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L'infini de la bêtise.

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Message par neopilina Lun 26 Jan 2015 - 12:15

( A baptiste, " Charlie " a fait l'objet de 48 procès, il en a perdu 9, L'infini de la bêtise. - Page 9 3438808084  . Les Lumières de l'Islam sont bien évidemment attendues avec impatience. Comme il y a un précédent, un exemple, un modèle, ça devrait se faire plus vite. )

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Message par poussbois Lun 26 Jan 2015 - 17:16

baptiste a écrit:En ce qui concerne les plaintes déposées contre Charlie l’accusation d’incitation à la haine raciale avait été jugée irrecevable, pourtant parmi le million et demi d’acheteurs du numéro de Charlie qui s’étaient précipités beaucoup sinon la majorité n’étaient pas d’innocents fanatiques de l’humour anticlérical mais bel et bien des électeurs FN.

Quel est le rapport entre les soi-disant acheteurs FN de Charlie et l'incitation à la haine ? D'abord, je rappelle que les unes de Charlie Hebdo portaient majoritairement sur le FN, justement, et surtout qu'aucun journal n'est responsable de ses lecteurs. Enfin, je souhaiterais que tu nous donnes tes références d'où tu tires que Charlie Hebdo est "majoritairement acheté par des électeurs FN". Ca m'intéresse.

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Message par neopilina Lun 26 Jan 2015 - 17:35

La liberté d'expression a, légalement, 4 limites en France : 1 - injure, 2 - diffamation, 3 - apologie du terrorisme, 4 - incitation, discrimination etc. ( L'intitulé est très long, je ne l'ai pas en tête, haine raciales, homophobie, islamophobie, antisémitisme, etc. ). C'est le truc de base, par exemple pour une charte de forum, c'est la Loi. " Charlie " a été condamné pour 1 et 2. Jamais pour les deux autres.
Sinon, il est bien clair qu'en tête de ceux que " Charlie " ne fait pas rire du tout, on a les islamistes radicaux, et en N°2, l'extrême droite.
Qu'on aime ou pas, et j'ai dis que je n'étais pas un assidu, je reconnais en " Charlie " une incarnation de cet esprit absolument singulier du peuple, du génie, français, qui étonne le monde depuis des siècles. Je m'immerge régulièrement dans le Grand Siècle (XVII°) et le XVIII°, tout l'Occident nous regarde, s'étonne, et d'ailleurs parle et communique en français ( Langue des lettres, de la science, de la diplomatie. ).

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Message par Courtial Lun 26 Jan 2015 - 20:51

La liberté d'expression a, légalement, 4 limites en France : 1 - injure, 2 - diffamation, 3 - apologie du terrorisme, 4 - incitation, discrimination etc.

On peut également y ajouter la menace. Je ne peux pas justifier une menace en disant que j'ai exercé ma liberté d'expression.

Bergame a écrit:Et pour ce qui concerne la supériorité de nos valeurs, il me semble assez évident également qu'elle ne peut avoir de sens que rapportée à une culture. Vous a-t-il semblé que la laïcité était une valeur prépondérante au Moyen-Orient ? Et pourtant, ils arrivent bien à "vivre ensemble" en Arabie Saoudite, aussi.
Alors bien sûr, le meurtre, lui, n'y est pas non plus un acte valorisé. Mais le problème n'est pas là : La plupart des déclarations de musulmans que je lis et entends, d'un côté condamnent les attaques terroristes, et de l'autre condamnent également les caricatures.

J'observe que le glissement sur la pente savonneuse reste à l'arrière-plan. D'accord pour le relativisme culturel, l'anti-colonialisme et tout ça, mais cela ne justifie pas tout. Musulman ne veut pas dire admirateur inconditionnel de la kalachnikov, dont on ne voit pas ce qu'elle représente de culturel ou d'oriental. Elle peut être maniée en même façon par des terroristes parfaitement occidentaux et catholiques. Et l'intégrisme étant la chose du monde la mieux partagée et universelle, il n'a nul besoin du folklore pour être expliqué.
Tant que les musulmans se contentent des protestations, on peut imaginer qu'ils ont la liberté de les exprimer. Il serait regrettable qu'on ne puisse interroger leur protestation au nom du même principe.

Au plan philosophique, je considère l'idée que toutes les valeurs se valent comme un contresens. Reste sans doute de nietzschéisme indécrottable, je vois mal comment on peut concevoir les valeurs sans une échelle de valeur (de façon scalaire, verticale), autrement dit, je crois que la hiérarchisation constitue l'essence même de la valorisation.

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Message par Courtial Mar 27 Jan 2015 - 0:53

Husserl cité par Crosswind a écrit:tout ce qui est transcendant (tout ce qui n'est pas donné de façon immanente) doit être pourvu de l'indice de nullité [...] De toutes les sciences, je n'ai le droit de disposer qu'en tant que phénomènes, non par conséquent en tant que systèmes de vérités valables que je puisse utiliser comme point de départ[à titre de prémisses, ni même à titre d'hypothèses] ; p. ex. toutes la psychologie, toute la science de la nature.[...] Vouloir amener la connaissance à une évidente présence-en-personne pour y voir l'essence [de son oeuvre] cela ne signifie pas déduire, induire, calculer, etc... [ne signifie pas inférer de façon légitime, à partir des choses déjà données ou considérées comme tells, des choses nouvelles]

Il résulte de cela que les valeurs morales sont purement arbitraires ? Il est question là-dedans des valeurs morales ? De l'arbitraire ?

Sans vouloir jouer les gardiens de musée, je trouve que tu prends trop de liberté avec Husserl. Tu fais ce que tu veux, hein, mais je trouve que c'est un peu trop. Dans un autre sujet, tu expliques aussi que le fin mot de la phénoménologie, c'est d'affirmer que chacun à sa propre raison à lui tout seul, en précisant que Husserl dit cela au sujet de la logique (sic).
C'est même pas drôle, en plus.

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Message par hks Mar 27 Jan 2015 - 1:45

euthyphron a écrit:Non, le droit n'entérine pas des valeurs, il fixe les règles, c'est tout, mais c'est déjà ça. Son fondement est pragmatique, et non éthique : comment faire régner l'ordre?

Il me semblait que l' ordre (versus le désordre) relèvait des valeurs.

Le juriste est en présence de faits ( plus précisément de comportements humains).
Se présentent des choix:
par ex:  favoriser les fervents du désordre ou bien ceux de l'ordre ou bien laisser également les deux s'affronter.
Le droit va être utile ( ce qui est une valeur et la valeur qui  justifie son existence), utile ici c'est favoriser la viabilité ou la vivacité  de certaines valeurs ( celle du camp de l' ordre ou dune certain abaissement de la violence par exemple ).

Il va être utile comme force de coercition. Il permet d' autorité la prépondérance de certaine valeurs sur d'autres.

Ce qui na pas de valeurs, à la limite, c'est la force de police (le bras armé de la justice)... encore qu'on puisse estimer plus ou moins valorisée de recourir à la force matérielle pour imposer le Droit beaucoup la voit comme pragmatiquement nécessaire et indifférente  aux valeurs.( ce en quoi ils valorisent la praxis ... c'est à dire avoir de la suite dans les idées....parce que légiférer sans moyens d' appliquer c' est irresponsable !!!  )  

L' ordre se peut être ( et c'est prégnant en droit ) les règles de filiation.
On a l' interdit de l' inceste, c'est une valeur, ce n'est pas factuel.
Le droit entérine cette valeur. Si certaines valeurs l' emportent sur d'autres le droit entérine.

On a eu de nos jours en matière de reconnaissance des homosexualités des évolutions qui ont induit des  évolutions du droit de filiation.

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Message par hks Mar 27 Jan 2015 - 2:05

bergame a écrit:Et dans mon esprit, s'en tenir au droit, c'est justement une manière d'éviter d'en arriver à la question de la culture et des valeurs, qui me semble beaucoup plus impliquante et potentiellement beaucoup plus conflictuelle.
L'infini de la bêtise. - Page 9 4221839403 L'infini de la bêtise. - Page 9 4221839403
.
J' ai un peu étudié l' évolution personnelle d'un des meilleurs penseurs français du Droit Pierre Legendre .
Tiraillé et in fine implosant.Tiraillé entre des valeurs.
Lui le juriste que sa science éminente du droit aurait du prémunir du conflictuel.
Comme quoi on y échappe pas ( aux valeurs !) .

http://www.vacarme.org/article1640.html

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Message par poussbois Mar 27 Jan 2015 - 2:58

Bergame a écrit:
Lorsque, poussbois, tu énonces : "Seuls les non-laïcs sont offensés", que veux-tu dire ? Qu'une partie des musulmans en France ne sont pas "laïcs" ? Admettons. Il me semble d'ailleurs que ce n'est pas complètement évident d'être musulman ET laïc. Mais une fois qu'on a dit ça :  Et alors ? Au nom de quoi vas-tu demander aux musulmans d'être laïcs ? Ou bien tu vas disserter sur la supériorité de la valeur "laïcité" pour ce qui concerne le "vivre-ensemble" (ce que tu as commencé à faire du reste).

C'est bien dommage que ta mémoire te joue des tours et que tu ne te rappelles absolument pas les échanges que nous avions eus sur ce thème au sujet de l'excision. C'est bien dommage, ça t'aurait évité de comprendre aussi mal et d'être inutilement blessant. Peu importe, je vais te repréciser : JE NE DEMANDE RIEN A PERSONNE ! J'explique juste la cible et le mécanisme des caricatures de Charlie Hebdo.

Vous a-t-il semblé que la laïcité était une valeur prépondérante au Moyen-Orient ? Et pourtant, ils arrivent bien à "vivre ensemble" en Arabie Saoudite, aussi.

Heu, non, il n'y a pas de vivre ensemble en Arabie Saoudite. Apostat, c'est un crime passible de la lapidation. Les quelques agnostiques (je pends la terminologie la plus neutre) qui y vivent doivent tout de même supporter tous les jours des contraintes religieuses dont ils ne voient plus l'intérêt sous peine de graves problèmes. Pas d'association homosexuelle non plus, et pourtant, j'ai dans l'idée qu'il doit toutefois y en avoir comme partout. Alors, non, pas de vivre ensemble, mais un pouvoir autoritaire qui maintient ses institutions.

Haiaiaie, ça y est, je vais être taxé de méchant impérialiste parce que je veux imposer un fonctionnement occidental au monde entier (j'anticipe hein). Eh bien, non, même pas. Grand bien leur face d'avoir un pays relativement en paix avec une économie prospère, si ça doit se faire sur le dos de l'oppression de quelques minorités somme toute indéfendable : incroyants et invertis... Au moins, le reste de la population profite d'un pouvoir fort.
Haiaiaie, je me jette dans le trou béant : mais chez nous aussi on opprime ! Oui un peu. Mais justement, on a des caricaturistes qui nous renvoient nos pires autoportraits pour nous permettre la prise de conscience.

Alors bien sûr, le meurtre, lui, n'y est pas non plus un acte valorisé. Mais le problème n'est pas là : La plupart des déclarations de musulmans que je lis et entends, d'un côté condamnent les attaques terroristes, et de l'autre condamnent également les caricatures.
Et c'est leur droit le plus strict. De même qu'ils ont le droit de porter plainte pour offense et d'être déboutés ou pas. Je ne vois pas où est le problème.

En conclusion, je ne vois pas comment nous allons pouvoir gérer ce problème sans revenir au droit et peut-être à la culture. Sans énoncer clairement -oui, en effet : "Ici, c'est la France, et le droit français dit X et Y. Tout citoyen français et résident en France est sensé connaître et respecter le droit français. Dans le cas contraire, il sera sanctionné."
Et dans mon esprit, s'en tenir au droit, c'est justement une manière d'éviter d'en arriver à la question de la culture et des valeurs, qui me semble beaucoup plus impliquante et potentiellement beaucoup plus conflictuelle.

Oui, c'est la base du droit : imposer par la force la paix sociale et la protection des institutions quand l'éducation et la morale individuelle ont fait défaut.



Pour répondre à Courtial, dont le message est limpide, je suis tout à fait d'accord. Le problème, c'est qu'on peut préférer un système à un autre, constater l'échelle des valeurs, on ne peut également que constater la forte hétérogénéité mondiale de ces échelles. En France, le droit d'expres​sion(qui est mis actuellement sur un piédestal où il est bien loin de se trouver) fait partie des valeurs de référence. Remettre cela en cause ne peut se faire qu'en France, et certainement pas au Niger où les dernières manifestations anti-caricatures ont donné lieu à une 20aine de meurtres.

En même temps, on s'est tellement occupé à notre profit de la politique intérieure de ces pays qu'il est normal qu'ils viennent nous expliquer comment vivre chez nous. Après tout, on est dans la même démarche, la même logique : chacun considère que son échelle de valeurs doit être universelle. Et je trouve navrant que sous prétexte de défendre LOCALEMENT des valeurs auxquelles je tiens, me fasse tout de suite passer pour l'un de ses impérialistes ce que précisément je dénonce.

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Message par kercoz Mar 27 Jan 2015 - 8:14

poussbois a écrit:Et je trouve navrant que sous prétexte de défendre LOCALEMENT des valeurs auxquelles je tiens, me fasse tout de suite passer pour l'un de ses impérialistes ce que précisément je dénonce.

Localement ?
On peut de plus en plus souvent citer la phrase de Bossuet : """Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences dont ils chérissent les causes""
Notre niveau de vie est issu de la globalisation. Les valeurs locales n'ont plus de valeurs si les échanges sont multilatéraux. Charlie est traduit en plusieurs langues , dont l' arabe ...( mais pas en Breton !)

Le terme "VALEUR" mériterait plus d'attention. A mon avis, si l' on remonte ses dérives itératives, on doit s'apercevoir qu'il ne devrait s' utiliser que pour l' individu. La "valeur" d' un objet n'étant que le dépot de la valeur du possesseur lors d' un échange à une époque ou le transfert d' objet était plus symbolique qu' utilitaire.

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Message par Crosswind Mar 27 Jan 2015 - 10:52

Courtial a écrit:
Husserl cité par Crosswind a écrit:tout ce qui est transcendant (tout ce qui n'est pas donné de façon immanente) doit être pourvu de l'indice de nullité [...] De toutes les sciences, je n'ai le droit de disposer qu'en tant que phénomènes, non par conséquent en tant que systèmes de vérités valables que je puisse utiliser comme point de départ[à titre de prémisses, ni même à titre d'hypothèses] ; p. ex. toutes la psychologie, toute la science de la nature.[...] Vouloir amener la connaissance à une évidente présence-en-personne pour y voir l'essence [de son oeuvre] cela ne signifie pas déduire, induire, calculer, etc... [ne signifie pas inférer de façon légitime, à partir des choses déjà données ou considérées comme tells, des choses nouvelles]

Il résulte de cela que les valeurs morales sont purement arbitraires ? Il est question là-dedans des valeurs morales ? De l'arbitraire ?

Sans vouloir jouer les gardiens de musée, je trouve que tu prends trop de liberté avec Husserl. Tu fais ce que tu veux, hein, mais je trouve que c'est un peu trop. Dans un autre sujet, tu expliques aussi que le fin mot de la phénoménologie, c'est d'affirmer que chacun à sa propre raison à lui tout seul, en précisant que Husserl dit cela au sujet de la logique (sic).
C'est même pas drôle, en plus.

Je ne peux pas prétendre avoir raison dans mes propos sur Husserl, son œuvre prise dans sa globalité, puisque je ne suis pas un spécialiste de la question. Partant de là je suis forcé de tenter de lire Husserl et ceux qui le connaissent "bien".

En lisant modestement "L'Idée de la phénoménologie", et j'avoue humblement ne m'attaquer à la quatrième leçon que maintenant, je trouve dès la première leçon

Husserl a écrit: Mais à quoi sert-il de faire appel aux contradictions, puisque la logique elle-même est en question et devient problématique. En effet, la validité, pour le réel, des lois logiques, validité qui, pour la pensée naturelle, est hors de toute doute, devient maintenant problématique et même douteuse.

Difficile d'être plus clair. La logique, pour Husserl, ne peut être prise pour connaissance. Il suffit de peser le poids réel de cette proposition husserlienne pour comprendre, par extension, qu'il est parfaitement possible d'envisager une logique radicalement différente de celle que l'on connaît et qui pourtant fera sens, mais dans un autre état de conscience. Ce qu'il dit, c'est simplement que l'important n'est pas d'écrire "1+1=2", mais que cette proposition fasse sens. Si "1+1=4" fait sens, alors cette proposition sera valable. Il affirme donc que la logique est une "connaissance humaine", liée aux "formes intellectuelles humaines", c-à-d à un état de conscience déterminé.

Je ne pense pas avoir écrit quelque part que le but ultime de la phénoménologie à la sauce husserlienne était de prouver que "chacun avait raison à lui tout seul". Ou alors nous nous sommes mal compris... Ou tu as mal compris la signification réelle de l'Epochè et de la réduction ?

Le sens d'une valeur ne fait pas sens autrement que tout le restant du vécu. Le sens de toute chose est relatif à un état de conscience, et déterminer un état de conscience étalon ne peut qu'être une pétition de principe, un arbitraire. Ce que je vais te dire pourra te paraître un peu fort, mais ne pas comprendre ce fait revient à ne pas appréhender correctement l'Epochè phénoménologique. Aucune connaissance, pas même le Bien ou le Mal, ne peut être assurée de manière transcendante, Universelle. Il est possible de déterminer le Bien ou le Mal, mais uniquement sur des critères imposés par une conscience hors d'atteinte.

C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire

Je disais que je lisais Husserl, bien modestement, mais aussi des gens qui le connaissent plutôt bien. On ne peut pas vraiment dire que Bitbol soit un amateur en la matière...
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Message par Courtial Mar 27 Jan 2015 - 20:29

Husserl a écrit:Mais à quoi sert-il de faire appel aux contradictions, puisque la logique elle-même est en question et devient problématique. En effet, la validité, pour le réel, des lois logiques, validité qui, pour la pensée naturelle, est hors de toute doute, devient maintenant problématique et même douteuse.

crosswind a écrit:Difficile d'être plus clair. La logique, pour Husserl, ne peut être prise pour connaissance.

Sur ces bases-là, ce qui va être difficile, c'est de discuter sérieusement. Cette phrase ne dit rien qui soit lié à ta proposition.

La phrase dit que sur le point que l'on est en train de discuter (lequel, on ne le saura pas, ceci est cité hors contexte), il serait vain de soulever des objections (ou des justifications, je ne sais) au nom de la contradiction, puisque l'on est précisément en train d'interroger la logique elle-même (elle est en question et devient problématique : elle n'est donc pas supposée acquise). On ne va pas faire appel à la contradiction, c'est-à-dire un principe... logique, ou une relation...logique.
Puisqu'alors on supposerait acquis ce qu'on est précisément en train d'interroger. Ce serait une pétition de principe, un diallèle, pour faire pédant.
J'imagine que dans le texte que tu ne nous donnes pas (ce qu'il y avant juste avant), il doit soulever un point, touchant au fondement de la logique, point qui peut apparaître comme une erreur de raisonnement. Ou une impossibilité. Et il dit en quelque sorte, que ça, c'est une difficulté de la logique, mais qu'il se place d'un point de vue anté-logique, etc.

Ca ne veut pas dire que la logique n'est pas une connaissance.

Et personne ne demande de connaître tout Husserl. Faut juste lire la phrase.

Crosswind a écrit:C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire

Et ce canevas normé, il est normé par quoi, d'après Husserl (puisque tu maintiens qu'on trouve cela dans ces phrases) ? L'arbitraire qui donne la norme du cavenas, il dépend de quel Sujet libre décidant arbitrairement la norme ?
Ou si ce n'est pas un "arbitraire" au sens de dépendant du libre-arbitre de, s'il n'y a pas de sujet normant, c'est donc le hasard ? Il y a une distribution aléatoire de canevas normants qui constituent les valeurs ?

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Message par hks Mar 27 Jan 2015 - 23:52

croswind a écrit:C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire
Le mot arbitraire choque un peu .
Il aurait choqué Husserl  qui dit ( dans un  texte assez difficile des idéeen 1 §/55)

Husserl a écrit:« On peut encore dire d’une certaine manière et sans précautions dans l’emploi des mots : toutes les unités réelles sont des “unités de sens”. Des unités de sens présupposent une conscience donatrice de sens (…). Si le concept de réalité est tiré des réalités naturelles, des unités d’une expérience possible, on peut sans doute identifier le “tout du monde”, le “tout de la nature” avec le tout des réalités ; mais il est absurde de l’identifier au tout de l’être et par là même de le porter à l’absolu. ( …) La réalité et le monde sont ici précisément un titre général pour désigner certaines unités de sens dotés de validité, à savoir des unités de “sens” se rapportant à certains enchaînement au sein de la conscience absolue et pure qui en vertu de leur essence donnent tel sens et non tel autre (…). L’absurdité commence quand on se met à philosopher et que, en quête d’une ultime information sur le sens du monde, on oublie de remarquer que le monde lui-même a son être complet sous la forme d’un certain “sens” qui présuppose la conscience absolue à titre de champ pour la donation de sens »40.

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Message par neopilina Mer 28 Jan 2015 - 1:44

hks a écrit:
Husserl a écrit:« On peut encore dire d’une certaine manière et sans précautions dans l’emploi des mots : toutes les unités réelles sont des “unités de sens”. Des unités de sens présupposent une conscience donatrice de sens (…). Si le concept de réalité est tiré des réalités naturelles, des unités d’une expérience possible, on peut sans doute identifier le “tout du monde”, le “tout de la nature” avec le tout des réalités ; mais il est absurde de l’identifier au tout de l’être et par là même de le porter à l’absolu. ( …) La réalité et le monde sont ici précisément un titre général pour désigner certaines unités de sens dotés de validité, à savoir des unités de “sens” se rapportant à certains enchaînement au sein de la conscience absolue et pure qui en vertu de leur essence donnent tel sens et non tel autre (…). L’absurdité commence quand on se met à philosopher et que, en quête d’une ultime information sur le sens du monde, on oublie de remarquer que le monde lui-même a son être complet sous la forme d’un certain “sens” qui présuppose la conscience absolue à titre de champ pour la donation de sens ». Ideen, §/55.

Intéressant. Ça me rappelle le livre " Gamma " de la " Métaphysique " où Aristote se proposant d'examiner à fond des principes aussi fondamentaux que celui d'identité, de non-contradiction, découvre, à son plus grand étonnement, ça l'agace même, qu'ils ne sont pas radicalement logiques, de nature logique. Il finit par admettre, lâcher, envisager, qu'ils sont métaphysiques. On sait que je vais plus loin : je dis ontologiques. Dés qu'il y a Sujet il y a génération de Sens, et c'est fondamentalement d'abord ontologique. Tout Sujet, même si le volet scientifique, neurologique, etc., n'est pas encore connu par le menu, génère d'abord d'emblée, fondamentalement, radicalement, au point que je viens de le dire, il y a un corolaire scientifique, de l'ontologique, des Étants, du Sens.
Je ne lis pas Husserl. Les " Recherches logiques " me sont tombées des mains des dizaines de fois, mais il y a une formule très très connue de la VI°, je crois, ou Husserl parle de l'entité ultime en terme de recherche, d'inquisition, de questionnement, c'est d'ailleurs la seule chose que j'ai retenu et repris, me convenant très bien, que j'ai rejoint à ma façon en poussant la démarche du doute radical aussi loin que possible, il parle de, je cite, " la copule qui est, vaut, fait sens ". La première chose qu'on peut dire de l'Étant, par définition, tautologiquement, c'est qu'il est, et j'ajoute immédiatement à la suite, ontologiquement dit donc, qu'il est Un et un, de facto généré tel par le Sujet. Abstraction faite de l'Être en tant que tel, l'infini ontologique, un Étant peut donc parfaitement être aussi mais autrement qu'ontologiquement, un infini. Le Socle, le Fond, est selon moi ontologique, et c'est lui, l'expérience de celui-ci en tant que tel, en dernier lieu " Il y a quelque chose sinon il n'y aurait même pas cela ", déclinaison manifeste du principe de non-contradiction, qui permet d'éviter l'itération à l'infini que Sartre redoutait tant. Socle, Fond, qui atteint, permet de repartir, de revenir, et donc entre autre, de reprendre, d'entériner, en revenant d'une nuit éminemment métaphysique, dans d'autres, meilleures, conditions, le cogito. Ce socle atteint par la connaissance, on peut passer à la " suite " Ce qu'est tel ou tel Étant, ce qui pourra relever d'une, de plusieurs, d'une multitude, de disciplines positives, scientifiques et/ou humaines. L'Étant est Donné, conquis, acquis, en tant que tel, on peut poursuivre.


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Message par kercoz Mer 28 Jan 2015 - 8:35

Courtial a écrit:
Crosswind a écrit:C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire

Et ce canevas normé, il est normé par quoi, d'après Husserl ..... ? L'arbitraire qui donne la norme du cavenas, il dépend de quel Sujet libre décidant arbitrairement la norme ?

Il me semble qu'il faut entendre plutot que c' est le CHOIX du canevas qui est arbitraire .( et non pas le canevas)
Et que ce choix est fait par la structure......ou plutot que ce choix est fait par l' évolution différenciée de la culture dans une structure qui elle serait plutot un invariant.

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Message par jghislain Mer 28 Jan 2015 - 9:45

Husserl a écrit: L’absurdité commence quand on se met à philosopher et que, en quête d’une ultime information sur le sens du monde, on oublie de remarquer que le monde lui-même a son être complet sous la forme d’un certain “sens” qui présuppose la conscience absolue à titre de champ pour la donation de sens »40.

Je n'ai pas lu Husserl, l'ayant considéré trop abstrait et en-dehors des réalités par son discours sur les idées. Mais je trouve les diverses citations ici assez intéressantes.

Il semblerait, d'après le peu donné ici à saisir, que Husserl n'a aucune confiance dans le désir métaphysique d'absoluité de l'esprit. Enfin quant à l'application de ses propres vues, surtout quand on a la vue courte, d'après ce que j'ai compris. Car dans cette dernière citation ci-dessus, il reconnaît la vanité, malgré un déni général ("un oubli"), de toute recherche vers une transcendance qui amènerait, en suivant l'esprit, propre à chacun, et sa logique, à remonter vers un sens ultime et absolu du monde. Puisque pour se faire, cela présupposerait d'avoir, par analogie avec une conscience immanente finie, d'avoir donc, une conscience absolue (et totale...) du monde, chose illusoire. Non pas, d'après ce que je lis, que Husserl refuse au monde son sens, mais plutôt qu'il est absurde de vouloir philosopher pour l'atteindre, au regard de notre conscience immanente et finie.

Néanmoins, que je sache, Husserl n'en demeure pas moins un logicien, mathématicien qui plus est, ce qui a tout pour me plaire. Je me pose une question. Si Husserl ne s'intéresse pas à l'Etre classique, d'un point de vue métaphysique je veux dire, l'Etre signifie-t-il pour lui rien qu'un objet de l'esprit, qui se base sur la copule dans notre lien logique d'appréhension du monde ? Et donc que toute démarche de l'esprit ne tient que dans cette recherche logique, et donc que la voie vers l'Etre, c'est aussi un perfectionnement de l'esprit humain, tout en restant dans l'abstraction et en suspendant toute reproduction de nos schémas de pensée vers une vue systématique du monde ?

Dans ce cas, la philosophie d'Husserl est, comme les mathématiques, un jeu de logique, et même plus : un jeu de perfectionnement de l'esprit, que ferait le philosophe dans sa tour d'ivoire avant de retourner dans le monde pour y voir plus clair. Une démarche de retrait et de longs travaux de l'esprit : du raisonnement, de l'observation de sa pensée.

Très intéressant alors, et pas étonnant qu'un maître à penser aussi profond a pu faire surgir un Heidegger quelques années après...

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Message par Crosswind Mer 28 Jan 2015 - 10:34

Courtial a écrit:

La phrase dit que sur le point que l'on est en train de discuter (lequel, on ne le saura pas, ceci est cité hors contexte), il serait vain de soulever des objections (ou des justifications, je ne sais) au nom de la contradiction, puisque l'on est précisément en train d'interroger la logique elle-même (elle est en question et devient problématique : elle n'est donc pas supposée acquise). On ne va pas faire appel à la contradiction, c'est-à-dire un principe... logique, ou une relation...logique.
Puisqu'alors on supposerait acquis ce qu'on est précisément en train d'interroger. Ce serait une pétition de principe, un diallèle, pour faire pédant.
J'imagine que dans le texte que tu ne nous donnes pas (ce qu'il y avant juste avant), il doit soulever un point, touchant au fondement de la logique, point qui peut apparaître comme une erreur de raisonnement. Ou une impossibilité. Et il dit en quelque sorte, que ça, c'est une difficulté de la logique, mais qu'il se place d'un point de vue anté-logique, etc.

Ca ne veut pas dire que la logique n'est pas une connaissance.

Cet extrait est tiré de la première leçon de L'idée de la phénoménologie. Le point sur lequel discute Husserl est précisément la connaissance. Il mentionne noir sur blanc dans son texte que la logique - à l'instar de toutes les autres sciences naturelles, des mathématiques à la psychologie en passant par la biologie - ne peut être la source d'une connaissance. Toute sa première leçon est dédiée à montrer pourquoi ce qu'il nomme "l'attitude naturelle" ne peut atteindre une connaissance autre que ce qu'il dénomme "connaissance humaine". Il ne le mentionne pas textuellement ainsi, mais je me permets de traduire cette proposition en m'appuyant sur Michel Bitbol : la connaissance de l'humain est relative à son état de conscience et ne peut prétendre à une universalité transcendante.

La transcendance et son problème dans la connaissance, ainsi que la mise en évidence de la nécessité de partir dans une philosophie critique de la connaissance d'une "connaissance donnée absolument et indubitablement" fait l'objet de la deuxième leçon. Et il fait bien entendu appel à Descartes et son cogito, pour ensuite terminer par l'introduction de l'Epochè et de la réduction.

Dans son résumé il écrit encore ceci
Husserl a écrit:[...]tout ce qui est transcendant (tout ce qui n'est pas donné de façon immanente) doit être pourvu de l'indice de nullité, c'est-à-dire : son existence, sa validité ne doit pas être posée comme telle, mais tout au plus comme phénomène de validité. De toutes les sciences, je n'ai le droit de disposer qu'en tant que phénomènes, non par conséquent en tant que systèmes de vérités valables que je puisse utiliser comme point de départ [à titre de prémisses, ni même à titre d'hypothèses]

La logique ne peut donc être utilisée comme système de vérité valable pour pouvoir être utilisé comme point de départ à une critique de la connaissance car elle n'est pas une connaissance donnée sûre, telle que l'est le cogito.

Je peux me tromper, je l'admets volontiers, mais j'ai beau retourner et relire les trois premières leçons cela continue de signifier pour moi que la logique ne peut être prise ni comme outil permettant d'accéder à la connaissance, ni même comme connaissance.



Crosswind a écrit:C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire
Courtial a écrit:

Et ce canevas normé, il est normé par quoi, d'après Husserl (puisque tu maintiens qu'on trouve cela dans ces phrases) ? L'arbitraire qui donne la norme du cavenas, il dépend de quel Sujet libre décidant arbitrairement la norme ?

Ou si ce n'est pas un "arbitraire" au sens de dépendant du libre-arbitre de, s'il n'y a pas de sujet normant, c'est donc le hasard ? Il y a une distribution aléatoire de canevas normants qui constituent les valeurs ?

HKS a raison, j'ai emprunté le mot "arbitraire" un peu à la légère. Je réfléchis à votre (EDIT, désolé pour le vouvoiement, c'est que tu me donnes l'impression d'un sage alors je marque instinctivement le respect ;-) ) remarque particulièrement judicieuse L'infini de la bêtise. - Page 9 3184188294
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Message par Crosswind Mer 28 Jan 2015 - 11:16

Courtial a écrit:
Crosswind a écrit:C'est de ce procédé que l'on peut également déduire qu'il n'y a pas un état de conscience type, "normal". Toute théorie, aussi profonde qu'elle puisse être, toute science, toute valeur, se repose sur un canevas de conscience normé. Et l'on ne se rend plus compte que ce canevas est purement arbitraire


Et ce canevas normé, il est normé par quoi, d'après Husserl (puisque tu maintiens qu'on trouve cela dans ces phrases) ? L'arbitraire qui donne la norme du cavenas, il dépend de quel Sujet libre décidant arbitrairement la norme ?

Ou si ce n'est pas un "arbitraire" au sens de dépendant du libre-arbitre de, s'il n'y a pas de sujet normant, c'est donc le hasard ? Il y a une distribution aléatoire de canevas normants qui constituent les valeurs ?

Toute petite remarque préliminaire : on se comprend mal, je ne prétends pas que Husserl ait jamais écrit la citation, reprise par vous ici plus haut, en clair. S'il se trouve que je l'ai explicitement ou implicitement mentionné, je m'en excuse.

Le canevas normé de l'état de conscience est d'abord un constat. Les neurosciences, tout comme les sciences psychologiques en général, ont cette lourde tendance à normer, à établir une liste de ce qui est considéré comme normal de ce qui ne l'est pas. Ce sont donc bien les sciences qui établissent une norme. Hors aucune science ne peut prétendre à établir une connaissance. Ça c'est Husserl. L'état de conscience normé ne peut donc être pris pour connaissance.

Reste encore à débattre du problématique. Mais ce sera pour tout à l'heure car je dois faire les courses hebdomadaires L'infini de la bêtise. - Page 9 4017359721
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Message par Bergame Mer 28 Jan 2015 - 14:17

poussbois a écrit:C'est bien dommage que ta mémoire te joue des tours et que tu ne te rappelles absolument pas les échanges que nous avions eus sur ce thème au sujet de l'excision. C'est bien dommage, ça t'aurait évité de comprendre aussi mal et d'être inutilement blessant.
Si j'ai été blessant, je m'en excuse, ce n'était pas mon intention, et je suis d'ailleurs assez étonné de l'avoir été. J'essayais juste en fait de dire : Je comprends qu'on soutienne Charlie sur les caricatures (j'ai dit que j'étais partiellement d'accord), mais je me demande au nom de quoi on le peut, alors même qu'on sait être offensant.

Car enfin, ce n'est pas si simple, tout de même, je crois. Restons sur l'exemple de notre échange : J'ai écrit quelque chose de bonne foi, tu es blessé. Quelle est ma réaction ? Je présente mes excuses. Je présente mes excuses alors même que, très honnêtement, je n'avais pas conscience de dire quelque chose qui puisse te blesser, je n'ai pas même voulu t'offenser délibérément. Mais voila, tu me dis que tu es offensé, et je te présente mes excuses, ça fait partie de ma bonne éducation.  Wink
Qu'aurais-tu donc pensé si j'avais fait fi de la manifestation de ton état émotionnel, et si j'avais continué, l'air de rien, à enfoncer le clou ? Il y a de bonnes chances pour que tu aies pensé, d'une part que je suis un sale con, et d'autre part que je n'ai pas un énorme respect pour toi. Non ? La limite est fine entre la provocation gratuite et la simple connerie méprisante. Ce qui peut sauver la provocation, c'est le rire. Mais le rire est à géométrie variable : Ce qui fait rire les uns ne fait pas forcément rire les autres, voire pas du tout. Dieudonné m'en semble un exemple symétrique à celui de Charlie.

Et puis enfin, je n'oublie pas que l'équipe de Charlie a payé un lourd tribut. D'une certaine manière, ils sont donc des héros, ce qu'ils représentent maintenant dépasse largement la question du bien-fondé de leurs caricatures. Et il y a effectivement quelque chose d'héroïque dans l'attitude du "ils ont voulu nous tuer, mais nous sommes toujours debouts", qui est la "bonne" attitude je pense, en tout cas j'y suis sensible aussi. Mais c'est quand même pas simple, me semble-t-il, comme cas, et si j'en crois un sondage de ce matin, les Français sont d'ailleurs assez partagés sur la question -ce que je trouve très bien.

Sur la hiérarchie des valeurs, je crois qu'il faut revenir un peu en arrière.
Ma question était : "Au nom de quoi peut-on offenser délibérément Autrui ?" -et en l'occurrence, ici, les musulmans, qui pensent que la représentation de leur prophète constitue un blasphème.
Ta réponse, Courtial, a été limpide :
Courtial a écrit:Donc ma réponse à ta question sur "au nom de quoi...'" on peut transgresser ou détruire une valeur (et ainsi offenser ceux qui y sont attachés) : au nom d'une valeur plus haute.
Donc replaçons bien la discussion au niveau qui était le sien : Nous ne parlons pas ici d'éventuelles "valeurs terroristes" (si ça pouvait exister). Car évidemment, si tu places la discussion à ce point :
Courtial a écrit:Je considère le crime comme un acte ayant moins de valeur que le respect de la vie des autres
, nous serons tous d'accord avec toi : Le meurtre, c'est mal. Mais -à moins que tu n'assimiles "musulman" à "terroriste", ce qui n'est évidemment pas le cas- ce n'est pas une réponse à ma question puisque ce n'était pas le point auquel, moi, je plaçais la discussion.
S'il fallait donc reformuler et préciser la question, je crois qu'elle consiste à se demander au nom de quoi on peut affirmer que les valeurs républicaines, laïques, sont "meilleures", "plus hautes" que les valeurs musulmanes. Que ce ne soit pas "les nôtres", ce me semble clair. Que nous ne nous y retrouvions pas, parfait. Mais "plus hautes" ?
Oui, peut-être, pour nous.

Donc hiérarchisation des valeurs, bien sûr. Il ne peut en être autrement, je pense que nous en serons d'accord. Mais cette hiérarchisation est-elle subjective, transsubjective, culturelle, objective/universelle, voila je crois la question. Ma réponse -pour ce que ça vaut : Je pense qu'il existe des valeurs universelles, mais négatives. Des interdits. J'ai déjà dit par exemple que je ne connaissais pas d'exception sociologique à la généralité de l'interdit du meurtre. En revanche, je ne crois pas qu'il existe de valeurs positives universelles, de prescriptions objectives valables pour tout un chacun.

Surtout que, pour revenir à la question qui nous occupe, nous aurions tort de nous croire trop aisément dans le camp du Bien. Evidemment, nous avons des victimes, maintenant, donc ça aide à se sentir du bon côté. Mais le discours qui se développe dans les communautés musulmanes depuis quelques années voire quelques décennies, c'est que l'Occident n'est pas le lieu du Bien, c'est, au contraire, le lieu de la débauche, de la perversion, de la pornographie -donc de la dégradation humiliante des femmes- et du despotisme planétaire.


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Message par kercoz Mer 28 Jan 2015 - 14:41

Bergame a écrit:. Ma réponse -pour ce que ça vaut : Je pense qu'il existe des valeurs universelles, mais négatives. Des interdits. J'ai déjà dit par exemple que je ne connaissais pas d'exception sociologique à la généralité de l'interdit du meurtre. En revanche, je ne crois pas qu'il existe de valeurs positives universelles, de prescriptions objectives valables pour tout un chacun.

Complètement d'accord.
Toutes les règles morales invariantes sont répressives , inhibitrices. Ce pourquoi j' appuie mon argument sur une "agressivité intra-spé" ( au risque d'agacer ) originelle et sur une utilisation freinée voire inversée de cette "énergie primaire".

Le plus dur c'est d'accepter que le "bien" n' est qu'un "moindre mal"....
Pour la hiérarchisation des valeurs .....elle me semble exister , mais n'exister que dans une même culture.

Je remets ce lien de Marcel Gauchet qui me semble pertinent sur ce débat:
http://plus.franceculture.fr/marcel-gauchet

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Message par Crosswind Mer 28 Jan 2015 - 14:46

C'est ptêt pas le lieu, mais qu'est ce qu'une morale invariante ?

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Message par kercoz Mer 28 Jan 2015 - 15:03

Crosswind a écrit:C'est ptêt pas le lieu, mais qu'est ce qu'une morale invariante ?

Je ne pèse pas assez mes mots , mais par "morales invariantes" je pense aux comportement invariants dans toutes ou la pluspart des cultures.
Ces morales sont répressives " tu ne ...pas "....tu ne convoiteras pas le bien d'autrui...tu ne baiseras pas ta voisine ...etc .
Ce caractère "répressif" me semble montrer la nécessité d' une répression contre un comportement "naturel" que porterai l' instinct. Ce que j' appelle l' agressivité intra-spé.
Comme l' a dit quelqu'un , il n' y a pas de Morale ,il n' y a que des comportements moraux .......ceux qui servent a la socialisation des individus...ceux qui permettent de perpétuer cet état de groupe ...et seuls ceux qui les utilisent ont survécu.
C'est la raison pour laquelle il faut se méfier de la "Raison" qui , elle ne sert que les intérets des individus , au détriment de ceux du groupe.

Goffman dit vouloir étudier non l' individu et ses interactions , Mais les interactions et ( éventuellement) les individus. Justement pour repèrer les invariants comportementaux en évitant l' affect de la subjectivation.( intro de son livre " les rites d'interaction")
Bergame dit avec raison que toutes les "valeurs universelles sont des interdits".....bien qu'il oublie la seule valeur "positive" :
"Tu aimeras ton prochain comme toi même"
On remarque deja que le "prochain" n'est pas n' importe qui , mais un "proche".
Goffman dit que la "Face" est sacrée , inviolable.
Il est aussi grave de faire perdre la face que de la perdre.
Pour moi , la "face" est le dernier refuge de l' agressivité intra-spé" .....n' importe quel animal, aussi faible sois t il devient dominant et vainqueur sur le coeur de son territoire.

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Message par Crosswind Mer 28 Jan 2015 - 15:10

Merci !

Une autre question : tu parles de culture. Ainsi je déduis, peut-être un peu rapidement, que tu n'accepterais pas la proposition : " une morale invariante est une morale qui se retrouve chez tous les êtres humains, partout et toujours " ?
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Message par Courtial Mer 28 Jan 2015 - 15:25

Bergame a écrit:Surtout que, pour revenir à la question qui nous occupe, nous aurions tort de nous croire trop aisément dans le camp du Bien. Evidemment, nous avons des victimes, maintenant, donc ça aide à se sentir du bon côté. Mais le discours qui se développe dans les communautés musulmanes depuis quelques années voire quelques décennies, c'est que l'Occident n'est pas le lieu du Bien, c'est, au contraire, le lieu de la débauche, de la perversion, de la pornographie -donc de la dégradation humiliante des femmes- et du despotisme planétaire.

On pourra faire observer au passage que le Camp du Bien (L'Occident, pour faire court) n'est pas tout à fait le plus martyrisé, dans ce monde injuste et brutal. Dire qu'il est le Camp dominant ne semble pas exagéré. Si bien que l'état du Monde peut globalement lui être imputé. Sa responsabilité est éminente.
Et on a du mal à discerner ce qu'il y a de si bien.
Pour le dire plus brutalement, je crains que l'Irakien qui se fait bombarer par les Américains, n'ait des difficultés à percevoir où est le bien.
Le Bien est aussi pourvoyeur de morts que le Mal.
Il y a aussi, en France par exemple, des gars de banlieue qui ont un peu de mal à percevoir où est le bien.

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Message par neopilina Mer 28 Jan 2015 - 15:46

Je suis convaincu que l'usage du mot " Apartheid " par le premier ministre a été lourdement pesé : ne rien faire, ne pas assez faire, politiquement, c'est aussi faire. La droite a bien saisi le message.

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Message par Crosswind Mer 28 Jan 2015 - 16:31

Bergame a écrit: nous serons tous d'accord avec toi : Le meurtre, c'est mal.

Négatif ! Le meurtre ne représente le "mal" ni pour tous, ni partout, ni toujours. Je ne peux pour ma part associer le mot "meurtre", pris dans le sens le plus courant d'homicide volontaire, comme homonyme du mal.
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Message par Bergame Mer 28 Jan 2015 - 17:56

Ce que je dis, c'est que je ne connais pas d'exception sociologique à l'interdit du meurtre. Autrement dit, le meurtre est et a toujours été proscrit dans toutes les sociétés humaines. Après, il y a des cas psychologiques particuliers.

Et à condition d'éviter les sophismes du type : "Et la guerre ?"

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