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Apprendre à mourir ?

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Message par Courtial Lun 18 Nov 2013 - 11:33

On connaît la déclaration de Socrate (à moins que ce ne soit Platon) selon laquelle "philosopher, c'est apprendre à mourir".

Au-delà de la signification exprès que cela a dans cette philosophie, on peut s'interroger sur la place plus ou moins importante que doit occuper la pensée de la mort dans la philosophie, et bien entendu dans la vie en général.

Il ne s'agit pas d'instruire une opposition absurde entre penser à la mort et penser à la vie, comme si c'était une alternative. Néanmoins, on pourrait dire très grossièrement qu'il y a des philosophies qui accordent à cette pensée de la mort une grande importance et d'autres non : alors qu'Epicure nous dit que "la mort n'est rien pour nous", Marc-Aurèle nous impose un memento mori incessant. Schopenhauer également. Spinoza, qu'on rapproche souvent plus des Stoïciens, semble plutôt avoir été épicurien sur ce point : "l'homme sage ne pense à rien qu'à la mort, et sa sagesse est une méditation, non de la mort, mais de la vie" etc. C'est un point essentiel chez Heidegger, mais cela n'a pas l'air de beaucoup perturber Sartre.

Je cite ces exemples-là non pour indiquer un cursus studiorum mais pour faire sentir que ces différences ne sont sans doute pas solubles dans les grosses oppositions doctrinales (matérialistes contre spiritualistes, phénoménologues contre m marxistes, empiristes et rationalistes, chrétiens et athées, etc.)

Bref, quelle place faut-il donner à une méditation de la mort ?

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Message par poussbois Lun 18 Nov 2013 - 21:04

J'y rajouterais une approche de la mort plus positive, celle d'un écologiste qui constate autour de lui que la mort est source de vie et ce n'est pas qu'une boutade ou une observation de jardinier spécialiste de compost ou de poudre d'os. C'est le constat que le dynamisme, l'élan vital et la diversité sont maintenues par la succession des générations, qui entretiennent, cohorte après cohorte, toutes les potentialités d'une espèce. Il y a une forme de stérilité à l'immortalité. C'est le cas de ces arbres multimillénaires, à croissance déraisonnablement lente

Et pour continuer sur le positif, il y a la mort révolutionnaire et fertile d'un Kaliayev, dans les Justes. La mort et le crime "pour donner la vie", parce qu'on aime la vie justement et qu'il est alors possible de la défendre en y sacrifiant sa morale et sa propre existence. On peut y voir une forme de transcendance, j'y vois plutôt une absence de choix : la vie bafouée est insupportable, vivre néanmoins tout en le sachant est insupportable, quitte à mourir autant le faire en donnant une chance à ce (ceux) qu'on aime de goûter à une pure vitalité sans chaîne. Un acte politique qui vient en écho avec le fameux "je me révolte donc nous sommes".

Enfin, il me semblerait difficile de faire un travail sur la mort en faisant l'impasse sur la philosophie japonaise et son approche du suicide. je regrette toujours de m'y être si peu plongé alors même que j'aurais de quoi dans ma bibliothèque, mais le temps me manque. Quoi qu'il en soit et après avoir lu pas mal Mishima et quelques traités sur l'art de la guerre, les Japonais considèrent la mort comme un moyen parmi d'autres pour faire preuve de son respect envers soi-même, son statut social et celui de son entourage. On est à mon sens éloigné d'un philosophie pour apprendre à mourir, pour tendre vers une philosophie pour laquelle la mort est bien un échec sauf si elle est maîtrisée et ritualisée.


Quelle place faut-il donner à une méditation de la mort ? Celle qui lui revient, une des premières. Même Epicure, alors qu'il nous dit qu'elle ne peut nous être que rien, en fait un chapitre essentiel de sa philosophie. Un rien qui prend autant de place, voilà qui laisse perplexe. Ou peut-être est-ce un point qu'il considérait comme négligeable, mais sur lequel nous fixons notre attention, car nous ne sommes pas sortis de la superstition et des terreurs de l'inconnu ? C'est possible, sans doute que ceux qui ne souhaitent pas accorder à la mort un intérêt quelconque sont ceux qui comme Epicure se moquent du destin. Et pourtant, il avait notion de son destin et de l'importance de son leg ! le jardin et ses écrits. Lui-même a construit sa vie autour de cette position de liberté face à la mort. Il ne s'est simplement pas enchaîné à quelque chose qui l'aurait toujours dépassé, mais il en a tenu compte néanmoins : "le souci de bien vivre et le souci de bien mourir ne font qu'un". Sa philosophie restera a jamais une philosophie de mortel, ce qu'il était et ce qu'il revendiquait.

Donc opposition d'Epicure avec les philosophie mortifères et appelant à la mort, oui, sans doute, mais certainement pas opposition avec celles qui appellent à apprendre à bien mourir.

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Message par Courtial Lun 18 Nov 2013 - 22:06

Avec toutes mes excuses aux professionnels de la profession de traducteur, je vous propose un tout petit moment d'amateurisme, pour nous détendre,  avec ma trad. d'un bout de Heidegger, Sein und Zeit, par. 51, pp. 252-53 dans mon édition (Niemeyer 1979)

Heidegger, Sein und Zeit a écrit:Dans la vie publique, où s'insère l'existence en communauté quotidienne, on connaît la mort comme un événement que nous rencontrons constamment, nous rencontrons des "cas de mort". Celui-ci ou celui-là, qu'il soit un proche ou un étranger, "meurt". Des inconnus "meurent" tous les jours, à toute heure. "La mort" advient comme un événement bien connu dans le monde. Comme telle, elle ne nous étonne pas plus qu'un événement quotidien. Le On a déjà une explication toute prête pour cet événement. Que l'on tienne à ce sujet des propos explicites ou plus vagues, il est dit qu'on finit par mourir un jour ou l'autre, mais que, pour le moment, on n'est pas touché.
L'analyse du "on meurt" dévoile sans ambiguïté l'être-vers-la mort quotidien. Dans ce discours, la mort devient quelque chose d'indéterminé, qui doit bien surgir de quelque part, mais qui, pour le moment, n'est pas encore là-devant, qui donc ne menace pas. Le "on meurt" dispense l'idée que la mort frappe, en fin de compte, le On. L'explication courante dit : On meurt, parce que chacun et On peut s'en convaincre ; mais justement, il ne s'agit pas de moi, car ce On n'est personne. "Mourir" est sans doute un événement qui arrive à l'être-là, mais à personne en propre. S'il existe une ambiguïté du discours, elle apparaît bien dans ce propos sur la mort. Mourir, qui est, sans délégation possible, une possibilité propre à moi-même, devient un événement qui se produit en frappant le On. Ce discours parle de la mort comme de quelque chose de réel, voilant ainsi qu'elle est une possibilité, voilant par là-même ses moments constitutifs, et qu'elle est sans relation, indépassable. Dans cette ambiguité,l'être-là risque de se perdre dans le On, au détriment de son pouvoir-être le plus propre. Le On se permet et accroît la tentation d'escamoter l'être vers la mort dans ce qu'il a de plus propre (...)
Mais le On, tout en rassurant l'être-là en éloignant de lui sa mort, s'occupe de prescrire comment il faut en juger et comment il faut se comporter face à la mort. Ainsi, "penser à la mort" apparaît comme une crainte lâche, un manque de résolution et une fuite de la réalité. Le On ne laisse pas apparaître le courage de l'angoisse de la mort. Dans l'angoisse devant la mort, l'être-là est confronté à lui-même comme possibilité énigmatique et indépassable. Le On transforme cette angoisse en une crainte devant un événement qui va arriver. L'angoisse, présentée de façon équivoque comme une peur, apparaît comme une faiblesse qu'un être-là sûr de soi ne devrait pas connaître. D'après le décret implicite du On, "il nous appartient" d'opposer un calme indifférent au "fait" qu'on meurt. En développant cet air d'indifférence "supérieure", l'être-là aliène sa possibilité d'être la plus propre et sans relation.
Les soulignements et guillemets sont tous de Heidegger, naturellement.


Dernière édition par Courtial le Lun 18 Nov 2013 - 22:46, édité 1 fois

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Message par Courtial Lun 18 Nov 2013 - 22:30

poussbois a écrit:Même Epicure, alors qu'il nous dit qu'elle ne peut nous être que rien, en fait un chapitre essentiel de sa philosophie.
Bien sûr, tout à fait.
C'est même à vrai dire non pas seulement un chapitre, mais même l'essentiel de sa philosophie.
Marcel Conche l'a abondamment montré : le matérialisme, c'est une philosophie de la mort. Pour le matérialiste radical, la vie émane de la non-vie et se ramène ultimement à elle. Les atomes, ils existent, certes, et il n'y a finalement qu'eux qui existent vraiment (ils sont incréés et indestructibles, ils ont toutes les caractéristiques essentielles de "l'Etre", même au sens le plus obtusément parménidien). Mais exister n'est pas vivre et je ne dirais pas qu'un atome "vit". Il est, point barre.
Mais si les atomes sont l'origine de tout (ce qui est vivant et ce qui ne l'est pas), cela signifie seulement que le fond de la vie est la non-vie.

Et lorsque je serai mort, je serais bien un quelque chose, du point de vue matériel. On trouvera toujours quelques molécules au fond d'une tombe ou dans une boîte, et il faudra bien dire que c'est moi (quoi ou qui d'autre ? ). Ce qui signifie derechef que ce que le matérialiste identifie comme moi, c'est moi comme mort.


Dernière édition par Courtial le Lun 18 Nov 2013 - 22:39, édité 1 fois

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Message par poussbois Lun 18 Nov 2013 - 22:39

Ca doit pas être très bien traduit : j'ai rien compris... lol


Non, en fait, j'essaye depuis tout à l'heure de m’approprier ce texte, mais le résultat est sans utilité aucune pour le forum.

J'ai l'impression que je finirais par arriver à quelque chose : dépossession, ambiguïté, déphasage, bon, c'est pas ça, mais ça viendra.  Sauf pour la dernière phrase, où là je ne voie vraiment pas ce qui se joue :

"l'être-là aliène sa possibilité d'être la plus propre et sans relation." C'est quoi une possibilité sans relation ?

Enfin, Heidegger décrit une fatalité ? ou une conjoncture sociale contre laquelle nous avons la possibilité d'aller ?

============================

"sans relation" c'est sans relation avec le On, que je suis _on. Et "la plus propre", la plus intime, enfin à soi, à l'être-là (l'immanent, enfin celui qui fait l'expérience sensible de son existence) .... Heidegger pour les nuls, ça existe ?


Dernière édition par poussbois le Lun 18 Nov 2013 - 22:54, édité 1 fois

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Message par Courtial Lun 18 Nov 2013 - 22:50

Je m'en suis déjà excusé.
C'est de la traduction sauvage, j'ai pas de diplôme, je n'ai sans doute pas le droit de prendre ce texte sans payer des royalties.
mais tu vas quand même pas me balancer, hein, dis ?

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Message par poussbois Lun 18 Nov 2013 - 23:00

Au final, ce serait presque une charge contre le détachement épicurien ce texte, non ?

Un détachement qui nous priverait de notre seule façon d'avoir une expérience intime de la conscience de notre propre fin. Or, il n'y a que dans cette intimité qu'il serait possible de savoir comment nous sommes capables, nous-même, d'appréhender notre fin. L'ambiguïté, la dépossession et au final la prescription permettent à une société de s'organiser "un bonheur pour tous" débarrasser d'angoisses morbides qui devraient pourtant être constitutif de notre être intime.

Je suis complètement à côté ou un petit peu dedans quand même ? Ho et puis si tu te permets une traduction sauvage, je peux me permettre une réinterprétation sauvage également... bon, tu as peut être fait plus d'Allemand que moi de philo, c'est le risque sur internet de trouver plus sauvage que soi.


Dernière édition par poussbois le Lun 18 Nov 2013 - 23:33, édité 1 fois

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Message par Courtial Lun 18 Nov 2013 - 23:47

poussbois a écrit:Au final, ce serait presque une charge contre le détachement épicurien ce texte, non ?

Un détachement qui nous priverait de notre seule façon d'avoir une expérience intime de la conscience de notre propre fin.
Certainement. Mais il faut revenir à ce que Heidegger essaye de faire voir au début du texte.
Encore une fois, je ne suis pas un spécialiste de Heidegger et je ne peux pas tout expliquer, il y a des tas de trucs que je ne comprends pas plus que toi. J'en connais un peu, et certes bien plus que la plupart des gens, mais, là encore, je n'ai aucun diplôme, pas de papier qui m'autorise à administrer la Parole de Heidegger.

Touchant à Epicure, il aborde la question par l'idée qu'on a peur de la mort. Et il dit que c'est faux. Heidegger répond qu'il a raison, mais pas pour les raisons qu'il donne.
C'est très important, parce que beaucoup de questions sont suspendues à l'idée qu'on aurait peur de la mort. Par exemple ceux qui disent qu'on a inventé Dieu, la vie éternelle et tout cela parce que l'homme a peur de la mort (donc il se "rassure" en rêvant à l'immortalité, une autre vie, etc.). Il y a donc là un socle d'argumentation puissant.
Mais Heidegger explique ici que le fait de présenter la question comme une affaire de peur (d'où tout ce qu'il dit sur : être sur de soi, être courageux, regarder la réalité en face, etc.) est une falsification phénoménologique.
Ceci parce que l'on a peur de quelque chose. Par exemple d'un événement (tomber malade, être mordu par un chien, etc.). Mais la mort n'est justement pas un événement. Et encore moins une chose (le chien méchant, les virus, etc.). La mort, cela veut dire Moi = rien. Je ne suis pas confronté à un quelque chose qui me menace, mais à la possibilité,incluse dans mon être même, d'être rien.
Je ne me bats pas contre un quelque chose qui va débarquer d'un coin quelconque, mais la nature propre de mon être qui est d'être vers rien. (Je traduis : être vers rien plutôt qu'être pour rien, "être vers la mort" plutôt qu'"être pour la mort", en allemand : zu dem Tode sein,  à dessein, naturellement ; il n'y a aucune finalité là-dedans, c'est absurde, il n'y a rien qui fait que je devrais mourir).

Autrement dit : dans le rapport avec la mort, je suis certes confronté. Mais pas confronté à un quelque chose, ou à un événement, à une "réalité", mais au rien, au néant, et qui n'est pas simplement le rien indéterminé, mais le rien de moi.
Epicure a donc raison de dire que la mort n'est rien. Mais il croit que c'est seulement un rien de rien et cela ne convient pas. C'est le rien de moi, dont il s'agit.

Si à présent nous prenons au sérieux le rapport à la mort comme un rapport à rien, ce qui évacue la mise en place épicurienne (il n'y a qu'un fou, un malade, pour avoir peur d'un rien, Epicure le dit explicitement et avec raison), il nous reste maintenant le rapport, non avec quelque chose, mais avec rien.
Et ceci, c'est l'expérience de l'angoisse, qui est une "peur", mais devant rien.
C'est pourquoi Heidegger considère que la question de la peur de la mort est une façon de dévoyer et d'oblitérer la question de l'angoisse. Il dit d'ailleurs un peu plus loin (mais j'ai la flemme, il est tard, je vais fermer la maison, de ressortir le passage précis) que la peur, c'est en fait la lâcheté de ne pas affronter l'angoisse.

Bon, là je ferme la boutique. J'espère t'avoir éclairé (et non embrouillé) avec ces explications.

En plus, je ne tenais pas plus que cela à évoquer ce genre de choses, j'avais donné ce sujet en pensant à Jankélévitch, à Montaigne, à Marc-Aurèle,  à Augustin, des trucs comme ça.


Dernière édition par Courtial le Mar 19 Nov 2013 - 0:15, édité 2 fois

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Message par poussbois Mar 19 Nov 2013 - 0:07

"Le On ne laisse pas apparaître le courage de l'angoisse de la mort."

Il y a effectivement une grande différence entre angoisse et peur. Et je n'avais pas vu ce distinguo entre la peur de quelque chose et l'angoisse du rien. Merci.

Avant de passer à Augustin, autre question : Heidegger part donc du principe qu'il nous est possible d'avoir conscience de notre propre fin, ce qui reste encore à prouver. Il est très amusant de voir chez les alpinistes comme chez les plongeurs (deux mondes que je connais bien) le nombre de personnes dont l'angoisse est moins de mourir que de ne pas être retrouvé après leur mort, corps englouti par la glace ou partant à la dérive dans le courant. Dans les deux cas, il reste quelque chose, le rien de la mort est antinomique avec le corps qui reste...

Confronté au néant comme à l'infini, il faudrait encore que le risque de "se perdre dans le On" après avoir accepté l'ambiguïté qui nous fait confondre une possibilité (propre) avec un événement, il faudrait donc que ce risque soit dépendant de nous comme le propose Heidegger, et non une fatalité. C'est au final une philosophie assez optimiste sur notre capacité à appréhender l'ensemble de notre vie.


Et puisque tu parles de Montaigne, un texte bien connue d'un philosophe qui accepte avec bonheur de se voir partir vers le rien par petit bout :

Montaigne a écrit:Dieu fait grâce à ceux à qui il soustrait la vie par le menu ; c’est le seul bénéfice de la vieillesse. La dernière mort en sera d’autant moins plaine et nuisible : elle ne tuera plus qu’un demi ou un quart d’homme. Voilà une dent qui me vient de choir, sans douleur, sans effort : c’était le terme naturel de sa durée. Et cette partie de mon être et plusieurs autres sont déjà mortes, autres demi mortes, des plus actives et qui tenaient le premier rang pendant la vigueur de mon âge. C’est ainsi que je fonds et échappe à moi. Quelle bêtise sera-ce à mon entendement de sentir le saut de cette chute, déjà si avancée, comme si elle était entière ? Je ne l’espère pas. A la vérité, je reçois une principale consolation, aux pensées de ma mort, qu’elle soit des justes et naturelles, et que mes-huy je ne puisse en cela requérir ni espérer de la destinée faveur qu’illégitime. Les hommes se font accroire qu’ils ont eu autrefois, comme la stature, la vie aussi plus grande. Mais Solon, qui est de ces vieux temps là, en taille pourtant l’extrême durée à soixante dix ans. Moi, qui ai tant adoré, et si universellement, cet ariston metron du temps passé et ai pris pour la plus parfaite la moyenne mesure, prétendrais-je une démesurée et monstrueuse vieillesse ? Tout ce qui vient au revers du cours de nature peut être fâcheux, mais ce qui vient selon elle doit être toujours plaisant. Omnia quae secundum naturam fiunt, sunt habenda in bonis. Par ainsi, dit Platon, la mort que les plaies ou maladies apportent soit violente, mais celle qui nous surprend, la vieillesse nous y conduisant, est de toutes la plus légère et aucunement délicieuse. Vitam adolescentibus vis aufert, senibus maturitas. La mort se mêle et confond par tout à notre vie : le déclin préoccupe son heure et s’ingère au cours de notre avancement même. J’ai des portraits de ma forme de vingt et cinq et de trente cinq ans ; je les compare avec celui d’asteure : combien de fois ce n’est plus moi, combien est mon image présente plus éloignée de celles là que de celle de mon trépas. C'est trop abusé de nature de la tracasser si loin, qu’elle soit contrainte de nous quitter et abandonner notre conduite, nos yeux, nos dents, nos jambes et le reste à la merci d’un secours étranger et mendié, et nous résigner entre les mains de l’art, lasse de nous suivre.

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Message par quid Mar 19 Nov 2013 - 2:19

Concernant le texte de Heidegger,

pour moi, çà parle effectivement entre autre de la différence entre la peur et l'angoisse, mais aussi entre le vécu, et le projeté. Il fustige également à la fin, le côté "j'ai pas peur", la valeur sociétale accordée à ceux qui ne craignent pas la mort, sans doute dans le fait de la banaliser, de ne pas en parler, mais il fait remarquer qu'en fait, cette attitude, c'est ne pas y faire face personnellement et que c'est plus une négation, un récit, que cela n'a rien d'une attitude courageuse.

Je rajouterai, au delà du texte, que cela n'est pas une garantie pour chasser l'angoisse, mais parfois seulement se mettre une contrainte supplémentaire qui serait faire comme si on pouvait ne pas en tenir compte, s'empêcher finalement mutuellement d'en parler de cette angoisse. Car pour en parler, encore faut-il la regarder en face et ne pas la considérer comme une faiblesse.

Donc qu'est-ce que j'ai compris :

Que projeter la mort comme un événement, est une extension qui est abusive. Car la mort, çà concerne chaque personne, mais chaque personne en particulier. La mort, çà ne concerne que celui qui meurt. Donc projeter sa propre mort comme ayant une relation avec la mort commune comme fait divers, c'est fausser la considération de sa propre mort. On échange une angoisse contre une crainte.

En faisant de la mort un fait divers, on en fait quelque chose à laquelle on pourrait échapper, une crainte qui dilue l'angoisse de sa propre mort. La crainte devient un enjeu à surmonter en tant que crainte, comme toute crainte infantile ou non, alors que l'angoisse survient lorsque la réalité de l'événement surgit pour soi.

La mort, en premier lieu, c'est ce qui ne nous concerne pas. Mais contrairement au fait divers qui peut ne jamais nous concerner, la mort nous concerne tout de même (elle nous concerne en dernier lieu Apprendre à mourir ?  4149931130 ). Elle n'est pas un fait divers qui nous arrive ou non, elle est un fait qui arrivera à chacun. Mais une attitude qui consiste à la prendre comme un fait divers, à vivre sans cette réalité qui me concerne incontestablement, conduit à vivre dans une réalité particulière qui ne l'est pas. Toute connaissance est obligeante si elle nous conduit à croire celle-ci. La connaissance de notre mort nous oblige à faire avec et non pas sans.



Il y a quelque chose je n'avais pas vu dans le texte et que Courtial a mis en évidence dans son commentaire, c'est le côté « rien » de la mort :

Phrase extraites de Sein und Zeit par Heidegger (Traduit de l'allemand par Courtial) a écrit:..Dans ce discours, la mort devient quelque chose d'indéterminé, qui doit bien surgir de quelque part, mais qui, pour le moment, n'est pas encore là-devant, qui donc ne menace pas.

...mais justement, il ne s'agit pas de moi, car ce On n'est personne. "Mourir" est sans doute un événement qui arrive à l'être-là, mais à personne en propre.

...Mourir, qui est, sans délégation possible, une possibilité propre à moi-même, devient un événement qui se produit en frappant le On. Ce discours parle de la mort comme de quelque chose de réel, voilant ainsi qu'elle est une possibilité, voilant par là-même ses moments constitutifs, et qu'elle est sans relation, indépassable.

...Dans l'angoisse devant la mort, l'être-là est confronté à lui-même comme possibilité énigmatique et indépassable.
Du coup la différence entre crainte et angoisse est également que la crainte est relative à quelque chose qui arrive alors que l'angoisse serait plutôt face à l'inconnu, le vide, l'indépassable.

La mort projetée en tant qu'événement par le On est un moyen de concrétiser sa propre mort qui n'est finalement qu'un vide.
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Message par lanK Mar 19 Nov 2013 - 15:06

Je veux relever ce que dit Quid :
"La mort, en premier lieu, c'est ce qui ne nous concerne pas."
et " la mort nous concerne tout de même (elle nous concerne en dernier lieu  ). "
je sais ou sens confusément qu'il y a en premier lieu la mort, qu'elle est déjà là.
cette question qui semble terrible, effrayante , angoissante ... celle de l'après moi-nous,
celle qui obnubile et donc oblitère celle de l'avant ,des limbes et autres contrées insondables.
Le discours peut sembler suffisant, mais n'est-il qu'une posture d'indifférence teintée face à ce dont il s'agit (qui nous meut,nous agite),l'absence .
Être ailleurs ,mais où donc.

Je lis actuellement Le sermon sur la chute de Rome,
"Marcel rentra au village pour enterrer son père, puis sa mère, et il ne les pleura pas parce que la mort avait toujours été leur vocation et il était presque heureux qu'ils aient enfin pu répondre à un appel qu'ils avaient dû feindre si longtemps de ne pas entendre. "
des emprunts à Saint Augustin :
"Tu es étonné parce que le monde touche à sa fin ? Etonne-toi plutôt de le voir parvenu à un âge si avancé. Le monde est comme un homme : il naît, il grandit et il meurt. (...) Dans sa vieillesse, l'homme est donc rempli de misères, et le monde dans sa vieillesse est aussi rempli de calamités. (...) Le Christ te dit : Le monde s'en va, le monde est vieux, le monde succombe, le monde est déjà haletant de vétusté, mais ne crains rien : ta jeunesse se renouvellera comme celle de l'aigle.
Saint Augustin, sermon 81, §8, décembre 410 "

L'espérance d'un ailleurs,d'autre chose .

Je regardais hier soir un débat à la tv mots croisés
colères françaises
j'ai retenu ce mot : chaos
devoir s'organiser pour l'après.

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Message par quid Mar 19 Nov 2013 - 23:05

À lanK
lanK a écrit:
Je lis actuellement Le sermon sur la chute de Rome,
"Marcel rentra au village pour enterrer son père, puis sa mère, et il ne les pleura pas parce que la mort avait toujours été leur vocation et il était presque heureux qu'ils aient enfin pu répondre à un appel qu'ils avaient dû feindre si longtemps de ne pas entendre. "
Voilà effectivement qui illustre ce que je pensais en disant cela :
Quid a écrit:La mort, en premier lieu, c'est ce qui ne nous concerne pas. Mais contrairement au fait divers qui peut ne jamais nous concerner, la mort nous concerne tout de même, elle nous concerne en dernier lieu.
Je n'avais pas mis spécialement les parenthèses dans un premier temps.

La question est de « comment vivre l'appréhension de sa propre mort ? »

Et je remarque qu'en général on ne s'en préoccupe pas tant qu'on ne se sent pas concerné.

Mais qu'on est concerné implicitement, la perspective de sa propre mort plane sur chacun.

En tenir compte ne vient pas également pour chacun. En tout cas ne pas en tenir compte nécessitera une considération minimale.

Mais dans tout les cas, cette considération nous rattrapera (en dernier lieu).
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Message par Geo Rum Phil Mer 20 Nov 2013 - 12:09

Courtial a écrit:On connaît la déclaration de Socrate (à moins que ce ne soit Platon) selon laquelle "philosopher, c'est apprendre à mourir".
Apprendre à mourir, ce n’est jamais parvenir à la maturité ! Apprendre à mourir ?  2838363678 

Correction :
« Philosopher, c’est apprendre à mûrir »…car mûrir c’est bon pour l’immaturité des morts vivants.

On les mal connaît, les déclarations de Socrate, Bouddha et Jésus,… selon les interprétations fallacieuses des sophistes et pharisiens qui les haïssent, qui ont déformé leurs paroles selon leurs intérêts de pouvoir sur les autres. Apprendre à mourir ?  77115985 

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Message par victor.digiorgi Mer 20 Nov 2013 - 17:22

Courtial a écrit:Je m'en suis déjà excusé.
C'est de la traduction sauvage, j'ai pas de diplôme, je n'ai sans doute pas le droit de prendre ce texte sans payer des royalties.
mais tu vas quand même pas me balancer, hein, dis ?
Toute traduction appartient à celui qui l'a effectuée, si l'auteur de l'original est mort depuis un nombre d'années défini par les lois en vigueur dans le pays de l'auteur ou du traducteur, ou les deux.

(Attention quand même au plagiat de traduction, hein ...)

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Message par victor.digiorgi Mer 20 Nov 2013 - 17:30

Courtial a écrit:On connaît la déclaration de Socrate (à moins que ce ne soit Platon) selon laquelle "philosopher, c'est apprendre à mourir".
À moins que ce soit de Jésus-Christ ou Paul de Tarse ...



Courtial a écrit:Avec toutes mes excuses aux professionnels de la profession de traducteur, je vous propose un tout petit moment d'amateurisme, pour nous détendre,  avec ma trad. d'un bout de Heidegger, Sein und Zeit, par. 51, pp. 252-53 dans mon édition (Niemeyer 1979)

Heidegger, Sein und Zeit a écrit:Dans la vie publique, où s'insère l'existence en communauté quotidienne, on connaît la mort comme un événement que nous rencontrons constamment, nous rencontrons des "cas de mort". Celui-ci ou celui-là, qu'il soit un proche ou un étranger, "meurt". Des inconnus "meurent" tous les jours, à toute heure. "La mort" advient comme un événement bien connu dans le monde. Comme telle, elle ne nous étonne pas plus qu'un événement quotidien. Le On a déjà une explication toute prête pour cet événement. Que l'on tienne à ce sujet des propos explicites ou plus vagues, il est dit qu'on finit par mourir un jour ou l'autre, mais que, pour le moment, on n'est pas touché.
L'analyse du "on meurt" dévoile sans ambiguïté l'être-vers-la mort quotidien. Dans ce discours, la mort devient quelque chose d'indéterminé, qui doit bien surgir de quelque part, mais qui, pour le moment, n'est pas encore là-devant, qui donc ne menace pas. Le "on meurt" dispense l'idée que la mort frappe, en fin de compte, le On. L'explication courante dit : On meurt, parce que chacun et On peut s'en convaincre ; mais justement, il ne s'agit pas de moi, car ce On n'est personne. "Mourir" est sans doute un événement qui arrive à l'être-là, mais à personne en propre. S'il existe une ambiguïté du discours, elle apparaît bien dans ce propos sur la mort. Mourir, qui est, sans délégation possible, une possibilité propre à moi-même, devient un événement qui se produit en frappant le On. Ce discours parle de la mort comme de quelque chose de réel, voilant ainsi qu'elle est une possibilité, voilant par là-même ses moments constitutifs, et qu'elle est sans relation, indépassable. Dans cette ambiguité,l'être-là risque de se perdre dans le On, au détriment de son pouvoir-être le plus propre. Le On se permet et accroît la tentation d'escamoter l'être vers la mort dans ce qu'il a de plus propre (...)
Mais le On, tout en rassurant l'être-là en éloignant de lui sa mort, s'occupe de prescrire comment il faut en juger et comment il faut se comporter face à la mort. Ainsi, "penser à la mort" apparaît comme une crainte lâche, un manque de résolution et une fuite de la réalité. Le On ne laisse pas apparaître le courage de l'angoisse de la mort. Dans l'angoisse devant la mort, l'être-là est confronté à lui-même comme possibilité énigmatique et indépassable. Le On transforme cette angoisse en une crainte devant un événement qui va arriver. L'angoisse, présentée de façon équivoque comme une peur, apparaît comme une faiblesse qu'un être-là sûr de soi ne devrait pas connaître. D'après le décret implicite du On, "il nous appartient" d'opposer un calme indifférent au "fait" qu'on meurt. En développant cet air d'indifférence "supérieure", l'être-là aliène sa possibilité d'être la plus propre et sans relation.
Les soulignements et guillemets sont tous de Heidegger, naturellement.
Apprendre à mourir ?  51dl9u10


Prendre le parti de Nietzsche contre Heidegger, et se faire le complice du premier dans l'assassinat de la mort en enterrant le second au cimetière des vacuités, voilà la rumination à proposer en Pharmakon épicurien à tout malade de la mort vivante ...


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Message par poussbois Mer 20 Nov 2013 - 22:55

Il n'empêche que je ne vois pour l'instant pas d'incompatibilité irréconciliable. Si le détachement épicurien est dénoncé comme étant une posture impossible, ce qu'il est de fait, la préoccupation sur la façon d'appréhender sa propre fin est pourtant bien présente dans les deux philosophies...*

Ce détachement est ce qu'on en retient, dans l'usage commun, mais ne correspond pas au texte d'Epicure quand on l'étudie dans le détail. Au final, Epicure ne nie pas l'angoisse existentielle revendiquée ensuite par Heidegger, au contraire, il juge tout simplement que sa compréhension et consolation** nous sont inaccessibles. Il avait sans doute moins d'imagination... Wink

On peut voir des oppositions, ou pas. c'est au choix.

Amusant comme l'ontologie fait rapidement écho aux réflexions sur la mort, bien plus qu'une philosophie de la mesure comme celle de Montaigne. Je m'attends à beaucoup plus de commentaires (maladroits) du texte d'Heidegger que de réflexions sur l'humour et la pertinence de Montaigne...


Mais revenons aux origines :

Paul de Tharse, épitre aux romains a écrit:
5.12C'est pourquoi, comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché,...  
5.13car jusqu'à la loi le péché était dans le monde. Or, le péché n'est pas imputé, quand il n'y a point de loi.
5.14Cependant la mort a régné depuis Adam jusqu'à Moïse, même sur ceux qui n'avaient pas péché par une transgression semblable à celle d'Adam, lequel est la figure de celui qui devait venir.  
5.15Mais il n'en est pas du don gratuit comme de l'offense; car, si par l'offense d'un seul il en est beaucoup qui sont morts, à plus forte raison la grâce de Dieu et le don de la grâce venant d'un seul homme, Jésus Christ, ont-ils été abondamment répandus sur beaucoup.  
5.16Et il n'en est pas du don comme de ce qui est arrivé par un seul qui a péché; car c'est après une seule offense que le jugement est devenu condamnation, tandis que le don gratuit devient justification après plusieurs offenses.  
5.17Si par l'offense d'un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus Christ lui seul.  
5.18Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes.  
5.19Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l'obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes.
Où l'on retrouve le destin partagé, collectif du On, mais qui est encore transcendé par une justification et une absolution possible. Bien loin donc du libre choix d'assumer l'angoisse existentielle, comme réclamé par Heidegger.



*Pour les critiques et la baston, je demande au lecteur d'être attentif aux termes : "détachement épicurien" ne renvoie pas à Epicure, mais ce que qu'on en a fait qui à force d'usage et variations a fini en simple caricature, en posture épicurienne.

**Stieg Dagerman (un peu de prosélytisme ne nuit pas) :

Il est [...]absurde de prétendre que l’homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il écrit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L’important est qu’il fasse ce qu’il fait en toute liberté et en pleine conscience de ce que, comme tout autre détail de la création, il est une fin en soi. Il repose en lui-même comme une pierre sur le sable.

Je peux même m’affranchir du pouvoir de la mort. Il est vrai que je ne peux me libérer de l’idée que la mort marche sur mes talons et encore moins nier sa réalité. Mais je peux réduire à néant la menace qu’elle constitue en me dispensant d’accrocher ma vie à des points d’appui aussi précaires que le temps et la gloire.
Epicure-compatible, et Heidegger-compatible. Qu'en pensez-vous ?

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Message par victor.digiorgi Jeu 21 Nov 2013 - 14:26

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Quand je serai mort, on pourra me jeter aux chiens. Je ne serai pas là ! ...

Olivier de Kersauzon

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Message par poussbois Jeu 21 Nov 2013 - 15:25

Mais, s'il n'y est plus, alors qui jettera-t-on aux chiens ? Apprendre à mourir ?  2101236583 

Kersauson s'est encore pris les pieds dans le tapis en essayant de faire des phrases, c'est pas la première fois.

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Message par Geo Rum Phil Jeu 21 Nov 2013 - 17:33

poussbois a écrit: Kersauson s'est encore pris les pieds dans le tapis en essayant de faire des phrases, c'est pas la première fois.
Ce n’est pas pour la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands des tapis ...Apprendre à mourir ?  3291034321 
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Message par Courtial Jeu 21 Nov 2013 - 17:40

Geo Rum Phil a écrit:Apprendre à mourir, ce n’est jamais parvenir à la maturité !  

Correction :
« Philosopher, c’est apprendre à mûrir »…car mûrir c’est bon pour l’immaturité des morts vivants.
Ca, c'est plutôt la version Johnny Halliday : mûrir d'amûr, naturellement...Observons toutefois qu'aux yeux de notre copine Heidi, point n'est besoin d'être plus vieux : on l'est toujours assez pour mourir. Quant à Jankélévitch - qui n'aimerait pas ce voisinage compromettant mais passons - il dit aussi qu'aucune expérience n'est nécessaire, pour mourir : on ne peut pas faire de répétition, se préparer par des exercices, mais il ne faut pas s'en inquiéter car personne n'a jamais échoué à l'examen. Nulle éducation ni mûrissement n'est possible car on ne fera l'expérience qu'une fois. Il n'y a que des débutants et ils sont tous reçus.

Paul aux Romains a écrit:C'est pourquoi, comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché,...  
5.13car jusqu'à la loi le péché était dans le monde. Or, le péché n'est pas imputé, quand il n'y a point de loi.
5.14Cependant la mort a régné depuis Adam jusqu'à Moïse, même sur ceux qui n'avaient pas péché par une transgression semblable à celle d'Adam, lequel est la figure de celui qui devait venir.  
5.15Mais il n'en est pas du don gratuit comme de l'offense; car, si par l'offense d'un seul il en est beaucoup qui sont morts, à plus forte raison la grâce de Dieu et le don de la grâce venant d'un seul homme, Jésus Christ, ont-ils été abondamment répandus sur beaucoup.  
5.16Et il n'en est pas du don comme de ce qui est arrivé par un seul qui a péché; car c'est après une seule offense que le jugement est devenu condamnation, tandis que le don gratuit devient justification après plusieurs offenses.  
5.17Si par l'offense d'un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus Christ lui seul.  
5.18Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes.  
5.19Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l'obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes.
Je ne retrouve pas dans le texte de la Genèse la mention du fait que la mortalité est la punition du péché. Je croyais bien l'y avoir lue, pourtant. Adam devra mourir parce qu'il a péché : mais où trouve-t-on cela ?
L'idée que cette mortalité sera rachetée elle-même par la mort (et la mort d'un seul, la mort de Dieu) est un exercice de haute voltige sophistique ! Chapeau bas ! Belle illustration de l'adage credo quia absurdum (j'y crois parce que c'est absurde) !

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Message par victor.digiorgi Jeu 21 Nov 2013 - 19:38

poussbois a écrit:Mais, s'il n'y est plus, alors qui jettera-t-on aux chiens ? Apprendre à mourir ?  2101236583 

Kersauson s'est encore pris les pieds dans le tapis en essayant de faire des phrases, c'est pas la première fois.
Il y a évidemment des dimensions du rire et de l'humour qui ne s'adapteront jamais à la dimension du sérieux de la « pensée se pensant elle-même ».

poussbois a écrit:Mais, s'il n'y est plus, alors qui jettera-t-on aux chiens ? Apprendre à mourir ?  2101236583 
Un poulet plumé.

Avec des ongles, évidemment ...


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Message par victor.digiorgi Jeu 21 Nov 2013 - 19:46

Geo Rum Phil a écrit:
poussbois a écrit: Kersauson s'est encore pris les pieds dans le tapis en essayant de faire des phrases, c'est pas la première fois.
Ce n’est pas pour la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands des tapis ...Apprendre à mourir ?  3291034321 


Vous et votre sale mentalité de petit flic français !

Non, non et non ! Madame ! Moi et ma sale mentalité de petit flic BELGE ! ...


Agatha Christie

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Ce n'est pas la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands des tapis ...

Non, non et non, Geo ! Ce n'est pas la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands DE tapis ...


Hercule Poirot

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Message par poussbois Jeu 21 Nov 2013 - 20:46

victor.digiorgi a écrit:
Un poulet plumé.

Avec des ongles, évidemment ...


.
lol 

Ca c'est drole !

Kersauson est un vieux con prétentieux que plus personne n'ose bousculer et qui a une large audience et qui me fatigue. Ce n'est pas de l'humour, c'est juste bête. Par contre, quand on te pousse un peu, tu es drôle, vraiment. C'est la différence. Apprendre à mourir ?  2101236583 

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Message par victor.digiorgi Jeu 21 Nov 2013 - 21:01

.

Je ne sais pas si Kersauzon est un vieux, un con, un prétentieux, ou quoi que ce soit de ce genre, mais je porterais quand même à son crédit un talent certain pour l'écriture.

Je me suis littéralement (c'est le cas de le dire) régalé de son « Ocean Song ».

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Message par Geo Rum Phil Ven 22 Nov 2013 - 11:37

victor.digiorgi a écrit: Non, non et non ! Madame ! Moi et ma sale mentalité de petit flic BELGE ! ...[/i] Agatha Christie

Ce n'est pas la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands des tapis ...

Non, non et non, Geo ! Ce n'est pas la première fois que Victor fait son commerce avec les marchands DE tapis ...
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Tan pis pour le tapis d’érudit du grand flic de fautes d’orthographe ! Apprendre à mourir ?  3291034321 

Pourquoi une faute d’orthographe n’a pas la même grandeur qu’une erreur de jugement bien orthographiée ? Apprendre à mourir ?  3987630492 
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