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Le concept de foi

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Message par Tenzin Dorje Jeu 6 Sep 2007 - 13:41

Le concept luthérien de foi

Le concept de foi Luthertj1
Martin Luther (1483 - 1546)


Le concept de foi
A l'égard de ceux qui pensent que le concept luthérien de justification par la foi seule disqualifie l'action humaine, contre ceux qui se disent en eux-mêmes que « s'il n'y a que la foi seule pour se justifier aux yeux de Dieu, alors agir ne sert à rien : je vais croiser les bras, avoir la foi et attendre d'être sauvé ».

« 1- En disant : Faites pénitence, notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence. 3- Toutefois elle ne signifie pas non plus la seule pénitence intérieure ; celle-ci est nulle, si elle ne produit pas au dehors toutes sortes de mortifications de la chair. 4- C'est pourquoi la peine dure aussi longtemps que dure la haine de soi-même, la vraie pénitence intérieure, c'est à dire jusqu'à l'entrée dans le royaume des cieux. »[1]


On peut lire ces lignes soit comme des exhortations ou des injonctions, soit comme des préventions. S'il s'agit d'exhortation, on est en présence d'un Luther qui exhorte les fidèles à se haïr eux-mêmes, qui appelle les fidèles à mortifier leur chair, qui demande aux fidèles d'accepter d'être sauvés par Dieu en dépit du fait qu'ils soient haïssables : « haïssez-vous vous-même, auto-flagellez-vous, acceptez que l'Amour que Dieu vous porte soit plus grand que la haine que vous vous portez[...] ». En revanche, s'il s'agit de préventions, on est en présence d'un Luther qui prévient les fidèles des conséquences nécessaires de la foi : haine de soi, mortification de la chair : « quand vous accueillez la foi en vous-même, comme la rouille elle ronge ce qui est impur en vous, et vous vous haïssez vous-même pour être aussi impur et avoir tant à purifier, etc, etc. ».

D'un côté « je vous exhorte à vous comporter comme tels », et de l'autre « je vous préviens que c'est les choses se passent ainsi lorsque vous accueillez la foi en votre sein ».

Dans le cadre de la première lecture, qui énonce l'hypothèse d'un Luther qui exhorte, la haine de soi et la mortification de la chair sont des actions volontaires. On est appelé à agir, comme si nous avions la liberté d'agir ou de ne pas agir, de se haïr ou de ne point se haïr. Dans ce cas, on peut se demander « à quoi bon se haïr, à quoi bon se mortifier, à quoi bon accepté d'être aimé de Dieu puisque d'un autre côté, Luther me dit qu'il n'y a rien d'autre que la foi, et la foi seule, qui puisse me justifier aux yeux de Dieu, et que la haine de moi-même (ni rien d'autre) ne me justifiera pas ? ». La réponse semble assez évidente si on identifie la foi à la haine de soi et à la mortification de soi : la foi est la haine de soi, la foi est la mortification de sa chair, la foi est l'acceptation paradoxale de soi ... la foi est ces actions. C'est la raison pour laquelle ces actions sont opérantes et justifiantes. On pensera, avec Tillich, que la foi est active et consiste en partie à « [...]accepter d'être accepté en dépit du fait que l'on soit inacceptable ».
Quoi qu'il en soit, lire ces articles de Luther comme des exhortations nous amène sur le chemin de la foi comme actions volontaire : je peux me haïr ou ne pas me haïr, je peux accepter d'être accepté ou non, etc. bref, je peux agir en signant mes actions du sceau de la foi ou non, mais avoir la foi c'est agir. Mais il s'agit d'une interprétation plutôt « soft » de Luther, un peu à la manière de Tillich.

Dans le cadre de la seconde lecture, celle du Luther préventif, la haine de soi-même et l'auto-flagellation apparaissent comme des actions de la foi, dont on est serf. La foi, placée en nous par Dieu Lui-même, livre bataille contre ce qui est sale en nous, et par la suite, on se hait nécessairement soi-même pour être aussi impropre, et on mortifie sa chair dans l'optique nécessaire de se purifier pour laisser place à la foi qui ne peut prendre place que dans un coeur pur. Dans la mesure ou cette lecture est recoupée avec Du Serf arbitre, un autre écrit de Luther, elle est probablement plus fidèle que la première : non seulement, je souligne que « la foi est placée en nous par Dieu » ce que Luther explique dans Du Serf arbitre, mais en plus elle part elle-même en guerre contre la partie pécheresse de nous-même, qui finissent par s'incliner devant la foi, comme les esclaves de la cour de Dieu.
La question qu'on se posait à la première lecture ne se pose plus, à savoir « à quoi bon se haïr, à quoi bon se mortifier puisqu'il n'y a rien d'autre que la foi, et la foi seule, qui puisse me justifier aux yeux de Dieu, et que la haine de moi-même ne me justifiera pas ? ». Elle ne se pose plus car on est serf de la foi qui s'exerce dans la haine de soi et de la mortification de sa chair. En revanche, on en arrive encore à identifier ces actions à la foi. Elles ne sont pas tellement conséquences de la foi mais foi elle-même dans la mesure ou elles servent pleinement notre pénitence et notre justification devant Dieu.
Bref, lire les articles luthériens comme des préventions nous amène sur le chemin de la foi comme actions dont on est serf, ou la foi comme actions nécessaires : la foi délivre nécessairement sur des actions telles que la haine de moi-même, la mortification de ma chair, l'acceptation paradoxale de moi-même.

Dans la foi comme actions volontaires ou la foi comme actions dont on est serf, il n'y a pas de disqualification de toutes les actions humaines. La foi luthérienne n'est pas une chose passive, une espérance délavée, une attente « les bras croisés » ou encore une acceptation passive de soi-même. Il s'agit d'une acceptation active et de violences, non moins actives, envers les parties pécheresses de soi-même.


Bibliographie
CHRISTIN O. (1995), Les réformes : Luther, Calvin et les protestants, Découvertes Gallimard.
CRÉTÉ L., Sola Fide.
DELUMEAU J. (2003), Naissance et affirmation de la Réforme, PUF.
ERASME D. (2001), Diatribe : du libre arbitre, Folio essais.
LIENHARD M. (1999), « Introduction », in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999b), « Chronologie », in Oeuvres complètes, La Pléiade.
LUTHER M. (1999a), Cours sur l'Épître aux Romains, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999b), Lettre à Georg Spenlein, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999c), Controverse au sujet des forces et de la volonté de l'homme sans la grâce, in Oeuvres complètes, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999d), Lettres à Johann Lang, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999e), Controverse sur la théologie scolastique, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999f), Controverse destinée à montrer la vertu des indulgences [Les Quatre-vingt-quinze Thèses], in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (1999g), Sermon sur les indulgences et la grâce, in Oeuvres complètes, La Pléiade.
– (2001), Du serf arbitre, Folio essais.
TILLICH P. (1999), Le courage d'être, Éditions du Cerf.
VAUCHEZ A. (1999), Le prophétisme médiéval d'Hildegarde de Bingen à Savonarole, COLLEGIUM BUDAPEST Institute for Advanced Study (Public Lecture Series No. 20).


[1] : LUTHER M. (1965), Les quatre-vingt-quinze thèses, La Pléiade.
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Message par Bergame Ven 7 Sep 2007 - 10:23

J'ai plusieurs fois pensé à répondre à ce post sur Philautarchie, mais je n'en avais pas le courage. Puisque tu offres une nouvelle opportunité, lançons-nous. Parce que la lecture de Luther m'a profondément intéressé et... étonné, et j'aimerais confronter mon interprétation à la tienne, si tu le veux bien, Adam.

Dans De La Liberté du Chrétien, la relation que Luther décrit entre l'âme et Dieu est une relation quasi-charnelle. La foi m'a semblé être représentée comme un don de soi de l'âme à Dieu, ou plutôt au Christ. Cette relation charnelle est conçue, effectivement, comme une opération de nettoyage : En se mêlant au Christ, d'un mouvement spontané, l'âme se lave de ses fautes.
Mais à un endroit du texte, on lit quelque chose d'assez surprenant, au milieu de cet hommage à l'élan mystique. Luther, parlant de l'âme, dit quelque chose comme : "Et elle doit bien être assez heureuse et reconnaissante, cette petite pute, que le Christ veuille bien laver ses fautes et ses pêchés."
"Cette petite pute" ! En lisant ce passage, je me suis dit : "Quelle étonnante et féroce doctrine que celle qui considère l'âme, l'essence même de l'homme depuis l'Antiquité, sous les traits d'une prostituée. Et quelle exigence quasi-masochiste la sous-tend !"
Mais je me dis aussi en lisant ce que tu écris, Adam : Si la foi fut placée en l'homme par Dieu, il ne me semble donc pas que ce soit le cas de l'âme. Contrairement à l'enseignement de la scolastique (je parle sous ton contrôle, reprends-moi si je me trompe, je te prie) ce n'est donc pas l'âme, pour Luther, qui est la part de Dieu en l'homme, c'est la foi.
Il me semblerait presque que la foi, pour Luther, est une sorte de boussole. Elle indique la direction, le mouvement juste, à une âme humaine irrémédiablement perdue de toute éternité, du moins depuis la Chute.

La question que cela me pose est celle du choix. Il me semble (là encore) que la doctrine scolastique de la rédemption est irréductiblement fondée sur le concept de choix : Dieu a placé l'âme en l'homme afin qu'il soit, à tout instant, en mesure de choisir entre le Bien et le Mal. Conceptuellement, l'absence d'une âme d'ascendance divine chez Luther pose le problème de la possibilité du choix, et il me semble en effet qu'on a pu dire que la doctrine luthérienne était fondamentalement déterministe. De fait, si boussole il y a, elle indique toujours vers Dieu.

Il me semble qu'intervient alors la notion de Voix, de Parole. Tout se passe, dans le texte, comme si Dieu appelait. Et cet appel passe dans le monde par l'Ecriture, qui n'est pas même une retranscription humaine, une traduction de la Parole, mais qui me semble être, selon Luther, la Voix elle-même. Luther entend Dieu, physiquement, certains passages me semblent clairs à ce sujet.
Aussi Dieu appelle, et la foi répond -telle est la vocation, le Beruf. Elle entraine l'âme dans la direction de Dieu, en fait de son fils sur Terre, le Christ. Nait alors entre le Christ et l'âme une relation, d'ordre sentimental véritablement, physique même, charnelle, qui grandit peu à peu à mesure que l'âme apprend à connaitre le Christ, et à l'aimer. C'est mon interprétation de la construction luthérienne -et pardon pour le mauvais lyrisme :)

Reste toujours à mon avis la question du choix. Pour moi, tout se passe comme si, une fois l'Ecriture connue, une fois la parole de Dieu entendue, se mettait en place un process où la foi, en tant que boussole, ne peut pas faire autrement que diriger l'âme vers le Christ, et celle-ci ne peut pas faire autrement que d'aimer le Christ -comment pourrait-elle faire autrement, petite pute qu'elle est ? J'en étais même arrivé à penser que c'était peut-être de cette difficulté qu'héritait Kant.

Bref. Je compte sur toi pour me remettre sur les bons rails, Adam. Ce que j'écris là te parait-il une interprétation au moins un peu compréhensive ?
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Message par Tenzin Dorje Lun 10 Sep 2007 - 0:26

Yop, je suis tout étonné et bien content d'une suite dans un sujet théologique. Sache, en tous cas, que je travaille ma réponse.
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Message par Tenzin Dorje Mer 19 Sep 2007 - 18:20

Shalom,
Confrontons mais ne jouons pas au maître et à l'élève, je n'ai pas plus d'expertise que toi.
Dans le vif :


Bergame a écrit:Mais je me dis aussi en lisant ce que tu écris, Adam : Si la foi fut placée en l'homme par Dieu, il ne me semble donc pas que ce soit le cas de l'âme. Contrairement à l'enseignement de la scolastique (je parle sous ton contrôle, reprends-moi si je me trompe, je te prie) ce n'est donc pas l'âme, pour Luther, qui est la part de Dieu en l'homme, c'est la foi.
Chez Luther, l'âme, tout comme la foi, est placée en l'homme par Dieu. Il en parle dans un texte qui porte sur la Vierge Marie, datant de 1515 :
Depuis la chute, les âmes humaines baignent dans l'océan du péché, c'est ce qui la rend petite en tout alors que la foi est infiniment grande. Voici comment se passe la conception d'un être humain : la chair est enfantée par l'union de l'homme et de la femme et cette union porte le sceau du péché. Comme Marie a été enfantée par un père et une mère, elle est « pécheresse quand au corps » alors que le Christ, qui n'a d'autre Père que le Seigneur, est dès la naissance sans péché quand au corps. Cette phase conceptionnelle porte, chez Luther, le nom de conceptio carnis. Suit l'infusion de l'âme par Dieu : c'est la conceptio spiritualis. Dans le cas de Marie, le Très-Haut aurait soustrait l'âme de la Vierge à l'océan du péché afin qu'elle fut « sans péché quand à l'âme ». Elle trouve donc sa place entre les hommes et le Christ puisqu'elle est pécheresse quand au corps mais gracieuse quand à l'âme là ou les hommes sont pécheurs « corp et âme ».
Luther dit ensuite comment Jésus enfante la Vierge Marie à son tour et comment il lave la chair de sa mère du péché mais ce n'est pas le sujet que je traite. Passons.


Bergame a écrit:Il me semblerait presque que la foi, pour Luther, est une sorte de boussole. Elle indique la direction, le mouvement juste, à une âme humaine irrémédiablement perdue de toute éternité, du moins depuis la Chute.
Plus qu'une boussole, je dirais que la foi est l'oreille qui permet d'entendre le Christ. Et c'est le Christ qui guide, c'est lui qui est boussole. Il est à la fois guide et Chemin.


Bergame a écrit: Mais à un endroit du texte, on lit quelque chose d'assez surprenant, au milieu de cet hommage à l'élan mystique. Luther, parlant de l'âme, dit quelque chose comme : "Et elle doit bien être assez heureuse et reconnaissante, cette petite pute, que le Christ veuille bien laver ses fautes et ses pêchés." "Cette petite pute" ! En lisant ce passage, je me suis dit : "Quelle étonnante et féroce doctrine que celle qui considère l'âme, l'essence même de l'homme depuis l'Antiquité, sous les traits d'une prostituée. Et quelle exigence quasi-masochiste la sous-tend !"
En pensant à la scolastique, Luther qualifiait la logique de « pute du diable ». Tu te demandes de quoi l'âme peut bien être « la petite pute » et je dirais : souvent du diable. Depuis la chute, l'âme humaine a pu devenir la pute du diable, la pute du serpent mais ce n'est pas tout : dans Du Serf arbitre, Luther dit de la volonté humaine qu'elle est semblable à une monture chevauchée ou bien par Dieu ou bien par Satan, et qu'elle va là ou le cavalier la mène. Il ne suffit pas que l'homme veuille pour qu'on puisse parler de choix car chez Luther, quand l'homme veut, c'est d'une volonté asservie qu'il s'agit, d'une volonté « prostituée ».

Mais je pense qu'il ne faut pas voir le déterminisme luthérien comme un déterminisme absolu : si la volonté humaine est déterminée en ce qui concerne les affaires célestes, les Cieux n'ont cure des affaires des hommes et ne s'y immiscent que dans la mesure ou elles touchent aux cieux. Autrement dit : toutes les affaires humaines ne touchent pas au cieux, et dans celles-ci on n'est pas déterminé.


Bergame a écrit:Il me semble qu'intervient alors la notion de Voix, de Parole. Tout se passe, dans le texte, comme si Dieu appelait. Et cet appel passe dans le monde par l'Ecriture, qui n'est pas même une retranscription humaine, une traduction de la Parole, mais qui me semble être, selon Luther, la Voix elle-même. Luther entend Dieu, physiquement, certains passages me semblent clairs à ce sujet.
Luther indique quelque part que la force de la Parole de Dieu passe par la faiblesse de la parole des apôtres. Quant à savoir si il envisageait ou vivait sa relation à Dieu au travers les seuls Évangiles (retranscription par les hommes de la Parole de Dieu) ou bien sans intermédiaire (en relation directe avec Dieu) voilà ce que je dis :
Primo, le Réformateur souligne l'importance du Chemin que fut le Christ. On retrouve en général la christologie, plus que la théologie, chez les protestants pour lesquels il faut suivre le Christ qui est le Chemin à travers la peine, la douleur et l'Enfer. En bref, Dieu se serait fait homme pour que l'homme, par l'homme, parvienne à Dieu. Pour aller à Dieu, il faut d'abord passer par l'homme et sa faible parole mais ça n'exclu pas la relation directe : il y a des paradoxes chez Luther et c'est heureux comme ça.
Secundo, alors que l'étrangeté de Dieu est pratiquement une constante chez les mystiques, Luther bifurque en disant que « Dieu est Saint avec le Saint et il est dévoyé avec le dévoyé »1. Dieu parle la même langue que ceux à qui il s'adresse. On peut s'interroger « n'est-ce pas paradoxal que l'homme doive passer par la faiblesse de la parole des apôtres pour entendre Celle de Dieu et que, dans un même temps, Dieu s'adresse directement à l'homme dévoyé comme un dévoyé et au Saint comme un Saint ? ». Le mot de trop, dans l'interrogation précédente, c'est « directement » : en somme, lorsque Luther dit que Dieu s'adresse à l'homme, il signifie que le Seigneur s'adresse à l'homme par l'intermédiaire de ses apôtres. Et si Dieu n'aurait su être dévoyé, l'apôtre, qui n'est justement rien de plus qu'un homme, peut l'être.
Luther maintient le « principe » mystique qui veut que notre relation à Dieu soit, sinon l'expérience de l'absence comme chez de Certeau, l'expérience de la distance. On reste tendu entre sa petitesse et la grandeur de Dieu.


Dans cette « synthèse », j'ai parlé de l'infusion de l'âme et de l'immaculée conception, j'ai dit de quoi l'âme est la petite pute et la façon dont elle est déterminée et, enfin, j'ai décrit comment la Parole de Dieu vient jusqu'aux oreilles de l'homme.


Sur Intersession, une synthèse de la foi seule à la Réforme donne aussi quelques réponses et reprend quelques notions.

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Message par Infinity Lun 12 Mai 2008 - 16:58

J'ai le texte de Luther sur l'âme comme "petite prostituée" sous les yeux.

Il ne faut pas oublier une image cruciale employée quelques lignes avant : le mariage.

L'âme comme prostituée se purifie lorsqu'elle se marie au Christ, son époux. Ce lien nuptial va à l'encontre de la prostituée qui n'a lien avec aucun mari, qui est donnée à tous vents et donc qui n'est pas purifiée par le mariage, lequel est une union charnelle spiritualisée.

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Message par Bergame Jeu 15 Mai 2008 - 19:06

Oui, ça me semble exactement cela. Effectivement, on ne peut mieux exprimer l'opération de purification qui s'opère dans et par l'union quasi-charnelle de l'âme et du Christ que ne le fait Luther ici. Tout y est, d'ailleurs, de la métaphore : la foi est la dot que l'âme offre à son seigneur et maitre, ils se marient sous le régime de la communauté des biens (ce qui est à moi est à toi et vice-versa), ils se querellent déjà joyeusement comme tout jeune ménage, et elle est désormais sous sa protection, ainsi défendue contre les assauts du péché. Et arrive alors la phrase superbe et inquiétante :
N'est-ce pas là un heureux ménage, quand un riche, noble et juste époux comme le Christ épouse une malheureuse petite putain, mauvaise et méprisée, la débarrasse de tous les maux et la pare de tous les biens ?
La phrase elle-même reste quand même très violente, non ? Avant son élan vers le Christ qui sauve, l'homme n'est rien. Voila ce qui est dit ici.
Mais j'ai cru mieux comprendre après la synthèse d'Adam, et cela me renvoie effectivement à Kant. C'est un peu comme s'il n'y avait qu'un seul bon chemin (un seul Salut) et une infinité de voies de perditions. Quelque chose me dit que, chez Luther, s'il n'y a qu'un seul Christ, il n'y a pas qu'un seul Diable, c'est aussi cela que dit la métaphore de la prostituée, je crois.
Et puis la spontanéité, surtout, concept tellement central chez Kant et en même temps, tellement malaisé à saisir. L'élan vers le Christ est un élan spontané, désinteressé, au contraire de toutes les unions précédentes que cette petite pute d'âme a pu connaitre.
Personnellement, j'adore la précision de cette métaphore, et la trouve en même temps d'une grande violence. Il me semble que c'est le genre de détail qui permet de mieux appréhender ce qu'aux XVIe-XVIIe, on appelait l'humanisme.
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Message par Came Sam 16 Aoû 2008 - 19:55

Le Christ est une histoire, l'histoire du Dieu fait corps par compassion. Sa vie est le témoignage ou plutôt la dialectique d'un corps prisonnier d'une politique impériale. La vie de Jésus Christ est le projet et l'espoir d'une humanité juste pour tous.
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Message par Tenzin Dorje Mar 16 Sep 2008 - 1:46

Came a écrit:Le Christ est une histoire, l'histoire du Dieu fait corps par compassion. Sa vie est le témoignage ou plutôt la dialectique d'un corps prisonnier d'une politique impériale. La vie de Jésus Christ est le projet et l'espoir d'une humanité juste pour tous.

Mais non, pas par compassion, par ennui.

Histoire d'instituer un pont entre Lui et l'humanité.

Mais depuis le temps, j'ai adopté quelques vues juives (bubériennes en particulier) dans mes conceptions. Dans une telle perspective, un sauveur est inutile, Dieu l'est de toute éternité.

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Message par Infinity Sam 13 Déc 2008 - 13:01

Adam a écrit:
Came a écrit:Le Christ est une histoire, l'histoire du Dieu fait corps par compassion. Sa vie est le témoignage ou plutôt la dialectique d'un corps prisonnier d'une politique impériale. La vie de Jésus Christ est le projet et l'espoir d'une humanité juste pour tous.

Mais non, pas par compassion, par ennui.

Histoire d'instituer un pont entre Lui et l'humanité.

Mais depuis le temps, j'ai adopté quelques vues juives (bubériennes en particulier) dans mes conceptions. Dans une telle perspective, un sauveur est inutile, Dieu l'est de toute éternité.

mais dans la perspective judaïque, Dieu n'est-il pas l'éternel absent, d'où la nécessité de la sainte alliance ? cf Hegel et la conscience malheureuse coupée de son Dieu.
peux-tu développer ? je ne connais pas très bien Buber.

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Message par Tenzin Dorje Dim 5 Avr 2009 - 8:12

Infinity a écrit:
Adam a écrit:
Came a écrit:Le Christ est une histoire, l'histoire du Dieu fait corps par compassion. Sa vie est le témoignage ou plutôt la dialectique d'un corps prisonnier d'une politique impériale. La vie de Jésus Christ est le projet et l'espoir d'une humanité juste pour tous.

Mais non, pas par compassion, par ennui.

Histoire d'instituer un pont entre Lui et l'humanité.

Mais depuis le temps, j'ai adopté quelques vues juives (bubériennes en particulier) dans mes conceptions. Dans une telle perspective, un sauveur est inutile, Dieu l'est de toute éternité.

mais dans la perspective judaïque, Dieu n'est-il pas l'éternel absent, d'où la nécessité de la sainte alliance ? cf Hegel et la conscience malheureuse coupée de son Dieu.
peux-tu développer ? je ne connais pas très bien Buber.

Dans l'AT, il y a déjà deux alliances :

1- Celles entre Dieu et l'humanité à travers Noé, symbolisée par le signe public de l'arc-en-ciel.
2- Celle entre Dieu et le peuple sémite à travers Abraham, symbolisée par le signe privé de la circoncision.

Tous les mouvements juifs ne sont pas forcément messianique, et tous les théologiens juifs ne voient pas la nécessité de "donner corps" à l'Alliance à travers un Messie. Par exemple, au regard de la majorité des écoles hassidiques, l'être humain dispose de certains moyens qui lui permettent de communier avec Dieu et d'honorer l'Alliance (bains purificateurs, chants, danses, l'union de l'homme et de la femme par le mariage religieux, etc). Certaines écoles hassidiques on même leurs Saints, c'est dire que l'homme n'a pas perdu le pont jusqu'à l'Éternel ni les moyens de le traverser.

Buber, c'est large, c'est question plus précise j'aurai de la peine à te répondre.

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