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Nature et Causa sui

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Message par Bergame Lun 23 Mai 2016 - 14:20

hks a écrit:
Peux-tu préciser à propos de cette remise en question ?

Je ne suis pas certain de pouvoir préciser.

Mais je vois un même principe d'individuation dans le dit "inerte" que dans le vivant. Un principe qui n'est pas mécanique au sens ou dans le mécanique l 'effet subit la cause , il est passif. La cause y est extérieure à l' effet lequel n'a pas d intériorité à faire valoir. Dans le mécanisme l'effet est entièrement  le produit des causes extérieures. Il n'y a pas d'intériorité.
Les intériorité sont des composés d'éléments qui à leur tout sont causés par des causes extérieures.


Pour qu'il y ait un effet qui ne soit pas entièrement causé par des causes extérieures, il faut que l'intérieur soit sa cause et que donc il s'auto génère .

Ce qui veux dire que la Nature est comme le dit Spinoza causa sui, elle s'autogénère  ...mais  elle ne produit que des auto-générations.
Le principe d'individuation est antérieur à tous les autres.

Il y a chez Spinoza et Leibniz une autre manière de penser que chez Descartes et Newton ( mécanistes )
On a pu les dire animistes ou vitalistes si l'on veut.

Je tombe là-dessus. C'est très étonnant, comme argument, cela. Je suppose qu'il y a quelque chose de davantage fondé là-dessous, mais en l'état, ca n'est, à mes yeux, qu'un problème grammatical. Tu dis "La Nature" comme s'il s'agissait d'une entité unique. Et comme cette unique entité, manifestement, se perpétue, tu en déduis qu'elle s'auto-génère. Et de cette déduction, tu conclus que "le principe d'individuation" est premier.

Je trouve que l'enchainement est étonnant.

En première approximation, "La Nature", ce n'est pas une entité. C'est soit un concept, soit un ensemble indénombrable d'entités, qui ont pour caractéristique commune d'être vivantes. Or, en tant qu'être vivants, ces entités ne s'auto-génèrent pas (pour la très grande majorité d'entre eux) : Elles se reproduisent, génération après génération.

Ensuite, ca me semble bizarre de concevoir la causa sui comme "auto-génération". Je ne suis pas spécialiste, mais il me semblait qu'il s'agissait plutôt "d'auto-création", ce qui n'est pas la même chose.

Enfin, si on se place dans une perspective animiste, du pronom singulier "la", déduire que le principe d'individuation est premier me semble curieux. Dans une perspective animiste, la nature est, précisément, plurielle.

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Message par neopilina Lun 23 Mai 2016 - 15:27

( Je comprends très bien ce rapprochement entre Spinoza et Leibniz, je l'ai fait de mon coté, et cette distinction d'avec Descartes, Newton, et consorts que je qualifierais de " linéaristes ", un tentation qui peut devenir péché, et que je connais bien aussi. Mais comme je suis moi-même, encore plus profondément, " animiste ", " globaliste ", " immanentiste ", rien à craindre. C'est une réaction à chaud. J'essayerais de faire mieux, d'où les parenthèses. )

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Message par hks Lun 23 Mai 2016 - 18:58

bergame a écrit:Tu dis "La Nature" comme s'il s'agissait d'une entité unique.
C'est le minimum requis par Spinoza (une seule substance). Maintenant il faut rendre compte de ce que Spinoza appelle des modes. Des modifications de la substance unique. Là sans être spécialiste de Spinoza on peut comprendre
C' est après que les difficultés interviennent.

Pour moi Spinoza n'est pas très clair sur les modes.  Le fait est que nolens volens il parle d'individus
Individués  mais comment ? De quelle nature sont ces individus?
 Comment comprendre individus ET substance indivisible ?
Je ne vois pas de question de grammaire... je sais bien que c'est à la mode depuis Wittgenstein mais là je ne vois pas  .

Si la question de l' individuation était facile elle serait élucidée depuis longtemps et ce n'est pas le cas.
On a le concept d' apeiron
Anaximandre décrit l'apeiron comme seule cause du développement aussi organisé de notre univers. C'est en affirmant l'《infinité 》de ce dernier qu'il décrit l'apeiron comme étant un élément invisible à l'œil humain déterminant tout ce en quoi consiste notre monde et ce, depuis toujours et jusqu'à l'infini.
Est-ce  Spinoza ?...peut être.... disons que c'est proche .
Marc Halevy  dit que Spinoza connait Anaximandre et de plus le Eyn sof (Kaballiste )... sous réserves mais bref


L'infini/ indivisible  s'exprime (causa sui)
..........

Là dessus chez Spinoza intervient le conatus.(concept très fort chez lui ).
L' effort pour persévérer dans son être.
 Donc de qui ? De quelle genre d' entités ?
Je ne vois pas comment évacuer une intériorité .
Un lieu quel qu'il soit de l'effort.
Une localisation spatiale si on est dans l'attribut étendue ET une localisation "mentale"(ou psychique ) si on est dans l'attribut pensée.

..................

comme "auto-génération". Je ne suis pas spécialiste, mais il me semblait qu'il s'agissait plutôt "d'auto-création", ce qui n'est pas la même chose.
Nature et Causa sui 4221839403  je ne saisis pas la nuance ...mais suis disposé à en saisir une Nature et Causa sui 2101236583

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Message par Bergame Mar 24 Mai 2016 - 11:43

Mon intervention n'était pas très claire, j'y reviens. En fait, pour moi, tu essaies de concilier deux positions a priori difficilement conciliables : Un individualisme méthodologique qui, chez toi, me semble assez marqué, et une pensée spinoziste qui, autant que je la comprenne, me semble plutôt une pensée du Tout, si je puis dire -animiste en effet si tu veux. Et j'ai le sentiment que cette aporie, tu prétends la résoudre en disant que :
- En somme, le Tout est Un (= la Nature est une entité, jusque là pas de problème)
- Le Tout s'auto-génère... (là, je reviens sur ce que j'ai dit : Il semble qu'effectivement, pour Spinoza, la causa sui soit auto-engendrée plutôt qu'auto-créée, nature naturante et naturée )
- ...mais surtout il engendre des auto-générations (là, il me semble en revanche que c'est contradictoire)
- Donc le principe d'individuation est premier (du coup, la conclusion me semble erronée).

Je suppose, je comprends que l'individuation est liée, chez Spinoza, au conatus. Mais qu'elle est à comprendre alors comme un "processus", comme un mouvement, dont l'individualité serait la fin. Qu'y a-t-il au "début" de ce mouvement ? Certes, l'être, mais cet être, donc, n'est pas individualisé -il ne l'est pas encore. Par conséquent, ce n'est pas le principe d'individuation qui est premier, c'est au contraire, quoi, l'indifférenciation -le Tout.
Du reste, il me semble que pour Spinoza, toute chose est engagée dans cet effort de persévérer dans son être, et pas seulement les êtres vivants.

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Message par hks Mar 24 Mai 2016 - 14:24

'Bergame a écrit:Par conséquent, ce n'est pas le principe d'individuation qui est premier, c'est au contraire, quoi, l'indifférenciation -le Tout.
Manifestement le tout (la substance indivisible infinie ) n'est pas indifférenciée. Chez Spinoza elle ne l'est pas.
Il y a deux différenciations
1) les attributs
2) les modifications des attributs.

Je ne dis pas que le principe d' individuation est "au début" mais qu'il est antérieur à d'autres énonçables ou pensables (tel que la finalité ou même la causalité efficiente).( pas antérieur dans le temps)
.....................................
- ...mais surtout il engendre des auto-générations (là, il me semble en revanche que c'est contradictoire)

oui c'est là le problème.
Est-ce le le mode (la modification) a un degré d' auto -détermination?
Cette question est très disputée ..parce qu'elle engage la question de la liberté  ou d'un degré de liberté,  plus exactement d'une autonomie (toujours relative)

Il me semble que Spinoza s'en tire ainsi (Scolie du lemme 7 partie 2 de l' Ethique)

Nous voyons par ce qui précède comment un individu composé peut être affecté d'une foule de manières, en conservant toujours sa nature. Or jusqu'à ce moment nous n'avons conçu l'individu que comme formé des corps les plus simples, de ceux qui ne se distinguent les uns des autres que par le mouvement et le repos, par la lenteur et la vitesse. Que si nous venons maintenant à le concevoir comme composé de plusieurs individus de nature diverse, nous trouverons qu'il peut être affecté de plusieurs autres façons en conservant toujours sa nature ; car puisque chacune de ses parties est composée de plusieurs corps, elle pourra (par le lemme précédent), sans que sa nature en soit altérée, se mouvoir tantôt avec plus de vitesse, tantôt avec plus de lenteur, et par suite communiquer plus lentement ou plus rapidement ses mouvements aux autres parties. Et maintenant si nous concevons un troisième genre d'individus formé de ceux que nous venons de dire, nous trouverons qu'il peut recevoir une foule d'autres modifications, sans aucune altération de sa nature. Enfin, si nous poursuivons de la sorte à l'infini nous concevrons facilement que toute la nature est un seul individu dont les parties c'est-à-dire tous les corps, varient d'une infinité de façons, sans que l'individu lui-même, dans sa totalité reçoive aucun changement. Tout cela devrait être expliqué et démontré plus au long, si j'avais dessein de traiter du corps ex professo ; mais je répète que tel n'est point mon objet, et que je n'ai placé ici ces préliminaires que pour en déduire aisément ce que je me propose maintenant de démontrer.

 C'est un emboitement  d' individu libre ou autonome par nature, mais intégrés dans un et de plus grands ...donc non libres sous ce rapport.

Un individué a une nature et dure en vertu de sa nature (et donc persévère dans cette nature)... mais n'est pas soustrait à un dépendance envers ce qui l'englobe.
..........................

hks a écrit:Ce qui veux dire que la Nature est comme le dit Spinoza causa sui, elle s'autogénère  ...mais  elle ne produit que des auto-générations.
la formulation peut sans doute être amendée ... mais ce qui est produit ce sont des  individuations s'auto- générant. Ce n'est même pas produit, c'est l'état éternel de la Nature.

 "Generation" pose problème :
Spinoza parle plus dans le sens de s'auto- préservant. Il est essentialiste  ce qui pose un vrai problème en ce que l'essence est souvent vu par lui comme synchronique pas diachronique.(il n'en dit pas toujours la même chose). C' est l'articulation de la durée et de l'essence ( la nature d' un organisme qui est  problématique chez lui.
C' est pourquoi on le voit affirmer que la mort d' une chose (ou d'un vivant) n' est due qu'aux cause extérieures .
L'idée que par nature un organisme évolue nécessairement vers sa fin(ou sa métamorphose  en une autre forme ) lui échappe un peu...beaucoup.

On le voit dans le texte que je cite :
Spinoza a écrit:nous trouverons qu'il peut être affecté de plusieurs autres façons en conservant toujours sa nature

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Message par Bergame Mar 24 Mai 2016 - 15:04

Ah oui, c'est bien ce que je comprenais : Tu essaies de "sauver", si j'ose dire, la liberté au sens du libre-arbitre, chez Spinoza.
Et pour ce faire, si je comprends bien, tu déplaces la causa sui de la Nature aux individus : Les individus, en tant qu'ils sont part de la Nature, qu'ils participent de la Nature si l'on peut dire, sont comme  la Nature : Ils s'auto-engendrent. En fait, il me semble que tu comprends un peu la causa sui comme une autonomie élargie aux dimensions de l'être.

Mais outre que, comme ca, a priori, ca semble un peu problématique en effet -les individus ne s'auto-engendrent pas, hein, enfin il me semble raisonnable de partir du principe que Spinoza savait comment on fait les bébés   Nature et Causa sui 3438808084 - je fais surtout l'hypothèse que, dans cette réflexion, tu penses d'abord à l'homme. Or, si ton interprétation était juste, elle devrait être juste, non pas seulement pour l'homme, mais encore pour tout être vivant, y compris animaux et végétaux, et même, encore une fois, pour toute chose. Qu'est-ce que cela pourrait donc signifier qu'une pierre s'auto-engendre ? Qu'est-ce que cela pourrait signifier qu'une plante ait un quelconque degré d'autonomie ?

Pour ce qui me concerne, j'avais plutôt l'idée que, chez Spinoza, le libre-arbitre est illusion, et la liberté est l'horizon d'un processus de libération qui passe par la prise de conscience, la connaissance, des déterminismes et du désir. Non ?
Une thèse qui ne rebute pas un psychologue, d'ailleurs. Nature et Causa sui 3438808084

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Message par hks Mar 24 Mai 2016 - 20:22

bergame a écrit:En fait, il me semble que tu comprends un peu la causa sui comme une autonomie élargie aux dimensions de l'être.
à mon avis (qui n'engage que moi) Spinoza( qui ne le dit pas et n'en a peut être pas conscience) tire l'idée de causa sui de la conscience de SA liberté. Ce qui n'en n'invalide pas la pertinence rapportée au niveau de la Nature tout entière.

Mais outre que, comme ca, a priori, ca semble un peu problématique en effet -les individus ne s'auto-engendrent pas,
Donc piur toi ils sont entièrement causés par des causes extérieures à eux. Nature et Causa sui 4221839403
Pour moi ce n'est pas l'un ou l'autre
mais l'un ET l'autre.

bergame a écrit:Pour ce qui me concerne, j'avais plutôt l'idée que, chez Spinoza, le libre-arbitre est illusion, et la liberté est l'horizon d'un processus de libération qui passe par la prise de conscience, la connaissance, des déterminismes et du désir. Non ?

Je ne parle pas de libre arbitrage.
Le dit "libre arbitre" est la partie émergée de la question de l 'autonomie (non absolue ) ...et ce n'est pas la question de fond. Je veux bien nier mon libre arbitre (conscient) je n'ai pas évacué mon autonomie.

Spinoza dit que nous ignorons les causes qui nous déterminent ,certes,  cherchons alors à les connaitre ...il n'est pas évident que toutes les causes intérieures soient éliminables.
La nature propre d'un individué est une cause qui ne lui est pas extérieure.
( je maintiens )


bergame a écrit:Or, si ton interprétation était juste, elle devrait être juste, non pas seulement pour l'homme, mais encore pour tout être vivant, y compris animaux et végétaux, et même, encore une fois, pour toute chose. Qu'est-ce que cela pourrait donc signifier qu'une pierre s'auto-engendre ?
Là le problème de l' animisme versus le mécanisme est posée.

Pour moi cela a un sens de dire qu'un minéral s'auto- engendre .( sans parler des cristaux  où cela parait évident ).
Un auto engendrement suppose une structure individué  persistant  dans son être. C'est à dire le contraire de l'anihilation pure et simple .  (ou plutôt du néant d' être). et une pierre n'est pas un néant d' être .
Ce qui existe résiste  et éventuellement évolue  change de forme, se métamorphose . Ce qui n'est pas individué est hors de ce genre d' existence et est un néant d' être.

..................
C''est pourquoi je critique l'idée de virtuel versus l'actuel.
l' en-puissance est  la puissance d'un actuel
Chez Aristote  déjà c'était ainsi.

Aristote a écrit:« Que selon la notion l'acte soit antérieur, cela est évident : c'est parce qu'il peut s'actualiser que ce qui est puissant, au sens premier est puissant. Par exemple, j'appelle capable de construire, celui qui peut construire. »

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