a pas loin de la démocratie à la dictature, voyez...
- Le postulat de l'ignorance de la masse -même en ce qui concerne le Traité constitutionnel, dis donc ! le texte politique le plus débattu, le plus discuté de ces 50 dernières années. Lorsque les éditeurs politiques évoquent leurs ventes de 2005, les larmes leur montent aux yeux et un doux sourire illumine leur visage. Mais fi ! Il est bien évident que si le peuple a voté "non", c'est qu'il n'a pas compris le texte. Il l'aurait compris, il aurait voté "oui", le peuple, comment faire autrement ?
- Le postulat du désintérêt de la masse, pour faire bonne mesure -si l'on n'est pas convaincu par le préjugé selon lequel la masse est ignorante et stupide et que par conséquent, il ne faut surtout pas lui laisser choisir elle-même les dirigeants, ce n'est pas grave, rassurez-vous, de toutes façons ça ne l'intéresse pas !
- La référence au réel : On n'argumente pas contre les faits, et les faits, mon brave, c'est que les parlements nationaux sont devenus des chambres d'enregistrement, et que le pouvoir est désormais aux mains des entreprises multinationales, des organisations internationales et des ONG. Point. Dans un autre topic, on demandait : "C'est quoi le réel ?" Hé ben voila, le réel, c'est ça et c'est pas autre chose. Circulez.
- La complexité. Aaah, la complexité... Le monde est complexe, la vie est complexe, mais n'allez surtout pas croire que cet argument soit de nature à remettre en cause l'assertion précédente. Pas du tout ! Le monde est complexe, certes, mais ça n'empêche personne de vous définir le réel d'une phrase.
- Et malgré tout cela : L'ignorance des masses, la dangerosité du peuple souverain, l'inanité de la procédure électorale, le rejet de tout principe de représentation -y compris parlementaire -malgré tout cela, baptiste, tu te définis comme démocrate. N'est-ce pas ? :) Mais enfin, bon, disons que c'est une nouvelle forme de démocratie, quoi... "Et alors ? Au nom de quoi, monsieur, au nom de quoi me refuseriez-vous le droit de me dénommer démocrate ? Vous n'avez pas le monopole de la démocratie, monsieur, vous ne l'avez pas ! Et puis, d'ailleurs, c'est quoi la démocratie ?" etc. etc.
Ah si en effet, tu avais pourtant oublié un argument, mais Courtial y supplée, et c'est une bonne chose. Car en vérité, c'est le plus important, c'est le plus prégnant, et pourtant c'est celui qui est le moins souvent explicité. Il plane comme un spectre dans les livres et les consciences : C'est une démocratie qui a porté Hitler au pouvoir. Voila, comme ça c'est dit. Et on peut même aller plus loin : On peut faire l'hypothèse, avec Courtial, que la majorité des Allemands voulaient exterminer les Juifs. Et ainsi conduire à l'idée qu'Auschwitz a pu répondre à une attente de la majorité des allemands et, qu'à ce titre, il a, en quelque sorte, été instauré démocratiquement. On a alors suggéré que le nazisme était démocratique. En fait, on a même suggéré que ce qu'il y a de plus abominable, dans le nazisme, il le doit à son caractère démocratique. Et là, il faut le reconnaître : On atteint au sublime. :)
La question est pourtant simple :
- Oui ou non, Hitler a-t-il été porté au pouvoir en 33 par la majorité des citoyens allemands ? Ou au moins par la majorité des électeurs ?
- Oui ou non, la majorité des Allemands désiraient-ils l'extermination physique des Juifs ?
Le reste -et en particulier les "expériences de pensée" du type : "Oui, mais en supposant que la majorité le voulait ?" -c'est de la rhétorique. Et sur de tels sujets, au moins, on devrait tout de même s'abstenir de rhétorique -àmha.
Je sais bien -enfin je crois- que sous ton clavier, Courtial, ce n'est pas intentionnel. Mais cette assimilation implicite de la démocratie au nazisme, franchement, c'est -àmha toujours- l'origine de tous nos maux -ou à tout le moins d'une bonne partie.
- L'assimilation de la démocratie à la dictature -une merveille de novlangue, on ne le souligne pas assez : La paix c'est la guerre, l'amour c'est la haine, et la démocratie c'est la dictature
- L'assimilation de la démocratie au marxisme -ça se comprend à partir du premier argument : Les "démocraties populaires" étaient marxistes, et le marxisme est dictatorial, donc il n'y a pas loin de la démocratie à la dictature, voyez...
- Le postulat de l'ignorance de la masse -même en ce qui concerne le Traité constitutionnel, dis donc ! le texte politique le plus débattu, le plus discuté de ces 50 dernières années. Lorsque les éditeurs politiques évoquent leurs ventes de 2005, les larmes leur montent aux yeux et un doux sourire illumine leur visage. Mais fi ! Il est bien évident que si le peuple a voté "non", c'est qu'il n'a pas compris le texte. Il l'aurait compris, il aurait voté "oui", le peuple, comment faire autrement ?
- Le postulat du désintérêt de la masse, pour faire bonne mesure -si l'on n'est pas convaincu par le préjugé selon lequel la masse est ignorante et stupide et que par conséquent, il ne faut surtout pas lui laisser choisir elle-même les dirigeants, ce n'est pas grave, rassurez-vous, de toutes façons ça ne l'intéresse pas !
- La référence au réel : On n'argumente pas contre les faits, et les faits, mon brave, c'est que les parlements nationaux sont devenus des chambres d'enregistrement, et que le pouvoir est désormais aux mains des entreprises multinationales, des organisations internationales et des ONG. Point. Dans un autre topic, on demandait : "C'est quoi le réel ?" Hé ben voila, le réel, c'est ça et c'est pas autre chose. Circulez.
- La complexité. Aaah, la complexité... Le monde est complexe, la vie est complexe, mais n'allez surtout pas croire que cet argument soit de nature à remettre en cause l'assertion précédente. Pas du tout ! Le monde est complexe, certes, mais ça n'empêche personne de vous définir le réel d'une phrase.
- Et malgré tout cela : L'ignorance des masses, la dangerosité du peuple souverain, l'inanité de la procédure électorale, le rejet de tout principe de représentation -y compris parlementaire -malgré tout cela, baptiste, tu te définis comme démocrate. N'est-ce pas ? :) Mais enfin, bon, disons que c'est une nouvelle forme de démocratie, quoi... "Et alors ? Au nom de quoi, monsieur, au nom de quoi me refuseriez-vous le droit de me dénommer démocrate ? Vous n'avez pas le monopole de la démocratie, monsieur, vous ne l'avez pas ! Et puis, d'ailleurs, c'est quoi la démocratie ?" etc. etc.
Ah si en effet, tu avais pourtant oublié un argument, mais Courtial y supplée, et c'est une bonne chose. Car en vérité, c'est le plus important, c'est le plus prégnant, et pourtant c'est celui qui est le moins souvent explicité. Il plane comme un spectre dans les livres et les consciences : C'est une démocratie qui a porté Hitler au pouvoir. Voila, comme ça c'est dit. Et on peut même aller plus loin : On peut faire l'hypothèse, avec Courtial, que la majorité des Allemands voulaient exterminer les Juifs. Et ainsi conduire à l'idée qu'Auschwitz a pu répondre à une attente de la majorité des allemands et, qu'à ce titre, il a, en quelque sorte, été instauré démocratiquement. On a alors suggéré que le nazisme était démocratique. En fait, on a même suggéré que ce qu'il y a de plus abominable, dans le nazisme, il le doit à son caractère démocratique. Et là, il faut le reconnaître : On atteint au sublime. :)
La question est pourtant simple :
- Oui ou non, Hitler a-t-il été porté au pouvoir en 33 par la majorité des citoyens allemands ? Ou au moins par la majorité des électeurs ?
- Oui ou non, la majorité des Allemands désiraient-ils l'extermination physique des Juifs ?
Le reste -et en particulier les "expériences de pensée" du type : "Oui, mais en supposant que la majorité le voulait ?" -c'est de la rhétorique. Et sur de tels sujets, au moins, on devrait tout de même s'abstenir de rhétorique -àmha.
Je sais bien -enfin je crois- que sous ton clavier, Courtial, ce n'est pas intentionnel. Mais cette assimilation implicite de la démocratie au nazisme, franchement, c'est -àmha toujours- l'origine de tous nos maux -ou à tout le moins d'une bonne partie.
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Euh... si je peux me permettre, il ne semble pas très habile de parier sur l'absence d'intention de mes propos les plus contestables, de les attribuer à la naiveté ou à l'inattention. Bien plus probable de les supposer voulus et conscients- même si cela les fait moins sympathiques, naturellement.
Pour ce qui est de la volonté des Allemands à exterminer les Juifs, je laisse entendre que ce n'était pas majoritaire selon moi, il suffit de relire mon texte pour s'en convaincre, mais bon, c'est toujours pareil, on ne lit pas, on "réagit", sur Internet. (N'importe qui pourra s'en convaincre sur ce que j'ai écrit effectivement ;il s'agit par ailleurs d'un sujet sur lequel j'ai beaucoup travaillé et sur lequel je prétends, en conséquence, avoir un avis : on peut le contester, naturellement, mais pas en commençant par le présenter comme le contraire de ce qu'il est, et, si on tient à le savoir, je trouve le procédé parfaitement dégueulasse(1)
Nous nous en étions déjà entretenus ensemble (Moi et Bergame en particulier), sur le fait que je trouve parfaitement insupportable qu'on ne se croie pas tenu de lire ce qu'on condamne, autorisé à dire n'importe quoi - y compris sur des textes qu'on peut, avec un coup de "fléche vers le haut", consulter en direct, etc. On a tout, mais est-ce que cela veut dire qu'on est plus sérieux, et surtout plus attentif à l'autre, et surtout plus pensant ? Ben non, certainement pas. Courtial prétend que la démocratie, c'est d'être un nazi, ben voyons...Et c'est tout à fait ce que j'ai voulu dire, naturellement. Démocrate = nazi, ben, cte bonne blague...
Mais merci, vraiment grand merci de me compter parmi les fascistes qui s'ignorent, les antisémites inconscients, et surtout de la générosité dont tu fais montre, merci vraiment. Tu as ton facho à toi, en quelque sorte, un peu comme les antisémites ont "leur" Juif ou "leur" Arabe, les racistes leur "Nègre" etc.
(1) Je trouve des atteintes violentes et insupportables à mon éthique que soit sanctuarisée et officialisée la non-lecture. Qu'on sache qu'on ne m'empèchera pas de réclamer contre ces abus, qu'on me trouvera en face pour les dénoncer et que je n'autoriserais pas que ces procédés malsains ne deviennent la manière ordinaire de faire, dans ce forum.
Pour ce qui est de la volonté des Allemands à exterminer les Juifs, je laisse entendre que ce n'était pas majoritaire selon moi, il suffit de relire mon texte pour s'en convaincre, mais bon, c'est toujours pareil, on ne lit pas, on "réagit", sur Internet. (N'importe qui pourra s'en convaincre sur ce que j'ai écrit effectivement ;il s'agit par ailleurs d'un sujet sur lequel j'ai beaucoup travaillé et sur lequel je prétends, en conséquence, avoir un avis : on peut le contester, naturellement, mais pas en commençant par le présenter comme le contraire de ce qu'il est, et, si on tient à le savoir, je trouve le procédé parfaitement dégueulasse(1)
Nous nous en étions déjà entretenus ensemble (Moi et Bergame en particulier), sur le fait que je trouve parfaitement insupportable qu'on ne se croie pas tenu de lire ce qu'on condamne, autorisé à dire n'importe quoi - y compris sur des textes qu'on peut, avec un coup de "fléche vers le haut", consulter en direct, etc. On a tout, mais est-ce que cela veut dire qu'on est plus sérieux, et surtout plus attentif à l'autre, et surtout plus pensant ? Ben non, certainement pas. Courtial prétend que la démocratie, c'est d'être un nazi, ben voyons...Et c'est tout à fait ce que j'ai voulu dire, naturellement. Démocrate = nazi, ben, cte bonne blague...
Mais merci, vraiment grand merci de me compter parmi les fascistes qui s'ignorent, les antisémites inconscients, et surtout de la générosité dont tu fais montre, merci vraiment. Tu as ton facho à toi, en quelque sorte, un peu comme les antisémites ont "leur" Juif ou "leur" Arabe, les racistes leur "Nègre" etc.
(1) Je trouve des atteintes violentes et insupportables à mon éthique que soit sanctuarisée et officialisée la non-lecture. Qu'on sache qu'on ne m'empèchera pas de réclamer contre ces abus, qu'on me trouvera en face pour les dénoncer et que je n'autoriserais pas que ces procédés malsains ne deviennent la manière ordinaire de faire, dans ce forum.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 03/07/2008
Re: Professionnels de la profession
Je crois ne pas avoir mal lu Courtial. Tu dis : "si 95 % de la population (ce n'était pas le cas, bien sûr) désire les exterminer, la mesure devient "démocratique" parce qu'elle est voulue par la majorité." Je conteste cette "expérience de pensée", ce qui est présenté tout à la fois comme une hypothèse envisageable et comme un énoncé faux. Soyons clair : Si tu ne penses pas que 95% des allemands voulaient l'extermination des juifs, pourquoi alors feins-tu de le supposer ? Excuse-moi, il y a problème.
Et pourquoi y a-t-il problème ? Parce que, tu me reproches d'avoir trouvé mon fasciste, mais je ne t'étonnerai pas outre mesure, j'en suis sûr, si je te dis que j'ai eu le même sentiment ? Oui, pour moi, ce qui est décidé à la majorité est démocratique, oui. Et tu le sais, puisqu'effectivement, nous en avons parlé. Donc, avant de qualifier ma position de "jean-marisme" , s'il te plait, montre-moi que la majorité des allemands voulaient exterminer les juifs, ou montre-moi que la majorité des allemands ont porté Hitler au pouvoir, ou montre-moi que Marine Le Pen va remporter la prochaine élection présidentielle à la majorité des suffrages. Et peut-être que je remettrai en cause également le principe majoritaire. Mais pour l'instant, je ne lis que des suppositions, auxquelles tu précises de plus ne pas croire toi-même.
Tu vois ce que je veux dire, j'en suis sûr : Ne te contente pas, stp, d'expériences de pensée, d'hypothèses à mon avis gratuites, pour révoquer le principe majoritaire. Ou alors, il me semble qu'il faut assumer.
Parce que moi, je suis désolé, je veux bien qu'on désigne le principe majoritaire comme "tyrannie de la majorité" -enfin, "je veux bien", façon de parler, c'est une énorme c...ie qui ne tient pas le route 5 mns, à mon avis- mais si ce n'est pas le principe majoritaire qui prévaut, d'une manière ou d'une autre, c'est le principe minoritaire. Ca se justifie "démocratiquement", ça, le principe minoritaire ?
Et pourquoi y a-t-il problème ? Parce que, tu me reproches d'avoir trouvé mon fasciste, mais je ne t'étonnerai pas outre mesure, j'en suis sûr, si je te dis que j'ai eu le même sentiment ? Oui, pour moi, ce qui est décidé à la majorité est démocratique, oui. Et tu le sais, puisqu'effectivement, nous en avons parlé. Donc, avant de qualifier ma position de "jean-marisme" , s'il te plait, montre-moi que la majorité des allemands voulaient exterminer les juifs, ou montre-moi que la majorité des allemands ont porté Hitler au pouvoir, ou montre-moi que Marine Le Pen va remporter la prochaine élection présidentielle à la majorité des suffrages. Et peut-être que je remettrai en cause également le principe majoritaire. Mais pour l'instant, je ne lis que des suppositions, auxquelles tu précises de plus ne pas croire toi-même.
Tu vois ce que je veux dire, j'en suis sûr : Ne te contente pas, stp, d'expériences de pensée, d'hypothèses à mon avis gratuites, pour révoquer le principe majoritaire. Ou alors, il me semble qu'il faut assumer.
Parce que moi, je suis désolé, je veux bien qu'on désigne le principe majoritaire comme "tyrannie de la majorité" -enfin, "je veux bien", façon de parler, c'est une énorme c...ie qui ne tient pas le route 5 mns, à mon avis- mais si ce n'est pas le principe majoritaire qui prévaut, d'une manière ou d'une autre, c'est le principe minoritaire. Ca se justifie "démocratiquement", ça, le principe minoritaire ?
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Dans un premier temps j’ai été surpris par la richesse de ce que j’étais censé avoir écrit d’après toi, tous ces sous-entendus tellement sous-entendus que je ne les avais pas entendus mais dans un second je fus déçu, trop d’incompréhension de distorsions de mes propos. Lorsque je dis que certaines dictatures furent le fruit de la démocratie, je ne prétends pas qu’elles furent démocratiques dans leur fonctionnement, juste que la démocratie peut accoucher légalement d’une monstruosité, que le peuple peut se vouer au diable sans contrainte.
Juste un petit détail, mais bon ce n’est pas sans importance, Maastricht ce fut la victoire du Oui pas celle du Non :!: . Mais bon le peuple en masse peut se tromper. :D Passionnés les français, dites vous, par ce référendum, oui, mais comment ne pas entendre les raisons invoquées par les uns et les autres, comment ne pas voir les 30% d’abstentions, le peuple ne s’est pas trompé, il ne s’est peut-être pas déplacé. Enfin bien sûr cela dépends du sens que vous donnez à ce mot, que mettez-vous dans le « peuple » ? Je n’ai pas qu’il était illégitime que le peuple participe, le peuple qui participe s’investi dans un parti, une association, une ONG lorsqu’il est actif est légitime. Dans une république il n’est pas illégitime que celui qui agit obtienne de voir ses efforts récompensés.
D’où la question pas simple de Courtial, la république plutôt que la démocratie sans se référer à des concepts, la gouvernance plutôt que le gouvernement ou vice versa, des jeux de mots? Non pas simplement. La république c’est l’attachement à certains concepts tandis que la définition de Roosevelt de la démocratie « Le gouvernement par le peuple et pour le peuple » n’implique-t-elle pas l’idée que certains concepts sont révisables si le peuple le désire ? Comment inscrire cela dans le réel : la désignation totale ou partielle des candidats aux élections législatives par tirage au sort parmi les citoyens, circonscriptions électorales (bon j’admet que cela risque d’être chaud) qui ne soient pas des circonscriptions géographiques mais des appartenances sociales, non, ce ne serait pas impossible mais largement combattu tant cela irait à l’encontre des intérêts particuliers. Une seconde chambre représentative des forces économiques et sociales et des collectivités territoriales…une république ce sont des institutions à servir, une démocratie que l’on y ajoute populaire ou pas c’est un régime au service de…, les institutions avant les hommes qui les servent pour qu’elles soient à leur tour au service des hommes ou bien l’inverse ?
Juste un petit détail, mais bon ce n’est pas sans importance, Maastricht ce fut la victoire du Oui pas celle du Non :!: . Mais bon le peuple en masse peut se tromper. :D Passionnés les français, dites vous, par ce référendum, oui, mais comment ne pas entendre les raisons invoquées par les uns et les autres, comment ne pas voir les 30% d’abstentions, le peuple ne s’est pas trompé, il ne s’est peut-être pas déplacé. Enfin bien sûr cela dépends du sens que vous donnez à ce mot, que mettez-vous dans le « peuple » ? Je n’ai pas qu’il était illégitime que le peuple participe, le peuple qui participe s’investi dans un parti, une association, une ONG lorsqu’il est actif est légitime. Dans une république il n’est pas illégitime que celui qui agit obtienne de voir ses efforts récompensés.
D’où la question pas simple de Courtial, la république plutôt que la démocratie sans se référer à des concepts, la gouvernance plutôt que le gouvernement ou vice versa, des jeux de mots? Non pas simplement. La république c’est l’attachement à certains concepts tandis que la définition de Roosevelt de la démocratie « Le gouvernement par le peuple et pour le peuple » n’implique-t-elle pas l’idée que certains concepts sont révisables si le peuple le désire ? Comment inscrire cela dans le réel : la désignation totale ou partielle des candidats aux élections législatives par tirage au sort parmi les citoyens, circonscriptions électorales (bon j’admet que cela risque d’être chaud) qui ne soient pas des circonscriptions géographiques mais des appartenances sociales, non, ce ne serait pas impossible mais largement combattu tant cela irait à l’encontre des intérêts particuliers. Une seconde chambre représentative des forces économiques et sociales et des collectivités territoriales…une république ce sont des institutions à servir, une démocratie que l’on y ajoute populaire ou pas c’est un régime au service de…, les institutions avant les hommes qui les servent pour qu’elles soient à leur tour au service des hommes ou bien l’inverse ?
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: Professionnels de la profession
Elle n'est pas de Roosevelt, cette définition, mais de Lincoln, discours de Gettysburg.
D'abord, il faut comprendre que toutes ces thèses, ces idées, je me les tape à longueur de journée jusqu'à la nausée, je les connais par coeur. Donc j'ai tendance 1) à les reconnaître assez vite 2) à en être un peu agacé -je le reconnais.
Ce que je constate est très simple : La démocratie s'évanouit. Lentement, elle est vidée de sa substance. En 50 ans, on est passé d'une conception de la démocratie qui ne l'envisageait pas autrement que définie par l'élection des dirigeants et le principe majoritaire, à un ensemble d'institutions ("démocratie libérale") sur le modèle anglo-saxon (séparation des pouvoirs, indépendance de la justice, responsabilisation du gouvernement devant le parlement, etc.) puis, dans un troisième temps, à la "gouvernance". A chacun de comprendre le processus à l'oeuvre et d'envisager ce que pourrait être la suite.
La "démocratie libérale" était déjà un compromis entre la tradition démocratique et la tradition libérale. Mais aujourd'hui nous n'en sommes même plus à la "démocratie libérale". Il est tout à fait possible que tu n'en aies pas pleinement conscience, baptiste -je mets 50 sacs sur "étudiant à Sciences-po", j'ai bon ?- mais ton argument contre les parlements nationaux est tout à fait typique. La démocratie libérale avait tendance à faire prévaloir le législatif sur l'exécutif, et à préconiser la limitation du gouvernement par le Parlement. Mais c'était reconnaître un pouvoir au parlement, justement. Maintenant, non seulement l'exécutif national est sensé avoir de moins en moisn de pouvoir -et c'est très bien comme ça, nous dit-on, ça l'empêche en particulier d'interférer avec le marché- mais même le Parlement n'en a plus -c'est tout le principe de la "politique post-parlementaire" évoquée plus haut.
Et néanmoins, il faut continuer à appeler ça "démocratie", parce que la masse -qui est si bête- elle y tient, à ce mot. Hé bien, oui, je suis désolé, je ne veux froisser personne -en tous cas, pas ici- mais tout cela, pour moi, c'est de la fumisterie de grande envergure. Il n'y a rien de démocratique dans les organisations internationales, il n'y a rien de démocratique ni dans l'Entreprise ni dans le Marché, et il n'y a rien de démocratique dans la "gouvernance".
D'abord, il faut comprendre que toutes ces thèses, ces idées, je me les tape à longueur de journée jusqu'à la nausée, je les connais par coeur. Donc j'ai tendance 1) à les reconnaître assez vite 2) à en être un peu agacé -je le reconnais.
Ce que je constate est très simple : La démocratie s'évanouit. Lentement, elle est vidée de sa substance. En 50 ans, on est passé d'une conception de la démocratie qui ne l'envisageait pas autrement que définie par l'élection des dirigeants et le principe majoritaire, à un ensemble d'institutions ("démocratie libérale") sur le modèle anglo-saxon (séparation des pouvoirs, indépendance de la justice, responsabilisation du gouvernement devant le parlement, etc.) puis, dans un troisième temps, à la "gouvernance". A chacun de comprendre le processus à l'oeuvre et d'envisager ce que pourrait être la suite.
La "démocratie libérale" était déjà un compromis entre la tradition démocratique et la tradition libérale. Mais aujourd'hui nous n'en sommes même plus à la "démocratie libérale". Il est tout à fait possible que tu n'en aies pas pleinement conscience, baptiste -je mets 50 sacs sur "étudiant à Sciences-po", j'ai bon ?- mais ton argument contre les parlements nationaux est tout à fait typique. La démocratie libérale avait tendance à faire prévaloir le législatif sur l'exécutif, et à préconiser la limitation du gouvernement par le Parlement. Mais c'était reconnaître un pouvoir au parlement, justement. Maintenant, non seulement l'exécutif national est sensé avoir de moins en moisn de pouvoir -et c'est très bien comme ça, nous dit-on, ça l'empêche en particulier d'interférer avec le marché- mais même le Parlement n'en a plus -c'est tout le principe de la "politique post-parlementaire" évoquée plus haut.
Et néanmoins, il faut continuer à appeler ça "démocratie", parce que la masse -qui est si bête- elle y tient, à ce mot. Hé bien, oui, je suis désolé, je ne veux froisser personne -en tous cas, pas ici- mais tout cela, pour moi, c'est de la fumisterie de grande envergure. Il n'y a rien de démocratique dans les organisations internationales, il n'y a rien de démocratique ni dans l'Entreprise ni dans le Marché, et il n'y a rien de démocratique dans la "gouvernance".
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Bergame a écrit:Elle n'est pas de Roosevelt, cette définition, mais de Lincoln, discours de Gettysburg.
D'abord, il faut comprendre que toutes ces thèses, ces idées, je me les tape à longueur de journée jusqu'à la nausée, je les connais par coeur. Donc j'ai tendance 1) à les reconnaître assez vite 2) à en être un peu agacé -je le reconnais.
Ce que je constate est très simple : La démocratie s'évanouit.
Autant pour moi, Roosevelt au lieu de Lincoln, désolé il commençait à se faire tard. Je comprends l’irritation de Courtial, avant de répondre on prend la peine de lire. Si tu avais lu tu te serais rendu compte que peu ou prou nous disons la même chose.
Le réel c’est quoi aujourd’hui, une élection dans deux semaines : 35% d’abstentions, 15% de non inscrits, 5% de votes nuls. Les candidats en tête font à peine plus de 25% de ces 45%, soit 12% est ce ainsi que devrait fonctionner une démocratie ?
Oui nous sommes dans un modèle anglo-saxon, un monde holistique dans lequel les luttes pour le pouvoir s’exercent à travers toute une multitude d’organisations supra nationales non démocratiques au sens de la démocratie parlementaire. Dans mon propos il n’y a aucun jugement de valeur, aucun argument contre les parlements nationaux, juste la reconnaissance d’un fait, le parlement important pour nous, celui où se prennent les décisions c’est le parlement européen et c’est pourtant celui qui attire le plus grand nombre d’abstentionnistes.
La vie est une lutte pour le pouvoir, une petite frange de la population éduquée, dont nous faisons parti, à monopolisé ce pouvoir, qu’elle vote à droite ou à gauche c’est la même, ce que les anglo-saxons appellent « les professionnels ». Pour en revenir à la question de Courtial sur les professionnels de la profession et à mon exemple, nous avons quatre candidats qui prétendent représenter les classes populaires, un prof de philo sénateur à vie, une agrégée de sciences économiques (décidément ils sont partout) , un historien déguisé en facteur, et une avocate, où est la puissance tribunicienne de la plèbe ?
Contrairement à ce que tu prétends, tout ceci est démocratique, même si ce n’est voulu que par une minorité car c’est accepté par tous, l’abstention, le vote blanc ou nul valent acceptation. Une démocratie peut-elle fonctionner avec de moins en moins d’électeurs ? L’avenir nous le dira. Aujourd’hui les grands projets sont-ils encore le fait des partis politiques ? Quels mouvements sont porteurs du changement ? Qui négocie au niveau supra national ? Quel est l’autonomie d’un premier ministre Grec et de son parlement (ne nous moquons pas se sera bientôt notre tour) ?
Un conseil, ne te lance pas dans les sciences divinatoires tu n’y as aucun avenir. Etudiant à science po moi? J’ai passé la limite d’âge pour y être accepté comme enseignant.
Nous faisons le même constat, la démocratie disparaît mais nous sommes les acteurs de cette disparition, et alors ! La vie n’est pas figée, la fin de l’histoire n’a pas d’histoire, c’est juste une histoire de l’idée de la fin de l’histoire. Plutôt que de se morfondre il faut agir là où il est possible d’agir, aujourd’hui c’est la gouvernance, et bien faisons avec. Pour faire avancer l’idée de taxation financière mieux vaut ATTAC qu’un parti politique, de même en ce qui concerne l’élaboration des directives environnementales européennes.
Je n’ai pas le pouvoir de changer le monde, juste celui d’agir.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: Professionnels de la profession
Bon, d'abord, le coup du "tu m'as mal lu", il ne va peut-être pas falloir nous le sortir trop souvent quand même. Ce que je dis est simple : Tu récites une doxa. Je comprends que ce soit un peu violent à lire, mais c'est effectivement mon opinion. Tes arguments, je les lis 10 fois par jour, c'est comme ça, j'en suis désolé mais c'est ainsi : A mes yeux, tu récites une doxa. Et néanmoins, évidemment, ça ne t'empêche aucunement de te croire au-dessus de la masse abêtie et de te placer de toi-même dans le camp des gens éduqués. Oui je sais, ça aussi c'est violent à lire, mais que veux-tu : On est toujours l'ignorant de quelqu'un.
Et précisément, vois-tu, le paradoxe, c'est que moi je ne me place pas du côté de la "population éduquée". Précisément, je me place du côté de ce que tu appelles "la masse". Ca t'embête, ça, n'est-ce pas ? Par exemple, tu vois, il se trouve que j'ai du étudier et anayser le Traité constitutionnel pour ma thèse -le Traité constitutionnel, ami, pas le Traité de Maastricht, tu vois de quoi nous parlons ? Hé bien figure-toi que je n'ai pas été transporté d'enthousiasme, et que je pense que la majorité des votants a eu bien raison de voter "non". Que l'opinion du peuple français a été honteusement bafouée -mais "démocratiquement", toujours, ouf !- et que, pourtant, l'évolution récente de l'Union Européenne lui donne raison. Ainsi il semblerait que le "peuple" ait davantage de raison que les "gens éduqués" : Paradoxe, n'est-ce pas ?
Mais en fait, le problème, ce n'est pas d'être éduqué, c'est de savoir pour qui on roule. Apparemment, sur ce point, nous serons d'accord. Or, moi, je le sais : Je roule pour mes compatriotes, le peuple français. Et toi ? En te lisant je peux faire plusieurs hypothèses -mais comme chacun sait, je lis mal : Tu roules pour les entreprises multinationales ? Pour les anglo-saxons (disons les américains, pour faire simple) ? Pour qui roules-tu, baptiste ? Tu n'es pas obligé de me répondre, mais je pense que c'est une question importante à se poser à soi-même, lorsqu'on se pique de penser la politique.
Enfin, dernière chose, et au fond c'est la part la plus intéressante de notre petite diatribe, la conception de la démocratie. Tu dis :
Mais admettons donc. Alors question : Puisqu'apparemment le vote majoritaire n'est pas suffisant pour prendre en compte l'opinion du peuple, de quelle manière faudrait-il donc que le peuple se manifeste pour que tu veuilles bien entendre (toi par exemple) qu'il n'accepte pas ? Tu vois, baptiste, si on pousse ton raisonnement au bout, il ne reste plus d'expression possible du désaccord que par la violence. Car ce que tu dis ici, c'est que tant que le peuple ne manifeste pas en-dehors des institutions son désaccord avec l'orientation de politique générale voulue par une petite minorité -tu l'admets toi-même- hé bien "il consent". Il consent même lorsqu'il vote "non". Il consent même lorsqu'il ne vote pas. En gros, ce que tu dis, c'est que tant que nous n'aurons pas un vrai cataclysme, hé bien on fera comme si le "peuple" est d'accord.
Je crois que ce genre de raisonnement est parfaitement irresponsable. Et tu n'es pas le seul, bien entendu à le tenir. Ici, tu te fais effectivement et seulement le porte-parole de nos élites. Mais c'est parfaitement irresponsable. Quand je constate qu'on en est à dire, comme ça, comme en passant, que ce qui nous attend, c'est le sort de la Grèce : "Riez pas trop, ça nous pend au nez". Mais mon ami, tu crois que ça peut faire rire qui ? Tu mesures ce que tu dis ? La Grèce, elle est actuellement devant deux options : La guerre civile ou la dictature. C'est ça que tu nous souhaites ?
Hé bien moi pas. Alors ne prétends pas que nous disons la même chose, ami. Parce que pour l'instant, on discute, et nous sommes amis. Mais si le scénario que tu nous prévois se réalise, on ne le sera peut-être plus.
La démocratie, c'est la solution non-violente. Guerre civile d'un côté, dictature de l'autre, ce sont les solutions violentes. Nous avons le choix, quoiqu'on en dise. Tu as le choix, baptiste, comme nous tous, tu le dis, tu as le pouvoir d'agir. Mais dans tous les cas, il faudra assumer. Moi, je ne suis certainement pas un acteur de la disparition de la démocratie.
Et précisément, vois-tu, le paradoxe, c'est que moi je ne me place pas du côté de la "population éduquée". Précisément, je me place du côté de ce que tu appelles "la masse". Ca t'embête, ça, n'est-ce pas ? Par exemple, tu vois, il se trouve que j'ai du étudier et anayser le Traité constitutionnel pour ma thèse -le Traité constitutionnel, ami, pas le Traité de Maastricht, tu vois de quoi nous parlons ? Hé bien figure-toi que je n'ai pas été transporté d'enthousiasme, et que je pense que la majorité des votants a eu bien raison de voter "non". Que l'opinion du peuple français a été honteusement bafouée -mais "démocratiquement", toujours, ouf !- et que, pourtant, l'évolution récente de l'Union Européenne lui donne raison. Ainsi il semblerait que le "peuple" ait davantage de raison que les "gens éduqués" : Paradoxe, n'est-ce pas ?
Mais en fait, le problème, ce n'est pas d'être éduqué, c'est de savoir pour qui on roule. Apparemment, sur ce point, nous serons d'accord. Or, moi, je le sais : Je roule pour mes compatriotes, le peuple français. Et toi ? En te lisant je peux faire plusieurs hypothèses -mais comme chacun sait, je lis mal : Tu roules pour les entreprises multinationales ? Pour les anglo-saxons (disons les américains, pour faire simple) ? Pour qui roules-tu, baptiste ? Tu n'es pas obligé de me répondre, mais je pense que c'est une question importante à se poser à soi-même, lorsqu'on se pique de penser la politique.
Enfin, dernière chose, et au fond c'est la part la plus intéressante de notre petite diatribe, la conception de la démocratie. Tu dis :
Il faut donc comprendre que la démocratie repose selon toi sur le principe du "qui ne dit mot consent". Pourquoi pas, admettons. Evidemment, on pourrait te rétorquer que nous en sommes aujourd'hui à un point où même lorsque le peuple s'exprime et dit clairement et majoritairement "non", son opinion n'est pas écoutée : "oui, mais ce "non", qu'est-ce que ça veut dire, et vous voyez bien qu'ils ne sont pas tous d'accord sur la signification de ce "non", et l'abstention patati patata" et autres calembredaines de la même farine.Contrairement à ce que tu prétends, tout ceci est démocratique, même si ce n’est voulu que par une minorité car c’est accepté par tous.
Mais admettons donc. Alors question : Puisqu'apparemment le vote majoritaire n'est pas suffisant pour prendre en compte l'opinion du peuple, de quelle manière faudrait-il donc que le peuple se manifeste pour que tu veuilles bien entendre (toi par exemple) qu'il n'accepte pas ? Tu vois, baptiste, si on pousse ton raisonnement au bout, il ne reste plus d'expression possible du désaccord que par la violence. Car ce que tu dis ici, c'est que tant que le peuple ne manifeste pas en-dehors des institutions son désaccord avec l'orientation de politique générale voulue par une petite minorité -tu l'admets toi-même- hé bien "il consent". Il consent même lorsqu'il vote "non". Il consent même lorsqu'il ne vote pas. En gros, ce que tu dis, c'est que tant que nous n'aurons pas un vrai cataclysme, hé bien on fera comme si le "peuple" est d'accord.
Je crois que ce genre de raisonnement est parfaitement irresponsable. Et tu n'es pas le seul, bien entendu à le tenir. Ici, tu te fais effectivement et seulement le porte-parole de nos élites. Mais c'est parfaitement irresponsable. Quand je constate qu'on en est à dire, comme ça, comme en passant, que ce qui nous attend, c'est le sort de la Grèce : "Riez pas trop, ça nous pend au nez". Mais mon ami, tu crois que ça peut faire rire qui ? Tu mesures ce que tu dis ? La Grèce, elle est actuellement devant deux options : La guerre civile ou la dictature. C'est ça que tu nous souhaites ?
Hé bien moi pas. Alors ne prétends pas que nous disons la même chose, ami. Parce que pour l'instant, on discute, et nous sommes amis. Mais si le scénario que tu nous prévois se réalise, on ne le sera peut-être plus.
La démocratie, c'est la solution non-violente. Guerre civile d'un côté, dictature de l'autre, ce sont les solutions violentes. Nous avons le choix, quoiqu'on en dise. Tu as le choix, baptiste, comme nous tous, tu le dis, tu as le pouvoir d'agir. Mais dans tous les cas, il faudra assumer. Moi, je ne suis certainement pas un acteur de la disparition de la démocratie.
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Bergame a écrit:Je crois ne pas avoir mal lu Courtial. Tu dis : "si 95 % de la population (ce n'était pas le cas, bien sûr) désire les exterminer, la mesure devient "démocratique" parce qu'elle est voulue par la majorité." Je conteste cette "expérience de pensée", ce qui est présenté tout à la fois comme une hypothèse envisageable et comme un énoncé faux. Soyons clair : Si tu ne penses pas que 95% des allemands voulaient l'extermination des juifs, pourquoi alors feins-tu de le supposer ? Excuse-moi, il y a problème.
Et pourquoi y a-t-il problème ? Parce que, tu me reproches d'avoir trouvé mon fasciste, mais je ne t'étonnerai pas outre mesure, j'en suis sûr, si je te dis que j'ai eu le même sentiment ? Oui, pour moi, ce qui est décidé à la majorité est démocratique, oui. Et tu le sais, puisqu'effectivement, nous en avons parlé. Donc, avant de qualifier ma position de "jean-marisme" , s'il te plait, montre-moi que la majorité des allemands voulaient exterminer les juifs, ou montre-moi que la majorité des allemands ont porté Hitler au pouvoir, ou montre-moi que Marine Le Pen va remporter la prochaine élection présidentielle à la majorité des suffrages. Et peut-être que je remettrai en cause également le principe majoritaire. Mais pour l'instant, je ne lis que des suppositions, auxquelles tu précises de plus ne pas croire toi-même.
Tu vois ce que je veux dire, j'en suis sûr : Ne te contente pas, stp, d'expériences de pensée, d'hypothèses à mon avis gratuites, pour révoquer le principe majoritaire. Ou alors, il me semble qu'il faut assumer.
Parce que moi, je suis désolé, je veux bien qu'on désigne le principe majoritaire comme "tyrannie de la majorité" -enfin, "je veux bien", façon de parler, c'est une énorme c...ie qui ne tient pas le route 5 mns, à mon avis- mais si ce n'est pas le principe majoritaire qui prévaut, d'une manière ou d'une autre, c'est le principe minoritaire. Ca se justifie "démocratiquement", ça, le principe minoritaire ?
OK. Compris. Les expériences de pensée, ça ne le fait pas, et mon exemple du nazisme était dans le boiteux- pas- clair, si je peux inventer la catégorie. Tu m'admets quand même à la cession de rattrapage de septembre ?
Bon, alors, je me lance.
J'ai été pour ma part traumatisé, par l'expérience du FIS, en Algérie - et je n'ai pas cité les "révolutions arabes" par hasard, il y a pas que de l'abstraction conceptuelle, dans ce que j'avais indiqué, mais passons...-, le FIS (Front Islamiste de Salut) qui avait clairement annoncé avant les élections que s'il obtenait la majorité et accédait ainsi "démocratiquement" au pouvoir, il n'y aurait ensuite plus d'élections, naturellement, parce qu'il ferait beau voir, quand même, que la Loi d'Allah dépende d'une quelconque consultation électorale. Résultat ? Raz de marée du FIS et décision du pouvoir en place d'annuler les élections.
Faudra-t-il que je m'appuie sur les merveilles de démocratie afghane ou irakienne qui mettent le plus constamment au pouvoir les régimes les plus fascistes ? Ou le Hamas en Palestine ? Des types charmants, vraiment, qui n'ont rien trouvé de plus urgent que balancer des bombes sur des cars de ramassage scolaire, mais les Israeliens n'ont pas trop de mouron à se faire, ils ont déjà tué infiniment plus d'Arabes (comme l'ami Bachar en a tué encore beaucoup plus, mais en l'espèce on trouve des tas de "démocrates" qui trouvent tout cela très bien).
Il faudrait aussi revenir sur les Tigres Tamouls et les choses très inquiétantes qui ont eu lieu au Sri Lanka.
Pour ce qui regarde la philosophie, on ne s'étonnera pas qu'un fasciste dans mon genre cite Platon et l'idée (République , livre que la démocratie a une fâcheuse tendance à conduire à la tyrannie (moi, je lis bien "tyrannie", ce qui n'est pas du tout, de mon point de vue, le totalitarisme, même si on aime aujourd'hui à les confondre, ce genre de tour de passe passe, escamotages de haut vol sont plutôt dans le genre libéral, qui n'est pas du tout mon style, en tant que fasciste).
Mais si je me suis mal exprimé, je vais tenter de le corriger en reformulant autrement ce que j'ai voulu dire. J'ai voulu dire que pour que l'opinion ou le désir du plus grand nombre soit un désir démocratique, encore faut-il que cette masse soit elle-même... euh... démocratique, sinon ça ne marche pas et l'on a que des réflexes ethniques, des pogrommes, des crimes, des abominations, des Hutus sûrs de leur bon droit, etc. Moi, les masses, j'ai rien contre, mais elles ne seront pas démocratiques seulement parce qu'elles sont des masses.
Courtial- Digressi(f/ve)
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Re: Professionnels de la profession
Décidément c’est assez étrange de découvrir en te lisant ce que je sui supposé avoir écrit. Le fait que je décrive le fonctionnement d’un système ne veut pas dire que je l’approuve. Je passe sur les procès d’intention que tu me fais pour aller à l’essentiel : c’est quoi le peuple pour toi? Lorsque l’on parle gouvernement, le peuple c’est le gouverné par opposition au gouvernant. Le peuple s’abstiens à 50% mais dans certains quartiers à 70% . Ce peuple peut être éduqué ou pas, là n’est pas la question, mais peut-être aurais tu gagné à lire les précédents messages au lieu de prétendre savoir sans lire. Il y a des gens éduqués ignorant de la chose publique et des gens peu éduqués au fait de cette même chose publique, pour la majorité (éduqué ou pas) ce n’est qu’affaire d’opinion superficielle lorsque ce n’est pas désintérêt total. Il se trouve que du côté des gouvernants nous n’avons qu’une catégorie celle des éduqués. La professionnalisation du politique s’est faites chez nous sans jamais être évoquée, ce n’est pas le cas partout. Par exemple voici un débat chez nos voisins Suisse.
http://www.hebdo.ch/la_milice_un_mythe_sous_perfusion_76936_.html
Le vote majoritaire n’est pas suffisant pour rendre compte de l’opinion quand ce peuple dans sa totalité vote à moins de 50% , quand une fraction de ce peuple ne vote qu’à moins de 30%, non il n’est pas satisfaisant. Le vote majoritaire tel qu’il est aujourd’hui n’est pas représentatif de la société il favorise la sur représentation d’une catégorie celle des « professionnels » au détriment des citoyens plus ordinaires. Personne ne te demande si tu es d’accord ou pas pour faire parti de la catégorie des « professionnels », le fait est que tu en fais parti par ton éducation, et même si tu devenais facteur tu le resterais.
La gouvernance n’est pas un phénomène de génération spontané, il est né de l’existence de carences, il est né de la nécessité et entre autre mais pas uniquement de faire face à cette professionnalisation. La principale préoccupation des partis politique ce n’est pas de faire avancer des idées mais avoir des élus non pour agir mais pour les faire rémunérer et toucher des subventions.
La gouvernance ce n’est pas le seul fait des lobbys industriels ou financiers. Qui restera un grand acteur de l’écologie Raoul Lemaire ou Eva Joly, qui restera un grand acteur de l’anti capitalisme sauvage Ignacio Ramonet, Bernard Cassen et Susan George ou Besancenot, Mélenchon et Arthaud ? La vie ne procède pas exclusivement du politique institutionnel, l’avenir ne peut-être laissé aux seules mains de gens qui conduisent le nez sur le pare-brise préoccupé par leur réélection, l’action politique peu se concevoir en dehors des partis.
Si tu avais lu mes précédents messages tu aurais pu lire que pour que le politique retrouve une place qu’il a perdu les questions premières à résoudre c’est entre autre celle de la représentativité et celle de la désignation des candidats, la démocratie dans laquelle nous vivons ne survivra que si elle résout ces deux problèmes. Pourquoi la campagne actuelle est si terne, parce que quoi qu’il advienne, la moitié des électeurs ne voteront pas, 23% voterons à gauche peu importe le candidat, 23% voteront à droite peu importe le candidat et ceux qu’il faut convaincre c’est ceux qui feront la balance c'est-à-dire 4%.
Décidément tu es fâché avec la divination , je me suis rendu une fois aux USA, arrivée dimanche après-midi départ lundi après-midi et mes amis m’accusent volontiers de faire de l’anti-américanisme primaire. J’ai beaucoup plus fréquenté les sujets de Léonid et ses successeurs que ceux de Ronald, si j’ai travaillé à l’international c’était pour une entreprise familiale française. Je suis républicain, je défends l’existence d’institutions anti totalitaires au service de tous, d’institutions fondées sur un certain nombre de concepts dont certains supérieurs à une « volonté du peuple » issu des urnes et parfois dictée par une mauvaise humeur passagère.
http://www.hebdo.ch/la_milice_un_mythe_sous_perfusion_76936_.html
Le vote majoritaire n’est pas suffisant pour rendre compte de l’opinion quand ce peuple dans sa totalité vote à moins de 50% , quand une fraction de ce peuple ne vote qu’à moins de 30%, non il n’est pas satisfaisant. Le vote majoritaire tel qu’il est aujourd’hui n’est pas représentatif de la société il favorise la sur représentation d’une catégorie celle des « professionnels » au détriment des citoyens plus ordinaires. Personne ne te demande si tu es d’accord ou pas pour faire parti de la catégorie des « professionnels », le fait est que tu en fais parti par ton éducation, et même si tu devenais facteur tu le resterais.
La gouvernance n’est pas un phénomène de génération spontané, il est né de l’existence de carences, il est né de la nécessité et entre autre mais pas uniquement de faire face à cette professionnalisation. La principale préoccupation des partis politique ce n’est pas de faire avancer des idées mais avoir des élus non pour agir mais pour les faire rémunérer et toucher des subventions.
La gouvernance ce n’est pas le seul fait des lobbys industriels ou financiers. Qui restera un grand acteur de l’écologie Raoul Lemaire ou Eva Joly, qui restera un grand acteur de l’anti capitalisme sauvage Ignacio Ramonet, Bernard Cassen et Susan George ou Besancenot, Mélenchon et Arthaud ? La vie ne procède pas exclusivement du politique institutionnel, l’avenir ne peut-être laissé aux seules mains de gens qui conduisent le nez sur le pare-brise préoccupé par leur réélection, l’action politique peu se concevoir en dehors des partis.
Si tu avais lu mes précédents messages tu aurais pu lire que pour que le politique retrouve une place qu’il a perdu les questions premières à résoudre c’est entre autre celle de la représentativité et celle de la désignation des candidats, la démocratie dans laquelle nous vivons ne survivra que si elle résout ces deux problèmes. Pourquoi la campagne actuelle est si terne, parce que quoi qu’il advienne, la moitié des électeurs ne voteront pas, 23% voterons à gauche peu importe le candidat, 23% voteront à droite peu importe le candidat et ceux qu’il faut convaincre c’est ceux qui feront la balance c'est-à-dire 4%.
Décidément tu es fâché avec la divination , je me suis rendu une fois aux USA, arrivée dimanche après-midi départ lundi après-midi et mes amis m’accusent volontiers de faire de l’anti-américanisme primaire. J’ai beaucoup plus fréquenté les sujets de Léonid et ses successeurs que ceux de Ronald, si j’ai travaillé à l’international c’était pour une entreprise familiale française. Je suis républicain, je défends l’existence d’institutions anti totalitaires au service de tous, d’institutions fondées sur un certain nombre de concepts dont certains supérieurs à une « volonté du peuple » issu des urnes et parfois dictée par une mauvaise humeur passagère.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: Professionnels de la profession
Il y a plusieurs questions qui se chevauchent, alors je vais choisir les miennes.
1) suffit-il qu'une décision recueille l'assentiment du plus grand nombre pour qu'elle soit légitime?
Non, non, et cent fois non! Rousseau a tout dit là dessus, en une phrase : "D'où cent qui veulent un maître ont-ils le droit de décider pour dix qui n'en veulent point?".
2) s'ensuit-il que le suffrage universel soit antidémocratique?
Bien sûr que non, et il faut éviter de triturer les mots dans tous les sens. Si les gouvernants, les édiles, les décideurs ou que sais-je sont arrivés au pouvoir sans être élus, ce n'est pas une démocratie. Précisons que le suffrage universel, cela veut dire que tous les citoyens qui le souhaitent votent. Mais un scrutin peut être démocratique sans être majoritaire. Si par exemple le prince est élu par une assemblée elle-même élue à la proportionnelle, c'est démocratique. Donc, le suffrage universel est une condition nécessaire, mais non suffisante, de la démocratie.
3) l'exemple du référendum sur la constitution européenne est-il un cas de déni de démocratie? oui et non. Non parce que le résultat est que le projet a été rejeté, conformément à la volonté des électeurs. Que ceux-ci aient été souverainistes antiturcs, ou bien altermondialistes anticapitalistes. On ne leur a pas demandé quelle Europe ils souhaitaient, on n'a pas à se faire croire qu'ils l'ont dit. Mais oui quand même, plus subtilement. En réalité, le référendum n'était qu'un vote de confiance. Tous les arguments des partisans du "oui" allaient en ce sens, il était, souvenez-vous, obligatoire de voter oui pour faire avancer la construction européenne. Les gens ont cru qu'on leur demandait de se prononcer sur l'adoption d'un traité, ils l'ont fait, ils ont été dupes, on n'attendait d'eux qu'une caution démocratique pour pouvoir décider sans eux.
4) faut-il redouter la "professionnalisation" de la politique? Là-dessus, je rejoins Courtial, qui évoque judicieusement à mon avis dans son message initial Hannah Arendt et sa dénonciation de la réduction du politique à une technique. Mais on peut aussi poser le problème du point de vue des citoyens : le peuple n'est pas traité en acteur, pas même potentiel, de la vie politique, mais en instrument. Il paraît qu'une campagne électorale est en cours. De quoi parlent les medias? des choix de société qui s'offrent à nous? Non, mais de la façon dont l'instrument peuple réagit à l'actualité, et des sondages qui disent à qui l'instrument peuple profite. Le peuple est ainsi convié à savourer le spectacle de sa propre instrumentalisation.
1) suffit-il qu'une décision recueille l'assentiment du plus grand nombre pour qu'elle soit légitime?
Non, non, et cent fois non! Rousseau a tout dit là dessus, en une phrase : "D'où cent qui veulent un maître ont-ils le droit de décider pour dix qui n'en veulent point?".
2) s'ensuit-il que le suffrage universel soit antidémocratique?
Bien sûr que non, et il faut éviter de triturer les mots dans tous les sens. Si les gouvernants, les édiles, les décideurs ou que sais-je sont arrivés au pouvoir sans être élus, ce n'est pas une démocratie. Précisons que le suffrage universel, cela veut dire que tous les citoyens qui le souhaitent votent. Mais un scrutin peut être démocratique sans être majoritaire. Si par exemple le prince est élu par une assemblée elle-même élue à la proportionnelle, c'est démocratique. Donc, le suffrage universel est une condition nécessaire, mais non suffisante, de la démocratie.
3) l'exemple du référendum sur la constitution européenne est-il un cas de déni de démocratie? oui et non. Non parce que le résultat est que le projet a été rejeté, conformément à la volonté des électeurs. Que ceux-ci aient été souverainistes antiturcs, ou bien altermondialistes anticapitalistes. On ne leur a pas demandé quelle Europe ils souhaitaient, on n'a pas à se faire croire qu'ils l'ont dit. Mais oui quand même, plus subtilement. En réalité, le référendum n'était qu'un vote de confiance. Tous les arguments des partisans du "oui" allaient en ce sens, il était, souvenez-vous, obligatoire de voter oui pour faire avancer la construction européenne. Les gens ont cru qu'on leur demandait de se prononcer sur l'adoption d'un traité, ils l'ont fait, ils ont été dupes, on n'attendait d'eux qu'une caution démocratique pour pouvoir décider sans eux.
4) faut-il redouter la "professionnalisation" de la politique? Là-dessus, je rejoins Courtial, qui évoque judicieusement à mon avis dans son message initial Hannah Arendt et sa dénonciation de la réduction du politique à une technique. Mais on peut aussi poser le problème du point de vue des citoyens : le peuple n'est pas traité en acteur, pas même potentiel, de la vie politique, mais en instrument. Il paraît qu'une campagne électorale est en cours. De quoi parlent les medias? des choix de société qui s'offrent à nous? Non, mais de la façon dont l'instrument peuple réagit à l'actualité, et des sondages qui disent à qui l'instrument peuple profite. Le peuple est ainsi convié à savourer le spectacle de sa propre instrumentalisation.
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amicus plato sed magis amica veritas
euthyphron- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/06/2011
Re: Professionnels de la profession
Euthyphron (et plus ... :-) >
D'où vient que l'exercice professionnel de la politique passe par la communication d'entreprise si ce n'est en tant qu'il est infiltré par l'idéologie des affaires ? Si le pouvoir politique est lui-même ainsi (entre autres moyens) instrumentalisé (paravent de légalité démocratique), qu'en est-il de la distinction traditionnelle entre les professionnels de la politique et le peuple ? Enfin, de quoi parlons-nous alors ici même, au juste, qui puisse constituer autant de voix qui comptent, assurées de ne point verser dans l'anachronisme ?
D'où vient que l'exercice professionnel de la politique passe par la communication d'entreprise si ce n'est en tant qu'il est infiltré par l'idéologie des affaires ? Si le pouvoir politique est lui-même ainsi (entre autres moyens) instrumentalisé (paravent de légalité démocratique), qu'en est-il de la distinction traditionnelle entre les professionnels de la politique et le peuple ? Enfin, de quoi parlons-nous alors ici même, au juste, qui puisse constituer autant de voix qui comptent, assurées de ne point verser dans l'anachronisme ?
Re: Professionnels de la profession
Courtial, ça fait plaisir. :) D'autant plus que je crois que ce sujet constitue un petit abcès entre nous deux. MAis je ne suis pas sûr que nous tombions d'accord pour autant.
Baptiste, tu pratiques trop le double langage pour moi. Tes posts sont parcourus par un pas de deux qui commence à m'ennuyer, je te l'avoue : Tantôt, l'évolution vers la gouvernance et la disparition de la démocratie relève de la nécessité et tu ne prétends que décrire le réel -tu sais ce que c'est le réel, toi, n'est-ce pas ?- tantôt tu t'assumes comme un acteur de cette disparition et tu revendiques le droit d'agir. Il faut choisir : Ou les choses se passent loin au-dessus de la tête des hommes -ce qui n'est rien d'autre qu'une négation de la politique- ou nous en sommes tous les acteurs. Pour l'instant, tu danses d'un pied sur l'autre quand ça t'arrange.
Quant à ta manière de tenter de m'imposer tes catégories sous le prétexte que personne ne me demande mon avis quant à la possibilité de me définir moi-même, je te réponds gentiment, baptiste, que même si personne ne me demande mon avis, tu peux compter sur le fait que je l'exprime, et affirme que personne n'est plus légitime à me définir moi-même que moi.
Incidemment, cette idée a d'ailleurs tout à voir avec la démocratie. Ta façon de prétendre définir autrui autoritairement me semble tout à fait caractéristique.
Maintenant, le principal sujet en cause, à mon avis :
A cet égard, je reprends l'exemple bienvenu de Courtial, qu'on ait une base concrète de réflexion :
Où sont donc ces valeurs qui, apparemment, existent indépendamment de ce qu'en pensent ou en croient les hommes, valables universellement quelques soient les cultures, les religions, les croyances ? Où sont-elles ? Le Ciel des Idées, c'est une métaphore. Si vous affirmez que c'est un objet réel, une portion réelle du ciel réel, alors svp, pointez dessus une lunette astronomique et montrez-le à tous.
Moi je pense qu'il n'y a pas d'autres valeurs que celles auxquelles les hommes croient, pas d'autres valeurs que celles qui orientent effectivement leur comportement. Il est possible que les algériens, ou au moins une majorité d'entre eux, ne croient pas en la même chose que vous. Et alors ? Ils ont tort ?
Ma définition de la démocratie, elle est simple, c'est celle de De Gaulle, je n'en ai jamais trouvé de meilleure : "La démocratie, c'est l'autodétermination".
Accessoirement, euthyphron, dire que le projet de Traité constitutionnel a été rejeté est très discutable. Les citoyens français l'ont rejeté, oui, mais il a été amendé, synthétisé, "ramassé" et adopté au contraire par le Parlement.
Baptiste, tu pratiques trop le double langage pour moi. Tes posts sont parcourus par un pas de deux qui commence à m'ennuyer, je te l'avoue : Tantôt, l'évolution vers la gouvernance et la disparition de la démocratie relève de la nécessité et tu ne prétends que décrire le réel -tu sais ce que c'est le réel, toi, n'est-ce pas ?- tantôt tu t'assumes comme un acteur de cette disparition et tu revendiques le droit d'agir. Il faut choisir : Ou les choses se passent loin au-dessus de la tête des hommes -ce qui n'est rien d'autre qu'une négation de la politique- ou nous en sommes tous les acteurs. Pour l'instant, tu danses d'un pied sur l'autre quand ça t'arrange.
Quant à ta manière de tenter de m'imposer tes catégories sous le prétexte que personne ne me demande mon avis quant à la possibilité de me définir moi-même, je te réponds gentiment, baptiste, que même si personne ne me demande mon avis, tu peux compter sur le fait que je l'exprime, et affirme que personne n'est plus légitime à me définir moi-même que moi.
Incidemment, cette idée a d'ailleurs tout à voir avec la démocratie. Ta façon de prétendre définir autrui autoritairement me semble tout à fait caractéristique.
Maintenant, le principal sujet en cause, à mon avis :
Il ne suffit pas non plus de taper du poing sur la table. Moi, je dis : "Oui". Si tu dis "non", alors expose stp euthyphron ta définition de la démocratie -ou de la légitimité, puisque incidemment tu as assimilé l'une à l'autre, ce qui est compréhensible à condition qu'on s'accorde sur les définitions. Quelle est/sont la/les condition(s) de la légitimité politique, selon toi ?euthyphron a écrit:suffit-il qu'une décision recueille l'assentiment du plus grand nombre pour qu'elle soit légitime? Non, non, et cent fois non!
A cet égard, je reprends l'exemple bienvenu de Courtial, qu'on ait une base concrète de réflexion :
Courtial, où se situe ici exactement le problème ? Si les électeurs algériens ont voté en masse pour le FIS et l'abolition de la démocratie au profit d'un gouvernement théocratique ou que sais-je, c'est leur choix. C'est un choix que tu ne ferais pas sans doute, et moi non plus mais au nom de quoi, au nom de quel critère, au nom de quelle valeur, peut-on dire à autrui : "Le choix que tu fais en pleine conscience est un mauvais choix". Un mauvais choix pour qui ?le FIS (Front Islamiste de Salut) qui avait clairement annoncé avant les élections que s'il obtenait la majorité et accédait ainsi "démocratiquement" au pouvoir, il n'y aurait ensuite plus d'élections, naturellement, parce qu'il ferait beau voir, quand même, que la Loi d'Allah dépende d'une quelconque consultation électorale. Résultat ? Raz de marée du FIS et décision du pouvoir en place d'annuler les élections.
Où sont donc ces valeurs qui, apparemment, existent indépendamment de ce qu'en pensent ou en croient les hommes, valables universellement quelques soient les cultures, les religions, les croyances ? Où sont-elles ? Le Ciel des Idées, c'est une métaphore. Si vous affirmez que c'est un objet réel, une portion réelle du ciel réel, alors svp, pointez dessus une lunette astronomique et montrez-le à tous.
Moi je pense qu'il n'y a pas d'autres valeurs que celles auxquelles les hommes croient, pas d'autres valeurs que celles qui orientent effectivement leur comportement. Il est possible que les algériens, ou au moins une majorité d'entre eux, ne croient pas en la même chose que vous. Et alors ? Ils ont tort ?
Ma définition de la démocratie, elle est simple, c'est celle de De Gaulle, je n'en ai jamais trouvé de meilleure : "La démocratie, c'est l'autodétermination".
Accessoirement, euthyphron, dire que le projet de Traité constitutionnel a été rejeté est très discutable. Les citoyens français l'ont rejeté, oui, mais il a été amendé, synthétisé, "ramassé" et adopté au contraire par le Parlement.
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Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Sur le traité constitutionnel, je n'ai rien dit d'autre. Le traité constitutionnel a été rejeté, et comme le but du jeu n'était pas de transformer le peuple français (et non européen) en acteur de la construction européenne, mais de se donner une caution démocratique, eh bien l'on a fait sans ce que l'on souhaitait faire avec.
Maintenant sur le point de désaccord, mes poings ne sont pas en train de se blesser à force de cogner une pauvre table, ce sont plutôt les bras qui m'en tombent, d'avoir à justifier l'évidence . Et je veux bien essayer de réfléchir sur ce qui constitue la légitimité politique, mais ce n'est pas l'objet, l'objet est seulement de rejeter une énormité. Une majorité qui se trompe n'oblige en rien une minorité à reconnaître qu'elle a raison.
Rien à voir, c'est ce que j'explique aussitôt, avec le suffrage universel, malgré les apparences. Dans le cas du suffrage universel, il s'agit d'appliquer les règles d'un jeu, probablement démocratique en effet. Il ne s'agit pas de s'incliner piteusement devant le grand nombre, mais de prendre une décision à partir des suffrages exprimés. Cette décision est légitime même si elle n'a été votée que par, par exemple, un tiers d'électeurs, si elle est à la majorité relative. Il ne s'agit donc pas d'une idolâtrie des masses. "Légitime" veut dire ici conforme aux règles en usage, comme on dit d'un monarque qu'il est légitime .
Exemple : toi tu devrais, selon ta logique, te demander si les Allemands approuvaient la solution finale ou pas. S'ils étaient majoritaires, la voici justifiée! oui, c'est gros, c'est lourd, c'est même idiot , mais c'est ma négation de cette monstruosité que tu désapprouves. Selon ma logique, la question est très mal posée, puisque la solution finale n'a pas fait l'objet d'un vote.
Et si elle l'avait fait, et si elle avait été approuvée? Ce sont des si. Une mauvais expérience de pensée. Mais il m'est déjà arrivé, toutes proportions gardées , d'avoir honte du résultat d'une élection à laquelle j'avais participé. Je ne me suis pas pour autant senti obligé d'approuver ce résultat, j'ai fait avec, c'est-à-dire que j'ai eu honte d'être Français, et, confidence pour confidence, cela dure depuis cinq ans et je suis pressé que cela s'arrête.
Maintenant sur le point de désaccord, mes poings ne sont pas en train de se blesser à force de cogner une pauvre table, ce sont plutôt les bras qui m'en tombent, d'avoir à justifier l'évidence . Et je veux bien essayer de réfléchir sur ce qui constitue la légitimité politique, mais ce n'est pas l'objet, l'objet est seulement de rejeter une énormité. Une majorité qui se trompe n'oblige en rien une minorité à reconnaître qu'elle a raison.
Rien à voir, c'est ce que j'explique aussitôt, avec le suffrage universel, malgré les apparences. Dans le cas du suffrage universel, il s'agit d'appliquer les règles d'un jeu, probablement démocratique en effet. Il ne s'agit pas de s'incliner piteusement devant le grand nombre, mais de prendre une décision à partir des suffrages exprimés. Cette décision est légitime même si elle n'a été votée que par, par exemple, un tiers d'électeurs, si elle est à la majorité relative. Il ne s'agit donc pas d'une idolâtrie des masses. "Légitime" veut dire ici conforme aux règles en usage, comme on dit d'un monarque qu'il est légitime .
Exemple : toi tu devrais, selon ta logique, te demander si les Allemands approuvaient la solution finale ou pas. S'ils étaient majoritaires, la voici justifiée! oui, c'est gros, c'est lourd, c'est même idiot , mais c'est ma négation de cette monstruosité que tu désapprouves. Selon ma logique, la question est très mal posée, puisque la solution finale n'a pas fait l'objet d'un vote.
Et si elle l'avait fait, et si elle avait été approuvée? Ce sont des si. Une mauvais expérience de pensée. Mais il m'est déjà arrivé, toutes proportions gardées , d'avoir honte du résultat d'une élection à laquelle j'avais participé. Je ne me suis pas pour autant senti obligé d'approuver ce résultat, j'ai fait avec, c'est-à-dire que j'ai eu honte d'être Français, et, confidence pour confidence, cela dure depuis cinq ans et je suis pressé que cela s'arrête.
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euthyphron- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 01/06/2011
Re: Professionnels de la profession
Je ne revendique pas le droit d’agir, je prétends qu’il s’agit d’une obligation. Lorsque le monde politique, lorsque les partis de gouvernement (nous en avons la preuve chaque jour pendant cette campagne ) n’ont pour point de vue qu’un horizon à très court terme, lorsque les partis protestataires s’engluent dans des luttes intestines stériles, alors agir dans d’autres cadres devient nécessaire. Je ne danse pas d’un pied sur l’autre, je regrette la situation actuelle mais ne me résigne pas pour autant à n’être que spectateur. Tu nous as expliqué ton parcours professionnel international et ton travail de thèse, ce n’est pas moi qui te défini c’est toi, tu n’appartiens pas au mondes des ouvriers qui ont quitté l’école sans diplôme, cela ne te donne aucun droit supplémentaire, juste cela fait que tu ne vois pas et ne verra jamais le monde d’un même point de vue qu’eux.
Le politique depuis les grecs c’est simplement l’art de vivre ensemble, faire d’une somme d’individualités, d’une multiplicité une unité. La démocratie est un ensemble de valeurs qui ne se réfère pas uniquement à des formes de gouvernement comme tu prétends le faire, il désigne aussi « une forme de société ayant pour valeur la liberté et l'égalité, c'est l'usage qu'en fait Alexis de Tocqueville, qui s'attache plus aux dimensions culturelles qu'au système politique en lui-même, ou de manière plus générale encore, un ensemble de valeurs, d'idéaux et de principes politiques, sociaux ou culturels. » Pour reprendre les exemples avancés par Euthryphon et Courtial comment justifies tu que la comptabilisation des votes se fasse sur la base des suffrages exprimé et pas sur la base des électeurs en âge et condition de voter ? Bien sûr, ils n’avaient qu’à aller voter, suis-je bête :idea: , mais voila il ne le font pas, pourquoi ?
L’art de vivre ensemble ne passe pas obligatoirement par le fait que toutes les décisions soient renvoyées au suffrage universel. Tu cites De Gaulle et l’autodétermination, ce mot qu’il ressuscita à contrario de la politique menée depuis la fin de la guerre pour régler un problème particulier autrement insoluble, il s’agissait en l’occurrence d’une expression visant à répondre à une question de circonstance, il ne s'agissait pas de donner un choix au peuple algérien ce choix était connu depuis longtemps mais de trouver une issue opposable. Mais bon allons pour l’autodétermination, pour en revenir à l’exemple du FIS de Courtial, la question posée au peuple algérien n’était pas celle de l’autodétermination et la réponse encore moins. La question était d’élire une chambre démocratiquement pour la première fois et la réponse du peuple algérien s’adressait au FLN, c’était « casse toi », le peuple algérien n’avait pas été interrogé sur un changement de régime. Ces deux exemples justifient pleinement que je maintienne mon point de vue, à savoir que l’ensemble des valeurs et principes d’une démocratie sont supérieurs à un vote majoritaire de circonstance.
Je rejoins Euthryphron lorsqu’il dit que le suffrage universel n’est plus acteur potentiel mais simple instrument, la professionnalisation de la politique et la disparition des idéologies en sont les causes principales, la montée en puissance de la gouvernance simplement la conséquence. La campagne actuelle n’en est malheureusement que la pire illustration. Le remède pour moi passe par une réforme de la représentation nationale et de celle de la désignation des candidats, mais je me répète.
Le politique depuis les grecs c’est simplement l’art de vivre ensemble, faire d’une somme d’individualités, d’une multiplicité une unité. La démocratie est un ensemble de valeurs qui ne se réfère pas uniquement à des formes de gouvernement comme tu prétends le faire, il désigne aussi « une forme de société ayant pour valeur la liberté et l'égalité, c'est l'usage qu'en fait Alexis de Tocqueville, qui s'attache plus aux dimensions culturelles qu'au système politique en lui-même, ou de manière plus générale encore, un ensemble de valeurs, d'idéaux et de principes politiques, sociaux ou culturels. » Pour reprendre les exemples avancés par Euthryphon et Courtial comment justifies tu que la comptabilisation des votes se fasse sur la base des suffrages exprimé et pas sur la base des électeurs en âge et condition de voter ? Bien sûr, ils n’avaient qu’à aller voter, suis-je bête :idea: , mais voila il ne le font pas, pourquoi ?
L’art de vivre ensemble ne passe pas obligatoirement par le fait que toutes les décisions soient renvoyées au suffrage universel. Tu cites De Gaulle et l’autodétermination, ce mot qu’il ressuscita à contrario de la politique menée depuis la fin de la guerre pour régler un problème particulier autrement insoluble, il s’agissait en l’occurrence d’une expression visant à répondre à une question de circonstance, il ne s'agissait pas de donner un choix au peuple algérien ce choix était connu depuis longtemps mais de trouver une issue opposable. Mais bon allons pour l’autodétermination, pour en revenir à l’exemple du FIS de Courtial, la question posée au peuple algérien n’était pas celle de l’autodétermination et la réponse encore moins. La question était d’élire une chambre démocratiquement pour la première fois et la réponse du peuple algérien s’adressait au FLN, c’était « casse toi », le peuple algérien n’avait pas été interrogé sur un changement de régime. Ces deux exemples justifient pleinement que je maintienne mon point de vue, à savoir que l’ensemble des valeurs et principes d’une démocratie sont supérieurs à un vote majoritaire de circonstance.
Je rejoins Euthryphron lorsqu’il dit que le suffrage universel n’est plus acteur potentiel mais simple instrument, la professionnalisation de la politique et la disparition des idéologies en sont les causes principales, la montée en puissance de la gouvernance simplement la conséquence. La campagne actuelle n’en est malheureusement que la pire illustration. Le remède pour moi passe par une réforme de la représentation nationale et de celle de la désignation des candidats, mais je me répète.
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: Professionnels de la profession
Il n'y a certainement pas de disparition des idéologies, il y a disparition des conflits idéologiques, et ce, essentiellement au niveau des élites. Comme tu l'as dit, baptiste, droite et gauche disent et font peu ou prou la même chose aujourd'hui. Cela signifie simplement que l'une des idéologies en concurrence a gagné et occupe le terrain faute d'adversaires. A cet égard, la "gouvernance" n'est rien de plus en effet qu'une étape supplémentaire dans l'application du programme libéral.
En revanche, cette union idéologique des élites n'a pas pris dans la "masse", comme tu l'appelles. Et ce à quoi nous assistons, c'est, à mon avis, à un divorce croissant entre des élites qui sont engagés dans le programme libéral, et une population qui, dans sa grande majorité, ne s'y reconnaît pas. Et je pense qu'elle n'a pas tort, et qu'elle fait preuve de beaucoup de raison : Elle voit bien, et de plus en plus clairement, que le libéralisme est d'abord une doctrine du gouvernement des élites par les élites pour les élites.
Euthyphron, ce que tu dis n'a rien d'évident. Rien du tout, c'est même un énorme problème.
Bon, d'abord, je constate que tu ne soutiens pas l'idée des valeurs universelles et réelles. Ta proposition est plus modeste :
1) Les règles en usage ici et maintenant ne sont pas en usage ailleurs et en d'autres temps. Ca, c'est une évidence, mais une évidence qu'il est, je crois, toujours bon de rappeler. La question, à partir de là, c'est : Y a-t-il des règles meilleures que d'autres, et si oui, selon quels critères, et comment le justifier ? En gros, c'est la question de Guéant, n'est-ce pas : Y a-t-il des civilisations supérieures aux autres ?
2) Qu'est-ce qui fait que des règles soient en usage, ici, et qu'elles ne le soient pas ailleurs ? Qu'est-ce que ça veut dire, au fond, "en usage" ? Je fais vite, mais je pense que nous en serons d'accord : Irréductiblement, ça signifie qu'elles sont acceptées par ceux qui jouent.
Autrement dit, supposons que demain, euthyphron, la majorité des individus, par exemple en France, n'acceptent plus ce "jeu"-ci et ces "règles"-ci, et en veulent d'autres ? Pour le coup, c'est une expérience de pensée, mais qui réfère à l'exemple de Courtial : Un peuple qui décide démocratiquement de mettre fin à ces institutions démocratiques que tu appelles toi-même un "jeu", destiné à rien d'autre qu'à conférer une "caution démocratique". Hé bien je prétends que si la majorité des individus ne voulaient plus, en France, des institutions démocratiques, il n'y aurait plus de démocratie. Parce que si l'on maintenait néanmoins ces institutions contre la volonté de la majorité, le régime qui procéderait ainsi n'aurait plus rien de démocratique. Et les institutions qu'il maintiendrait ainsi par la force ou la manipulation seraient complètement vidées de leur significations. On pourrait avoir des simulacres d'élection, on pourrait conserver une justice indépendante de l'exécutif, une constitution même, ce n'aurait plus rien d'une démocratie. Tiens, un peu comme les "démocraties populaires" d'Europe de l'Est.
Et d'ailleurs, le régime qui a annulé les élections en Algérie et a ainsi allumé le feu de la guerre civile, ce régime était-il lui-même démocratique ? Ou ne ressemblait-il pas un peu tout de même à une dictature militaire ?
Maintenant, ton exemple, euthyphron. Oui, bien sûr, tu gagnes 10.000 points godwin. Mais je crois que tu as raison de poser le problème, parce que précisément, la conception de la démocratie dont nous sommes tributaires aujourd'hui dans le monde occidental dérive directement de cet évènement et de l'interpération qui en est faite -c'est ce que j'en pense en tous cas. Après Auschwitz, nous ne pouvons plus penser pareil.
Mais je récuse l'"expérience de pensée", c'est trop facile. Au prétexte que, peut-être, si ça se trouve, les allemands ont majoritairement voulu la Shoah, nous, occidentaux, devrions nous contenter éternellement de ce que tu appelles toi-même un "jeu" démocratique ? Sans même la possibilité de le critiquer et de réclamer autre chose, parce que dans ce cas, on tombe dans le populisme, la démagogie, la démolatrie, le fascisme, et j'en passe ? Ben voyons.
Première chose : Le paradoxe du régime nazi, c'est qu'on l'interprète comme une dérive du principe majoritaire alors que c'est exactement l'inverse : Hitler a été porté au pouvoir par une minorité d'électeurs d'une part, et par le jeu des institutions "démocratiques" d'autre part. Il n'a pas été élu Chancelier, il a été nommé. Précisément, si la constitution de Weimar avait prévu que le chef de l'exécutif soit élu à la majorité des électeurs au suffrage universel, et non pas issu d'une coalition parlementaire et nommé par le président -qui n'était pas plus élu au suffrage universel, d'ailleurs- Hitler n'aurait pas été Chancelier en 33. La Ve République française n'a pas d'autre origine que ce constat -parce que De Gaulle, lui, il savait que Hitler n'avait pas été élu selon un principe majoritaire. Ce qu'on ne dit jamais -et pourquoi ne le dit-on pas ?- c'est que ce n'est pas un régime démocratique à la française qui a porté Hitler au pouvoir, c'est précisément un régime démocratique à la britannique, un régime parlementaire.
Seconde chose : Hitler n'a certes pas été élu à la majorité des suffrages, mais il apparaît nénamoins (on n'a pas de chiffres) qu'il a bénéficié d'un soutien grandissant de la population allemande de 33 à 38-39, et sans doute jusqu'en 42-43. Et je risque d'être choquant, j'en suis désolé par avance : Je pense qu'il y a de bonnes raisons à cela. J'entends, je précise : Des raisons subjectives -je ne sais pas ce que sont des raisons objectives- pour un allemand moyen, de la "masse", de l'époque. Il faut voir ce qu'est l'Allemagne en 33 et ce qu'elle est en 38. Du point de vue de ce citoyen allemand moyen, je suis désolé, moi je peux comprendre que ça ait pu apparaître stupéfiant -et une bénédiction. Non, le soutien à Hitler ne m'apparaît pas incompréhensible -ce qui ne signifie pas que je le partage, bien évidemment. D'autant que les Allemands, ou une certaine partie d'entre eux, aspirent à la revanche, c'est indéniable. Bien sûr, la politique de Hitler a un coût caché, la guerre. Mais les allemands de l'époque sont-ils pacifistes ? Je ne le crois pas.
Maintenant, dire que Hitler bénéficiait d'un soutien important de la majorité du peuple allemand, sans doute même très majoritaire à certains moments, et formuler des hypothèses susceptibles d'expliquer ce soutien, ce n'est pas dire que la majorité du peuple allemand voulait la Shoah. Et personnellement, je n'ai lu aucun historien de la période qui affirme cela, ou même le suggère -vous oui ? Il y a là une croyance, une sorte de postulat jamais examiné, qui flotte dans les consciences et oriente l'analyse politique, mais qui ne résiste pas à l'examen. Ce n'est sans doute pas totalement une coïncidence si les nazis ont mis tant de soin à cacher à leur propre population la vocation des camps d'extermination. Je constate que l'ouverture des camps a été une surprise et une horreur, et je pense que personne -ou vraiment bien peu de monde- n'avait seulement envisagé cette abomination parce que, tout simplement, c'est inenvisageable, inimaginable. Que la majorité du peuple allemand ait pu vouloir la Shoah me semble une reconstruction a posteriori. Et qui plus est, pas très digne, une accusation inique, qui ne repose sur aucun élément. Mais évidemment, si on a si peu confiance en l'homme, autant ne pas lui laisser trop décider par lui-même.
Cette croyance a donc beaucoup servi à justifier des régimes "démocratiques" qui sont paradoxalement les mêmes que celui qui a permis à Hitler d'arriver au pouvoir. Et elle continue d'y servir, comme on le voit par exemple dans cette discussion, alors même que ces régimes sont de moins en moins démocratiques -ce que, pourtant, chacun constate. Je suis désolé, moi je trouve cela préoccupant. Et oui, je pense qu'il est plus que temps d'oeuvrer à "déconstruire" toute cette rhétorique accumulée pendant 50 ans.
En revanche, cette union idéologique des élites n'a pas pris dans la "masse", comme tu l'appelles. Et ce à quoi nous assistons, c'est, à mon avis, à un divorce croissant entre des élites qui sont engagés dans le programme libéral, et une population qui, dans sa grande majorité, ne s'y reconnaît pas. Et je pense qu'elle n'a pas tort, et qu'elle fait preuve de beaucoup de raison : Elle voit bien, et de plus en plus clairement, que le libéralisme est d'abord une doctrine du gouvernement des élites par les élites pour les élites.
Euthyphron, ce que tu dis n'a rien d'évident. Rien du tout, c'est même un énorme problème.
Bon, d'abord, je constate que tu ne soutiens pas l'idée des valeurs universelles et réelles. Ta proposition est plus modeste :
Très bien. Conséquences :"Légitime" veut dire ici conforme aux règles en usage, comme on dit d'un monarque qu'il est légitime
1) Les règles en usage ici et maintenant ne sont pas en usage ailleurs et en d'autres temps. Ca, c'est une évidence, mais une évidence qu'il est, je crois, toujours bon de rappeler. La question, à partir de là, c'est : Y a-t-il des règles meilleures que d'autres, et si oui, selon quels critères, et comment le justifier ? En gros, c'est la question de Guéant, n'est-ce pas : Y a-t-il des civilisations supérieures aux autres ?
2) Qu'est-ce qui fait que des règles soient en usage, ici, et qu'elles ne le soient pas ailleurs ? Qu'est-ce que ça veut dire, au fond, "en usage" ? Je fais vite, mais je pense que nous en serons d'accord : Irréductiblement, ça signifie qu'elles sont acceptées par ceux qui jouent.
Autrement dit, supposons que demain, euthyphron, la majorité des individus, par exemple en France, n'acceptent plus ce "jeu"-ci et ces "règles"-ci, et en veulent d'autres ? Pour le coup, c'est une expérience de pensée, mais qui réfère à l'exemple de Courtial : Un peuple qui décide démocratiquement de mettre fin à ces institutions démocratiques que tu appelles toi-même un "jeu", destiné à rien d'autre qu'à conférer une "caution démocratique". Hé bien je prétends que si la majorité des individus ne voulaient plus, en France, des institutions démocratiques, il n'y aurait plus de démocratie. Parce que si l'on maintenait néanmoins ces institutions contre la volonté de la majorité, le régime qui procéderait ainsi n'aurait plus rien de démocratique. Et les institutions qu'il maintiendrait ainsi par la force ou la manipulation seraient complètement vidées de leur significations. On pourrait avoir des simulacres d'élection, on pourrait conserver une justice indépendante de l'exécutif, une constitution même, ce n'aurait plus rien d'une démocratie. Tiens, un peu comme les "démocraties populaires" d'Europe de l'Est.
Et d'ailleurs, le régime qui a annulé les élections en Algérie et a ainsi allumé le feu de la guerre civile, ce régime était-il lui-même démocratique ? Ou ne ressemblait-il pas un peu tout de même à une dictature militaire ?
Maintenant, ton exemple, euthyphron. Oui, bien sûr, tu gagnes 10.000 points godwin. Mais je crois que tu as raison de poser le problème, parce que précisément, la conception de la démocratie dont nous sommes tributaires aujourd'hui dans le monde occidental dérive directement de cet évènement et de l'interpération qui en est faite -c'est ce que j'en pense en tous cas. Après Auschwitz, nous ne pouvons plus penser pareil.
Mais je récuse l'"expérience de pensée", c'est trop facile. Au prétexte que, peut-être, si ça se trouve, les allemands ont majoritairement voulu la Shoah, nous, occidentaux, devrions nous contenter éternellement de ce que tu appelles toi-même un "jeu" démocratique ? Sans même la possibilité de le critiquer et de réclamer autre chose, parce que dans ce cas, on tombe dans le populisme, la démagogie, la démolatrie, le fascisme, et j'en passe ? Ben voyons.
Première chose : Le paradoxe du régime nazi, c'est qu'on l'interprète comme une dérive du principe majoritaire alors que c'est exactement l'inverse : Hitler a été porté au pouvoir par une minorité d'électeurs d'une part, et par le jeu des institutions "démocratiques" d'autre part. Il n'a pas été élu Chancelier, il a été nommé. Précisément, si la constitution de Weimar avait prévu que le chef de l'exécutif soit élu à la majorité des électeurs au suffrage universel, et non pas issu d'une coalition parlementaire et nommé par le président -qui n'était pas plus élu au suffrage universel, d'ailleurs- Hitler n'aurait pas été Chancelier en 33. La Ve République française n'a pas d'autre origine que ce constat -parce que De Gaulle, lui, il savait que Hitler n'avait pas été élu selon un principe majoritaire. Ce qu'on ne dit jamais -et pourquoi ne le dit-on pas ?- c'est que ce n'est pas un régime démocratique à la française qui a porté Hitler au pouvoir, c'est précisément un régime démocratique à la britannique, un régime parlementaire.
Seconde chose : Hitler n'a certes pas été élu à la majorité des suffrages, mais il apparaît nénamoins (on n'a pas de chiffres) qu'il a bénéficié d'un soutien grandissant de la population allemande de 33 à 38-39, et sans doute jusqu'en 42-43. Et je risque d'être choquant, j'en suis désolé par avance : Je pense qu'il y a de bonnes raisons à cela. J'entends, je précise : Des raisons subjectives -je ne sais pas ce que sont des raisons objectives- pour un allemand moyen, de la "masse", de l'époque. Il faut voir ce qu'est l'Allemagne en 33 et ce qu'elle est en 38. Du point de vue de ce citoyen allemand moyen, je suis désolé, moi je peux comprendre que ça ait pu apparaître stupéfiant -et une bénédiction. Non, le soutien à Hitler ne m'apparaît pas incompréhensible -ce qui ne signifie pas que je le partage, bien évidemment. D'autant que les Allemands, ou une certaine partie d'entre eux, aspirent à la revanche, c'est indéniable. Bien sûr, la politique de Hitler a un coût caché, la guerre. Mais les allemands de l'époque sont-ils pacifistes ? Je ne le crois pas.
Maintenant, dire que Hitler bénéficiait d'un soutien important de la majorité du peuple allemand, sans doute même très majoritaire à certains moments, et formuler des hypothèses susceptibles d'expliquer ce soutien, ce n'est pas dire que la majorité du peuple allemand voulait la Shoah. Et personnellement, je n'ai lu aucun historien de la période qui affirme cela, ou même le suggère -vous oui ? Il y a là une croyance, une sorte de postulat jamais examiné, qui flotte dans les consciences et oriente l'analyse politique, mais qui ne résiste pas à l'examen. Ce n'est sans doute pas totalement une coïncidence si les nazis ont mis tant de soin à cacher à leur propre population la vocation des camps d'extermination. Je constate que l'ouverture des camps a été une surprise et une horreur, et je pense que personne -ou vraiment bien peu de monde- n'avait seulement envisagé cette abomination parce que, tout simplement, c'est inenvisageable, inimaginable. Que la majorité du peuple allemand ait pu vouloir la Shoah me semble une reconstruction a posteriori. Et qui plus est, pas très digne, une accusation inique, qui ne repose sur aucun élément. Mais évidemment, si on a si peu confiance en l'homme, autant ne pas lui laisser trop décider par lui-même.
Cette croyance a donc beaucoup servi à justifier des régimes "démocratiques" qui sont paradoxalement les mêmes que celui qui a permis à Hitler d'arriver au pouvoir. Et elle continue d'y servir, comme on le voit par exemple dans cette discussion, alors même que ces régimes sont de moins en moins démocratiques -ce que, pourtant, chacun constate. Je suis désolé, moi je trouve cela préoccupant. Et oui, je pense qu'il est plus que temps d'oeuvrer à "déconstruire" toute cette rhétorique accumulée pendant 50 ans.
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...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Professionnels de la profession
Tu vas voir que c'est comme d'habitude, nous allons finir par nous trouver d'accord, une fois que nous aurons compris de quoi nous parlons, ou plus précisément quelle est exactement la question.
Cela tourne manifestement autour de la notion de légitimité. J'ai employé ce mot, compte tenu du contexte, dans un sens qui n'en fait pas un synonyme de juste. "Légitime" qualifie un pouvoir obtenu selon les règles, et, j'ajouterai, aisément reconnaissable. En ce sens, Hitler était légitime.
Mais la légitimité ainsi définie ne saurait être un absolu. Je soutiens pour ma part qu'il est tout à fait permis moralement de contester les actes ou les décisions d'un pouvoir légitime. Et toi?
De plus, il faut assumer les conséquences de notre définition de la légitimité : elle n'implique aucunement la démocratie. Les légitimistes n'étaient pas des démocrates, mais pas non plus des gens qui ignoraient le sens des mots.
Mais la démocratie a ses prétentions. Le mot a cessé de désigner une forme de gouvernement parmi d'autres, pour signifier une valeur, à partir de laquelle on se pense autorisé à mesurer le degré de légitimité d'un pouvoir. Je dis bien "degré": dès lors que "démocratie" devient le signifiant d'un idéal, nous ne faisons qu'en être plus ou moins éloignés. Autrement dit, en ce sens, la démocratie est toujours un combat. Evidemment, nous retrouvons la confusion sémantique induite par le terme de "légitimité", qui prend cette fois un sens moral.
Revenons à ton expérience de pensée à partir de ces prémisses. La majorité décide qu'elle ne veut plus vivre en démocratie. Problème de légitimité au sens 1 : alors qu'un roi peut abdiquer, on ne peut dire la même chose d'un peuple. Problème aisément résolu : le tyran désiré est légitimé par l'élection qui l'a installé au pouvoir. Les puissances étrangères sauront qu'il est leur véritable interlocuteur, comme ce fut le cas avec Hitler.
Problème de légitimité au sens 2 : je combattrai ce tyran sans remords, dans la mesure de mes faibles capacités, et je ne me sentirai en rien coupable d'être en cela minoritaire.
Et si le tyran est empêché d'arriver au pouvoir, et que l'on organise de nouvelles élections jusqu'à ce que le bon peuple accepte enfin la démocratie? Les risques de guerre civile rendent plus complexe le problème de la légitimité au sens 1, disons qu'en cas de guerre civile la légitimité 1 n'est rétablie qu'avec la paix, et au profit du vainqueur. En cas de vacance de la légitimité 1, les questions de légitimité 2 sont insolubles. Disons concrètement qu'invalider le résultat d'élections au motif qu'il est déplaisant est évidemment antidémocratique.
Ces contradictions de la démocratie tendent à prouver que nous aurions bien tort de nous contenter du suffrage universel, et d'y voir l'essence de cet idéal appelé "démocratie", quand il n'en est qu'une règle du jeu bien adaptée.
Cela tourne manifestement autour de la notion de légitimité. J'ai employé ce mot, compte tenu du contexte, dans un sens qui n'en fait pas un synonyme de juste. "Légitime" qualifie un pouvoir obtenu selon les règles, et, j'ajouterai, aisément reconnaissable. En ce sens, Hitler était légitime.
Mais la légitimité ainsi définie ne saurait être un absolu. Je soutiens pour ma part qu'il est tout à fait permis moralement de contester les actes ou les décisions d'un pouvoir légitime. Et toi?
De plus, il faut assumer les conséquences de notre définition de la légitimité : elle n'implique aucunement la démocratie. Les légitimistes n'étaient pas des démocrates, mais pas non plus des gens qui ignoraient le sens des mots.
Mais la démocratie a ses prétentions. Le mot a cessé de désigner une forme de gouvernement parmi d'autres, pour signifier une valeur, à partir de laquelle on se pense autorisé à mesurer le degré de légitimité d'un pouvoir. Je dis bien "degré": dès lors que "démocratie" devient le signifiant d'un idéal, nous ne faisons qu'en être plus ou moins éloignés. Autrement dit, en ce sens, la démocratie est toujours un combat. Evidemment, nous retrouvons la confusion sémantique induite par le terme de "légitimité", qui prend cette fois un sens moral.
Revenons à ton expérience de pensée à partir de ces prémisses. La majorité décide qu'elle ne veut plus vivre en démocratie. Problème de légitimité au sens 1 : alors qu'un roi peut abdiquer, on ne peut dire la même chose d'un peuple. Problème aisément résolu : le tyran désiré est légitimé par l'élection qui l'a installé au pouvoir. Les puissances étrangères sauront qu'il est leur véritable interlocuteur, comme ce fut le cas avec Hitler.
Problème de légitimité au sens 2 : je combattrai ce tyran sans remords, dans la mesure de mes faibles capacités, et je ne me sentirai en rien coupable d'être en cela minoritaire.
Et si le tyran est empêché d'arriver au pouvoir, et que l'on organise de nouvelles élections jusqu'à ce que le bon peuple accepte enfin la démocratie? Les risques de guerre civile rendent plus complexe le problème de la légitimité au sens 1, disons qu'en cas de guerre civile la légitimité 1 n'est rétablie qu'avec la paix, et au profit du vainqueur. En cas de vacance de la légitimité 1, les questions de légitimité 2 sont insolubles. Disons concrètement qu'invalider le résultat d'élections au motif qu'il est déplaisant est évidemment antidémocratique.
Ces contradictions de la démocratie tendent à prouver que nous aurions bien tort de nous contenter du suffrage universel, et d'y voir l'essence de cet idéal appelé "démocratie", quand il n'en est qu'une règle du jeu bien adaptée.
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Re: Professionnels de la profession
"Légitime" veut dire beaucoup de choses, c'est l'un des objets de ma thèse d'essayer d'y voir clair. Mais il y a une chose de sûre, à mon avis, c'est que la légitimité est toujours reconnue.
Tu dis par exemple :
Tu suggères également qu'il existe un second sens, moral, au concept de légitimité. Nous pourrions proposer la définition suivante : "Légitime" qualifie un pouvoir qui s'exerce dans le respect de certaines valeurs.
Si cette définition reflète à peu près ce que tu entends, j'ajouterais : Certes, c'est une autre définition possible. Mais il ne s'agit jamais de n'importe quelles valeurs. Il s'agit de valeurs qui sont elles-mêmes reconnues comme légitimes. Ex : Les valeurs démocratiques légitiment les institutions démocratiques qui elles-mêmes légitiment les dirigeants occidentaux, mais elles ne le font que parce que ces valeurs sont elles-mêmes reconnues comme légitimes.
Tu vois l'idée : Existe-t-il une légitimité en soi ? Il faudrait alors montrer qu'il existe par exemple des valeurs en soi, des valeurs réelles et universelles. Il faudrait montrer que tous les hommes partagent une conception commune de ce qui est légitime. Et en fait, on n'aurait toujours rien fait d'autre que de montrer que les valeurs légitimes, irréductiblement, sont reconnues comme telles -mais qu'elles sont reconnues comme telles par la totalité des hommes.
Donc : La légitimité peut s'appliquer à beaucoup d'objets différents et référer à beaucoup d'usage, mais une chose est sûre : Elle est toujours reconnue. Simplement, si on ne part pas du principe qu'il existe des valeurs universelles, alors il faut se résoudre à admettre que ces valeurs ne sont pas reconnues comme légitimes par la totalité des hommes.
Donc nouvelle question : Lorsqu'un dit qu'un pouvoir X est légitime, on signifie qu'il est reconnu comme légitime. Mais reconnu par qui ? C'est là que me semble être tout le problème de la légitimité.
Et je prétends qu'irréductiblement, il n'y a pas d'autre manière de répondre à cette question que : "Par le peuple". Quoique ce concept désigne. Les uns parleront d'"individus", les autres de "masse", d'autres encore de "public", etc. peu importe. Ce qui est sûr, c'est que dans tout système politique, défini par le concept de pouvoir, il y a des dirigeants et des dirigés, des dominants et des dominés, des gouvernants et des gouvernés -autrement il n'y a pas de pouvoir, et il n'y a pas de politique. Or, lorsque l'on parle de "légitimité", on parle de la légitimité des premiers : Les dirigeants, les dominants, les gouvernants. La question est donc : Si la légitimité des premiers est reconnue, par qui l'est-elle ? Je réponds donc : Irréductiblement, par les seconds.
Alors à partir de là, Courtial l'a déjà dit : Comment qualifier le "peuple" ? Et surtout, comment le quantifier ? Comment savoir que le "peuple" considère que telle "règle du jeu" est légitime et que telle autre ne l'est pas. Et à partir du moment où la volonté générale n'existe pas, quelle part du peuple ? Car le "peuple", finalement, ce n'est qu'un concept, un ensemble mal défini. Je réponds : Certes, mais ce n'est pas un concept différent de tous les concepts en sciences sociales et politiques. Dans ces disciplines, le problème est toujours le même : Passer du qualitatif au quantitatif. Or, en sciences sociales et politiques, on résoud communément ce problème méthodologique ainsi : On recueille l'opinion. Et là, coïncidence miraculeuse : C'est exactement ce que font les procédures électorales et les référendums. Ca a même un nom : "L'opinion publique".
Que la "légitimité" se confonde si souvent avec la "démocratie" n'est donc pas seulement un problème culturaliste : C'est aussi un problème logique. Il se trouve que la méthode démocratique de choix des dirigeants par le "peuple" et de consultation du "peuple" sur les grandes options politiques coïncide avec la meilleure méthodologie pour évaluer la légitimité des dirigeants et des décisions -voire la seule. Encore faut-il bien comprendre de quelle "démocratie" on parle ici : Il ne s'agit pas d'institutions du type séparation des pouvoirs, etc. Il ne s'agit pas même de "règles du jeu". Il ne s'agit évidemment pas de "gouvernance". Il s'agit du principe de l'élection et/ou du référendum, avec la base électorale la plus large possible (= suffrage universel) et la possibilité d'un véritable choix.
C'est en cela que je dis que si la démocratie définit le pouvoir légitime dans les sociétés occidentales -et c'est le cas, incidemment- ce n'est pas n'importe quelle démocratie, c'est la démocratie électorale et référendaire. Or, la "gouvernance" signifie d'abord l'évanouissement de cette démocratie-là. Elle se caractérise en particulier par la multiplication des pouvoirs non-élus -comme déjà mentionné. Je dis donc que la "gouvernance" est une évolution vers un type de régime politique illégitime, parce que non-reconnu comme tel par le "peuple". C'est ce qu'il faut entendre quand je parle de divorce entre les "élites" et le "peuple". Et je constate d'ailleurs que le problème de la "légitimité démocratique" est au coeur de la littérature sur la "gouvernance".
Tu dis par exemple :
Je réponds : Admettons, c'est l'une des définitions possibles. Mais dans tous les cas, il ne s'agit jamais de n'importe quelles règles. Il s'agit de règles qui sont elles-mêmes reconnues comme légitimes. Ex : Les institutions démocratiques légitiment les dirigeants, mais elles ne le font que parce que ces institutions sont elles-mêmes reconnues comme légitimes."Légitime" qualifie un pouvoir obtenu selon les règles
Tu suggères également qu'il existe un second sens, moral, au concept de légitimité. Nous pourrions proposer la définition suivante : "Légitime" qualifie un pouvoir qui s'exerce dans le respect de certaines valeurs.
Si cette définition reflète à peu près ce que tu entends, j'ajouterais : Certes, c'est une autre définition possible. Mais il ne s'agit jamais de n'importe quelles valeurs. Il s'agit de valeurs qui sont elles-mêmes reconnues comme légitimes. Ex : Les valeurs démocratiques légitiment les institutions démocratiques qui elles-mêmes légitiment les dirigeants occidentaux, mais elles ne le font que parce que ces valeurs sont elles-mêmes reconnues comme légitimes.
Tu vois l'idée : Existe-t-il une légitimité en soi ? Il faudrait alors montrer qu'il existe par exemple des valeurs en soi, des valeurs réelles et universelles. Il faudrait montrer que tous les hommes partagent une conception commune de ce qui est légitime. Et en fait, on n'aurait toujours rien fait d'autre que de montrer que les valeurs légitimes, irréductiblement, sont reconnues comme telles -mais qu'elles sont reconnues comme telles par la totalité des hommes.
Donc : La légitimité peut s'appliquer à beaucoup d'objets différents et référer à beaucoup d'usage, mais une chose est sûre : Elle est toujours reconnue. Simplement, si on ne part pas du principe qu'il existe des valeurs universelles, alors il faut se résoudre à admettre que ces valeurs ne sont pas reconnues comme légitimes par la totalité des hommes.
Donc nouvelle question : Lorsqu'un dit qu'un pouvoir X est légitime, on signifie qu'il est reconnu comme légitime. Mais reconnu par qui ? C'est là que me semble être tout le problème de la légitimité.
Et je prétends qu'irréductiblement, il n'y a pas d'autre manière de répondre à cette question que : "Par le peuple". Quoique ce concept désigne. Les uns parleront d'"individus", les autres de "masse", d'autres encore de "public", etc. peu importe. Ce qui est sûr, c'est que dans tout système politique, défini par le concept de pouvoir, il y a des dirigeants et des dirigés, des dominants et des dominés, des gouvernants et des gouvernés -autrement il n'y a pas de pouvoir, et il n'y a pas de politique. Or, lorsque l'on parle de "légitimité", on parle de la légitimité des premiers : Les dirigeants, les dominants, les gouvernants. La question est donc : Si la légitimité des premiers est reconnue, par qui l'est-elle ? Je réponds donc : Irréductiblement, par les seconds.
Alors à partir de là, Courtial l'a déjà dit : Comment qualifier le "peuple" ? Et surtout, comment le quantifier ? Comment savoir que le "peuple" considère que telle "règle du jeu" est légitime et que telle autre ne l'est pas. Et à partir du moment où la volonté générale n'existe pas, quelle part du peuple ? Car le "peuple", finalement, ce n'est qu'un concept, un ensemble mal défini. Je réponds : Certes, mais ce n'est pas un concept différent de tous les concepts en sciences sociales et politiques. Dans ces disciplines, le problème est toujours le même : Passer du qualitatif au quantitatif. Or, en sciences sociales et politiques, on résoud communément ce problème méthodologique ainsi : On recueille l'opinion. Et là, coïncidence miraculeuse : C'est exactement ce que font les procédures électorales et les référendums. Ca a même un nom : "L'opinion publique".
Que la "légitimité" se confonde si souvent avec la "démocratie" n'est donc pas seulement un problème culturaliste : C'est aussi un problème logique. Il se trouve que la méthode démocratique de choix des dirigeants par le "peuple" et de consultation du "peuple" sur les grandes options politiques coïncide avec la meilleure méthodologie pour évaluer la légitimité des dirigeants et des décisions -voire la seule. Encore faut-il bien comprendre de quelle "démocratie" on parle ici : Il ne s'agit pas d'institutions du type séparation des pouvoirs, etc. Il ne s'agit pas même de "règles du jeu". Il ne s'agit évidemment pas de "gouvernance". Il s'agit du principe de l'élection et/ou du référendum, avec la base électorale la plus large possible (= suffrage universel) et la possibilité d'un véritable choix.
C'est en cela que je dis que si la démocratie définit le pouvoir légitime dans les sociétés occidentales -et c'est le cas, incidemment- ce n'est pas n'importe quelle démocratie, c'est la démocratie électorale et référendaire. Or, la "gouvernance" signifie d'abord l'évanouissement de cette démocratie-là. Elle se caractérise en particulier par la multiplication des pouvoirs non-élus -comme déjà mentionné. Je dis donc que la "gouvernance" est une évolution vers un type de régime politique illégitime, parce que non-reconnu comme tel par le "peuple". C'est ce qu'il faut entendre quand je parle de divorce entre les "élites" et le "peuple". Et je constate d'ailleurs que le problème de la "légitimité démocratique" est au coeur de la littérature sur la "gouvernance".
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Re: Professionnels de la profession
Si l'on parle toujours bien de la légitimité au sens 1, au sens juridico-politique disons, un pouvoir légitime est forcément reconnu tel, je veux bien, mais sans qu'il n'y ait eu d'acte de reconnaissance. En réalité, le pouvoir est reconnu légitime dès lors qu'il est reconnaissable. C'est la tradition qui fonde sa légitimité.
C'est parce que le roi est sacré qu'il est légitime, car tant qu'il ne l'est pas on ne sait pas qui est le roi. Henri IV a conquis sa légitimité non pas à coups de sondages d'opinion le plaçant loin devant la Ligue, mais en se faisant sacrer. Le peuple ne demande rien d'autre tant qu'on en reste à cette question de la légitimité au sens 1. Ce qu'attend le peuple, c'est de savoir à qui obéir, qui lui garantisse la stabilité dont il a besoin. C'est pourquoi les questions de légitimité ne se posent véritablement qu'en temps de crise (révolutions, guerres civiles, crise dynastique, etc.).
Ceci, note-le bien, conduit à la même conclusion que toi quant aux formes de pouvoir que tu dénonces.
Ne pas oublier non plus que si l'on glisse vers le sens 2 du mot "légitimité", moi du moins je maintiens qu'il peut être parfaitement légitime de désobéir aux puissances légitimes, et je ne demande pas pour cela la permission au peuple. Là dessus tu ne t'es pas prononcé.
C'est parce que le roi est sacré qu'il est légitime, car tant qu'il ne l'est pas on ne sait pas qui est le roi. Henri IV a conquis sa légitimité non pas à coups de sondages d'opinion le plaçant loin devant la Ligue, mais en se faisant sacrer. Le peuple ne demande rien d'autre tant qu'on en reste à cette question de la légitimité au sens 1. Ce qu'attend le peuple, c'est de savoir à qui obéir, qui lui garantisse la stabilité dont il a besoin. C'est pourquoi les questions de légitimité ne se posent véritablement qu'en temps de crise (révolutions, guerres civiles, crise dynastique, etc.).
Ceci, note-le bien, conduit à la même conclusion que toi quant aux formes de pouvoir que tu dénonces.
Ne pas oublier non plus que si l'on glisse vers le sens 2 du mot "légitimité", moi du moins je maintiens qu'il peut être parfaitement légitime de désobéir aux puissances légitimes, et je ne demande pas pour cela la permission au peuple. Là dessus tu ne t'es pas prononcé.
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