MARIE-MADELEINE
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MARIE-MADELEINE
.
Le récit suivant est parfaitement autobiographique.
Seul le nom de la personne en question a été inventé.
C'est de loin mon exercice littéraire préféré.
Il a été écrite à quatre mains avec mon ami intime, Victor Digiorgi.
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C'était au début des années 2000.
Google commençait à faire des ravages dans le business des moteurs de recherche, et l'idée de chercher à savoir ce qu'était devenue Marie-Madeleine me vint tout à coup à l'esprit.
Je taperais son nom et je verrais bien ce que ça donnerait.
Marie-Madeleine, quand j'avais sept ans, je la connaissais déjà depuis toujours. Elle avait sept ans aussi...
Les jours de chaleur, en été, nous faisions voguer des petits bateaux en papier dans la rigole de la rue que le cantonnier inondait pour la nettoyer au balai de broussailles. Oh, il y a longtemps...
Nous grandissions en même temps, presque toujours ensemble. Nous étions voisins.
Nous nous échangions des images d'animaux trouvées dans les emballages de tablette de chocolat. Ou des timbres. Ou des capsules de bouteilles. À la plage, nous bâtissions des châteaux ou sculptions des poissons dans le sable mouillé.
Les heures passaient sans que nous ne nous rendions compte que c'était des semaines, des mois et des années qui lentement s'additionnaient. Huit ans. Neuf ans. Dix ans.
Encore enfants tous les deux, nous allions aux rampes de mise à l'eau des barques du petit port pour lancer des galets en ricochets sur l'eau.
Nos jeux se complexifiaient peu à peu. Ça a été la pêche à la ligne, puis la gymnastique aux agrès de la plage. Et puis aussi la lecture.
Notre tout premier livre, à elle comme à moi, ça a été Don Quichotte, le doigt sur la ligne, suivant en même temps le récit, en lisant à voix haute et en éclatant de rire aux mêmes passages, le saladier-chapeau, Sancho balancé en l'air, etc.
Onze ans. Douze ans. Treize ans.
Dans la fenêtre de Google, je tapai « Marie-Madeleine Bianquis » et appuyai sur Enter. Je ne sais plus si je fus surpris ou si ne le fus pas. Je sais simplement que son nom m'est apparu immédiatement, en haut de la liste, en bleu, et que j'ai cliqué dessus.
Nos jeux se complexifiaient. Un jour, le hasard a voulu que nous nous retrouvions seuls chez elle un après-midi de chaleur. Comment tout s'est enchaîné alors, je ne saurais pas l'expliquer. Nous ne savions rien ni l'un ni l'autre de ce qui nous arrivait et qui nous prenait par surprise elle et moi. Tout s'est enchaîné sans que nous n'ayons un seul instant l'impression de pouvoir y faire quoi que ce soit. L'instinct le plus sauvage nous est carrément tombé sur le corps. Un vertige. Un firmament. Un gouffre. Un ouragan bienheureux. Des myriades d'étoiles au fond des yeux.
Mon ordinateur n'était pas très rapide. Un texte s'est affiché lentement. Au bout de deux ou trois secondes, j'ai vu qu'il y était bien question de ma Marie-Madeleine à moi. Une minuscule image est apparue tout en bas du texte. Je ne voyais pas ce que c'était. La flèche de ma souris s'est transformée en main quand je l'ai placée dessus... J'ai cliqué.
Nous avons eu par la suite quelques fois le même vertige et vu les mêmes étoiles, mais Marie-Madeleine m'a dit un jour que c'était trop dangereux pour elle. Les jeunes filles étaient plus instruites de la vie, plus conscientes des dangers que les jeunes garçons. À cette époque, la pilule n'existait pas. Les préservatifs étaient introuvables. L'avortement était extrêmement dangereux. Le risque était trop grand pour celles qui avaient « fauté », comme on disait à cette époque. Pour une « fille-mère », comme on disait aussi, c'était l'enfer assuré toute la vie. La morale bien pensante régnait de façon tyrannique sur les corps et les esprits.
Nous sommes donc passés aux caresses, à la tendresse et à l'amitié la plus pure qui ait existé de mémoire d'amour courtois.
Mais un jour, nous avions à peu près quinze ans, les adultes sont tous devenus fous.
Il a fallu fuir. Elle a suivi ses parents. J'ai suivi les miens.
Nous ne nous sommes plus jamais revus...
Une photo se construisit lentement sur mon écran. D'abord les boucles de ses cheveux. Puis l'arc de ses sourcils. L'arrondi de ses oreilles. La limpidité de ses yeux. Le galbe de son nez. Le sourire de sa bouche. Un peu de son épaule Et sa gorge devinée.
Comme une aube, une aurore, un rayonnement, un soleil.
Une douceur infinie.
Marie-Madeleine Bianquis (†)
Et, me lacérant les tripes, m'arrachant le cœur, me déchirant le corps, tout à coup, là, sous mes yeux, entre parenthèses, un poignard...
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Le récit suivant est parfaitement autobiographique.
Seul le nom de la personne en question a été inventé.
C'est de loin mon exercice littéraire préféré.
Il a été écrite à quatre mains avec mon ami intime, Victor Digiorgi.
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C'était au début des années 2000.
Google commençait à faire des ravages dans le business des moteurs de recherche, et l'idée de chercher à savoir ce qu'était devenue Marie-Madeleine me vint tout à coup à l'esprit.
Je taperais son nom et je verrais bien ce que ça donnerait.
Marie-Madeleine, quand j'avais sept ans, je la connaissais déjà depuis toujours. Elle avait sept ans aussi...
Les jours de chaleur, en été, nous faisions voguer des petits bateaux en papier dans la rigole de la rue que le cantonnier inondait pour la nettoyer au balai de broussailles. Oh, il y a longtemps...
Nous grandissions en même temps, presque toujours ensemble. Nous étions voisins.
Nous nous échangions des images d'animaux trouvées dans les emballages de tablette de chocolat. Ou des timbres. Ou des capsules de bouteilles. À la plage, nous bâtissions des châteaux ou sculptions des poissons dans le sable mouillé.
Les heures passaient sans que nous ne nous rendions compte que c'était des semaines, des mois et des années qui lentement s'additionnaient. Huit ans. Neuf ans. Dix ans.
Encore enfants tous les deux, nous allions aux rampes de mise à l'eau des barques du petit port pour lancer des galets en ricochets sur l'eau.
Nos jeux se complexifiaient peu à peu. Ça a été la pêche à la ligne, puis la gymnastique aux agrès de la plage. Et puis aussi la lecture.
Notre tout premier livre, à elle comme à moi, ça a été Don Quichotte, le doigt sur la ligne, suivant en même temps le récit, en lisant à voix haute et en éclatant de rire aux mêmes passages, le saladier-chapeau, Sancho balancé en l'air, etc.
Onze ans. Douze ans. Treize ans.
Dans la fenêtre de Google, je tapai « Marie-Madeleine Bianquis » et appuyai sur Enter. Je ne sais plus si je fus surpris ou si ne le fus pas. Je sais simplement que son nom m'est apparu immédiatement, en haut de la liste, en bleu, et que j'ai cliqué dessus.
Nos jeux se complexifiaient. Un jour, le hasard a voulu que nous nous retrouvions seuls chez elle un après-midi de chaleur. Comment tout s'est enchaîné alors, je ne saurais pas l'expliquer. Nous ne savions rien ni l'un ni l'autre de ce qui nous arrivait et qui nous prenait par surprise elle et moi. Tout s'est enchaîné sans que nous n'ayons un seul instant l'impression de pouvoir y faire quoi que ce soit. L'instinct le plus sauvage nous est carrément tombé sur le corps. Un vertige. Un firmament. Un gouffre. Un ouragan bienheureux. Des myriades d'étoiles au fond des yeux.
Mon ordinateur n'était pas très rapide. Un texte s'est affiché lentement. Au bout de deux ou trois secondes, j'ai vu qu'il y était bien question de ma Marie-Madeleine à moi. Une minuscule image est apparue tout en bas du texte. Je ne voyais pas ce que c'était. La flèche de ma souris s'est transformée en main quand je l'ai placée dessus... J'ai cliqué.
Nous avons eu par la suite quelques fois le même vertige et vu les mêmes étoiles, mais Marie-Madeleine m'a dit un jour que c'était trop dangereux pour elle. Les jeunes filles étaient plus instruites de la vie, plus conscientes des dangers que les jeunes garçons. À cette époque, la pilule n'existait pas. Les préservatifs étaient introuvables. L'avortement était extrêmement dangereux. Le risque était trop grand pour celles qui avaient « fauté », comme on disait à cette époque. Pour une « fille-mère », comme on disait aussi, c'était l'enfer assuré toute la vie. La morale bien pensante régnait de façon tyrannique sur les corps et les esprits.
Nous sommes donc passés aux caresses, à la tendresse et à l'amitié la plus pure qui ait existé de mémoire d'amour courtois.
Mais un jour, nous avions à peu près quinze ans, les adultes sont tous devenus fous.
Il a fallu fuir. Elle a suivi ses parents. J'ai suivi les miens.
Nous ne nous sommes plus jamais revus...
Une photo se construisit lentement sur mon écran. D'abord les boucles de ses cheveux. Puis l'arc de ses sourcils. L'arrondi de ses oreilles. La limpidité de ses yeux. Le galbe de son nez. Le sourire de sa bouche. Un peu de son épaule Et sa gorge devinée.
Comme une aube, une aurore, un rayonnement, un soleil.
Une douceur infinie.
Marie-Madeleine Bianquis (†)
Et, me lacérant les tripes, m'arrachant le cœur, me déchirant le corps, tout à coup, là, sous mes yeux, entre parenthèses, un poignard...
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Dernière édition par Emmanuel le Dim 11 Nov 2018 - 20:51, édité 1 fois
Emmanuel- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1321
Date d'inscription : 05/08/2018
Re: MARIE-MADELEINE
(ce n'est pas la première fois que tu postes la photographie de cette femme)
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 8364
Date d'inscription : 31/10/2009
Re: MARIE-MADELEINE
neopilina a écrit:(ce n'est pas la première fois que tu postes la photographie de cette femme)
En effet, c'est la deuxième ...
Anecdote. Le jour où j'ai eu effectué cette recherche, ma femme a senti que quelque chose s'était bouleversé en moi. Elle s'est approchée et a vu la photo de cette femme. Elle a compris mon bouleversement à la vue de la petite croix placée entre parenthèse au bas du portrait.
Par la suite, de temps en temps, elle m'a cité de cours passages des consolations de Sénèque à Marcia.
Lorsqu'elle a décidé de se suicider, elle m'a répété chaque jour pendant un mois un passage de ces consolations.
Elle est morte en m'adressant le même sourire que Marie-Madeleine.
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Emmanuel- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1321
Date d'inscription : 05/08/2018
Re: MARIE-MADELEINE
.
Sénèque. Consolations à Marcia.
.
Préambule. Sénèque veut consoler Marcia ; il la traitera en femme de courage
Exemples opposés de Livie et d'Octavie
Exhortations du philosophe Aréus à Livie
Une douleur exagérée n'est pas conforme au voeu de la nature
Insouciance de l'homme malgré son expérience quotidienne du malheur
Fragilité des biens humains. La vie n'est qu'une longue souffrance
Fragilité de l'homme
Marcia n'a pas le droit de se plaindre de son sort
Exemples de pères et de mères ayant subi des épreuves semblables
La vie comparée à un voyage à Syracuse
Procédés de consolation
Éloge de la mort
Brièveté de la vie. Sa durée est invariablement fixée pour chaque individu
La mort du fils de Marcia a peut-être été un bonheur pour lui
Les choses parfaites durent peu. Éloge de Métilius
L'âme de Métilius jouit, auprès de ses ancêtres, de la béatitude céleste
Prosopopée de Crémutius Cordius
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Sénèque. Consolations à Marcia.
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Préambule. Sénèque veut consoler Marcia ; il la traitera en femme de courage
Exemples opposés de Livie et d'Octavie
Exhortations du philosophe Aréus à Livie
Une douleur exagérée n'est pas conforme au voeu de la nature
Insouciance de l'homme malgré son expérience quotidienne du malheur
Fragilité des biens humains. La vie n'est qu'une longue souffrance
Fragilité de l'homme
Marcia n'a pas le droit de se plaindre de son sort
Exemples de pères et de mères ayant subi des épreuves semblables
La vie comparée à un voyage à Syracuse
Procédés de consolation
Éloge de la mort
Brièveté de la vie. Sa durée est invariablement fixée pour chaque individu
La mort du fils de Marcia a peut-être été un bonheur pour lui
Les choses parfaites durent peu. Éloge de Métilius
L'âme de Métilius jouit, auprès de ses ancêtres, de la béatitude céleste
Prosopopée de Crémutius Cordius
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Emmanuel- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1321
Date d'inscription : 05/08/2018
Re: MARIE-MADELEINE
.
1963
Une chevelure rousse. Flamme.
Des yeux verts. Émeraude.
Une voix à ensorceler tous les sorciers du monde.
Un corps à aimanter tous les regards des mâles.
Nous dansions, serrés, enlacés, suffoqués par nous-mêmes.
Georgia on my mind et Ray Charles avaient cessé depuis
longtemps et nous dansions encore.
Dans le silence absolu d'un temps voulu par la foudre.
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2018, le 19 juillet à 10h00
La loi québécoise sur l'aide à mourir dans la dignité est une bénédiction.
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1963
Une chevelure rousse. Flamme.
Des yeux verts. Émeraude.
Une voix à ensorceler tous les sorciers du monde.
Un corps à aimanter tous les regards des mâles.
Nous dansions, serrés, enlacés, suffoqués par nous-mêmes.
Georgia on my mind et Ray Charles avaient cessé depuis
longtemps et nous dansions encore.
Dans le silence absolu d'un temps voulu par la foudre.
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2018, le 19 juillet à 10h00
La loi québécoise sur l'aide à mourir dans la dignité est une bénédiction.
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Emmanuel- Digressi(f/ve)
- Nombre de messages : 1321
Date d'inscription : 05/08/2018
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