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Message par joseph curwan Mar 9 Déc 2014 - 13:19

salut. on trouve plein de textes intéressants de rorty en tapant "rorty pdf" dans google.

voyez par exemple :

http://olincenter.uchicago.edu/pdf/rorty.pdf


une idée pourrait être la traduction en français tout en en discutant au fur et à mesure...? si des gens sont intéressés, dites moi.

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Message par joseph curwan Mer 10 Déc 2014 - 13:14

ah, je vois que ma proposition soulève un enthousiasme généralisé ...
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Message par Crosswind Mer 10 Déc 2014 - 15:28

La philosophie en français n'est déjà pas simple. S'il faut se la taper en anglais, où allons-nous ? Richard Rorty 2101236583

Un résumé, peut-être ?

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Message par joseph curwan Mer 10 Déc 2014 - 15:39

le texte n'est pas très long et extrêmement dense. en gros, rorty explique pourquoi et comment les sociétés passent du stade religieux au stade philosophique. et il appelle de ses vœux un troisième stade, le stade post-philosophique, qui ne serait pas scientifique comme chez comte. je pense que le mieux serait de traduire le texte paragraphe par paragraphe et d'avancer ainsi progressivement.
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Message par neopilina Mer 10 Déc 2014 - 18:32

joseph curwan a écrit:Rorty explique pourquoi et comment les sociétés passent du stade religieux au stade philosophique. et il appelle de ses vœux un troisième stade, le stade post-philosophique, ...

Ce n'est pas parce qu'on est nul en philosophie qu'il faut en conclure qu'elle est morte !

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Message par joseph curwan Mer 10 Déc 2014 - 18:37

????

qui est nul ? qui dit que la philosophie est morte ?
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Message par neopilina Mer 10 Déc 2014 - 18:40

Rorty dit qu'il faut passer au stade suivant, ça en dit long sur ce qu'il pense de la philosophie. Moi j'ai l'impression qu'elle est à peine sortie du berceau, le temps philosophique n'est pas le temps historique. La philosophie vit une mauvaise passe, de là à l'enterrer, il y a un pas que je ne franchis pas.

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Message par joseph curwan Mer 10 Déc 2014 - 18:45

moi non plus, je ne franchis pas ce pas, et pourtant j'aime bien rorty.
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Message par hks Mer 10 Déc 2014 - 23:48

http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/14931/HERMES_1996_20_251.pdf?sequence=1
A l'avantage d 'être écrit en français et récapitule bien la pensée de Rorty .

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Message par hks Jeu 11 Déc 2014 - 0:08

Enfin, s'il n'y a pas de réponse à la question « pourquoi n'être pas cruel ? », on peut par contre se demander « comment réduire la cruauté des uns et la souffrance des autres ? »
Il va de soi que les institutions comme celles de l'État Providence peuvent y contribuer, etc page 256

En gros Rorty  est moral mais ne sait pas pourquoi il l 'est...
et refuse  toute tentative de le savoir ... d' où le rejet de la métaphysique.

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Message par neopilina Jeu 11 Déc 2014 - 0:54

Je ne connais pas ce Rorty, j'ai juste réagis au propos rapporté par Joseph. Mais globalement j'ai remarqué que les types qui cognent le plus sur la métaphysique sont ceux qui sont à peine en mesure d'entendre ce " mot ".

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Message par baptiste Jeu 11 Déc 2014 - 7:27

hks a écrit:
Enfin, s'il n'y a pas de réponse à la question « pourquoi n'être pas cruel ? », on peut par contre se demander « comment réduire la cruauté des uns et la souffrance des autres ? »
Il va de soi que les institutions comme celles de l'État Providence peuvent y contribuer, etc page 256

En gros Rorty  est moral mais ne sait pas pourquoi il l 'est...
et refuse  toute tentative de le savoir ... d' où le rejet de la métaphysique.

C'est tout de même légèrement plus compliqué, mais comme il n'y a pas de question posée dans le sujet de ce post, il n'y a pas de réponse à donner.

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Message par euthyphron Jeu 11 Déc 2014 - 9:12

La suggestion de joseph curwan est intéressante, mais peut paraître démesurée. Ce n'est pas avec nos petits bras que nous allons traduire, commenter et discuter tout l'oeuvre de Rorty.
Mais un extrait d'une quinzaine de lignes, formant un tout, et judicieusement choisi par joseph curwan lui-même? Pourquoi pas? Si ça te dit, Joseph.
L'avantage de se taper un devoir de traduction c'est que cela nous obligera à lire le texte. Il a été plusieurs fois proposé, par Courtial surtout, un texte à commenter mais rapidement on parle d'autre chose, ce qui est dommage car la lecture attentive et questionneuse d'un texte est un exercice intellectuel que j'apprécie beaucoup. A suivre...

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Message par joseph curwan Jeu 11 Déc 2014 - 11:40

15 lignes, c'est trop court ! le dernier tiers du texte (p .20-28) me semble le plus intéressant car il y est question des conséquences pratiques de la pensée rortyenne et de son utopie. je viens de le relire. je peux le traduire et le poster, et on verrait ensuite sur quel passage en particulier discuter.

cela vous convient-il ?
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Message par hks Jeu 11 Déc 2014 - 13:11

C'est tout de même légèrement plus compliqué,
Je ne suis pas certain que ce soit plus compliqué. Rorty est un relativiste sceptique qui affirme un souci moral tout en avouant ne pas pouvoir se prononcer sur un savoir des causes de son désir de morale.
Vu qu'il refuse toutes argumentations "philosophiques" ... comment et pourquoi argumenter face à un tel scepticisme?

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Message par hks Jeu 11 Déc 2014 - 13:20

à poussbois

Je ne comprends pas pourquoi ( rarement ...mais ce matin par ex  ) je suis  privé de la possibilité de réponse  avec balises et smilleys . J'en suis réduit à "message rapide" . ?? .
Je n'ai pas non plus la possibilité de t' envoyer un message privé. ...20 minutes plus tard!!
bon apparemment c'est réparé .. je n'avais pas non plus la fonction "edit" ... bref sur le sujet Richard Rorty 2101236583


Dernière édition par hks le Jeu 11 Déc 2014 - 13:36, édité 1 fois

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Message par euthyphron Jeu 11 Déc 2014 - 13:23

joseph curwan a écrit:15 lignes, c'est trop court ! le dernier tiers du texte (p .20-28) me semble le plus intéressant car il y est question des conséquences pratiques de la pensée rortyenne et de son utopie. je viens de le relire. je peux le traduire et le poster, et on verrait ensuite sur quel passage en particulier discuter.

cela vous convient-il ?
C'est comme tu veux. Le contexte est toujours intéressant à connaître, donc si tu as le temps de traduire 8 pages, cela rendra service. Mais cela me paraît trop long pour une discussion sérieuse, et j'ai peur que s'il faut décider démocratiquement du passage à étudier nous n'arriverons à rien de plus que ce qui est déjà là. Donc, si tu peux isoler le passage le plus intéressant, tout en nous donnant le contexte si tu le souhaites, je trouve que ce serait bien. Mais c'est comme tu veux.

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Message par joseph curwan Jeu 11 Déc 2014 - 16:20

bon, j'ai essayé de traduire un passage pas trop long et significatif. ce n'est pas très satisfaisant, mais il faudra faire avec. les nombres entre crochets correspondent aux pages de l'essai.

*

Le déclin de la vérité rédemptrice et l'émergence d'une culture littéraire, par Richard Rorty. novembre 2000 (extrait)

Traduction par joseph curwan


[20] Jusqu’à présent je n’ai rien dit à propos de la relation de la culture littéraire avec la politique. Je terminerai en abordant ce sujet. En effet la querelle entre ceux qui voient l’avènement d’une culture littéraire comme une bonne chose et ceux qui la voient comme une mauvaise chose est principalement une querelle à propos de quelle sorte de haute culture réussira le mieux à créer et faire durer le climat de tolérance qui s’épanouit de préférence dans les sociétés démocratiques.
Ceux qui affirment qu’une culture centrée sur la science est meilleure pour ce but s’appuient sur l’amour de la vérité en opposition à la haine, la passion, le préjudice, la superstition et toutes les forces de la déraison contre lesquelles Socrate et Platon affirmaient que la philosophie pourrait nous sauver. Mais ceux qui sont de l’autre côté sont sceptiques quant à l’opposition platonique entre raison et déraison. Ils ne voient pas le besoin de relier la différence entre une conversation tolérante et une mauvaise volonté d’écouter l’autre, et la distinction entre une partie plus élevées de nous-même qui permet d’atteindre la rédemption et une autre partie qui est pure animalité.
Le point important de ceux qui pensent qu’un juste respect pour la vérité objective, et par conséquent pour la science, est important pour faire durer un climat de tolérance et de bonne volonté, est que l’argumentation est essentielle pour la science et la démocratie. Quand on choisit entre [21] des théories scientifiques différentes et quand on choisit entre des textes de législation différents, nous voulons que les gens basent leur décision sur des arguments – arguments qui partent de prémisses que l’on peut rendre plausibles pour quiconque s’intéresse au sujet.
Les prêtres donnent rarement de tels arguments, ni les intellectuels littéraires. Il est donc tentant de penser que la préférence de la littérature sur la science est un rejet de l’argumentation en faveur de prédictions oraculaires – une régression vers quelque chose d’inconfortable comme le stage pré-philosophique, religieux, de la vie intellectuelle occidentale. Vu de cette façon, l’avènement d’une culture littéraire ressemble à la trahison des clercs.
Mais ceux d’entre nous qui se reconnaissent dans l’émergence de la culture littéraire peuvent contrer cette critique en disant que, alors que l’argumentation est essentielle pour les projets de coopération sociale, la rédemption est une affaire individuelle et privée. De la même façon que l’émergence de la tolérance religieuse a reposé sur la distinction entre les besoins de la société et les besoins de l’individu, et en disant que la religion n’était pas nécessaire pour les premiers, de même la culture littéraire nous demande de disjoindre la délibération politique des projets de rédemption. Cela signifie être d’accord sur le fait que les espoirs privés pour l’authenticité et l’autonomie devraient être laissés à la maison quand les citoyens d’une société démocratique se réunissent pour débattre à propos de ce qui doit être fait.
Comprendre cela amène à dire : la seule façon qu’a la science d’être valable pour la politique est que les scientifiques apportent un bon exemple de coopération sociale, d’une culture d’expert dans laquelle l’argumentation progresse. Ils apportent un modèle pour la délibération politique –un modèle d’honnêteté, de tolérance et de confiance. Cette habileté est une affaire de procédures plutôt que de résultats et c’est pourquoi des charpentiers ou des conducteurs d’engins apportent un aussi bon modèle qu’un département en astrophysique. La différence entre un accord raisonnable sur la façon de résoudre un problème durant la construction [22] d’une maison ou d’un pont, et un accord raisonnable sur ce que les physiciens appellent « une théorie du tout » est, dans ce contexte, non pertinente.  Car quoique nous apprenne cette théorie, elle ne nous guidera pas dans notre conduite politique ou notre rédemption individuelle.
Cette remarque peut paraître arrogante et dogmatique, car il arrive certainement que les résultats d’enquêtes empiriques aient eu, dans le passé, un impact sur notre propre image. Galilée et Darwin ont réfuté certaines fantaisies en montrant la pertinence d’un apport matérialiste. Ils ont par conséquent rendu plus facile le passage d’une haute culture religieuse à une culture sécularisée, simplement philosophique. Mon argument en faveur d’une culture littéraire repose donc sur le constat  que se débarrasser des fantaisies, des agents causales qui ne dépendent pas de la conduite des particules élémentaires, a épuisé l’utilité des sciences naturelles pour des buts rédempteurs et politiques.
Je ne fais pas ce constat comme un résultat de raisonnement philosophique ou une intuition, mais juste comme une prédiction à propos du futur. Une prédiction similaire a amené les philosophes du dix-huitième siècle à penser que la religion Chrétienne avait fait à peu près tout ce qu’elle pouvait pour la condition morale de l’humanité, et qu’il était temps de laisser la religion derrière nous et de donner sa place à la métaphysique, idéaliste ou matérialiste. Quand les intellectuels littéraires affirment que la science naturelle n’a rien à nous offrir excepté un exemple édifiant de conversation tolérante, ils font quelque chose d’analogue à ce que les « philosophes » faisaient quand ils disaient que même les meilleurs prêtres n’ont rien à offrir en dehors d’exemples édifiants de charité et de décence. Réduire la science d’une source possible de vérité rédemptrice à un modèle de coopération rationnel est l’analogue contemporain de la réduction des Gospels d’un moyen d’atteindre la joie éternelle à une collection de conseils moraux mis en musique. [23] C’est cette sorte de réduction que Kant et Jefferson recommandaient, et que les protestants libéraux des deux derniers siècles ont progressivement accomplie.
Pour dire les choses autrement : aussi bien la religion chrétienne que la métaphysique matérialiste se sont transformés en artéfacts qui s’auto-consument. Le besoin d’une orthodoxie religieuse a été sapé par l’insistance de St Paul sur la primauté de l’amour, et par la prise de conscience que la religion de l’amour ne pouvait pas demander à chacun de réciter le même crédo. Le besoin d’une métaphysique a été sapé par l ‘habilité de la science moderne de voir l’esprit humain comme un système nerveux exceptionnellement complexe et ainsi de se voir en termes pragmatiques plutôt que métaphysique. La science nous a montré comment voir l’enquête empirique et l’usage de cet appareil physiologique pour gagner une plus grande maîtrise de l’environnement, plutôt que comme un moyen de remplacer l’apparence par la réalité. Comme le dix-huitième siècle est devenu capable de voir le Christianisme non comme une révélation d’en haut mais comme une continuation de la réflexion socratique, le vingtième siècle est devenu capable de voir la science naturelle non comme révélant la nature intrinsèque de la réalité, mais comme une suite de résolution de problèmes pratiques tels que ceux rencontrés par les castors et les charpentiers.
Abandonner l’idée qu’il y a une nature intrinsèque de la réalité à découvrir par les prêtres, ou les philosophes, ou les scientifiques revient à séparer le besoin de rédemption de la recherche d’un agrément universel. C’est à dire abandonner la recherche d’une définition précise de la nature humaine et d’un précepte pour mener La Bonne Vie de l’Homme. Une fois ces recherches abandonnées, augmenter les limites de l’imagination humaine prend le rôle que jouait l’obédience à une volonté divine dans une culture religieuse, et le rôle que la découverte de ce qui est réellement réel jouait dans une culture philosophique. Mais cette substitution [24] n’est pas une raison pour abandonner la recherche d’une forme utopique de vie politique : la Bonne Société Globale.



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Message par joseph curwan Jeu 11 Déc 2014 - 16:27

je rappelle le lien vers le texte en anglais :

http://olincenter.uchicago.edu/pdf/rorty.pdf
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Message par euthyphron Ven 12 Déc 2014 - 10:58

Texte très intéressant!
J'ai regardé la traduction, qui a le grand mérite à mon sens d'être proche du texte, et proposé en rouge quelques amendements. Les points d'interrogation signifient que pour moi quelque chose ne va pas, mais que je ne sais pas par quoi remplacer.
Le troisième point d'interrogation porte sur Gospel, qui si je ne m'abuse (je n'ai pas les moyens de vérifier) signifie "évangile", et qu'il faudrait donc traduire ainsi. Il me semble que Rorty joue sur les mots, le Gospel-bonne nouvelle est devenu gospel-chant édifiant.
Es-tu d'accord avec les amendements que je propose? D'autres ont-ils des suggestions à faire, non pour refaire une nouvelle traduction, mais pour garantir la fiabilité de celle-ci?

rorty, trad.joseph curwan a écrit:
[20] Jusqu’à présent je n’ai rien dit à propos de la relation de la culture littéraire avec la politique. Je terminerai en abordant ce sujet. En effet la querelle entre ceux qui voient l’avènement d’une culture littéraire comme une bonne chose et ceux qui la voient comme une mauvaise chose est principalement une querelle à propos de quelle sorte de haute culture réussira le mieux à créer et faire durer le climat de tolérance qui s’épanouit de préférence dans les sociétés démocratiques.
Ceux qui affirment qu’une culture centrée sur la science est meilleure pour ce but s’appuient sur mettentl’amour de la vérité en opposition à la haine, la passion, le préjudicepréjugé, la superstition et toutes les forces de la déraison contre lesquelles Socrate et Platon affirmaient que la philosophie pourrait nous sauver. Mais ceux qui sont de l’autre côté sont sceptiques quant à l’opposition platonique platonicienneentre raison et déraison. Ils ne voient pas le besoin de relier la différence entre une conversation tolérante et une mauvaise volonté d’écouter l’autre, et la distinction entre une partie plus élevées de nous-même qui permet d’atteindre la rédemption et une autre partie qui est pure animalité.
Le point importantfort de ceux qui pensent qu’un juste respect pour la vérité objective, et par conséquent pour la science, est important pour faire durer un climat de tolérance et de bonne volonté, est que l’argumentation est essentielle pour la science et la démocratie. Quand on choisit entre [21] des théories scientifiques différentes et quand on choisit entre des textes de législation différents, nous voulons que les gens basent leur décision sur des arguments – arguments qui partent de prémisses que l’on peut rendre plausibles pour quiconque s’intéresse au sujet.
Les prêtres donnent rarement de tels arguments, ni les intellectuels littéraires. Il est donc tentant de penser que la préférence de la littérature sur la science est un rejet de l’argumentation en faveur de prédictions oraculaires – une régression vers quelque chose d’inconfortable comme le stage? pré-philosophique, religieux, de la vie intellectuelle occidentale. Vu de cette façon, l’avènement d’une culture littéraire ressemble à la trahison des clercs.
Mais ceux d’entre nous qui se reconnaissent dans l’émergence de la culture littéraire peuvent contrer cette critique en disant que, alors que l’argumentation est essentielle pour les projets de coopération sociale, la rédemption est une affaire individuelle et privée. De la même façon que l’émergence de la tolérance religieuse a reposé sur la distinction entre les besoins de la société et les besoins de l’individu, et en disant que la religion n’était pas nécessaire pour les premiers, de même la culture littéraire nous demande de disjoindre la délibération politique des projets de rédemption. Cela signifie être d’accord sur le fait que les espoirs privés pour l’authenticité et l’autonomie devraient être laissés à la maison quand les citoyens d’une société démocratique se réunissent pour débattre à propos de ce qui doit être fait.
Comprendre cela amène à dire : la seule façon qu’a la science d’être valable pour la politique est que les scientifiques apportent un bon exemple de coopération sociale, d’une culture d’expert dans laquelle l’argumentation progresse. Ils apportent un modèle pour la délibération politique –un modèle d’honnêteté, de tolérance et de confiance. Cette habileté est une affaire de procédures plutôt que de résultats et c’est pourquoi des charpentiers ou des conducteurs d’engins apportent un aussi bon modèle qu’un département en astrophysique. La différence entre un accord raisonnable sur la façon de résoudre un problème durant la construction [22] d’une maison ou d’un pont, et un accord raisonnable sur ce que les physiciens appellent « une théorie du tout » est, dans ce contexte, non pertinente.  Car quoiquequoi que nous apprenne cette théorie, elle ne nous guidera pas dans notre conduite politique ou notre rédemption individuelle.
Cette remarque peut paraître arrogante et dogmatique, car il arrive certainement que les résultats d’enquêtes empiriques aient eu, dans le passé, un impact sur notre propre image. Galilée et Darwin ont réfuté certaines fantaisies en montrant la pertinence d’un apport matérialiste. Ils ont par conséquent rendu plus facile le passage d’une haute culture religieuse à une culture sécularisée, simplement philosophique. Mon argument en faveur d’une culture littéraire repose donc sur le constat  que se débarrasser des fantaisies, des agents causales ?qui ne dépendent pas de la conduite des particules élémentaires, a épuisé l’utilité des sciences naturelles pour des buts rédempteurs et politiques.
Je ne fais pas ce constat comme un résultat de raisonnement philosophique ou une intuition, mais juste comme une prédiction à propos du futur. Une prédiction similaire a amené les philosophes du dix-huitième siècle à penser que la religion chrétienne avait fait à peu près tout ce qu’elle pouvait pour la condition morale de l’humanité, et qu’il était temps de laisser la religion derrière nous et de donner sa place à la métaphysique, idéaliste ou matérialiste. Quand les intellectuels littéraires affirment que la science naturelle n’a rien à nous offrir excepté un exemple édifiant de conversation tolérante, ils font quelque chose d’analogue à ce que les « philosophes » faisaient quand ils disaient que même les meilleurs prêtres n’ont rien à offrir en dehors d’exemples édifiants de charité et de décence. Réduire la science d’une source possible de vérité rédemptrice à un modèle de coopération rationnel est l’analogue contemporain de la réduction des Gospels ?d’un moyen d’atteindre la joie éternelle à une collection de conseils moraux mis en musique. [23] C’est cette sorte de réduction que Kant et Jefferson recommandaient, et que les protestants libéraux des deux derniers siècles ont progressivement accomplie.
Pour dire les choses autrement : aussi bien la religion chrétienne que la métaphysique matérialiste se sont transformés en artéfacts qui s’auto-consument. Le besoin d’une orthodoxie religieuse a été sapé par l’insistance de St Paul sur la primauté de l’amour, et par la prise de conscience que la religion de l’amour ne pouvait pas demander à chacun de réciter le même crédo. Le besoin d’une métaphysique a été sapé par l ‘habilitéla capacité de la science moderne deà voir l’esprit humain comme un système nerveux exceptionnellement complexe et ainsi de se voir en termes pragmatiques plutôt que métaphysique. La science nous a montré comment voir l’enquête empirique et l’usage de cet appareil extraphysiologique pour gagner une plus grande maîtrise de l’environnement, plutôt que comme un moyen de remplacer l’apparence par la réalité. Comme le dix-huitième siècle est devenu capable de voir le Christianisme non comme une révélation d’en haut mais comme une continuation de la réflexion socratique, le vingtième siècle est devenu capable de voir la science naturelle non comme révélant la nature intrinsèque de la réalité, mais comme une suite de résolution de problèmes pratiques tels que ceux rencontrés par les castors et les charpentiers.
Abandonner l’idée qu’il y a une nature intrinsèque de la réalité à découvrir par les prêtres, ou les philosophes, ou les scientifiques revient à séparer le besoin de rédemption de la recherche d’un agrément universel. C’est à dire abandonner la recherche d’une définition précise de la nature humaine et d’un précepte pour mener La Bonne Vie de l’Homme. Une fois ces recherches abandonnées, augmenter les limites de l’imagination humaine prend le rôle que jouait l’obédience à une volonté divine dans une culture religieuse, et le rôle que la découverte de ce qui est réellement réel jouait dans une culture philosophique. Mais cette substitution [24] n’est pas une raison pour abandonner la recherche d’une forme utopique de vie politique : la Bonne Société Globale.

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Message par hks Ven 12 Déc 2014 - 12:58

Texte très intéressant!

Non que je trouve ce texte inintéressant ... je le vois comme une réaffirmation pour ne pas dire "redite actualisée" d'un hédonisme sceptique. Pragmatique et sociétal, essentiellement sociétal.
Disons qu'il parlera à certains et pas du tout à d'autres ... à d'autres plus intérieur ...ou plus intériorisés.

Donc que ce texte ne me parle que modérément...ou superficiellement. Il n'est pas assez explicite sur  le fond de la pensée éthico -politique de Rorty.

Cela renvoie à sa position par rapport  à Rawls et puis à Nozick ou à Taylor.(et à d'autres  dans le contexte  américain mais aussi "continentaux " comme Hans Jonas( bien qu' américain) ou Habermas )

Le relativisme ( philosophique) de Rorty fragilise son libéralisme politique.
Puisqu'il ne peut ni ne veut affirmer de bases sures  à son jugement moral  on peut lui opposer  la légitimité de  l immoralité (et entre autre la cruauté comme valeur  )

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Message par joseph curwan Ven 12 Déc 2014 - 13:06

merci pour vos commentaires. pour la traduction il faut voir ... la suite du texte est beaucoup plus explicite sur le projet de société rortyen.
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Message par hks Ven 12 Déc 2014 - 13:22

la suite du texte est beaucoup plus explicite sur le projet de société rortyen.
mais c'est là qu' on l' attend.

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Message par joseph curwan Ven 12 Déc 2014 - 14:10

>>>Le relativisme ( philosophique) de Rorty fragilise son libéralisme politique.
Puisqu'il ne peut ni ne veut affirmer de bases sures  à son jugement moral  on peut lui opposer  la légitimité de  l immoralité (et entre autre la cruauté comme valeur  )>>>

d'une manière générale, rorty énerve les platoniciens, les kantiens et les marxistes.

ce qu'il faut comprendre, c'est que si rorty affirme que la solidarité est préférable à la cruauté, c'est parce qu'il estime que les conséquences pratiques de la solidarité sont préférables pour la société démocratique à celles de la cruauté, et pas en se référant à une valeur ou entité ou capacité supra-humaine (transcendante) avec laquelle l'homme serait en contact ou qu'il posséderait en lui.

on peut penser que ce raisonnement est faible et que l'homme a absolument besoin d'idéaux transcendants et régulateurs sous peine de sombrer dans la décadence et la barbarie. mais on peut aussi douter de l'efficacité de ces idéaux régulateurs, que ce soient ceux des prêtres, des philosophes ou des scientifiques : dans quelle mesure ces gens ont réussit à limiter la cruauté dans l'histoire du vingtième siècle, par exemple ?

rorty, lui, a fait son choix, dans les traces de montaigne, de wilde, de james, de mills, de rawls et d'autres encore.

le mérite du texte que je propose est d'expliquer les raisons de ce choix.
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Message par kercoz Ven 12 Déc 2014 - 14:38

[quote="joseph curwan"
ce qu'il faut comprendre, c'est que si rorty affirme que la solidarité est préférable à la cruauté, c'est parce qu'il estime que les conséquences pratiques de la solidarité sont préférables pour la société démocratique à celles de la cruauté,........... mais on peut aussi douter de l'efficacité de ces idéaux régulateurs, que ce soient ceux des prêtres, des philosophes ou des scientifiques : dans quelle mesure ces gens ont réussit à limiter la cruauté dans l'histoire du vingtième siècle, par exemple ?[/quote]

Il me semble que poser solidarité versus cruauté ( qui n'est pas l' opposé de solidarité), pose problème ...Pourquoi y aurai t il un "bien " ou un "mal" ...Les deux me semblent faire bon ménage .
En effet affirmer qu'on arrive a limiter la cruauté va poser des tas de problèmes en terme de valeurs , de sémantique et d' idéologie .
J'ai du mal avec les termes concernant les concepts, mais il me semble qu'on est dans un exemple type de réductionnisme : La solidarité c'est mieux que la cruauté ? .... avec ça il va faire un max d'adeptes , mais il va falloir les choper parce que généralement ils sont déja "en main" .
En montant le niveau , c'est évident qu'il vaut mieux ( de façon délibérée, non altruiste ) faire des heureux dans son environnement . Ca permet de croiser des sourires plutot que des opinels . Les altruistes en font autant pour les mêmes raisons , mais ils ne le savent pas.

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