Dire l'être ?
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Dire l'être ?
Un homme réduit sa consommation, il a aussitôt moins besoin d'argent. Qui retrouve-t-il de la sorte, peut-être ? Tel autre réduit ses mots, il a aussitôt moins besoin de communication. Est-ce à dire que sa "vérité" dès lors est individuelle et subjective ? Non, il n'est pas exclu qu'il aborde de la sorte une vérité de l'être au monde par-delà toute individualité. On aura cru qu'il s'isolait, il a rejoint en réalité une communauté plus grande.
Plus prosaïquement, un homme qui veut nous parler du "dehors" ne cesse de faire en réalité un va-et-vient entre deux espaces de communication. Ou plutôt, l'espace humain de communication lui impose des Existants qu'il se met alors à transposer dans l'espace de l'être au monde. Et inversement ! C'est bien pour cette raison que l'art de "créer de la vérité" est double, certes, mais également déontologique. L'expression même – créer de la vérité, cet oxymore – englobe ces deux espaces.
Mais notre homme parvient-il vraiment à conjuguer les deux ? Son envie de communiquer aux hommes fait qu'il est contraint de leur parler, alors que si véritablement « il rejoignait tout ce qui est au monde », comme il aime à dire, son comportement (son dire) ne pourrait être alors celui de tel homme, tel moi. Dès lors, peut-être se mettra-t-il un jour à son tour, comme d'autres en leur temps, à parler aux oiseaux et aux hommes indistinctement et au sujet des mêmes choses ... Mais est-ce que les hommes l'écouteront alors dans cette posture ?
Plus prosaïquement, un homme qui veut nous parler du "dehors" ne cesse de faire en réalité un va-et-vient entre deux espaces de communication. Ou plutôt, l'espace humain de communication lui impose des Existants qu'il se met alors à transposer dans l'espace de l'être au monde. Et inversement ! C'est bien pour cette raison que l'art de "créer de la vérité" est double, certes, mais également déontologique. L'expression même – créer de la vérité, cet oxymore – englobe ces deux espaces.
Mais notre homme parvient-il vraiment à conjuguer les deux ? Son envie de communiquer aux hommes fait qu'il est contraint de leur parler, alors que si véritablement « il rejoignait tout ce qui est au monde », comme il aime à dire, son comportement (son dire) ne pourrait être alors celui de tel homme, tel moi. Dès lors, peut-être se mettra-t-il un jour à son tour, comme d'autres en leur temps, à parler aux oiseaux et aux hommes indistinctement et au sujet des mêmes choses ... Mais est-ce que les hommes l'écouteront alors dans cette posture ?
A gagner le monde de l'être, ne perd-on pas les hommes ?
Re: Dire l'être ?
Qu'est-ce qu'une vérité qui n'est que de mots ?
Les mots ne sont-ils pas simplement l'écume d'un mouvement plus profond et invisible - y compris aux yeux mêmes de celui qui s'en sert ?
De fait je pense savoir que si un homme emploie moins de mots, c'est souvent pour communiquer plus. Pensons aux apophtegmes.
Quant à l'être, comment, pour un homme, le détacher des hommes ?
Les mots ne sont-ils pas simplement l'écume d'un mouvement plus profond et invisible - y compris aux yeux mêmes de celui qui s'en sert ?
De fait je pense savoir que si un homme emploie moins de mots, c'est souvent pour communiquer plus. Pensons aux apophtegmes.
Quant à l'être, comment, pour un homme, le détacher des hommes ?
même- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 10/01/2012
Re: Dire l'être ?
Qu'est-ce qu'une vérité qui n'est que de mots ?
- Un pur Existant.
Mais peut-être la vérité n'est-elle que de dire(s) ? :-)
Re: Dire l'être ?
Pourquoi "que" ? Car dire n'est-il QUE dire, ou dire est-il dans une certaine mesure performatif ?
Tu omets, par souci de saisir le SYSTEME de la communication, le contenu de ce dire.
Il y a une tension intérieure dont on se libère par le dire sous sa forme de parole. Je ne crois pas que ces mots n'ont qu'eux-mêmes pour origine.
Justement cet existant est peut-être unique pour chacun. Dans ses modes du moins. C'est pourquoi il y a tant de variantes et donc tant de personnalité dans le dire. Il n'est pas évident à mes yeux qu'une personne qui s'exprime ne fasse qu'exprimer elle-même. La plupart des temps dire une chose c'est en dire une autre. Et de niveaux en niveaux finalement, quoi que je fasse, j'arrive toujours à une dimension de transcendance. Et l'universalité de ce phénomène m'interroge vraiment. Dire, n'est ce pas alors prêter sa voix à...Disons un pur existant ?
Tu omets, par souci de saisir le SYSTEME de la communication, le contenu de ce dire.
Il y a une tension intérieure dont on se libère par le dire sous sa forme de parole. Je ne crois pas que ces mots n'ont qu'eux-mêmes pour origine.
Un pur Existant.
Mais peut-être la vérité n'est-elle que de dire(s)
Justement cet existant est peut-être unique pour chacun. Dans ses modes du moins. C'est pourquoi il y a tant de variantes et donc tant de personnalité dans le dire. Il n'est pas évident à mes yeux qu'une personne qui s'exprime ne fasse qu'exprimer elle-même. La plupart des temps dire une chose c'est en dire une autre. Et de niveaux en niveaux finalement, quoi que je fasse, j'arrive toujours à une dimension de transcendance. Et l'universalité de ce phénomène m'interroge vraiment. Dire, n'est ce pas alors prêter sa voix à...Disons un pur existant ?
même- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 10/01/2012
Re: Dire l'être ?
Fata :
Dans la phrase : "Mais peut-être la vérité n'est-elle que de dire(s) ? :-)", le smiley fait écho à la parenthèse, laquelle signale un double sens :
1) .... n'est-elle que de dire
2) .... n'est-elle que de direS (des contenus)
Tu omets, par souci de saisir le SYSTEME de la communication, le contenu de ce dire.
Dans la phrase : "Mais peut-être la vérité n'est-elle que de dire(s) ? :-)", le smiley fait écho à la parenthèse, laquelle signale un double sens :
1) .... n'est-elle que de dire
2) .... n'est-elle que de direS (des contenus)
Re: Dire l'être ?
Vivre un état de conscience, le faire vivre dans des actes concrets, pour toi est-ce du domaine du dire ?
même- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 10/01/2012
Re: Dire l'être ?
Philin (varna) a écrit:A gagner le monde de l'être, ne perd-on pas les hommes ?
Plusieurs modalités de l'être ( Heidegger ), authentique et inauthentique, l'inauthenticité n'ayant pas de connotation péjorative. La vérité, l'être, est tout aussi bien dans la métaphysique que dans le débat de comptoir, se manifestant sous des formes différentes. Mais évidemment on ne peut pas ne pas conserver une notion verticale de hiérarchie, disons qu'il faut nuancer je pense.
Et l'universalité de ce phénomène m'interroge vraiment. Dire, n'est ce pas alors prêter sa voix à...Disons un pur existant ?
Qu'est-ce que t'appelle un existant ? un truc immatériel ?
Est-ce que tu parles bien de l'impersonnalité de la pensée, de la conscience ? Si c'est le cas je pense également que la pensée, la conscience n'est pas quelque chose de subjectif à la base, c'est plus une sorte de mouvement qui travaille sans cesse, une tension qui débite de son côté, et à laquelle on apporte des teintures psychologiques particulières. L'erreur je pense, c'est de penser, naturellement et basiquement, que cette pensée est purement subjective. Tous les phénomènes limites montrent et expriment une dissociaton de la pensée et de la subjectivité, je pense que c'est pas pour rien.
cedric- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 02/06/2008
Re: Dire l'être ?
même a écrit:Vivre un état de conscience, le faire vivre dans des actes concrets, pour toi est-ce du domaine du dire ?
Tu ne fais pas mention du sempiternel droit d'expression - alors donc, tel que je comprends ce que tu dis, pour moi c'est du dire-être.
"Après", pour moi il est question du où c'est dit : au monde -- et on parle alors indistinctement aux oiseaux et aux hommes -- ou bien aux hommes -- et on se met alors en danger de parler aux autres (si tant est que l'on dit-être par la parole) de "vérité de l'être". Et là c'est pas gagné. Le risque est simplement de trahir d'un côté, de mentir de l'autre ... :-)
Re: Dire l'être ?
Cédric a écrit :
Je pense que la vérité de l'être (formule lapidaire, à ce stade) ne peut être confondue avec la vérité-qui-circule, objet en effet de comptoir et de métaphysique, fut-ce à des degrès - et concernant des objets - différents.
M'enfin, par ailleurs ton message prête à confusion. Tu fais deux citations auxquelles tu réponds. Mais ces deux citations sont de deux personnes différentes. Si tu pouvais "éditer" et préciser qu'il s'agit de Même dans la deuxième ... merci. ;-)
La vérité, l'être, est tout aussi bien dans la métaphysique que dans le débat de comptoir, se manifestant sous des formes différentes.
Je pense que la vérité de l'être (formule lapidaire, à ce stade) ne peut être confondue avec la vérité-qui-circule, objet en effet de comptoir et de métaphysique, fut-ce à des degrès - et concernant des objets - différents.
M'enfin, par ailleurs ton message prête à confusion. Tu fais deux citations auxquelles tu réponds. Mais ces deux citations sont de deux personnes différentes. Si tu pouvais "éditer" et préciser qu'il s'agit de Même dans la deuxième ... merci. ;-)
Re: Dire l'être ?
La métaphysique et le comptoir ne sont pas différents. Ce qui diffère finalement c'est que là où souvent la métaphysique n'est qu'écrite, le comptoir propose un spectacle VIVANT.
même- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 10/01/2012
Re: Dire l'être ?
Pour faire court, je dirais que l'être, dont on parle entre philosophes aguerris avertis et tout, ça désigne la possibilité du vivant tout en sachant qu'il existe un écart entre cette possibilité même et le vivant en acte. Bref, c'est la possibilité qu'une telle chose soit possible, cette possibilité outrepassant, transcendant la sphère du vivant dans son aspect purement matériel. Cette possibilité semble avoir un rapport avec ce qu'on appelle la pensée ou la conscience.
C'est là la différence avec les scientifiques, je veux dire pour moi un philosophe n'est pas un scientifique, faut pas déconner, toutes les prétentions de la philosophie à la scientificité...., les scientifiques postulent un départ physique, une chronologie, les philosophes postulent une transcendance, un invariable.
C'est là la différence avec les scientifiques, je veux dire pour moi un philosophe n'est pas un scientifique, faut pas déconner, toutes les prétentions de la philosophie à la scientificité...., les scientifiques postulent un départ physique, une chronologie, les philosophes postulent une transcendance, un invariable.
cedric- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 02/06/2008
Re: Dire l'être ?
Philin (varna) a écrit:M'enfin, par ailleurs ton message prête à confusion. Tu fais deux citations auxquelles tu réponds. Mais ces deux citations sont de deux personnes différentes. Si tu pouvais "éditer" et préciser qu'il s'agit de Même dans la deuxième ... merci. ;-)
Désolé
cedric- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 02/06/2008
Re: Dire l'être ?
Ni l'un ni l'autre - moi. (Pour faire court à mon tour)
M'enfin, pour les citations plus haut, tu sais que tu peux "éditer", s'pas :-)
M'enfin, pour les citations plus haut, tu sais que tu peux "éditer", s'pas :-)
Re: Dire l'être ?
Bon me fais pas chier non plus.
cedric- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 02/06/2008
Bergame- Persona
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Date d'inscription : 03/09/2007
Re: Dire l'être ?
cedric a écrit:Pour faire court, je dirais que l'être, dont on parle entre philosophes aguerris avertis et tout, ça désigne la possibilité du vivant tout en sachant qu'il existe un écart entre cette possibilité même et le vivant en acte. Bref, c'est la possibilité qu'une telle chose soit possible, cette possibilité outrepassant, transcendant la sphère du vivant dans son aspect purement matériel. Cette possibilité semble avoir un rapport avec ce qu'on appelle la pensée ou la conscience.
C'est là la différence avec les scientifiques, je veux dire pour moi un philosophe n'est pas un scientifique, faut pas déconner, toutes les prétentions de la philosophie à la scientificité...., les scientifiques postulent un départ physique, une chronologie, les philosophes postulent une transcendance, un invariable.
Stephen Hawking écrivait récemment« La philosophie est morte, faute d’avoir su suivre les développements de la science moderne, en particulier de la physique. Ce sont les scientifiques qui ont repris le flambeau dans notre quête du savoir » pourtant il existe un mur du temps pour la physique, les physiciens l’appellent le mur de Planck : 10 puissance moins 43 seconde après le big bang, les physiciens ne savent pas remonter au-delà car les physiciens ont « besoin d’un déjà là » pour appuyer leur réflexion.
La transcendance, il me semble, est plus l’affaire de Saint Thomas d’Aquin que celle d’Aristote ou Spinoza qui serait plutôt l’immanence, mais voila la question de l’être immanent et invariable a-t-elle encore un sens depuis l’apparition de la théorie de l’évolution, la physique quantique et la théorie du chaos ?
La question de la métaphysique rationnelle est devenue le domaine des mathématiques pures la philosophie ayant pour point de vue l’ontologie. Heidegger, Russel, Sartre et bien d’autres ont développé des ontologies de « l’indifférence », constructions intellectuelles pures qui n’ont su faire école et n’existent plus qu’à travers des colloques académiques, en cela ils ont donné raison à Hawking laissant le champ libre aux physiciens et généticiens, seul Levinas nous a proposé de développer une ontologie de l’altérité qui pourrait-être fondement d’une nouvelle éthique. La philosophie traditionnellement s’occupait de dire l’être des choses, mais son discours sur l’être est concurrencé aujourd’hui par celui des sciences incluant mais pas exclusivement les sciences cognitives. La question purement philosophique n’est plus celle de « l’être du sens » mais celle du sens, du sens qui fonde l’éthique, ce qui avait fait dire à Camus dans le Mythe de Sisyphe
« Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie. »
baptiste- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 21/03/2012
Re: Dire l'être ?
baptiste a écrit: la philosophie ayant pour point de vue l’ontologie. Heidegger, Russel, Sartre et bien d’autres ont développé des ontologies de « l’indifférence », constructions intellectuelles pures qui n’ont su faire école et n’existent plus qu’à travers des colloques académiques, en cela ils ont donné raison à Hawking laissant le champ libre aux physiciens et généticiens, seul Levinas nous a proposé de développer une ontologie de l’altérité qui pourrait-être fondement d’une nouvelle éthique. »
[/i]
Mais alors, « une ontologie de l'altérité qui pourrait être fondement d’une nouvelle éthique » ne pourrait-elle te faire comprendre ces « constructions intellectuelles pures qui n’ont su faire école et n’existent plus qu’à travers des colloques académiques » autrement ? Peut-être s'agit-il en effet, ici et là, d'un autre mode de communication que celui, tout théologique il me semble, qui entend imposer dogmatiquement la vérité la plus pure, la plus scientifique, la plus, la plus, la plus – bref, la seule ? Or, sauf exception, la science en activité ne prononce pas de pareil discours dogmatique ...
Re: Dire l'être ?
Philin (varna) a écrit:
Mais alors, « une ontologie de l'altérité qui pourrait être fondement d’une nouvelle éthique » ne pourrait-elle te faire comprendre ces « constructions intellectuelles pures qui n’ont su faire école et n’existent plus qu’à travers des colloques académiques » autrement ? Peut-être s'agit-il en effet, ici et là, d'un autre mode de communication que celui, tout théologique il me semble, qui entend imposer dogmatiquement la vérité la plus pure, la plus scientifique, la plus, la plus, la plus – bref, la seule ? Or, sauf exception, la science en activité ne prononce pas de pareil discours dogmatique ... [/justify]
La question de la vérité n'est qu'une question purement académique, la science, c'est exact, ne révèle que des étapes successives, des transitions pas de vérité éternelle. C'est éloigné de l'équilibre que la matière génère de l'inédit. La nature, notre nature est dans le temps car elle peut créer autour de lois elle même hors du temps. Mais ces lois nous n'en connaissons que les effets pas la nature. "Il fallait être Newton pour remarquer que la lune tombe quand tout le monde voit qu'elle ne tombe pas." disait P.Valery, nous connaissons les effets de certaines lois comme la loi de gravitation pas leur nature.
Non, je n'accuse personne, je constate simplement qu'alors que les citoyens du monde doivent faire face à de nombreuses interrogations, la philosophie académique continue à s'intéresser à "l'être du sens", plutôt qu'au "sens", laissant ainsi le champ libre à d'autres.
baptiste- Digressi(f/ve)
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