Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
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Ahmed II
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
A Ahmed II
Sans en donner la référence, vous citez en fait le texte sanskrit et la traduction que vous utilisez du verset 45 du chant II de la Bhagavadgītā.
J’invite le lecteur à comparer cette traduction à trois autres, facilement accessibles car en format de poche. Ce sont celles de :
- Marc Ballanfat – GF Flammarion 2007
- Emile Sénart (1847-1928) qui fut considéré comme le plus grand indianiste de son temps – Les Belles Lettres 2008 (bilingue sanskrit-français)
- Michel Hulin (à partir de la traduction de Sénart – Points Sagesse 2010
Sans commentaire.
Sans en donner la référence, vous citez en fait le texte sanskrit et la traduction que vous utilisez du verset 45 du chant II de la Bhagavadgītā.
J’invite le lecteur à comparer cette traduction à trois autres, facilement accessibles car en format de poche. Ce sont celles de :
- Marc Ballanfat – GF Flammarion 2007
- Emile Sénart (1847-1928) qui fut considéré comme le plus grand indianiste de son temps – Les Belles Lettres 2008 (bilingue sanskrit-français)
- Michel Hulin (à partir de la traduction de Sénart – Points Sagesse 2010
Votre traducteur a écrit: Dépasse, ô Arjuna, les trois gunas, ces influences de la nature matérielle qui des Vedas font l'objet premier. Libère-toi de la dualité, abandonne tout désir de possession et de paix matérielle; sois fermement uni au Suprême.
Marc Ballanfat a écrit: Le monde et ses trois qualités sont l’objet des paroles sacrées.
Arjuna, détache-toi de ce monde aux trois qualités, dépasse les contraires, demeure en permanence dans l’être, par-delà l’action ou le repos ; sois en possession de toi-même.
Emile Sénart a écrit: C’est le domaine sensible des trois gunas qui est l’objet des vedas ; affranchis-toi, ô Arjuna, du domaine des trois gunas ; demeure supérieur à toutes les sensations, de volonté inébranlable, indifférent à la richesse, maître de toi.
Michel Hulin a écrit: Les Vedas ont pour domaine les trois attributs constitutifs (de la Nature). Place-toi, ô Arjuna, au-delà de ces attributs. Affranchis-toi des couples d’opposés. Demeure en permanence dans l’élément du sattva, indifférent aux richesses, maître de toi-même.
Sans commentaire.
Vanleers- Digressi(f/ve)
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Date d'inscription : 15/01/2017
Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Je suis à mon tour étonné par la traduction et je remarque que tu te réfères à un travail d’érudit qui me confirme dans mon opinion que les érudits à force d’analyser le texte n’en comprennent plus le sens.
Je ne possède plus la Gita que j’ai lue dans ma jeunesse et dont j’ai conservé en mémoire la leçon. J’ai trouvé une version pdf de la traduction de E.-L. Burnouf (1861) où le verset 45 est :
La traduction au XIVe chapitre des trois gunas par vérité, instinct et obscurité, reprise aussi par Wikipédia, ne me satisfait pas plus que celle que tu présentes (vertu, passion, ignorance).
Dans la Gita, les trois Gunas sont présentés selon la doctrine du Yoga, comme des obstacles à l’illumination. Dans le Samkhya, qui est une cosmologie rationnelle et réaliste, ce sont trois principes et propriétés fonctionnelles normales, ni bonnes ni mauvaises.
Ma compréhension des trois principes est fondées sur la comparaison de différentes sources au sujet du Samkhya où ce sont des qualités perceptibles, de l’ayurvéda où par excès ils deviennent trois nocivités ou Doshas, de la médecine bouddhiste tibétaine où par corruption ce sont les trois poisons psychiques.
Dans le Samkhya, les trois Gunas sont :
- tamas qualité de l’élément terre signifie passivité, inertie, stabilité, conservation
- rajas qualité du feu signifie activité force, mouvement, cohérence
- sattva, qualité de l’air signifie réceptivité, souplesse, mobilité ,ouverture d’esprit
Les trois Gunas sont indissociables, toujours présent dans tout être animé ou inanimé exactement comme les trois couleurs principales bleu rouge et vert sont composantes de toute teinte colorée mais dans des proportions variables.
Ce sont des thèmes symboliques qu’on ne peut pas définir par une seule expression. Ils s’expriment différemment selon le contexte (physique, physiologiques, pathologique, psychologique).
Le point de vue de la Gita est celui des obstacles psychiques à la sérénité,
- l’excès de passivité tamas conduit à l’attachement l’avarice, la peur, la confusion mentale
- l’excès d’activité rajas s’exprime par l’impulsivité , l’amour, la colère, la haine
- l’excès de réceptivité sattva conduit à la distraction aux désirs et plaisirs et à l’instabilité
Le but du Yoga, l’Union mystique, n’est pas la suppression des 3 Gunas, mais leur équilibre parfait, permettant d’accomplir l’œuvre sans être perturbé. C’est l’état qui correspond par analogie à l’équilibre des trois couleurs principales, le gris, exempt de couleur .
Je ne possède plus la Gita que j’ai lue dans ma jeunesse et dont j’ai conservé en mémoire la leçon. J’ai trouvé une version pdf de la traduction de E.-L. Burnouf (1861) où le verset 45 est :
45 - On trouve les « trois qualités » dans le Vêda : sois exempt des trois qualités, Arjuna ; que ton âme ne se partage point, qu’elle soit toujours ferme ; que le bonheur ne soit pas l’objet de ses pensées ; qu’elle soit maîtresse d’elle-même.
La traduction au XIVe chapitre des trois gunas par vérité, instinct et obscurité, reprise aussi par Wikipédia, ne me satisfait pas plus que celle que tu présentes (vertu, passion, ignorance).
Dans la Gita, les trois Gunas sont présentés selon la doctrine du Yoga, comme des obstacles à l’illumination. Dans le Samkhya, qui est une cosmologie rationnelle et réaliste, ce sont trois principes et propriétés fonctionnelles normales, ni bonnes ni mauvaises.
Ma compréhension des trois principes est fondées sur la comparaison de différentes sources au sujet du Samkhya où ce sont des qualités perceptibles, de l’ayurvéda où par excès ils deviennent trois nocivités ou Doshas, de la médecine bouddhiste tibétaine où par corruption ce sont les trois poisons psychiques.
Dans le Samkhya, les trois Gunas sont :
- tamas qualité de l’élément terre signifie passivité, inertie, stabilité, conservation
- rajas qualité du feu signifie activité force, mouvement, cohérence
- sattva, qualité de l’air signifie réceptivité, souplesse, mobilité ,ouverture d’esprit
Les trois Gunas sont indissociables, toujours présent dans tout être animé ou inanimé exactement comme les trois couleurs principales bleu rouge et vert sont composantes de toute teinte colorée mais dans des proportions variables.
Ce sont des thèmes symboliques qu’on ne peut pas définir par une seule expression. Ils s’expriment différemment selon le contexte (physique, physiologiques, pathologique, psychologique).
Le point de vue de la Gita est celui des obstacles psychiques à la sérénité,
- l’excès de passivité tamas conduit à l’attachement l’avarice, la peur, la confusion mentale
- l’excès d’activité rajas s’exprime par l’impulsivité , l’amour, la colère, la haine
- l’excès de réceptivité sattva conduit à la distraction aux désirs et plaisirs et à l’instabilité
Le but du Yoga, l’Union mystique, n’est pas la suppression des 3 Gunas, mais leur équilibre parfait, permettant d’accomplir l’œuvre sans être perturbé. C’est l’état qui correspond par analogie à l’équilibre des trois couleurs principales, le gris, exempt de couleur .
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Pour examiner la vérité il est besoin, une fois en sa vie, de mettre toutes choses en doute autant qu’il se peut. (Descartes)
Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
pame a écrit:
La traduction au XIVe chapitre des trois gunas par vérité, instinct et obscurité, reprise aussi par Wikipédia, ne me satisfait pas plus que celle que tu présentes (vertu, passion, ignorance).
Si tu veux approfondir la question, lis le 18e chapitre, une bonne partie est dédiée aux gunas. À partir du verset 4.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Plutôt que d’ approfondir des textes qui sont des traductions douteuses d’européens, je préfère utiliser mon intelligence et mon intuition pour comprendre le sens et le but de la pensée orientale avec l’aide des explications données par des philosophes ou historiens indiens.Ahmed II a écrit:Si tu veux approfondir la question, lis le 18e chapitre, une bonne partie est dédiée aux gunas. À partir du verset 4.
Les trois Gunas sont des qualités et deviennent des vertus si elles ne sont pas entachées par des sentiments personnels : par exemple, la stabilité de tamas, l’action adroite de rajas et l’attention vigilante de sattva sont les vertus des arts martiaux, quand elles ne sont pas corrompues par l’attachement, la colère et les désirs.
Tel est le sens du Yoga et de la Baghavad Gita.
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Pour examiner la vérité il est besoin, une fois en sa vie, de mettre toutes choses en doute autant qu’il se peut. (Descartes)
Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
pame a écrit:avec l’aide des explications données par des philosophes ou historiens indiens.
Bonjour, Je ne comprends pas ton raisonnement. Tu dis que tu n'as pas lu la Gita depuis fort longtemps... D’où tiens-tu tes informations sur les gunas ? Le traducteur que je cite était hindou...
Bien à toi
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Vanleers a écrit:A Ahmed II
- Emile Sénart (1847-1928) qui fut considéré comme le plus grand indianiste de son temps – Les Belles Lettres 2008 (bilingue sanskrit-français)Emile Sénart a écrit: C’est le domaine sensible des trois gunas qui est l’objet des vedas ; affranchis-toi, ô Arjuna, du domaine des trois gunas ; demeure supérieur à toutes les sensations, de volonté inébranlable, indifférent à la richesse, maître de toi.
Sans commentaire.
Bonjour, c'est étrange, mais personnellement je ne vois aucune différence entre la traduction que j'ai fournie et celle de Sénart, ni des autres d'ailleurs. En outre, les traducteurs que tu cites écrivent tous que les trois gunas doivent être dépassés. Où est l'erreur ?
Note: pour ce qui est du sattva que l'un des auteurs cite, il ne s'agit pas du sattva mondain, mais spirituel, le pur sattva.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Je soulignais plus haut la fonction prédominante de l’intelligence dans la pratique du yoga. Dans ce chapitre, trois considérations retiennent l’attention : l’importance des gunas, le peu d’intérêt qu’accorde dorénavant Krishna aux Védas -qui traitent surtout des affaires de ce monde- et de l’intelligence.
« Tu as reçu de moi, jusqu'ici, la connaissance analytique de la philosophie du sankhya. Reçois maintenant la connaissance du yoga, qui permet d'agir sans être lié à ses actes. Quand cette intelligence te guidera, tu pourras briser les chaînes du karma. » (39)
Dans le verset ci-dessous, buddhi, traduit par intelligence, est utilisé à deux reprises. C’est un truisme que de le dire mais c’est avec elle que l’on pratique le yoga. Par exemple, les gens mangent le plus souvent en se guidant par le goût, dont la langue en est le sens, par conséquent tout ce qui goûte savoureux et digeste peut être bouffé à volonté, mais le yogi use de son intelligence pour discriminer ce qui est bon ou mauvais.
esa te ’bhihita sankhye
buddhir yoge tv imam shrinu
buddhya yukto yaya partha
karma-bandham prahasyasi
La pratique du yoga, comme il est dit dans ce verset, est associée à l’action. Et l’action c’est du karma, d’où le karma-yoga, le yoga de l’action. Selon Krishna, le karma-yoga doit être pratiqué à l’aide de l’intelligence, buddhi. Karma-yoga et buddhi-yoga sont utilisés invariablement et sont synonymes, de ce que je comprends.
Au fur et à mesure de la lecture de la Bhagavad-gita, nous réalisons que le buddhi-yoga est avant tout une activité dévotionnelle, personnelle, grâce à laquelle les instructions de Krishna nous permettraient d’en finir avec l’illusion qu’engendrent les actes mal intentionnés. Pour en arriver là, cependant, l’individu ne doit plus « se laisser distraire par le langage fleuri des Védas ».
« Quand ton intelligence aura traversé la forêt touffue de l'illusion, tout ce que tu as entendu, tout ce que tu pourrais encore entendre, te sera indifférent.
Quand ton mental ne se laissera plus distraire par le langage fleuri des Vedas, quand il sera tout absorbé dans la réalisation spirituelle, alors tu seras en union avec l'Être Divin. » (52, 53)
« Tu as reçu de moi, jusqu'ici, la connaissance analytique de la philosophie du sankhya. Reçois maintenant la connaissance du yoga, qui permet d'agir sans être lié à ses actes. Quand cette intelligence te guidera, tu pourras briser les chaînes du karma. » (39)
Dans le verset ci-dessous, buddhi, traduit par intelligence, est utilisé à deux reprises. C’est un truisme que de le dire mais c’est avec elle que l’on pratique le yoga. Par exemple, les gens mangent le plus souvent en se guidant par le goût, dont la langue en est le sens, par conséquent tout ce qui goûte savoureux et digeste peut être bouffé à volonté, mais le yogi use de son intelligence pour discriminer ce qui est bon ou mauvais.
esa te ’bhihita sankhye
buddhir yoge tv imam shrinu
buddhya yukto yaya partha
karma-bandham prahasyasi
La pratique du yoga, comme il est dit dans ce verset, est associée à l’action. Et l’action c’est du karma, d’où le karma-yoga, le yoga de l’action. Selon Krishna, le karma-yoga doit être pratiqué à l’aide de l’intelligence, buddhi. Karma-yoga et buddhi-yoga sont utilisés invariablement et sont synonymes, de ce que je comprends.
Au fur et à mesure de la lecture de la Bhagavad-gita, nous réalisons que le buddhi-yoga est avant tout une activité dévotionnelle, personnelle, grâce à laquelle les instructions de Krishna nous permettraient d’en finir avec l’illusion qu’engendrent les actes mal intentionnés. Pour en arriver là, cependant, l’individu ne doit plus « se laisser distraire par le langage fleuri des Védas ».
« Quand ton intelligence aura traversé la forêt touffue de l'illusion, tout ce que tu as entendu, tout ce que tu pourrais encore entendre, te sera indifférent.
Quand ton mental ne se laissera plus distraire par le langage fleuri des Vedas, quand il sera tout absorbé dans la réalisation spirituelle, alors tu seras en union avec l'Être Divin. » (52, 53)
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Ahmed II a écrit:Je soulignais plus haut la fonction prédominante de l’intelligence dans la pratique du yoga.
« Tu as reçu de moi, jusqu'ici, la connaissance analytique de la philosophie du sankhya. Reçois maintenant la connaissance du yoga, qui permet d'agir sans être lié à ses actes. Quand cette intelligence te guidera, tu pourras briser les chaînes du karma. » (39)
La connaissance analytique peut-elle être autre chose que ce que tu nommes " fonction prédominante de l'intelligence" ? Sachant que l'intelligence est tournée vers la compréhension du monde physique, de la nature, qu'est-ce qui peut suivre cela dans la voie du yoga sinon une autre forme de connaissance ? La contemplation qui découle de l'intuition par exemple ?
La connaissance du yoga ne doit-elle pas mener à la Libération ?
Ahmed II a écrit:La pratique du yoga, comme il est dit dans ce verset, est associée à l’action. Et l’action c’est du karma, d’où le karma-yoga, le yoga de l’action. Selon Krishna, le karma-yoga doit être pratiqué à l’aide de l’intelligence, buddhi. Karma-yoga et buddhi-yoga sont utilisés invariablement et sont synonymes, de ce que je comprends.
L'action dont il est question ici est ,à mon sens, une activité spirituelle qui est assez éloignée de ce que l'on nomme "intelligence" ( en Occident) qui est principalement tournée vers l'extériorité.
Je me demande si tu n'as pas intérêt à considérer tout cela comme une mythologie dont la fonction est d'apprendre aux gens de tous horizons intellectuels à bien mener leur existence ? Ne serait-ce pas une métaphysique à l'usage du peuple..? ( comme l'a été la mythologie grecque en son temps. Arjuna ne serait-il pas Zeus par exemple, ces flèches ne correspondraient-elles pas aux éclairs de celui-ci et ne serait-il pas la dimension spirituelle, l'esprit de l'homme en proie aux désirs ..?)
Autrement dit: soit ce récit est une récréation, une fantaisie, soit il a un sens plus profond et donc plus important, et dans ce cas, ne faut-il pas quelque peu "psychologiser" ce mythe ?
C'est une question.
Dernière édition par maraud le Lun 17 Juil 2017 - 23:09, édité 1 fois
maraud- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
« Quand ton intelligence aura traversé la forêt touffue de l'illusion, tout ce que tu as entendu, tout ce que tu pourrais encore entendre, te sera indifférent.
Quand ton mental ne se laissera plus distraire par le langage fleuri des Vedas, quand il sera tout absorbé dans la réalisation spirituelle, alors tu seras en union avec l'Être Divin. » (52, 53)
Cette notion se trouve dans l'ésotérisme islamique: Insanoul Kamil, l'homme accompli, ou parfait... En Chine , je crois que l'on parle de "roi".. Quoi qu'il en soit, c'est une " figure" que l'on retrouve partout dans la Tradition.( Dans la mythologie grecque, cette figure est personnifiée par le héros qui siège aux côtés des dieux dans l'Olympe)
Je ne donne pas un conseil, je dis juste que l'approche de la Tradition, même circonscrite à l'Inde, peut ne pas exclure ses autres modalités d'expression( dans les autres cultures)
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La vie est belle!
maraud- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
maraud a écrit:La connaissance analytique peut-elle être autre chose que ce que tu nommes " fonction prédominante de l'intelligence" ? Sachant que l'intelligence est tournée vers la compréhension du monde physique, de la nature, qu'est-ce qui peut suivre cela dans la voie du yoga sinon une autre forme de connaissance ? La contemplation qui découle de l'intuition par exemple ?
La connaissance du yoga ne doit-elle pas mener à la Libération ?
La connaissance est un attribut de l'intelligence, elle est variée. Le sankhya est un acquis possible par l'intelligence. Oui, elle peut être autre chose, il suffit de lire, entre autres, la Bible par exemple, qui tente d'en donner une explication, grossière. Ou le Coran.
L'intelligence n'est pas uniquement tournée vers le physique. L'âme n'est pas physique. Krishna explique ce qu'est l'âme. Et cette connaissance fait partie du samkhya.
Je mentionnais le 18e chapitre qui donne d'autres informations sur l'intelligence, qui est, en gros, catégorisée en trois branches, correspondants aux trois gunas. Il y a ceux qui ont une intelligence influencée par la vertu, d'autres par la passion, et d,autres encore par l'ignorance. Chacune d'elle se comportent différemment.
La connaissance du yoga mène-t-elle à la libération ? Certainement, selon les enseignements. Mais il vaut mieux avoir un oiseau dans la main que deux dans le ciel. La connaissance doit être avant tout pratique, ensuite elle peut mener à la libération...
PS. Il y a beaucoup de monde autour de moi, de la famille et des amis, et j'écris dans le bruit, pour te répondre rapidement.
Oui, il y a une autre forme d'intelligence, celle qui est réalisée. En sanskrit on appelle la connaissance -jnana, et la réalisation de cette connaissance -vijnana. L'une peut être stérile ou théorique, l'autre pratique et utile.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Je me demande si tu n'as pas intérêt à considérer tout cela comme une mythologie
Je cherche surtout à comprendre les faits, les instructions pratiques. Par exemple, quand les traducteurs traduisent les planètes supérieures par le ciel, c'est une interprétation de ce dont parlent les écrits védiques; ils coupent les angles pour faire entrer les données dans leur croyance. Les faits, les écrits ou les paroles de Krishna sont plus précis : ils désignent tout un monde au-delà du ciel. Si je déforme leurs explications, je ne peux pas comprendre ce que signifie Indra, le dieu des dieux, ni les planètes supérieures et leurs qualités, ni les planètes inférieures. Ni ce que signifie ontologiquement gentil et méchant, dieu et démon, sura ou asura.
La métaphysique n'est destinée au peuple, mais elle visent les spéculateurs, les intellectuels et les experts, vite dit. Le peuple, lui, ça lui prend des arts pratiques, comme le théâtre, les histoires et la musique. Et surtout la dévotion, le partage, l'amour, les émotions.
Si psychologiser il y a besoin, cela viendra après, pour l'instant il s'agit de donner les faits. Comment peut-on psychologiser quand on ne sait même pas le contexte et la culture dans laquelle est née la Bhagavad-gita ? Personnellement je n'en éprouve nul besoin. Quand Krishna dit "je", je prends ce je pour une personne, en l'occurrence elle parle à Arjuna, une autre personne. Krishna et Arjuna doivent confronter d'autres personnes, mauvaises, selon les explications. Il est question d'une guerre. Kurukshetra est un vrai lieu. La bhagavad-gita ou Krishna, ou Vyasa, n'ont en aucun moment fait allusion à une métaphore.
L'entourage dans lequel je suis à présent est musulman. J'ai grandi comme musulman, comme un occidental, mais mon objectivité m'a permis de ne pas user de ce conditionnement
pour filtrer la connaissance védique par le biais de la culture que j'ai reçue. Je répète : amour signifie partage, compréhension, fraternité ou ouverture sur le monde et les autres. Si cet amour
manifeste de l'intolérance, de la violence et de la fermeture, je le conteste et le rejette; il est incohérent.
Bien à toi,
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Hamed II a écrit:Bonjour, c'est étrange, mais personnellement je ne vois aucune différence entre la traduction que j'ai fournie et celle de Sénart, ni des autres d'ailleurs ... le peu d’intérêt qu’accorde dorénavant Krishna aux Védas ... Au fur et à mesure de la lecture de la Bhagavad-gita, nous réalisons que le buddhi-yoga est avant tout une activité dévotionnelle, personnelle, grâce à laquelle les instructions de Krishna nous permettraient d’en finir avec l’illusion qu’engendrent les actes mal intentionnés. Pour en arriver là, cependant, l’individu ne doit plus « se laisser distraire par le langage fleuri des Védas ».
« Quand ton intelligence aura traversé la forêt touffue de l'illusion, tout ce que tu as entendu, tout ce que tu pourrais encore entendre, te sera indifférent.
Quand ton mental ne se laissera plus distraire par le langage fleuri des Vedas, quand il sera tout absorbé dans la réalisation spirituelle, alors tu seras en union avec l'Être Divin. » (52, 53)
Dans les différentes traductions, je vois plusieurs différences, et je mentionne celle qui me paraît la plus importante :
Le traducteur que tu as choisi a écrit : " ... ; sois fermement uni au Suprême ".
Marc Ballanfat a écrit : " .... ; sois en possession de toi-même ".
Emile Sénart a écrit : " ... ; demeure supérieur à toutes les sensations, de volonté inébranlable, indifférent à la richesse, maître de toi ".
Michel Hulin a écrit : " ... Demeure en permanence dans l’élément du sattva, indifférent aux richesses, maître de toi-même ".
Il y a tout de même une sacrée différence ( Et même du genre à remplir les cimetières, on l'a assez vu. ) entre être " maître chez Soi ", un des thèmes majeurs de toutes les grandes spiritualités, pensées, y compris celle du sous-continent indien, et se retrouver " uni au Suprême ", " en union avec l'Être Divin ", in extenso un Dieu, c'est à dire Krishna. Et on nous dit bien que ceci fait, le reste n'a plus d'importance. Clairement dit, j'y vois moi, dans la traduction que tu utilises, dans cette lecture, que tu fais tienne, une dérive (au sens non-péjoratif du terme), une évolution, monothéistes, à laquelle, bien sûr, l'immense majorité des indiens ne peut pas adhérer, de même que le bouddhisme, phénomène foncièrement indien, sera finalement et tout de même chasser de l'Inde. Il y a aussi le cas des populations du Nord de l'Inde qui refuseront la transition védisme - brahmanisme, etc. : en fait cela vaut pour tout ce qui s'écartera du courant dominant védisme-brahmanisme-hindouisme.
_________________
" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Au cour de ce sujet, tu as dit que les occidentaux ne s'intéressaient pas aux autres spiritualités, pensées, sagesses, philosophies. Je ne suis pas d'accord. J'ai connu et je connais, un peu, d'autres cultures, et je ne vois pas chez elles le même intérêt que nous pour les autres cultures de façon générale, même si il y a un essor manifeste dans ce sens, il n'est pas très ancien. Si on cherche des cultures fermées sur les autres on va vite trouver, mais dans le lot, il n'y a pas l'Occident.
Je n'oserais jamais dire que l'occident est plus intelligent, malin, etc., que les autres cultures, c'est grossier. Et encore moins qu'il est plus sage, clairement dit, dans ce domaine, la métaphysique, nous frisons allègrement l'indigence radicale.
Mais à cause d'une population indo-européenne qui s'est installée en Grèce entre le X° et V° siècle av. J.C., nous avons développé un type de pensée, d'intelligence très spécifique. En faisant un petit bon dans le temps, cela donnera notoirement, au XVII° siècle, l'avènement de " LA science ", des sciences dites " exactes ", ou encore, pour reprendre un mot détestable, mais entré dans les usages, dites " dures ". Comme si il y en avait des molles ( Ce que ne disait pas l'auteur de la formule " sciences dures ". ). Mais, c'est un débat chronique, ce n'est pas parce que " LA science " est une découverte occidentale qu'elle est occidentale, c'est idiot. Et d'ailleurs, on voit très bien, une fois que d'autres s'y sont mis, faire aussi bien, mieux, que nous dans ce domaine.
Le but de mon propos est le suivant. Ce que nous avons fait avec " LA science ", est en train de se reproduire, avec un décalage de deux siècles, avec les sciences humaines. Par exemple, le terme " psychiatrie " est forgé en 1808, et un siècle plus tard, on a déjà de très nombreuses chaires de sciences humaines de toute sorte, qui continuent à se multiplier au XX° siècle. Et les " autres " s'y sont mis aussi.
Et donc, dernière étape, il se passera la même chose avec la métaphysique. Ce n'est certainement pas une hypothétique métaphysique occidentale qui sera adoptée, mais la façon d'en faire. L'argument phare de tous les despotes et réactionnaires du monde c'est de dire que, je cite, " les valeurs occidentales " ne sont pas culturellement les leurs. Mais il se trouve que les dites valeurs ne sont pas plus occidentales que l'électricité ou la chimie du carbone. Les russes, les chinois, les arabes, etc., d'aujourd'hui, ne supporteraient pas leurs anciens régimes. Je suis absolument convaincu que l'Orient, l'Inde, l'Extrême Orient, etc., ont dans ce domaine fait mieux et depuis longtemps que l'Occident qui s'est embourbé dans le monothéisme des Livres, et qui s'y trouve toujours bien plus compromis qu'il ne le pense, quand bien même il se proclame athée, des boulets et autres chaines demeurent. Mais on sait que dans ce domaine, la difficulté majeure c'est de dire, de disposer des discours qui permettent au plus grand nombre de partager les expériences des pionniers, des explorateurs, de l'espace métaphysique ( En partie l'a priori du philosophe. ). L'apport occidental, comme pour " LA science ", les sciences humaines, ça sera des méthodes, des discours. Par exemple, on parlait ci-dessus " d'être maître de Soi ", mais ce rêve, ce désir, qui part du constat, effectivement surprenant, scandaleux, terrifiant, stupéfiant, que la condition humaine est a priori tragique, maudite, et que notoirement, entre autres, la conscience, le moi, le sujet, n'est pas maître en sa demeure, est aussi vieux que l'espèce. Et donc, chaque région du monde a proposé sa ou ses façons d'y remédier. C'est des spiritualités, des pensées, des sagesses, des philosophies, et pour le plus grand nombre, des cultures et des religions. Impossible d'aborder les qualités des unes et des autres, mais c'est beaucoup plus facile de leur trouver un défaut commun : l'empirisme. Comme pour " LA science ", les sciences humaines, le défi, c'est encore une fois de mettre la main sur les discours les plus adaptés. La science et les sciences humaines sont désormais des entreprises collectives, grâce à des méthodes, des outils, des discours, communs. Au tour de la métaphysique ! Je vais le dire à l'occidentale, parce que c'est mon héritage, mais l'objectif est manifestement universel, il faut qu'Ulysse, archétype de l'homme, accomplisse la prophétie de Tirésias, qu'il en finisse avec les Destins, la Tragédie, et, cogito, Sa Grande Poubelle intérieure, la Mer du Couchant de l'Odyssée, qu'il trouve enfin sa Voie. Il la cherche depuis toujours, mais il serait dorénavant temps que cela soit concerté.
Je n'oserais jamais dire que l'occident est plus intelligent, malin, etc., que les autres cultures, c'est grossier. Et encore moins qu'il est plus sage, clairement dit, dans ce domaine, la métaphysique, nous frisons allègrement l'indigence radicale.
Mais à cause d'une population indo-européenne qui s'est installée en Grèce entre le X° et V° siècle av. J.C., nous avons développé un type de pensée, d'intelligence très spécifique. En faisant un petit bon dans le temps, cela donnera notoirement, au XVII° siècle, l'avènement de " LA science ", des sciences dites " exactes ", ou encore, pour reprendre un mot détestable, mais entré dans les usages, dites " dures ". Comme si il y en avait des molles ( Ce que ne disait pas l'auteur de la formule " sciences dures ". ). Mais, c'est un débat chronique, ce n'est pas parce que " LA science " est une découverte occidentale qu'elle est occidentale, c'est idiot. Et d'ailleurs, on voit très bien, une fois que d'autres s'y sont mis, faire aussi bien, mieux, que nous dans ce domaine.
Le but de mon propos est le suivant. Ce que nous avons fait avec " LA science ", est en train de se reproduire, avec un décalage de deux siècles, avec les sciences humaines. Par exemple, le terme " psychiatrie " est forgé en 1808, et un siècle plus tard, on a déjà de très nombreuses chaires de sciences humaines de toute sorte, qui continuent à se multiplier au XX° siècle. Et les " autres " s'y sont mis aussi.
Et donc, dernière étape, il se passera la même chose avec la métaphysique. Ce n'est certainement pas une hypothétique métaphysique occidentale qui sera adoptée, mais la façon d'en faire. L'argument phare de tous les despotes et réactionnaires du monde c'est de dire que, je cite, " les valeurs occidentales " ne sont pas culturellement les leurs. Mais il se trouve que les dites valeurs ne sont pas plus occidentales que l'électricité ou la chimie du carbone. Les russes, les chinois, les arabes, etc., d'aujourd'hui, ne supporteraient pas leurs anciens régimes. Je suis absolument convaincu que l'Orient, l'Inde, l'Extrême Orient, etc., ont dans ce domaine fait mieux et depuis longtemps que l'Occident qui s'est embourbé dans le monothéisme des Livres, et qui s'y trouve toujours bien plus compromis qu'il ne le pense, quand bien même il se proclame athée, des boulets et autres chaines demeurent. Mais on sait que dans ce domaine, la difficulté majeure c'est de dire, de disposer des discours qui permettent au plus grand nombre de partager les expériences des pionniers, des explorateurs, de l'espace métaphysique ( En partie l'a priori du philosophe. ). L'apport occidental, comme pour " LA science ", les sciences humaines, ça sera des méthodes, des discours. Par exemple, on parlait ci-dessus " d'être maître de Soi ", mais ce rêve, ce désir, qui part du constat, effectivement surprenant, scandaleux, terrifiant, stupéfiant, que la condition humaine est a priori tragique, maudite, et que notoirement, entre autres, la conscience, le moi, le sujet, n'est pas maître en sa demeure, est aussi vieux que l'espèce. Et donc, chaque région du monde a proposé sa ou ses façons d'y remédier. C'est des spiritualités, des pensées, des sagesses, des philosophies, et pour le plus grand nombre, des cultures et des religions. Impossible d'aborder les qualités des unes et des autres, mais c'est beaucoup plus facile de leur trouver un défaut commun : l'empirisme. Comme pour " LA science ", les sciences humaines, le défi, c'est encore une fois de mettre la main sur les discours les plus adaptés. La science et les sciences humaines sont désormais des entreprises collectives, grâce à des méthodes, des outils, des discours, communs. Au tour de la métaphysique ! Je vais le dire à l'occidentale, parce que c'est mon héritage, mais l'objectif est manifestement universel, il faut qu'Ulysse, archétype de l'homme, accomplisse la prophétie de Tirésias, qu'il en finisse avec les Destins, la Tragédie, et, cogito, Sa Grande Poubelle intérieure, la Mer du Couchant de l'Odyssée, qu'il trouve enfin sa Voie. Il la cherche depuis toujours, mais il serait dorénavant temps que cela soit concerté.
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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
neopilina- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
La particularité de la civilisation européenne réside dans ses origines humanistes grecques et monothéistes judaïques. Le christianisme est devenu un mélange des deux alors que son origine (Jean-Baptiste et Jésus) était une gnose orientale, plus précisément zoroastrienne par l’intermédiaire des esséniens.neopilina a écrit:Mais à cause d'une population indo-européenne qui s'est installée en Grèce entre le X° et V° siècle av. J.C., nous avons développé un type de pensée, d'intelligence très spécifique. En faisant un petit bon dans le temps, cela donnera notoirement, au XVII° siècle, l'avènement de " LA science ", des sciences dites " exactes ", ou encore, pour reprendre un mot détestable, mais entré dans les usages, dites " dures ".
L’humanisme grec d’origine socratique et platonicien a influencé le monothéisme chrétien .
Les philosophies rationalistes et matérialistes des présocratiques ont évolué vers le stoïcisme romain qui a influencé les doctrines de l’Église romaine et son adoption de la logique restrictive d’Aristote, que celui-ci avait pourtant réservé aux connaissances empiriques et à la rhétorique.
Le christianisme oriental orthodoxe est resté gnostique, trinitaire et platonicien, alors que le christianisme romain et occidental a dévié vers un rationalisme dualiste intolérant qui a causé le schisme et favorisé l’éclosion des sciences naturelles tout en tuant la spiritualité et la métaphysique.
Les monothéismes d’origine abrahamique se distinguent des monismes spirituels orientaux par leur dogmatisme exclusif revendiquant un Dieu à l’image de l’homme.
La civilisation occidentale se caractérise par son scientisme athée devenu religion consensuelle où l’homme, maître de la nature se prend pour Dieu.
C’est justement cette façon d’en faire qu’il s’agit de changer pour redécouvrir le côté métaphysique de l’univers: il faut en finir avec la réduction de la philosophie à l’homme et à sa psychologie.neopilina a écrit:Et donc, dernière étape, il se passera la même chose avec la métaphysique. Ce n'est certainement pas une hypothétique métaphysique occidentale qui sera adoptée, mais la façon d'en faire.
Ce qui distingue le monisme spirituel de l’Inde, de la Chine ou d’autres cultures, et qu’il peut nous apprendre, c’est le respect et la primauté de toute forme de vie et l’élévation de la conscience au-delà de la condition humaine
L’homme a émergé de la Nature et vit grâce à la Nature .
La nature vivante a évolué sans l’homme et peut continuer à évoluer sans l’homme, cette espèce de primate gonflé qui se croit maître de l’univers et l’égal de Dieu.
_________________
Pour examiner la vérité il est besoin, une fois en sa vie, de mettre toutes choses en doute autant qu’il se peut. (Descartes)
Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Pame a écrit:Les monothéismes d’origine abrahamique se distinguent des monismes spirituels orientaux par leur dogmatisme exclusif revendiquant un Dieu à l’image de l’homme.
Il y a une question que l'on est en droit de se poser ( avis aux darwinistes ) : s'il y a eu un changement entre le fait de devoir se" libérer" ( tradition) et celui de "vouloir être sauvé"( Religion), c'est peut-être parce que l'être humain déclinant a dû revoir ses prétentions à la baisse, non ?
Donc soit on admet l'idée de déclin et des cycles du manvantara, soit on pense que l'on évolue et on persiste dans "l'optimisme béat".
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La vie est belle!
maraud- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
neopilina a écrit:
Dans les différentes traductions, je vois plusieurs différences, et je mentionne celle qui me paraît la plus importante :
Le traducteur que tu as choisi a écrit : " ... ; sois fermement uni au Suprême ".
Marc Ballanfat a écrit : " .... ; sois en possession de toi-même ".
Merci pour ce partage. J'ai lu tes réponses et je te répondrai plus tard car je suis occupé. Mais il n'y a pas de différence entre "uni au suprême" et "en possession de soi-même" selon le yoga de la Bg.
Pour ce qui est du monothéisme, l'Inde offre un monothéisme également, avec Krishna comme seul Dieu. En fait, c'est le monothéisme que les religions pratiquaient autrefois, avant qu'il ne devienne radical avec l'évolution de la religion juive, radical et totalitaire. Je t'en parlerai.
Bien à toi,
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Ce matin j'ouvre en précipitation mon ordi et je tombe sur cette phrase, qui conclut le texte de pame. Je me dis que la façon dont il a utilisé le verbe "évoluer" est imprécis.
Puis, le message de Maraud apporte un éclaircissement. (Je crois que vous vous entendez sur ce point... Je partage l'idée que la nature également décline, due au kali-yuga. Mais que l'homme accentue, à son échelle, ce processus.)
pame a écrit:
L’homme a émergé de la Nature et vit grâce à la Nature .
La nature vivante a évolué sans l’homme et peut continuer à évoluer sans l’homme, cette espèce de primate gonflé qui se croit maître de l’univers et l’égal de Dieu.
Puis, le message de Maraud apporte un éclaircissement. (Je crois que vous vous entendez sur ce point... Je partage l'idée que la nature également décline, due au kali-yuga. Mais que l'homme accentue, à son échelle, ce processus.)
Donc soit on admet l'idée de déclin et des cycles du manvantara, soit on pense que l'on évolue et on persiste dans "l'optimisme béat".
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
neopilina a écrit:Au cour de ce sujet, tu as dit que les occidentaux ne s'intéressaient pas aux autres spiritualités, pensées, sagesses, philosophies. Je ne suis pas d'accord.
Bonjour,
Je ne crois pas avoir dit cela. En tout cas, je ne le pense pas. Je soutiens par contre que les occidentaux ne s'intéressent pas à la spiritualité "théiste" des hindous, et qu'ils négligent la Bg et le MBh.
Pour ce qui est de la science, je considère qu'il y a science et science, que la "modernité" s'est engagée sur la voie de la science matérialiste, grossière, et technique, qui, à terme, apporte des résultats contraires au bien de l'humanité et de la nature. N'est-ce pas une évidence ? La science matérialiste est basée sur une idéologie insensée, celle, grosso modo, de l'homme nouveau, qui se passe de Dieu. C'est une bêtise sans nom.
Pour ce qui est de la métaphysique, ce n'est pas mon fort. Je suis plutôt rationnel. (Je te reviendrai pour en dire plus.)
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Je voudrais répondre aux questionnements de néopilina au sujet du verset de la Bg. Je suis heureux qu’il ait pris le temps de considérer les différentes interprétations, car c’était, en fait, le point de départ du défi lancé par Vanleers. Néo a noté, à juste titre, que Bhaktivedanta a traduit du sanskrit atmavan par "sois fermement uni au Suprême " alors que les trois autres traducteurs ont choisi "sois en possession de toi-même ", "maître de toi ", "maître de toi-même ".
Il a vu juste, dans le sens qu’il y a une différence apparente, dans les mots. Mais la clé de cette interprétation réside dans la traduction de Hulin et que j’ai déjà soulignée, sattva, la Vertu avec un grand V. C’est chez lui qu’elle prend tout son sens car il a relevé l’expression dans le verset nitya-sattvah-sthah, qui signifie littéralement : demeuré fixer dans la Vertu, « transcendantale ». Cette Vertu spirituelle, au-delà de la contamination par l’énergie matérielle, comme le temps et l’ego et l’influence des trois gunas, représente le Seigneur suprême, le Brahman.
Voilà comme je comprends ce verset et il est en droite ligne avec tous les autres versets de la Bg : l’âme individuelle doit s’unir avec l’Âme suprême, dans l’amour et le service (la bhakti); il ne peut pas être autrement quand elle dépasse les trois gunas. La Bg n’enseigne pas, par exemple, le bouddhisme dont lequel l’être culmine ultimement dans une espèce de vide, le nirvana. L’être, l’âme, ne peut pas demeurer sans connexion avec l’Autre, à moins qu’elle soit morte, définitivement, si une telle chose existe.
Il a vu juste, dans le sens qu’il y a une différence apparente, dans les mots. Mais la clé de cette interprétation réside dans la traduction de Hulin et que j’ai déjà soulignée, sattva, la Vertu avec un grand V. C’est chez lui qu’elle prend tout son sens car il a relevé l’expression dans le verset nitya-sattvah-sthah, qui signifie littéralement : demeuré fixer dans la Vertu, « transcendantale ». Cette Vertu spirituelle, au-delà de la contamination par l’énergie matérielle, comme le temps et l’ego et l’influence des trois gunas, représente le Seigneur suprême, le Brahman.
Voilà comme je comprends ce verset et il est en droite ligne avec tous les autres versets de la Bg : l’âme individuelle doit s’unir avec l’Âme suprême, dans l’amour et le service (la bhakti); il ne peut pas être autrement quand elle dépasse les trois gunas. La Bg n’enseigne pas, par exemple, le bouddhisme dont lequel l’être culmine ultimement dans une espèce de vide, le nirvana. L’être, l’âme, ne peut pas demeurer sans connexion avec l’Autre, à moins qu’elle soit morte, définitivement, si une telle chose existe.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Bonjour à tous ce qui me lisent,
Je voudrais ajouter quelques lignes à propos de l'intelligence, suite à ce que j'écrivais plus haut.
Le yoga consiste avant tout à maîtriser les sens. Krishna insistera beaucoup sur cette condition, car une intelligence saine en dépend. Et tout le reste.
« Qui restreint ses sens et s’absorbe en moi, prouve certes une intelligence sûre. C’est en contemplant les objets des sens que l’homme s’attache à eux; de là naît la convoitise, et de la convoitise la colère. La colère, quant à elle, engendre l’illusion, et l’illusion l’égarement de la mémoire. Lorsque la mémoire s’égare, l’intelligence se perd et c’est la ruine du jugement et de la décision; alors l’homme choit à nouveau dans le cycle sans fin du samsara.» (61 à 63)
J’ai parlé d’une intelligence saine, pour discerner entre elles, car comme nous allons le voir elles sont de différents types. En effet, qu’est-ce que l’intelligence ? Question énigmatique, à bien y réfléchir. En gros, on peut affirmer qu’il y en a de bonnes et de mauvaises. Les dictateurs par exemple (Staline, Hitler, Mao) sont très intelligents, mais source de destruction et de souffrance tous azimuts. L’intelligence est souvent utilisée à mauvais escient. Mais elle reste toujours de l’intelligence. Personne ne nierait que Machiavel ou Ben Laden n’étaient pas intelligents. Ou Donald Trump.
Au dix-huitième chapitre, le dernier, plus d’informations nous sont données à ce sujet : « Il y a trois ordres de savoir, d’actes et d’agissants; ils correspondent aux trois gunas. » La hiérarchie des choses et des êtres vivants est omniprésente. L’égalité est un concept, mental, par définition, et non physique, artificiel mais non réel, spirituel mais non matériel. Pour cela, les gunas sont incontournables, ils sont la jauge nous permettant d’apprécier les choses et les êtres vivants à leur juste valeur.
« À présent, écoute, Arjuna, en détail je vais décrire pour toi les trois sortes d’intelligence et de détermination, selon les trois gunas. L’intelligence par quoi l’on distingue ce qu’il convient ou ne convient pas de faire, ce qui est à craindre et ce qui ne l’est pas, ce qui enchaîne et ce qui libère, cette intelligence procède de la vertu. Mais l’intelligence qui de la religion ou de l’irréligion ne distingue pas les voies, ni ne distingue ce qu’il convient ou ne convient pas de faire, cette intelligence imparfaite appartient à la passion. Quant à l’intelligence baignant dans l’illusion et les ténèbres, qui prend l’irréligion pour la religion et la religion pour l’irréligion, qui toujours se tourne vers la voie mauvaise, cette intelligence relève de l’ignorance. » (29 à 32)
P.S. Et je voulais aussi revenir rapidement au verset concernant les gunas, puisqu'il a créé de la confusion. Juste pour souligner que l'expression en sanskrit nistraigunyah signifie "dans une pure existence spirituelle", c'est dire au-delà des trois gunas. Il ne s'agit donc pas de confondre le guna de la vertu, sattva, avec la vertu transcendantale, comme je l'ai déjà expliqué.
Je voudrais ajouter quelques lignes à propos de l'intelligence, suite à ce que j'écrivais plus haut.
Le yoga consiste avant tout à maîtriser les sens. Krishna insistera beaucoup sur cette condition, car une intelligence saine en dépend. Et tout le reste.
« Qui restreint ses sens et s’absorbe en moi, prouve certes une intelligence sûre. C’est en contemplant les objets des sens que l’homme s’attache à eux; de là naît la convoitise, et de la convoitise la colère. La colère, quant à elle, engendre l’illusion, et l’illusion l’égarement de la mémoire. Lorsque la mémoire s’égare, l’intelligence se perd et c’est la ruine du jugement et de la décision; alors l’homme choit à nouveau dans le cycle sans fin du samsara.» (61 à 63)
J’ai parlé d’une intelligence saine, pour discerner entre elles, car comme nous allons le voir elles sont de différents types. En effet, qu’est-ce que l’intelligence ? Question énigmatique, à bien y réfléchir. En gros, on peut affirmer qu’il y en a de bonnes et de mauvaises. Les dictateurs par exemple (Staline, Hitler, Mao) sont très intelligents, mais source de destruction et de souffrance tous azimuts. L’intelligence est souvent utilisée à mauvais escient. Mais elle reste toujours de l’intelligence. Personne ne nierait que Machiavel ou Ben Laden n’étaient pas intelligents. Ou Donald Trump.
Au dix-huitième chapitre, le dernier, plus d’informations nous sont données à ce sujet : « Il y a trois ordres de savoir, d’actes et d’agissants; ils correspondent aux trois gunas. » La hiérarchie des choses et des êtres vivants est omniprésente. L’égalité est un concept, mental, par définition, et non physique, artificiel mais non réel, spirituel mais non matériel. Pour cela, les gunas sont incontournables, ils sont la jauge nous permettant d’apprécier les choses et les êtres vivants à leur juste valeur.
« À présent, écoute, Arjuna, en détail je vais décrire pour toi les trois sortes d’intelligence et de détermination, selon les trois gunas. L’intelligence par quoi l’on distingue ce qu’il convient ou ne convient pas de faire, ce qui est à craindre et ce qui ne l’est pas, ce qui enchaîne et ce qui libère, cette intelligence procède de la vertu. Mais l’intelligence qui de la religion ou de l’irréligion ne distingue pas les voies, ni ne distingue ce qu’il convient ou ne convient pas de faire, cette intelligence imparfaite appartient à la passion. Quant à l’intelligence baignant dans l’illusion et les ténèbres, qui prend l’irréligion pour la religion et la religion pour l’irréligion, qui toujours se tourne vers la voie mauvaise, cette intelligence relève de l’ignorance. » (29 à 32)
P.S. Et je voulais aussi revenir rapidement au verset concernant les gunas, puisqu'il a créé de la confusion. Juste pour souligner que l'expression en sanskrit nistraigunyah signifie "dans une pure existence spirituelle", c'est dire au-delà des trois gunas. Il ne s'agit donc pas de confondre le guna de la vertu, sattva, avec la vertu transcendantale, comme je l'ai déjà expliqué.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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De la Bhagavad-gita de Marc Ballanfat
Tiré de la traduction de la Bhagavad-gita de Marc Ballanfat.
La gita ne peut pas répondre à l'interdit de Bouddha... Tout simplement parce que Krishna est apparu bien avant lui. C'est un secret de Polichinelle. Dans la plupart des Puranas, on trouve cette information. Aussi, la gita ne parle pas de Bouddha. Elle mentionne de nombreuses personnalités mais de Bouddha il n'en est pas question.
Considérez sa logique. Il écrit : «le bouddhisme a joué un rôle évident », et tout de suite après il ajoute qu'on ne peut pas le démontrer avec certitude. Certitude ou pas, qu'il nous donne alors des indications plausibles à partir d'écrits, pourtant produits en masse à cette époque, que Bouddha a existé avant Krishna. Ni lui, ni Madeleine Biardeau, ni Patrick Olivelle, qu'il cite, n'ont fait cette démonstration. Mais tous s'obstinent à prétendre, sans jamais la moindre preuve historique ou scripturaire, que l'auteur, Vyasa, faisait partie d'une conspiration nationale et qui consistait à tromper les érudits et le public ignorants. L'interprétation de ses sanskritisques sortis de la Sorbonne consiste à répéter que Krishna, Vyasa et tous les grands sages étaient de fieffés menteurs. Qu'ils ont délibérément faussé l'histoire. Lui, Marc Ballanfat, et tutti quanti s'évertuent à rectifier leur mauvaise foi...
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Dans sa traduction de la Bhagavad-gita, Shri Aurobindo écrit, à la fin, en appendice* : « En ce qui concerne l’enseignement fondamental de la Gita, comme aussi la vie spirituelle en général, le Krishna qui nous importe est l’incarnation éternelle du Divin, et non pas l’instructeur et conducteur d’hommes dont parle l’histoire. »
Étrange. Le titre qu’a donné Vyasa à cet enseignement est Le chant du Bienheureux. Quelle idée, Aurobindo, cherche-t-il à nous transmettre par ce paradoxe ? Qu’il va se servir des paroles de Krishna pour nous instruire d’une autre Entité, plus spirituelle, éternelle et divine, et qui se serait incarnée dans un corps, celui de Krishna ?** Qu’il y aurait deux visions, ou deux conceptions, en tout cas deux interprétations majeures de la Bhagavad-gita. L’une serait dérisoire, circonstancielle, historique et mondaine, et l’autre fondamentale, transcendantale, essentielle et supérieure… La sienne.
Aurobindo ne met pas en doute le fait que Krishna ait existé. Ni Arjuna. Trop de références historiques attestent leur immense influence sur les intellectuels de haut niveau et le peuple en général pour remettre en question cette réalité. Il l’admet. Et il dit même que tout cela « pourrait bien être plus qu’une fiction poétique ». Mais c’est tout. Krishna, en tant que tel, ne l’intéresse pas. Il est surtout fasciné par « le Divin transcendant, cosmique et intérieur, source de toutes choses et Maître de tous, Divin secret en l’homme. » Un face à face avec Dieu, conclut-il, consiste en une expérience dont la « forme du Sans-forme » est la réalisation la plus élevée. Quand Krishna dit « Je », il faut lire « Il », c’est-à-dire la Divinité, sans forme. Par exemple : « la Divinité dit dans la Gita », explique-t-il, au lieu de traduire littéralement par « Krishna dit dans la Bhagavad-gita ».
* (p. 335) Spiritualités vivantes, Albin Michel, 1970. Écrit originellement en 1942.
** (À l’instar du Dieu de Moïse qui s’incarne dans Jésus ?)
PS. Est-ce la Gita ou Krishna qui reconnaît l'Avatar humain ? Qu'est-ce qu'un Avatar humain ? Et qu'est-ce qu'un Avatar divin ? Krishna, selon Aurobindo, fait-il partie de la catégorie des Avatars humains ou divin ?
Étrange. Le titre qu’a donné Vyasa à cet enseignement est Le chant du Bienheureux. Quelle idée, Aurobindo, cherche-t-il à nous transmettre par ce paradoxe ? Qu’il va se servir des paroles de Krishna pour nous instruire d’une autre Entité, plus spirituelle, éternelle et divine, et qui se serait incarnée dans un corps, celui de Krishna ?** Qu’il y aurait deux visions, ou deux conceptions, en tout cas deux interprétations majeures de la Bhagavad-gita. L’une serait dérisoire, circonstancielle, historique et mondaine, et l’autre fondamentale, transcendantale, essentielle et supérieure… La sienne.
« La Gita reconnaît l’existence de l’Avatar humain. »
Aurobindo
Aurobindo
Aurobindo ne met pas en doute le fait que Krishna ait existé. Ni Arjuna. Trop de références historiques attestent leur immense influence sur les intellectuels de haut niveau et le peuple en général pour remettre en question cette réalité. Il l’admet. Et il dit même que tout cela « pourrait bien être plus qu’une fiction poétique ». Mais c’est tout. Krishna, en tant que tel, ne l’intéresse pas. Il est surtout fasciné par « le Divin transcendant, cosmique et intérieur, source de toutes choses et Maître de tous, Divin secret en l’homme. » Un face à face avec Dieu, conclut-il, consiste en une expérience dont la « forme du Sans-forme » est la réalisation la plus élevée. Quand Krishna dit « Je », il faut lire « Il », c’est-à-dire la Divinité, sans forme. Par exemple : « la Divinité dit dans la Gita », explique-t-il, au lieu de traduire littéralement par « Krishna dit dans la Bhagavad-gita ».
* (p. 335) Spiritualités vivantes, Albin Michel, 1970. Écrit originellement en 1942.
** (À l’instar du Dieu de Moïse qui s’incarne dans Jésus ?)
PS. Est-ce la Gita ou Krishna qui reconnaît l'Avatar humain ? Qu'est-ce qu'un Avatar humain ? Et qu'est-ce qu'un Avatar divin ? Krishna, selon Aurobindo, fait-il partie de la catégorie des Avatars humains ou divin ?
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
La Bhagavad-gita est une thérapie. Elle vous retourne. Vous rentre dedans, vous fait grincer des dents, mais elle enchante finalement les âmes en quête de liberté qui en ont assez des dogmes ringards et des utopies sans lendemain, dévastateurs. C’est là message de la bhakti : l’émotion, l’amour, le service et le partage sont supérieurs à la morale et à la philosophie; le travail des champs ou la bergère qui trait les vaches, par exemple, sont le summum du bonheur et de la perfection. L’acte est social, pratique et joyeux. Krishna, à bien l’écouter, décourage cette ultime idée du silence et de la contemplation béate éternels. Au contraire, musique, théâtre, danse, conte, écriture, cuisine, couture et broderie sont des arts qui soutiennent et égayent l’adoration de l’Être suprême. Ils sont le moyen et le but.
Dieu danse, malheureusement pour Nietzsche qui faisait semblant de ne pas le savoir, se persuadant qu’il était mort.
Dieu danse, malheureusement pour Nietzsche qui faisait semblant de ne pas le savoir, se persuadant qu’il était mort.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
« Bien que Je sois le non-né, bien que Je sois impérissable dans Mon existence propre, bien que Je sois le Seigneur de toutes les existences, cependant Je repose sur Ma propre nature, et Je prends naissance par Ma propre Maya. » (4.6)
Ici, Krishna dit qu’il est le Seigneur de tous les êtres vivants. Mais Aurobindo n’a pas d’intérêt pour la voie de la bhakti. Au mieux, il l’utilise comme une échelle, son but atteint, il la rejette. Ce qui l’intéresse, c’est l’esprit, pas Krishna. Il est concerné par le jnana, le yoga de la connaissance, l’Énergie divine qui nous habite et nous guide, de l’intérieur du corps. La Bhagavad-gita, pourtant, est avant tout la relation et le débat entre deux êtres, deux grands amis, dont l’un se trouve être Dieu -il le rappelle constamment-, l’autre un demi-dieu*, et plus encore.
Avant le combat un doute terrifiant s’empare d’Arjuna, … tous ces morts…et c’est alors un échange entre dieux. L’ami, désemparé par le cours des événements, devient disciple, l’humble serviteur, ce qui n’est pas la même chose, on s’en doute. Cet échange est une des relations que nous, lecteurs, pouvons virtuellement avoir ou développer avec Dieu – en devenant son ami ou son serviteur.
En Inde, le fantasme spirituel pour une femme est d’avoir Krishna pour bébé, de développer une relation filiale avec Dieu. On imagine sans grand effort (du moins ceux qui le peuvent) le bonheur de la mère de Krishna, Devaki, la sœur du roi Kamsa, d’avoir Krishna comme fils. Krishna enfant, Krishna bébé, est l’un des plus grands désirs sentimentaux que peut éprouver l’être humain ou divin. C’est cela, en premier lieu, que présente la Bhagavad-gita, si l’on veut être pragmatique. Deux hommes sur un char de guerre discutent, deux amis.
« Constatant la grande compassion d’Arjuna et sa profonde tristesse, le regard noyé dans un flot de larmes et la détresse qui s’emparait de tout son être, Krishna lui dit : d’où te vient, en ce moment crucial de l’engagement, ces considérations indignes d’un homme éveillé aux valeurs de la vie ? Elles ne conduisent ni au ciel ni à la gloire mais apporteront sur toi l’opprobre. Arjuna, je t’en prie, ne cède pas à une faiblesse aussi mesquine et avilissante; elle ne te sied guère; chasse-la de ton cœur et relève-toi! » (2. 1, 2 et 3)
Deux amis se parlent entre quatre yeux. Seulement, ensuite, viendra le jnana : la connaissance, le raisonnement, la logique, les mathématiques, le rationnel, les théories, les symboles, les allégories et les interprétations.
Ici, Krishna dit qu’il est le Seigneur de tous les êtres vivants. Mais Aurobindo n’a pas d’intérêt pour la voie de la bhakti. Au mieux, il l’utilise comme une échelle, son but atteint, il la rejette. Ce qui l’intéresse, c’est l’esprit, pas Krishna. Il est concerné par le jnana, le yoga de la connaissance, l’Énergie divine qui nous habite et nous guide, de l’intérieur du corps. La Bhagavad-gita, pourtant, est avant tout la relation et le débat entre deux êtres, deux grands amis, dont l’un se trouve être Dieu -il le rappelle constamment-, l’autre un demi-dieu*, et plus encore.
Avant le combat un doute terrifiant s’empare d’Arjuna, … tous ces morts…et c’est alors un échange entre dieux. L’ami, désemparé par le cours des événements, devient disciple, l’humble serviteur, ce qui n’est pas la même chose, on s’en doute. Cet échange est une des relations que nous, lecteurs, pouvons virtuellement avoir ou développer avec Dieu – en devenant son ami ou son serviteur.
En Inde, le fantasme spirituel pour une femme est d’avoir Krishna pour bébé, de développer une relation filiale avec Dieu. On imagine sans grand effort (du moins ceux qui le peuvent) le bonheur de la mère de Krishna, Devaki, la sœur du roi Kamsa, d’avoir Krishna comme fils. Krishna enfant, Krishna bébé, est l’un des plus grands désirs sentimentaux que peut éprouver l’être humain ou divin. C’est cela, en premier lieu, que présente la Bhagavad-gita, si l’on veut être pragmatique. Deux hommes sur un char de guerre discutent, deux amis.
« Constatant la grande compassion d’Arjuna et sa profonde tristesse, le regard noyé dans un flot de larmes et la détresse qui s’emparait de tout son être, Krishna lui dit : d’où te vient, en ce moment crucial de l’engagement, ces considérations indignes d’un homme éveillé aux valeurs de la vie ? Elles ne conduisent ni au ciel ni à la gloire mais apporteront sur toi l’opprobre. Arjuna, je t’en prie, ne cède pas à une faiblesse aussi mesquine et avilissante; elle ne te sied guère; chasse-la de ton cœur et relève-toi! » (2. 1, 2 et 3)
Deux amis se parlent entre quatre yeux. Seulement, ensuite, viendra le jnana : la connaissance, le raisonnement, la logique, les mathématiques, le rationnel, les théories, les symboles, les allégories et les interprétations.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
De Krishna, cependant, de Govinda, comme Arjuna se plaît souvent à interpeler son ami, par affection (et qui signifie celui qui aime les vaches), ou de Vrindavan, de la raison pour laquelle son village, Vrindavan, est excessivement cher à son cœur, au cœur de Krishna s’entend, ou encore quel était le nom de sa mère adoptive (Yasoda) et comment ses deux mères se comportaient avec lui (sa mère biologique se prénommait Devaki), de ces détails Shri Aurobindo ne s’en soucie guère. Ni pour lui, ni pour ses lecteurs. C’est pourtant de cela qu’il s’agit en premier, de ce qui est au cœur de la Bhagavad-gita.
La Gita, Le chant du Bienheureux, n’est qu’un épisode du Mahabharata. Afin d’approfondir son contenu, son secret, afin d’accéder au saint des saints, il faut à vrai dire se plonger dans le Harivamsa ou le Bhagavad Purana, pour ne mentionner que les écrits de Vyasa. Car le Mahabharata ne fournit qu’une maigre description de la vie de Krishna en tant que telle. Et Krishna prend ce moment, avant la bataille, pour se révéler et nous mettre sur la piste de sa vie sur terre et de ses origines dans l’au-delà; le lien est quasi indissociable. Ce qu’Aurobindo laisse d’ailleurs timidement entendre dans son commentaire des versets cités plus haut : « La Gita n’est pas un simple évangile de guerre et d’action héroïque, un crédo nietzschéen de puissance et de force hautaine qui tient la pitié pour une faiblesse. Il y a une compassion divine qui descend sur nous d’en haut. » (C’est moi qui souligne.) Il n’y a pas seulement la compassion qui est descendue, mais Krishna lui-même. Dixit, la Bhagavad-gita.
« Mes gloires divines ne connaissent pas de limites, ô Arjuna.
Ce qui je t'ai révélé n'est qu'une manière d'exemple,
une infime parcelle de ma grandeur infinie. » (10.40)
Ce qui je t'ai révélé n'est qu'une manière d'exemple,
une infime parcelle de ma grandeur infinie. » (10.40)
La Gita, Le chant du Bienheureux, n’est qu’un épisode du Mahabharata. Afin d’approfondir son contenu, son secret, afin d’accéder au saint des saints, il faut à vrai dire se plonger dans le Harivamsa ou le Bhagavad Purana, pour ne mentionner que les écrits de Vyasa. Car le Mahabharata ne fournit qu’une maigre description de la vie de Krishna en tant que telle. Et Krishna prend ce moment, avant la bataille, pour se révéler et nous mettre sur la piste de sa vie sur terre et de ses origines dans l’au-delà; le lien est quasi indissociable. Ce qu’Aurobindo laisse d’ailleurs timidement entendre dans son commentaire des versets cités plus haut : « La Gita n’est pas un simple évangile de guerre et d’action héroïque, un crédo nietzschéen de puissance et de force hautaine qui tient la pitié pour une faiblesse. Il y a une compassion divine qui descend sur nous d’en haut. » (C’est moi qui souligne.) Il n’y a pas seulement la compassion qui est descendue, mais Krishna lui-même. Dixit, la Bhagavad-gita.
Ahmed II- Digressi(f/ve)
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Re: Le Mahabharata et la Bhagavad-gita
Entre parenthèses -toujours à propos de ce verset plus haut, « d’où te vient, en ce moment crucial de l’engagement, ces considérations indignes d’un homme éveillé aux valeurs de la vie ? »-, quand Aurobindo écrit : « car celui-là seul est le sur-homme qui manifeste au plus haut point dans l’humanité la nature du suprême divin », il occulte l’enseignement ésotérique qui sous-tend les relations intimes entre Dieu et les humains; dans la bhakti, les femmes de Vrindavan sont supérieures aux hommes. Elles sont des sur-femmes.
Puis vient l’amour de sa mère, adoptive, et de toutes ses femmes qui l’aimaient comme leur propre enfant. C’est un amour direct, sans tralala, sans l’idée que Krishna est le Dieu suprême de la création matérielle et pour laquelle elles n’éprouvent d’ailleurs absolument aucun intérêt; leur bonheur est de donner le sein à Krishna ou de le baigner et de le nourrir en cuisinant des mets succulents. Dans tous les temples de Krishna en Inde, les brahmanas, lorsqu’ils servent et adorent la déité, ont conscience de cette dimension idéale qui est leur repère. Fermer la parenthèse.
Contrairement à Aurobindo, je pense que la bhakti est le cœur du message de la Bhagavad-gita. En ce sens, cet enseignement est une Révolution culturelle universelle, spirituelle, religieuse, littéraire et philosophique. Elle est surtout, positivement, la parole de deux hommes, de deux amis extraordinaires. En italique, svp!
Mais ce n’est pas ce qui intéresse Shri Aurobindo, cette parole des deux amis. En cela, il est platonicien, il va chercher le sens de la Gita ailleurs, dans les Idées. L’importance historique et traditionnelle que joue ce lieu sacré, Kurukshetra, sur lequel s’est déroulé le grand sacrifice que fut la bataille, puisque des millions de soldats sont morts, n’a pas prise sur lui. Cela ne l’intéresse pas, ou alors anecdotiquement. Ni comme nourriture intellectuelle, ni comme application pratique dans sa vie de tous les jours, encore moins comme serviteur ou dévot de Krishna. Il s’en sert plutôt comme marchepied pour atteindre la libération, éventuellement. La Bhagavad-gita, oui, mais Krishna, non.
La forme d’amour de Dieu la plus élevée est représentée
par les vachères de Vrindavan, les gopis.
par les vachères de Vrindavan, les gopis.
Puis vient l’amour de sa mère, adoptive, et de toutes ses femmes qui l’aimaient comme leur propre enfant. C’est un amour direct, sans tralala, sans l’idée que Krishna est le Dieu suprême de la création matérielle et pour laquelle elles n’éprouvent d’ailleurs absolument aucun intérêt; leur bonheur est de donner le sein à Krishna ou de le baigner et de le nourrir en cuisinant des mets succulents. Dans tous les temples de Krishna en Inde, les brahmanas, lorsqu’ils servent et adorent la déité, ont conscience de cette dimension idéale qui est leur repère. Fermer la parenthèse.
Contrairement à Aurobindo, je pense que la bhakti est le cœur du message de la Bhagavad-gita. En ce sens, cet enseignement est une Révolution culturelle universelle, spirituelle, religieuse, littéraire et philosophique. Elle est surtout, positivement, la parole de deux hommes, de deux amis extraordinaires. En italique, svp!
Mais ce n’est pas ce qui intéresse Shri Aurobindo, cette parole des deux amis. En cela, il est platonicien, il va chercher le sens de la Gita ailleurs, dans les Idées. L’importance historique et traditionnelle que joue ce lieu sacré, Kurukshetra, sur lequel s’est déroulé le grand sacrifice que fut la bataille, puisque des millions de soldats sont morts, n’a pas prise sur lui. Cela ne l’intéresse pas, ou alors anecdotiquement. Ni comme nourriture intellectuelle, ni comme application pratique dans sa vie de tous les jours, encore moins comme serviteur ou dévot de Krishna. Il s’en sert plutôt comme marchepied pour atteindre la libération, éventuellement. La Bhagavad-gita, oui, mais Krishna, non.
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