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Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence

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Message par Vanleers Lun 22 Jan 2018 - 10:38

On a vu en quoi consistait l’éthique selon Levinas dans le post précédent et il est vrai, comme l’écrit Dan Arbib dans l’article signalé, que l’Ethique de Spinoza n’a rien d’éthique au sens de Levinas.
Mais il y a malentendu car le titre de l’ouvrage de Spinoza ne vise pas l’éthique au sens moral ou de la déontologie mais l’éthique au sens pratique, en tant que manière d’être ou de vivre, d’habitus.
Il s’agit de conquérir un nouvel ethos, une forme de vie joyeuse dans laquelle sera pleinement libérée la puissance d’agir et de penser.
Deleuze a donc raison de dire qu’en réalité l’Ethique est une éthologie.
Cette éthologie considère que l’homme est un être parfaitement naturel, qu’il n’est pas « un empire dans un empire ». C’est donc à bon droit que l’on a dit que le spinozisme était un naturalisme intégral et un antihumanisme théorique. Frédéric Lordon et Yves Citton en ont fait deux des cinq piliers du « credo minimalis » spinoziste. (Spinoza et les sciences sociales pp. 22-31 – Amsterdam Poches 2008)
Or, « Levinas restaure l'humanisme sur la base, non plus de la nature raisonnable de l'homme, mais sur l'obligation dans laquelle chaque homme se trouve de veiller sur son prochain sans pouvoir prétendre à une quelconque réciprocité. » (op. cit.)
Par contraste avec la philosophie de Spinoza, on comprend que la violence à l’égard d’autrui soit ce qu’il y a de pire dans l’éthique selon Levinas, éthique qui se fonde sur un humanisme théorique et qui définit l’homme comme le « gardien de son frère », ce qui implique nécessairement la non-violence à son égard.

Cette éthique non-violente, sans doute admirable, est-elle praticable ?

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Message par kercoz Lun 22 Jan 2018 - 10:53

Vanleers a écrit:
Il s’agit de conquérir un nouvel ethos, une forme de vie joyeuse dans laquelle sera pleinement libérée la puissance d’agir et de penser.
Deleuze a donc raison de dire qu’en réalité l’Ethique est une éthologie.

C'est complètement contradictoire sinon ridicule d' en appeler à l' éthologie pour une "forme de vie joyeuse et de libérer une puissance d'agir".
La seule façon d' agir sur l' agressivité ce sont les rites inhibiteurs. La raison ne peut qu' aller à l' encontre de ces rites. A la limite si la raison voulait accompagner ces rites, sans trop les contrer, ça pourrait le faire. Mais elle a strictement AUCUN intéret à le faire puisqu' elle sert quasi uniquement les intérets de l' individu.

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Message par hks Lun 22 Jan 2018 - 12:29

Or, « Levinas restaure l'humanisme sur la base, non plus de la nature raisonnable de l'homme, mais sur l'obligation dans laquelle chaque homme se trouve de veiller sur son prochain sans pouvoir prétendre à une quelconque réciprocité. » (op. cit.)

je me demande si je ne prèfèrerais pas Levinas ... finalement ... Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 2101236583
à cet anti-humaniste théorique  Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 177519025
"naturalisme intégral"(en fait matérialisme intégral)

lequel à force de se contraindre à raisonner n'éprouverait plus aucun sentiment.
d'empathie naturelle ...
......................
....................................
Un extrait sur F Lordon (pas ma tasse de thé  )  https://www.erudit.org/fr/revues/philoso/2014-v41-n1-philoso01460/1025733ar.pdf


« La société marche aux désirs et aux
affects. » Loin de tomber dans le psychologisme sentimental individualiste,(horreur )
cette assertion permet au contraire de dépasser l’antinomie des émotions et
des structures, pour les tenir inextricablement liées : « Il y a bien des individus (à peine)
et ils éprouvent des affects. Mais ces affects ne sont pas autre chose
que l’effet des structures
dans lesquelles les individus sont plongés. »

Dans un sursaut de lucidité Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 3438808084 , ce structuralisme des passions nous ramène à ce qui
définit la condition humaine( Eureka !), et plus précisément, à sa finitude, qui n’est telle
que parce que l’individu est ontologiquement pris dans des réseaux infinis de
déterminations causales, dont la puissance suffit à orienter celle des individus.(inexpliqué )

Néanmoins, ce déterminisme intégral est aussi ce qui permet de
concevoir les individus (inexpliqué)« comme des pôles de puissance désirante, dont le
désir, précisément, peut parfois(inexpliqué) aspirer à échapper aux normalisations institutionnelles
et, dans certaines conditions, y parvenir ». Le monde social, en
tant que puissance de détermination, n’est donc qu’affaire de désirs et d’affects
: voilà une référence évidente à la philosophie de Spinoza. E

plus bas
Fonder une
nouvelle épistémè à partir d’une image non subjective de l’humain : voilà
peut- être le vœu non avoué d’une telle entreprise. Force est donc de la faire
travailler, de lui accorder le temps nécessaire pour habiter nos esprits, pour
imprégner profondément nos schèmes mentaux les plus fondamentaux.


voila tout est là ...pas de sujet humain.
un monde de zombis mais on y va tout droit.



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Message par kercoz Lun 22 Jan 2018 - 13:37

Il n'est pas mal Lordon. Tu peux résoudre tes "inexpliqué" en remplaçant "déterminisme intégral" par "déterminisme relatif "

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Message par Vanleers Lun 22 Jan 2018 - 14:35

Avant de revenir plus directement au sujet : « Qu’est-ce que l’agressivité et la violence dans une perspective non-violente ? », je fais un détour par les théoriciens du droit naturel.
Pour ces théoriciens, notamment Hobbes et Spinoza, le droit naturel de l’individu est de faire tout ce que sa puissance le rend capable de faire.
Le droit naturel est la puissance : si un individu est assez puissant pour accaparer les biens de son voisin, voire de l’occire si nécessaire : c’est son droit.
A l’état de nature, les gros poissons mangent les petits poissons et la violence est quelque chose de tout à fait naturel.
Toutefois, l’état de nature n’a jamais existé pour les hommes et ils ont toujours vécu avec un Etat, sous une forme ou sous une autre, auquel ils ont délégué leur puissance individuelle d’exercer la violence sur autrui. Sans l’établissement d’un tel état civil, les hommes n’auraient pas survécu et se seraient entredétruits.
L’Etat exerce un pouvoir de coercition sur les citoyens mais ce n’est pas en faisant appel à leur raison. Car les hommes sont « inconstants et changeants » et peu suivent la raison et Spinoza écrit (Ethique IV 37 scolie 2) :

Spinoza a écrit:[…] un affect ne peut être réprimé que par un affect plus fort et contraire à l’affect à réprimer, et […] l’on s’abstient de causer un dommage par peur d’un dommage plus grand. C’est donc par cette loi que la Société pourra s’affermir, pourvu qu’elle s’attribue à elle-même le droit qu’a chacun de se venger et de juger du bien et du mal, et par suite, qu’elle ait le pouvoir de prescrire une règle de vie commune, de faire des lois et de les affermir, non par la raison, qui ne peut réprimer les affects (par le scol. Prop. 17 de cette p), mais par des menaces.

Le contraste est saisissant avec la conception de l’Etat selon Levinas.
Je cite la fin du paragraphe Le droit et l’Etat à partir du lien déjà donné :

sos.philosophie a écrit: Quel est alors le rôle de l'État ? A la tradition classique qui pense que l'État est l'ordre nécessaire pour réfréner les appétits d'un homme naturellement méchant, Levinas oppose un tout autre rôle à la loi : fixer une limite à la générosité envers autrui, générosité devenue excessive non par oubli de soi mais par oubli du tiers. La pluralité des échanges est constitutive du lien social.
Cependant, l'État peut se pervertir et, oubliant sa justification, écraser l'humain. Il faut rester vigilant et c'est pourquoi l'éthique est non seulement philosophie première mais aussi philosophie dernière : l'institution doit être critiquée, améliorée. La morale doit contrôler l'État.

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Message par hks Lun 22 Jan 2018 - 18:40

le résumé de SOS philosophique est incompréhensible sur un point  
Levinas oppose un tout autre rôle à la loi : fixer une limite à la générosité envers autrui, générosité devenue excessive non par oubli de soi mais par oubli du tiers.
si on ne sait pas ce que signifie le tiers

Marcel Neusch a écrit: « Le décentrement que [Levinas] nous oblige à faire du "Je" vers le "Tu", et au-delà de la relation du face-à-face, vers le tiers, c’est-à-dire l’autre, l’étranger, ne peut que déranger une civilisation du quant à soi. Ce qui est en jeu, chez Levinas, c’est une certaine manière de concevoir les rapports des hommes entre eux. Alors que toute notre civilisation exalte le "Je", que Pascal trouvait déjà haïssable, un "Je" qui pense et organise tout à partir de lui-même, Levinas accorde la priorité au "Tu", non pas le "Tu" que je choisis ou reconnais comme mon semblable, mais le "Tu" de rencontre, l’étranger, qui se met au travers de ma route, et me convoque à ma responsabilité. »
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Message par hks Lun 22 Jan 2018 - 19:01

P Simonnot a écrit:Alors que Hobbes compte essentiellement sur la crainte, voire l’effroi que suscite le Léviathan, Spinoza préfère l’adhésion par intérêt qui profite à chacun. Spinoza affirme qu’un Etat où les citoyens agissent par désir est plus puissant que celui où ils agissent par peur. Il est l’un des premier penseurs modernes à croire que la puissance de l’Etat ne se mesure pas à la terreur qu’il inspire mais à la confiance qu’il suscite.
http://nicomaque.blogspot.fr/2013/06/spinoza-vs-hobbes-raison-et-deraison.html Philppe Simonnot résume  Christian Lazzeri sur les différences ( notables ) entre Hobbes et Spinoza.

Spinoza a écrit:Non, je le répète, la fin de l’État n'est pas de faire passer les hommes de la condition d'êtres raisonnables à celle de bêtes brutes ou d'automates, mais au contraire il est institué pour que leur âme et leur corps s'acquittent en sûreté de toutes leurs fonctions, pour qu'eux-mêmes usent d'une Raison libre, pour qu'ils ne luttent point de haine, de colère ou de ruse, pour qu'ils se supportent sans malveillance les uns les autres. La fin de l’État est donc en réalité la liberté.

et vous nous parlez d' un Etat coercitif menaçant, voire terrorisant , autoritaire...un peu Hobbesien en fait

pour Hobbes
Or celui qui détient le droit d'exercer un tel pouvoir, celui-là est le souverain, et aucune loi ne peut lui être supérieure, puisqu'il est lui-même source de toute loi sans exception.

pas démocrate pour un sou . Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 177519025 Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 177519025
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Message par talvera Mar 23 Jan 2018 - 9:32

Vanleers a écrit:comment promouvoir l’agressivité, qui est une vertu, aussi bien au plan individuel qu’au plan collectif et empêcher la violence qui ne peut être que destructrice ?
On ne parle de violence que chez l’homme, alors que l’agressivité est un terme plus large. La non-violence est un vaste sujet (e.g. : Wikipedia). Dans ce sujet, à moins que le sujet porte davantage sur la question de savoir si l'agressivité est une vertu, je m’intéresse plus particulièrement à la question de la non-violence dans le droit (édition, application) et à la question de la non-violence vis-à-vis des animaux.
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Message par kercoz Mar 23 Jan 2018 - 9:58

talvera a écrit:[justify]
Vanleers a écrit:comment promouvoir l’agressivité, qui est une vertu, aussi bien au plan individuel qu’au plan collectif et empêcher la violence qui ne peut être que destructrice ?
On ne parle de violence que chez l’homme, alors que l’agressivité est un terme plus large.
Violence: a mon sens à prendre dans le sens mécanique, physique. Portant atteinte à l' intégrité physique ou morale d' un autre vivant.
Agressivité: expression d' une haine. Violence promise mais non nécessaire.

Le chat est violent avec une souris mais il n' est pas agressif. Il suffit de voir 2 chats se battre ou se menacer pour voir la différence.
L' agressivité extra-spécifique s' est réglée par la bifurcation de procédures différentes en terme de prédation et de territoire.
L' agressivité intra-spécifique, par définition ne peut utiliser ces procédures d' évitement ( sauf sous espèces ou cultures différentes).
-Pour la socialisation, il va etre utilisé des processus inhibiteur de cette agressivité. La plus simple étant la fuite qui peut être de qqs mètres. La tourterelle va tuer une autre dans une cage du fait de l' impossibilité de fuir.

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Message par Vanleers Mar 23 Jan 2018 - 17:05

talvera a écrit:
Vanleers a écrit:comment promouvoir l’agressivité, qui est une vertu, aussi bien au plan individuel qu’au plan collectif et empêcher la violence qui ne peut être que destructrice ?
On ne parle de violence que chez l’homme, alors que l’agressivité est un terme plus large. La non-violence est un vaste sujet (e.g. : Wikipedia). Dans ce sujet, à moins que le sujet porte davantage sur la question de savoir si l'agressivité est une vertu, je m’intéresse plus particulièrement à la question de la non-violence dans le droit (édition, application) et à la question de la non-violence vis-à-vis des animaux.

J’ai rapporté, dans le premier post de ce fil, la définition de la violence selon Jean-Marie Muller, théoricien et praticien de la non-violence, Je la répète :

Jean-Marie Muller a écrit: Toute manifestation de violence, quels qu’en soient le degré et l’intention, et même si elle ne va pas au terme du mouvement qui la constitue, participe à un processus de meurtre, de mise à mort. Le passage à l’acte n’aura pas nécessairement lieu, mais la visée ultime de la violence est toujours la mort de l’autre, son exclusion, son élimination, son anéantissement. Toute violence est un attentat perpétré contre l’humanité de l’autre homme.

On a vu ensuite que cette définition était cohérente avec la philosophie de Levinas ce qui laisse penser qu’une définition de la violence ne peut s’envisager que dans le cadre d’une philosophie donnée : autant de philosophies, de visions du monde, autant de définitions de la violence.

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Message par hks Mar 23 Jan 2018 - 18:24

On a vu ensuite que cette définition était cohérente avec la philosophie de Levinas ce qui laisse penser qu’une définition de la violence ne peut s’envisager que dans le cadre d’une philosophie donnée : autant de philosophies, de visions du monde, autant de définitions de la violence.

Ce n'est pas très consensuel.

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La violence est ce rythme de perturbations non acceptables, du moins pas sans dommages potentiels."  

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Message par talvera Mer 24 Jan 2018 - 11:34


kercoz a écrit: Violence: à mon sens à prendre dans le sens mécanique, physique.
Vanleers a écrit: Autant de philosophies, de visions du monde, autant de définitions de la violence.
hks a écrit: Ce n'est pas très consensuel.
Selon ce que je comprends, la violence est, historiquement, un phénomène humain. Je ne crois pas qu'on puisse parler de violence de la nature, sinon par anthropomorphisme. De ce point de vue, la violence n'est pas une, mais multiple, mouvante, souvent insaisissable, toujours changeante, elle désigne - suivant les lieux, les époques, les circonstances, voire les milieux - des réalités très différentes. Vouloir l'enfermer dans une définition fixe, simple, c'est s'exposer à la réduire et à mal comprendre l'évolution de sa spécificité historique. Lorsqu’on se penche sur les approches les plus courantes de la violence, on peut mettre en évidence au moins trois types de violence très distinctement caractérisés d'après leur champ d'application : la violence physique (qu’il faut resituer dans un contexte  biologique, évolutionniste, ethnologique, etc.), la violence économique, la violence morale ou symbolique. La violence ne peut être considérée uniquement en tant qu'agression physique. Deux aspects qui la composent sont en effet importants à retenir : un élément de force physique identifiable par ses effets; un élément plus immatériel représenté par la transgression d'un ordre normatif. Comme atteinte physique, la violence est aisément identifiable. Comme violation de normes, tout acte de transgression pourrait être qualifié de violence. C'est surtout à ce second aspect que s'intéresse l'approche sociologique.

La violence est définie et appréhendée en fonction des valeurs qui constituent les fondements de l'ordre sacré du groupe social de référence. Il s'agit pour une grande part de critères subjectifs. C'est ainsi que l'on rencontre Girard et Levinas sur le phénomène de la violence. Vivre en société peut se faire selon trois niveaux. Il y a le niveau de la nature, des bêtes, des animaux où règne la violence, la loi du plus fort. Il me semble qu'une société qui se veut d'abondance devrait être capable de ne plus camoufler le droit du plus fort sous un discours humaniste. Il y a un deuxième niveau, celui de l’ordre des lois, du contrat social, les décrets de la politique où tous les hommes sont en principes des égaux. Les paroles de Levinas et de Girard invitent à plus tendre au troisième niveau. Levinas fonde la morale, l’éthique sur la rencontre du visage d’autrui. Le visage d’autrui nous rappelle toujours qu’un autre peut être victime de nos paroles, de nos gestes, de nos actes. Girard, quant à lui, dénonce le caractère sacrificiel et parfois sacré des éruptions violentes, mais non pas le Sacré qui sert à l’épanouissement de l’homme. Le message chrétien n’aurait pas été compris par la modernité, moment où la violence se déchaîne puisque nul mythe ni sacrifice ne peuvent plus la contenir.

Quand vaincra-t-on la violence ?

Le manifeste de Séville sur la violence
La guerre et la violence ne sont pas une fatalité biologique. Il est possible de mettre fin à la guerre et aux souffrances qu’elle entraîne. Cela suppose que tous se mettent à l’œuvre et ce travail doit commencer dans l’esprit des hommes, d’hommes confiants dans la possibilité de la paix. Si l’homme a fait la guerre, alors il est capable de construire la paix. Chacun a son rôle à jouer.
Commentaire
Une enquête a montré que 50% des jeunes du monde entier croient au mythe selon lequel la guerre et la violence seraient inhérentes à la nature humaine. Cette conviction, par voie de conséquence, les rend moins susceptibles de participer à l’action en faveur de la paix.
L’esclavage a été aboli et la domination fondée sur la race et le sexe sont combattus aujourd’hui alors qu’ils ont été autrefois justifiés par la biologie. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien, tout comme pour la violence.


Dernière édition par talvera le Ven 26 Jan 2018 - 15:52, édité 2 fois
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Message par Vanleers Mer 24 Jan 2018 - 16:30

A talvera

Par quoi la violence est-elle réellement vaincue ?
Par son opposé, c’est-à-dire par la paix et la concorde.
Le rôle de l’Etat est précisément celui-là : assurer la paix et la concorde entre les citoyens.
Comme déjà indiqué, l’Etat impose la paix et la concorde par la force à des hommes qui, pour la plupart, ne suivent pas la raison et sont mus par leurs passions.
Et pourtant, si la violence est une passion, la paix et la concorde naissent de la raison, c’est-à-dire de la connaissance claire et distincte des choses
Le remède éthique que propose Levinas, à savoir la passion de l’Autre, reste d’ordre passionnel et non rationnel, ce qui pose problème.

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Message par hks Mer 24 Jan 2018 - 22:35

Il me semble que la reconnaissance d'autrui comme expérience peut être comprise rationnellement sans pour autant que le relation affective soit rationnelle.
Ainsi Spinoza comprend rationnellement les affects sans que l'objet( l'affect ou le sentiment) du raisonnement soit rationnel.
Sinon on fait du Hegel.

Ce qu'il faut montrer c'est que la rationalisation est éthique (ou plus éthique) que le sentiment ou même montrer que l' éthique est dans la rationalisation.

Le montrer pas le démontrer.
Quand le rationaliste montre un coeur sec, il n'a pas montré ce que certains attendent de l'éthique,
si ce que l'on demande c'est une reconnaissance affectueuse et quand c'est ce qu'on a à offrir.

Raisonnons : on échappe pas à un certain utilitarisme refermé sur le conatus lequel s'ouvre aux autres par intérêt personnel bien compris, certes .
Pas par empathie naturelle, mais par calcul.
Le sage tout tourné qu'il est vers Dieu, y trouve sans doute le bénéfice de la paix civile, mais pas autrui.
On a dans ce cas une éthique sans autrui, une éthique solipsiste.

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Message par kercoz Mer 24 Jan 2018 - 23:41

Vanleers a écrit:
Le remède éthique que propose Levinas, à savoir la passion de l’Autre, reste d’ordre passionnel et non rationnel, ce qui pose problème.

Connais pas trop Lévinas, mais il voit juste....C'est la rationalité qui pose problème.

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Message par baptiste Jeu 25 Jan 2018 - 8:04

Deux excès disait Pascal exclure la raison et n'admettre que la raison.

HKS, tu dis le "sage tourné vers Dieu" et le non sage tourné vers Dieu alors? Et puis est-ce vraiment un signe de sagesse de se tourner vers Dieu?

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Message par hks Jeu 25 Jan 2018 - 10:14

et le sage non tourné vers Dieu (bouddhisme par exemple)....

 baptiste, je renvoyais  à Spinoza ( et par le fait je m' adressais à Vanleers)..et donc je ne parlais pas du sage ou au non sage en" en général" mais au sage chez Spinoza.

La rationalité et plus précisément la rationalisation active ( sous forme de raisonnements suivis ) en matière de décision morale pose effectivement bien des problèmes.

Hegel vite dit incorpore la logique (du moins la sienne)à tout y compris aux sentiments qui sont une forme de l'expression de la rationalité  du Geist. cest pourquoi je dis :sinon on fait du Hegel.

Les neurosciences tendent à faire du Hegel.
Toutes les logiques (non linéaires y compris) tendent à faire du Hegel.(tout ce qui est réel est rationnel et tout ce est rationnel est réel).

On voit bien quelles butent sur une  différence d'avec l' intelligence humaine
.On ne sait pas vraiment ni penser ni où situer la différence .
On va parler de liberté ou d'autonomie de l'individu  qui n' est pas un mécanisme.
ou de grande complexité...ou de ce dont on ne peut rien dire ( Wittgenstein)

Dans cette optique Levinas tient la route.
.............................
pour Hegel
Jean-Luc Gouin a écrit:Il s'agit  de comprendre que raison, sentiment et monde sont saisis d'une même rationalité. C'est la séparation, la dichotomie qui, pour lui, est indéfendable parce que littéralement injustifiable. Hegel parlera de « La vérité du cœur et du vouloir et, ce qui est le même, leur rationalité effective ...la raison ne survole donc pas ce qui est elle l' embrasse et le comprend dans toute l 'extension de ces termes
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Message par Vanleers Jeu 25 Jan 2018 - 11:44

J’entends la raison au sens de Spinoza, c’est-à-dire un genre de connaissance.

Au sens strict, la raison c’est la connaissance du deuxième genre, c’est-à-dire la connaissance de ce qui est commun à différentes choses. C’est une connaissance vraie mais, par définition, elle ne connaît pas les essences singulières des choses.
Au sens large, la connaissance rationnelle regroupe les connaissances du deuxième et du troisième genre, cette dernière étant la connaissance vraie de l’essence des choses qui procède de la connaissance de l’essence de certains attributs de la Vie.

Exercer une violence vis-à-vis d’un être humain (on se limitera à ce cas pour plus de clarté), c’est être mu par un désir de lui faire du mal et, en conséquence, opérer quelque chose qui va lui nuire, plus ou moins gravement.
Ce désir (il vaudrait mieux l’appeler cette compulsion désirante car c’est un désir passif) est nécessairement déterminé par un affect, ici par un affect de haine.
On n’empêchera cette violence qu’en suscitant un affect contraire à cette haine et plus fort qu’elle.

Différents moyens sont envisageables.
En premier lieu car s'appliquant à tous les hommes, qu’ils suivent ou non la raison, un Etat fort empêchera la violence en menaçant les velléitaires de sanctions. Un affect de peur déterminera un désir de ne pas avoir d’ennuis qui pourra être plus fort que le désir de violence.
En deuxième lieu, les affects dictés par la raison comme la générosité ou l’amour de la Vie peuvent déterminer un désir de venir en aide à l’autre plus fort que le désir de violence.
Mentionnons enfin, ce que j’appellerai la passion de l’Autre chez Levinas, commandée par l'obéissance à ce que son visage exige.
Cet affect, que l’on peut assimiler à la pitié (commiseratio) est une passion triste « par soi mauvaise et inutile » (Ethique IV 50)
Toutefois, dans le scolie :

Spinoza a écrit: Celui que ne meut ni raison ni pitié à être secourable aux autres, on a raison de l’appeler inhumain.

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Message par hks Jeu 25 Jan 2018 - 18:58

Citation bien choisie Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 2101236583

_________________
"J'appelle "violence" ce qui excède les capacités d'intégration psychiques et  physiques.
La violence est ce rythme de perturbations non acceptables, du moins pas sans dommages potentiels."  

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Message par Vanleers Ven 26 Jan 2018 - 14:45

Sur un autre fil, j’ai déjà signalé la vidéo dans laquelle Daniel Sibony critique l’éthique de Levinas. C’est en :

https://www.youtube.com/watch?v=01Mb5I_4sf0

Cet auteur a publié une analyse de la philosophie de Levinas dans Don de soi ou partage de soi ? Le drame Levinas – Odile Jacob 2004 dont je donne les extraits suivants :

Daniel Sibony a écrit: La Scène. L’éthique de Levinas se noue non pas sur la Shoah mais sur la Scène qui la précède, la conditionne : l’arrestation de l’autre par les forces du mal en présence d’un tiers indifférent, apeuré ou complice, qui laisse la scène avoir lieu, par distraction ou négligence ; et au bout, c’est l’extermination.
[…]
L’éthique de Levinas s’enracine – d’où son impact – dans la faillite de l’Europe cultivée, faillite prévisible sauf pour qui a mis dans cette culture son espoir et ses valeurs. Levinas fut de ceux-là ; et pour eux, cette faillite a eu des effets déprimants ou régressifs, marquant quelque chose d’irréparable, qu’on ne peut (tenter de) réparer qu’au prix d’un impossible, d’une tenace surenchère, d’une provocation continue à un don pour l’autre toujours plus total. Son éthique dit ce qu’auraient dû entendre les nations devant la Scène : vous avez à répondre de l’autre, à sentir son appel, son regard, son visage ; il compte sur vous, à travers lui votre dignité se décide.
[…]
De fait, nul n’a justifié cette éthique sans renvoyer à la Shoah.
« Et justement, direz-vous, peut-on penser l’éthique sans la Shoah ?
- Mais tenir compte d’Auschwitz, est-ce prendre pour scène modèle la scène de la déportation ? N’est-ce pas plutôt combattre la haine identitaire et ses fixations collectives qui ont permis Auschwitz, ainsi que la lâcheté de ceux qui laissent faire, lâcheté qui est aussi une haine de l’être ? Les combattre n’est-ce pas tirer l’impasse identitaire, celle des Moi pleins d’eux-mêmes et celle des Moi souffrant du vide, vers l’appel d’être qui lui manque ? plutôt que de prétendre, moi, payer l’appoint, combler le déficit identitaire des haineux, et m’offrir comme si j’étais l’être en personne ? »
L’exergue d’Autrement qu’être – à la mémoire des victimes du nazisme(1) – dit que la Scène d’arrestation est essentielle, mais le livre n’en tire pas les conséquences, ne donne aucun moyen de franchir, de penser au-delà, comme si elle était le début et la fin de l’éthique. Du coup l’exergue est presque abusif : de quel droit prendre sur soi toute cette souffrance pour en faire la base d’une éthique ? (pp. 55-57).

(1) « À la mémoire des êtres les plus proches parmi les six millions d’assassinés par les nationaux-socialistes, à côté des millions et des millions d’humains de toutes confessions et de toutes nations, victimes de la même haine de l’autre homme, du même antisémitisme. »

On prolongera l’analyse de D. Sibony dans le prochain post.

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Message par talvera Ven 26 Jan 2018 - 15:55

Vanleers a écrit:
Daniel Sibony a écrit: de quel droit prendre sur soi toute cette souffrance pour en faire la base d’une éthique ?
Nous sommes tous d'accords ici pour dire que la violence est définie et appréhendée en fonction de critères subjectifs et qu'il n'y a pas de paroles d'évangile en la matière.


Dernière édition par talvera le Ven 26 Jan 2018 - 16:07, édité 2 fois
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Message par talvera Ven 26 Jan 2018 - 16:03

Paul Ricœur a écrit:Ethique et morale
C’est à cause de la violence qu’il faut passer de l’éthique à la morale.
A la violence répond l'interdiction morale : Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te soit fait.


Dernière édition par talvera le Ven 26 Jan 2018 - 16:55, édité 1 fois
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Message par Vanleers Ven 26 Jan 2018 - 16:14

Daniel Sibony, qui est également psychanalyste, prolonge son analyse de l’éthique de Levinas mais on n’en donnera ici que les premiers éléments.

Daniel Sibony a écrit: Si cette Scène – d’arrestation de l’autre – est « fondatrice », on comprend que l’expiation y joue le rôle essentiel. D’où le recours au cri de Dostoïevski : Nous sommes tous coupables de tout et de tous devant tous… Coupables du crime d’exister ; sous-entendu : après ce qui s’est passé, exister c’est avoir laissé faire. On est d’avance endettés d’une dette impayable. Mais hors-Scène, dans la vie, qu’est-ce qui distingue cette dette impayable de la dette obsessionnelle par laquelle le névrosé comble en fantasme le déficit de l’Autre (l’Autre parental ou inconscient) et prend contact avec la loi grâce à l’obsession de la faute ? contact qu’il fixe et qu’il ne trouve pas autrement ?
Dans la clinique des obsessions, si un sujet est « obsédé » par le malheur de l’autre, c’est que ce malheur le replonge dans une impasse qui lui est propre, et qu’il se sert de cette victime pour tenter d’en sortir ; en vain. De sorte qu’aider l’autre exige déjà de se délivrer de l’obsession qu’il vous donne ; il faut pouvoir l’oublier sans le refouler ; trouver le désir de l’aider plutôt que le carcan où figer son désir et où l’écrasement de soi fait jouir sur le mode de la toute-puissance.
[…]
Dans la Scène primordiale, la chute de l’autre (qu’on emmène) me destitue, me fait perdre la face. Ailleurs aussi, quand le destin de l’autre dépend de moi, si peu que ce soit, je perds la face si je me défile. Encore que, dans les cas non aigus, l’autre refuse souvent ma manie de répondre pour lui, mon envie de l’envelopper de ma responsabilité, ma façon d’étendre celle-ci à l’infini pour l’entourer. Que puis-je faire alors ? répondre avec lui ? à travers lui ? Ce serait donc le partage, de l’être et du manque-à-être, sous le regard du Tiers symbolique qui est au moins l’être-temps.
Mais cela, Levinas n’en veut pas, il me ramène à la Scène primordiale où l’autre s’effondre et où je dois faire quelque chose, en effet.
[…]
Du coup, on pourrait dire : je suis responsable non pas de l’autre mais de la loi qui le protège ; il l’est aussi, à sa façon, de la loi qui me protège. Là encore, partage et médiation. Si je réponds pour lui, directement, nous voilà « confondus ». Et c’est le cas quand ce qui lui arrive me « confond », quand il est arrêté sans que je lève le petit doigt : alors nous sommes confondus dans cette trahison de la loi. Lui et moi. Or la loi (symbolique) est une certaine ligature de notre rapport à l’être. De sorte qu’à nouveau, à travers l’autre, c’est de mon rapport à l’être et à la loi que j’ai à répondre : y compris de mon aveuglement quand au lieu d’une loi de vie, qui soutient mes possibilités d’être, c’est une loi de mort et de renoncement que je mets au-dessus de ma vie.

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Message par hks Ven 26 Jan 2018 - 21:07

En 1996 dans l'Arche n459
Sibony mentionne la remarque que lui fit Levinas présent dans son jury de thèse.
 Sibony parlait de "coup christique"
et Levinas de lui demander :"mais qu' est -ce qu'il vous on fait les chrétiens ?"

Daniel Sibony considère Levinas comme " un christ sans miracle et sans mise en croix "( sic)

Sibony se veut-il plus juif que Levinas, lequel avait dejà reproché à Spinoza ne plus l'être du tout .

Sibony a écrit:J ai toujours eu l'impression que l'antipathie si légitime - de Levinas pour la conduite de Heidegger …l 'a obligé, suite à la guerre, à sacrifier toute la partie de la pensée juive que Heidegger a exploitée  Agressivité et violence dans la perspective de la non-violence - Page 2 4221839403 , pour se rabattre, lui, sur une éthique plus chrétienne faites de voeux … qui sonnent faux dans la bouche de ceux pour qui l'autre qui compte le plus c'est abord eux  (page 77)

Sûr qu'on peut voir Sibony comme un petit peu communautaire (un petit peu quand même, sans se forcer, on peut)
et moi qui voyais Levinas comme déjà suffisamment communautaire.
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Message par hks Ven 26 Jan 2018 - 21:08

Lévinas précise l’objectif
recherché à travers l’usage du mot "éthique"
:
« Ma tâche ne
consiste pas à construire l’éthique ; j’essaie seulement d’en
chercher le sens. Je ne crois pas en effet que toute philosophie
doive être pragmatique »
199 ; l’éthique est loin d’être un savoirvivre.
Elle ne nécessite aucun volontarisme. L’éthique est une
pensée qui s’exerce nécessairement. Elle signifie essentiellement
ce qui se passe dans le rapport interhumain ou le rapport d’un
homme avec un autre homme. Pour Lévinas, la relation
bienveillante à l’égard d’autrui est première : « L’éthique précède
la doctrine… »,

je cite
https://www.google.fr/search?q=TH%C3%88SE+DE+DOCTORAT+UNIQUE+EN+PHILOSOPHIE+Soutenue+le+10+janvier+2013+par+BAMBARA+Romuald+Evariste&oq=TH%C3%88SE+DE+DOCTORAT+UNIQUE+EN+PHILOSOPHIE+Soutenue+le+10+janvier+2013+par+BAMBARA+Romuald+Evariste&aqs=chrome..69i57&sourceid=chrome&ie=UTF-8
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Message par Vanleers Sam 27 Jan 2018 - 11:17

Etre violent vis-à-vis d’un être humain, c’est lui nuire en y étant déterminé par un affect de haine.
La non-violence vise à réprimer cette passion triste et à transformer le violent en agressif, c’est-à-dire quelqu’un déterminé à agir par un affect issu de la raison.
L’éthique de Levinas va dans ce sens en contraignant le violent à reconnaître qu’il y a une communauté de nature entre lui et celui sur lequel il désire exercer la violence.
Cette contrainte n’est pas pleinement rationnelle comme le montre Daniel Sibony mais, cherchant à rectifier une erreur de perspective sur l’être humain, ses effets tendent néanmoins à réduire la violence.

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