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Et le progrès ?

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Message par baptiste Ven 14 Juin 2013 - 19:02

Qui est nous ? Par nous je désigne cet ensemble d’individus qui se distingue des autres par un caractère commun et qu’on appelle l’espèce humaine. En théorie ce caractère s’appelle la conscience, bon… Affirmer que l’idée de progrès politique n’existe pas me paraît un peu déclamatoire. Je pense qu’il est sain de critiquer le monde dans lequel nous vivons maintenant il me suffit de me référer à la vie de mes grands parents et arrières grands parents pour cesser immédiatement de me plaindre. La misère au moindre accident, les guerres à répétitions et leurs cortèges de destructions, de morts…je ne continue pas la litanie, elle est trop longue.
 
Tu objectes avec raison que cette idée d’évolution de la connaissance synonyme de progrès qui était celle et Descartes et Condorcet pose désormais problème. Elle pose problème parce que la connaissance est aussi devenue enjeu de pouvoir. Mais est-ce la connaissance qui est réellement en jeu ou l’homme et l’usage qu’il en fait ? Notre technologie a dépassé notre humanité, les techno-sciences imposent un nouveau paradigme que nous avons du mal à gérer démocratiquement. Einstein a dit en son temps « Le progrès technique est une hache qu’on a mis dans les mains d’un psychopathe », ce n’est pas la hache qui pose problème mais le psychopathe. Et le psychopathe c’est nous, l’espèce qui est censée avoir une conscience.
 

Il y a un hic chez Condorcet et Descartes, c’est l’idée de continuité…

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Message par euthyphron Ven 14 Juin 2013 - 23:10

Excuse-moi mais ta réponse est ambiguë.
Il y a progrès quand même? Les petits malheurs du 21e siècle ne sont que des broutilles?
Ou bien, il n'y a pas progrès, mais il faut se remonter le moral en pensant à ce qu'ont vécu nos vieux?
Si le progrès est une hache aux mains d'un psychopathe, d'une part il s'ensuit que "nous" désigne ce psychopathe, et non pas l'humanité, d'autre part qu'il aurait été préférable qu'il n'y ait pas de progrès.
Donc, où en es-tu?

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Message par poussbois Sam 15 Juin 2013 - 0:27

D'autant que le progrès est assimilé à un paquet d'autres concepts qui sont largement utilisés ici mais qui demanderaient à être recadrés. J'en vois trois principaux

Evolution ==> progrès
Gain de temps ==> progrès
Connaissance du futur ==> progrès

Pour l'évolution, je prends la connaissance scientifique comme exemple. Clairement, elle évolue, mais est-ce du progrès ? Cette connaissance n'est qu'une construction nouvelle sur des théories réfutées. Ce qui veut dire que les certitudes d'aujourd'hui seront réfutées demain, et que ceci est nécessaire puisque sinon, on ne parlerait pas de sciences. On construit le présent en continue sur les cendres du passé. Ce n'est pas du progrès, c'est du jardinage. Nous semons, nous regardons pousser, nous récoltons et engrangeons, puis nous écobuons pour préparer le prochain semis pendant que nous nous nourrissons de la récolte qui sera remplacée par la prochaine.Nécessairement, nous ne faisons que donner du crédit à des outils mal branlés, siècles après siècles.
Si de nombreux grecs, souvent mathématiciens, pensaient que le temps n'était pas linéaire, mais cyclique, ce n'est pas pour rien. Croire dans le progrès et dans un sens de l'histoire, c'est sous entendre la téléologie, chercher un but. Rassurant, mais à mon sens, vain.

Pour le gain de temps, avoir des outils mathématiques qu'on apprend plus vite pour aboutir au même résultat, il faudra m'expliquer quel est le rapport entre le gain de temps et le progrès. De nombreuses civilisations proposaient un enseignement oral, qui est totalement perdu par ce gain de temps qui ne veut retenir que la performance comme critère d'évaluation. A mon sens, le progrès est ici confondu avec ce critère d'évaluation qui répond à un besoin conjoncturel. En d'autres temps et d'autres lieux, aucun progrès ne serait retenu.

Quant à la connaissance du futur et à la réduction des aléas, de quoi parte-t-on exactement ? Nous continuons à naviguer dans des eaux incertaines et brouillasseuses et les sciences d'hier ont montré leurs limites. Les modèles économiques basés sur un progrès de 3% de PIB annuel se sont tous effondrés. La croissance continue, le progrès continu, sont des lubies de constructeurs qui veulent croire en l'avenir pour justifier leurs efforts. Ils n'ont jamais, en aucun lieu, pu trouver la moindre preuve de leur pertinence.
Même la soi-disant croissance sur le long temre (hors influence des différentes crise) n'est qu'une croyance comme une autre. Rajoutez-y les coûts écologiques et notre belle croissance à long terme s'effondre à très court terme.

J'ai l'impression, mais dites moi si je me trompe, que vous partez du principe que le progrès correspond aux critères d'évaluation de performances des civilisations / économies / individus que nous utilisons actuellement. Le problème est : changez ces critères (ce qui se passera nécessairement à terme car de même que la justice, ils ne sont que conjoncturels) et nous passons alors dans une phase de régression.

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Message par victor.digiorgi Sam 15 Juin 2013 - 3:55

À poussbois :

Comme tu le soulignes d'une certaine façon, le progrès peut être vu sous l'angle optimiste et positiviste d'une amélioration mesurable de performances techniques ou scientifiques. Mais changeons les critères d'évaluation et la définition du progrès change aussi, au point de pouvoir même devenir un concept parfaitement illusoire.

Si le progrès technoscientifique n'est pas la cause d'une bonne vie pour l'individu ou la société, ce progrès n'en est pas un, en définitive. 

Par contre, si le progrès technoscientifique permet d'avoir une bonne vie, ou plus exactement une vie meilleure que sans ce progrès, alors nous avons affaire à un progrès réel.

À partir de ce raisonnement bien simple, rien n'interdit à ceux qui sont très contents de vivre comme des dieux grâce à la technoscience de jouer de cynisme diogénien face à ceux qui se plaignent de ça. 

----------------

Cela dit, permets-moi de réagir à certains détails de philosophie des sciences évoqués par ton message :

1 )  La science ne se déploie pas à la suite de réfutations inévitables, mais sur la réfutabilité de ce qu'elle avance. Toute théorie scientifique est réfutable, mais cela ne signifie pas qu'elle sera obligatoirement réfutée. Et même lorsqu'une réfutation a lieu, elle n'est pas forcément totale. On ne construit donc pas la science sur des cendres. 

(Par exemple, la loi de l'hydrostatique énoncée par Archimède il y a plus de deux millénaires est réfutable au sens où quiconque peut tenter de la réfuter, mais à ce jour, personne ne l'a fait et cette loi est encore valable et largement appliquée dans de nombreux domaines des technosciences...)

2 )  Le gain de temps n'est un progrès que dans la mesure où il permet d'avoir une bonne vie, et encore, dans certaines conditions seulement, mais c'est tout de même toujours par rapport à ce qu'on fait du temps gagné que se joue la valeur de ce gain. Pour ma part, je préfère de loin traverser l'Atlantique en avion qu'en bateau à voile, tout en comprenant fort bien ceux qui veulent traverser cet océan à la voile, mais le plus vite possible pour gagner ce qu'ils veulent en honneur ou en argent ou en quoi que ce soit.

3 )  La connaissance du futur est toujours une fonction de celle des éléments du monde à un instant donné. Pour chaque prédiction, il existe un horizon événementiel au-delà duquel toute prévision est impossible, ou fausse, pour être plus précis. Les économistes et les politiques ne semblent pas connaître cette loi. Ou alors ils font semblant de ne pas la connaître pour créer de l'espoir ou du désespoir, suivant les besoins du moment. Ils spéculent, c'est le mot. En réalité, ils spéculent.

Voilà voilà

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Message par poussbois Sam 15 Juin 2013 - 9:36

Victor a écrit:1 )  La science ne se déploie pas à la suite de réfutations inévitables, mais sur la réfutabilité de ce qu'elle avance. Toute théorie scientifique est réfutable, mais cela ne signifie pas qu'elle sera obligatoirement réfutée. Et même lorsqu'une réfutation a lieu, elle n'est pas forcément totale. On ne construit donc pas la science sur des cendres.

Oui, tu as parfaitement raison sur le concept de réfutabilité. Il aurait sans doute fallu que je prenne le concept de rupture épistémologique de Bachelard pour illustrer mon propos. Les sciences avancent souvent avec des accélérations fortes et ponctuelles, liées à l'abandon ou à la refonte de principes qui la freinaient. Ceci dit, la réfutabilité a son utilité pour faire comprendre qu'une science ne doit pas et surtout ne peux pas être figée, ou ce n'est pas une science. La science est dialectique. A voir si cette forme dialectique peut être synonyme de progrès.

Autre problème, effectivement, "les inventions". Là, je coince un peu pour dire que ce n'est pas du progrès, c'est une idée qui résiste mais qu'intuitivement je réfute. Disons qu'on invente une concept mathématique ou physique comme on "invente" un trésor. Le trésor est là, avant que nous ayons l'idée de trésor, et ce n'est qu'à sa découverte qu'il est inventé. Chance ou travail, on lui donne une existence. Comme un paysage qui ne peut exister (au sens anthropique du terme) que s'il est vu par un observateur.Nous sommes donc des observateurs qui découvrons des paysages au fur et à mesure de notre voyage. Est-ce un synonyme de progrès là encore ? Plus en avance et plus on se rend compte que chaque réponse apporte plus de question qu'elle n'en résout... Ce n'est pas tout à fait une définition du progrès à mon sens.
De plus, il y aurait progrès si cette amélioration de connaissance était continue et sans faille, or nous ne faisons que faire le tri et chercher ce qui nous intéresse. Mes enfants ont un accès au monde informatique et à la culture web que je n'ai pas. Pour eux c'est un progrès. En même temps, ils sont incapables de démonter un carburateur. Pour moi, c'est une régression. On ne progresse pas, on trie.

Au final, Euthyphron en a parlé en premier de mémoire, la seule notion de progrès qui nous intéresse est celle du bonheur. Pour ceux que les échafaudages conceptuels et que le progrès technologiques ne remplissent pas de joie, le progrès est effectivement une chose difficile à avaler. J'ai plus l'impression de rentrer progressivement dans une récession barbare.

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Message par euthyphron Sam 15 Juin 2013 - 10:00

Je complèterai ton propos en posant (ou reposant, je ne sais plus) la question de l'échec du progrès. Puisqu'il suffit, apparemment, de mettre ensemble nos contributions pour aboutir à une solution collective qui serait, à première vue, supérieure ou égale à la meilleure des productions individuelles, pourquoi est-ce que ça ne marche pas? Est-ce seulement parce que l'homme est méchant? Est-ce encore un coup du péché originel, ou y a-t-il autre chose?

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Message par poussbois Sam 15 Juin 2013 - 10:40

:D
Que dit Rousseau du progrès ? Je n'en sais rien, mais je parie pour une position proche de celle de Condorcet.

Est-ce que la validation du principe de progrès historique n'est pas adossée à la validation du principe de l'homme bon naturellement et libre de se débarrasser d'une partie de ses chaînes ? Et dans ce cas, la position inverse serait préférée par les tenants d'un homme déterminé et auquel la bonté n'est qu'un apprentissage social à renouveler génération après génération.

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Message par victor.digiorgi Sam 15 Juin 2013 - 11:51

.

À poussbois :

Le concept de progrès est donc en définitive lié à une subjectivité, une relativité. 

La subjectivité et la relativité que j'avancerais alors se trouvent dans le concept du « mener une bonne vie » établi par les penseurs du matérialisme. 

Il n'y a de progrès que dans un utilitarisme visant une exultation du corps au sens le plus large.

Je dirais que le développement de l'endocrinologie est pour moi un progrès constant dans la mesure où ce domaine de la science m'a évité de mourir à l'âge de 10 ans. De façon plus globale, c'est-à-dire d'un point de vue dépassant celui de ma petite personne, la possibilité d'appliquer des règles d'hygiène définies par la science et rendues possibles par la technique a permis de prolonger la vie de l'humain d'un bon demi-siècle par rapport au moyen âge. 

Cela dit, nous entrons avec la durée de la vie dans un domaine qui a opposé un temps Beauvoir et Sartre. La première disait que c'était une bonne chose que de vivre vieux et en bonne santé, le second affirmait que ça n'avait aucune importance, ce qui révèle la subjectivité rattachée au concept de progrès. On est tenté de prendre subjectivement parti pour Beauvoir...


À euthyphron :

Aujourd'hui, il n'est plus possible de penser l'humain en terme d'erreur ou de mal intrinsèquement lié à son existence. Tu poses la question de savoir s'il y a autre chose que la méchanceté ou le péché originel. Je pense que oui. Il y a la physiologie de l'humain. 

Un humain, ça ne sait pas et ça ne peut pas savoir ce que sont la société, la nation, l'humanité, qui sont des mots refermés sur eux-mêmes, des définitions purement abstraites du point de vue de la corporéité humaine. Chaque être humain ne sait pas et ne peut pas voir au-delà de la horde d'origine, dont il est encore aujourd'hui le sujet parfaitement asservi par un déterminisme littéralement dictatorial.

Par exemple, un humain, s'il a un enfant et qu'on lui donne le choix entre deux possibilités : soit son enfant se casse la jambe, soit cent millions de personnes meurent à l'autre bout de la planète, eh bien pour lui, les cent millions de gens en question, ils peuvent tous crever. C'est ainsi que chaque humain se comporte. Et c'est ainsi que se déploie une éthique, car de leur côté, chacun des cent millions de gens de l'autre bout de la planète se comporte exactement de la même façon en s'occupant d'abord de son propre enfant, s'il en a un.

Toute politique visant à imposer des règles communes au plus grand nombre est une faillite proportionnelle au nombre concerné. C'est l'imbrication de millions et de milliards de comportements égocentriques au sens large du terme qui établissent ce que nous nommons une morale ou une éthique (du progrès, notamment). 

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Message par euthyphron Sam 15 Juin 2013 - 12:48

poussbois a écrit:
Que dit Rousseau du progrès ? Je n'en sais rien, mais je parie pour une position proche de celle de Condorcet.
Euh non pas vraiment! Le Discours sur les Sciences et les Arts, qui l'a fait connaître, défend la thèse selon laquelle le progrès des connaissances s'accompagne d'une régression morale. A lire! c'est chiant, comme tout Rousseau Razz, mais très riche en commentaires possibles, comme tout Rousseau aussi.

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Message par Bergame Sam 15 Juin 2013 - 12:57

Oui, le progrès me semble aussi tributaire de la mémoire, c'est-à-dire de l'enregistrement et de la conservation (il y a d'ailleurs peut-être là un premier paradoxe). Ce qui nous donne le sentiment du progrès, c'est la comparaison de réussites actuelles au regard de l'enregistrement des expériences passées, soldées par des échecs. L'idée générale en étant que l'accumulation de l'expérience doit permettre de ne pas reproduire les mêmes erreurs. Il me semble que c'est l'idée première derrière, par exemple, le texte de Descartes, mais aussi tous ceux que tu cites, Courtial, qui articulent l'expérience individuelle avec l'expérience collective : La vie individuelle étant trop brève pour réaliser suffisamment d'expériences probantes sur un sujet, envisageons l'histoire de la multitude comme une existence individuelle, qui accumulerait les expériences sur le temps long.

Or, cette idée n'a de sens qu'à plusieurs conditions, dont :
- Une théorie de la vérité, ou du moins de la fausseté, comme nous y arrivons avec les interventions de poussbois.
- La possibilité d'identifier empiriquement l'erreur.
- Donc des conditions d'observation contrôlées.
- Par ailleurs, l'idée que chaque génération profite de l'expérience des ainés, et en quelque sorte expérimente d'autres possibilités.
- Ce qui implique une théorie de la vérité et de la fausseté stable dans le temps. En somme : un Vrai en soi.

Je crois que le problème que pose le concept de progrès, ou auquel se confronte le concept de progrès, n'est pas (seulement) le fait qu'il implique un telos, une destination de l'homme et/ou de la société comme par exemple une société réconciliée avec elle-même. Plus gravement, me semble-t-il, il implique une idée du Vrai, un Vrai qui s'imposerait à l'ensemble des Hommes.

Dès lors, il m'apparaît compréhensible que les grands critères retenus communément pour mesurer empiriquement le progrès sont :
- La technologie
- La croissance économique
- Eventuellement la paix.
La technologie, parce que derrière ce concept se trouve une réduction pragmatiste de la science, qui envisage le Vrai comme ce qui rend possible l'action -traduction "moderne" du concept de liberté, en fait. A cet égard, un iPad5 offrant davantage de possibilités d'action qu'un iPad4 -on peut faire plus de choses avec- c'est effectivement un progrès. A l'inverse, une initiative qui restreint les potentialités d'action, qui contraint la liberté, est un archaïsme, un "retour en arrière", une erreur.
La croissance économique parce que l'argent est medium universel et cumulatif, et que plus l'argent augmente, plus la richesse progresse. A l'inverse, une initiative qui ne fait pas gagner d'argent ou en fait perdre est une erreur.
La paix, parce que, sous réserve de définitions, les conflits armés sont dénombrables.

Si ce qui précède a un peu de sens, il me semble qu'il revient ensuite à chacun de décider si, de son propre point de vue, ces quelques valeurs constituent en effet un critère du progrès, ou non, c'est-à-dire s'il s'agit ou non de buts désirables.

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Message par Bergame Sam 15 Juin 2013 - 13:44

Mais cette articulation pluralité / individu est elle-même problématique. D'abord, pardonnez ces oppositions futiles, mais il me semble que ce problème est typiquement un problème de sociologue -à condition de considérer la sociologie comme la science sociale fondamentale. La philosophie, me semble-t-il, et comme tendent à l'illustrer les exemples de Courtial (Condorcet, Pascal, Descartes, mais aussi, bien entendu, Hegel), a eu tendance à envisager l'histoire de l'humanité comme une histoire individuelle, à assimiler la phylogenèse à l'ontogenèse, et, par conséquent, à masquer ce que cette articulation a de problématique.
 
Par exemple, elle est problématique pour ce qui concerne la technologie, bien sûr : Qu'un iPad5 constitue un progrès par rapport à un iPad4 ne dit rien sur la question de savoir qui peut avoir accès à un iPad. Corollairement, que la croissance économique soit un critère de progrès ne dit rien sur la question de la redistribution des outputs. Etc. Mais je voudrais surtout discuter la question d'euthyphron :
 
euthyphron a écrit:Si je comprends bien, il faudrait admettre, sauf mauvaise foi évidente, que nous comprenons mieux le réel et que nous le maîtrisons davantage. C'est bien ça? Alors, je pose une question : qui est "nous"?
 
A mon avis, Weber -toujours lui- apporte un bel éclairage sur cette question. Weber se demandait en effet en quelle manière on peut dire que nous comprenons davantage, que nous maitrisons mieux notre environnement que nos ancêtres. Ce qui nous donne ce sentiment, dit-il, c'est le fait que nous sommes capables de réaliser des prédictions sur notre environnement immédiat qui s'avèrent le plus souvent exactes. Ainsi, l'individu serait, vis-à-vis de son environnement immédiat, dans la même position que le scientifique vis-à-vis de son protocole expérimental. En effet, le scientifique réalise une prédiction, et si elle s'avère juste, alors -et au regard de ce qui précède plus haut- il a le sentiment d'avoir fait progresser la connaissance du réel. L'individu, au quotidien, appréhenderait donc cognitivement le monde de la même manière. Ainsi, dit Weber, lorsque nous allons à notre bureau, nous faisons une prédiction sur l'heure à laquelle va arriver le train, et nous en tenons compte dans notre activité. Et effectivement, dans le monde technologique et rationalisé qui est le notre, les trains arrivent, le plus souvent, à l'heure.
 
Pourtant, paradoxe : Nous ne savons pas comment ils fonctionnent, ou si peu. Sur l'ensemble des items avec lesquels nous interagissons quotidiennement, nous, individus lambdas si je puis dire, en connaissons très peu. Je répète : nous pouvons faire des prédictions sur ce qui va se passer lorsque nous interagissons avec eux de telle ou telle manière, prédictions qui tombent, le plus souvent justes. Mais nous ne savons pas pourquoi : comment ça marche, comment ça fonctionne, etc.
 
Le paradoxe, conclue donc Weber, c'est qu'en fait, nous en connaissons moins sur notre réel, nous maîtrisons moins bien notre environnement quotidien que l'indien Hottentot, dont l'univers cognitif et pragmatique est plus restreint, certes, mais qui, lui, sait précisément, non seulement à quoi servent ses outils, mais également comment les fabriquer, comment ils fonctionnent, etc. En somme, et pour le dire de manière plus contemporaine, la complexité croissante de notre monde fait que, individuellement, nous le connaissons et le maitrisons toujours moins. D'où la spécialisation des tâches, et l'interdépendance croissante des individus. D'où, également, une évolution du concept de liberté, de l'autonomie vers la potentialité d'agir. L'interdépendance croissante démultiplie nos potentialités d'action, mais restreint toujours davantage notre autonomie. C'est peut-être là que se nichent, entre autres, les doutes quant à ce que recouvre le concept de "progrès".
Bref, on pourrait faire long.

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Message par victor.digiorgi Sam 15 Juin 2013 - 14:09

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À ces divers point de vue matériels sur le progrès, on pourrait ajouter celui discernable chez Spinoza dans la construction du sentiment d'éternité qu'il propose.

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Message par hks Sam 15 Juin 2013 - 15:56

Il y a dans ce texte de Condorcet deux régimes d' existence.
Celui de  la terre ( disons de la nature ) laquelle suit des lois  intangibles  et c'est heureux parce  que ces lois intangibles permettent le second régime celui des facultés humaines . 
Ce second régime échappe à  la stabilité et donc varie  dans un sens d'amélioration d 'où ce concept optimisme de "progrès"-

La perfectibilité de l' homme est  indéfinie  alors que celle de tout ce qui n'est pas l' homme  semble définie .
 L'homme est ainsi extrait de la nature .( ce qui présuppose l'idée de liberté humaine, à tout le moins l'idée d' une exceptionnalité de l' homme dans la nature ).

 Et je me demande si cette extraction est totalement  justifiée.
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Message par quid Sam 15 Juin 2013 - 17:44

victor.digiorgi a écrit: L'« humanité » est à ce que je constate une illusion idéalisante voulue par des gens qui prennent leurs désirs pour des réalités.
Il y a une réalité de l'humanité qui, comme le souligne Baptiste, est l'espèce humaine : Quels procédés notables et identifiables fait que chacun de nous est ici et maintenant ? Dans ces procédés nous trouvons nos caractéristiques communes. Ces procédés sont naturellement évolutif, sans sous-entendu de progrès.

Il y a une autre considération, et je pense que c'est de celle-là dont tu parles, c'est l'humanité idéalisée comme une vision de ce qu'elle serait, toutes considérations entendues.

Mais cette humanité là est peut-être plutôt à entendre comme l'humanité en tant que ce qu'elle devrait-être. Entre la première de fait, celle de l'espèce, et cette dernière il y a une autre considération d'humanité, c'est celle en tant que ce qu'elle pourrait-être.

Ces contraintes et visions qui peuvent ne pas faire consensus, conditionnent alors la vision du progrès.

à Poussbois :

Je pense qu'à l'aube de l'espèce humaine, reconnaître que telle technique était plus efficiente que telle autre était naturel. Qu'y voyaient-ils comme progrès ? Sans doute un moindre effort, de moindres peines, mais également une libération de temps pour les petits plaisirs, qui pouvaient se faire rare.

J'idéalise peut-être ce qu'était leur existence, mais doit-on penser que la simple activité de subsistance était d'une plénitude telle, qu'elle les comblait sous tous les aspects ?

L'évolution des techniques a permis une libération de temps. Cette évolution technique était recherchée ou tout au moins admise comme un progrès. La libération de temps qui en a découlé est une conséquence, elle était tout aussi admise comme progrès.

Si l'on doit critiquer cette démarche, la critique doit alors revenir à la source, et comment critiquer une démarche naturelle ?

Il vaut mieux prendre acte de ce processus, et se poser la question de pourquoi ce progrès est recherché.

La critique que l'on pourrait faire serait de ne pas comprendre ce processus et continuer dans son sens, sans mesurer s'il reste pertinent de nos jours. Et s'il convient de l'accompagner, quitte à réinvestir le temps libéré dans celui-ci, dans une ronde sans fin.

Car que fait-on, sinon quitter un genre d'aliénation subie (la nature) pour entrer dans une aliénation choisie (la nature de l'homme). Difficile de dire où est l'aliénation dans tout çà ?

Finalement ce que l'on considère comme aliénation, n'est-ce pas cette emprise d'une nécessité qui est par nature inexorablement vaine ?

Ne serait-ce pas le propre de la nécessité de se surmonter.

Ainsi l'humanité, le progrès, sont des visées, étant à la fois le moyen et la cible à atteindre, elles permettent de surmonter. En tant que visées elles seront elles-mêmes changeantes.
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Message par baptiste Sam 15 Juin 2013 - 22:17

Bergame, tu ne seras certainement pas surpris si je ne suis pas d’accord avec toi à propos de ton Indien. Un explorateur du début du XX siècle visitant les esquimaux demandait à un shaman la raison de ses invocations et celui-ci lui répondit « Parce que nous avons peur, ce que nous ne comprenons pas nous fait peur », il ne faut jamais oublier qu’un écrit quel qu’il soit est daté et adressé. Lorsque Condorcet, Pascal ou Descartes parlent, ils parlent depuis une époque qui connaissait régulièrement les épidémies, les disettes, les guerres et étaient soumises à l’obscurantisme des religions, le progrès des connaissances c’était pour eux et ceci depuis Aristote l’espérance de la libération de ces menaces.
 
C’est pourquoi Euthyphron ma réponse n’est pas ambiguë, il y a une évolution nécessaire antérieure à l’humanité et qui lui sera postérieure, cette évolution a été progrès suivant le sens donné par Condorcet ou Descartes, mais ce progrès n’a pas été continu, il a connu des accidents graves. Eh oui ! Ce nous désigne des psychopathes, désolé à des degrés plus ou moins grave nous sommes tous des psychopathes, c’est juste une question de degrés. Ce que tu nommes les horreurs du xx iéme siècle ont été vécues en leurs temps comme une espérance par leurs auteurs. La rationalité n’est pas une vertu très répandue.
 

D’un point de vue contemporain, nous pouvons, après les accidents du siècle passé, convenir que l’évolution n’est plus nécessairement progrès mais est-elle pour autant régression ? Nombre d’entre nous pensent que toute action fondée sur une connaissance scientifique est bonne et que toute inquiétude quand à ce type d’action est irrationnel, ce que tu soutiens Bergame lorsque tu  dis que le problème relève de la sociologie. La sociologie comme la biologie sont des sciences de l’observation et en tant que telles ne peuvent prévoir que ce qu’elles ont déjà vu suffisamment de fois. Cela ne signifie pas qu’elles n’aient rien à dire, au contraire, mais elles ne peuvent fournir de certitudes. La réponse est nécessairement dans un rapport à la nature, y compris notre nature humaine, nouveau. Il n’est plus acceptable de lire que nos comportements sont strictement indépendants de notre nature biologique et sociologique, mais l’existence d’une conscience et d’une volonté sont aussi des moteurs de l’agir humain. Pourquoi parles-tu d’évolution du concept de liberté de l’autonomie vers la capacité d’agir, comme quelque chose de contemporain, que fais-tu des stoïciens?

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Message par Axiome Dim 16 Juin 2013 - 0:36

Pour ceux que ça intéresse, 2 reportages d’environ 1h30 chacun…

Dans le premier reportage  j’ai cru apercevoir Chut et à plusieurs reprises…. Mais Chut…. !

Certains chantaient la « Complainte du progrès » (n’est-ce-pas! :D),  et bien aujourd’hui on en vient même à parler de « Survivre au progrès » !

 Vous constaterez dès le début du reportage, la difficulté de certains à définir le mot « Progrès ».

Un peu déçu des personnes questionnées, il manque des spécialités à mon goût ….

https://www.youtube.com/watch?v=xBu4F2UITEo

Le second n’est pas mal du tout, surtout à la fin …..

https://www.youtube.com/watch?v=cokVlhtMM-k

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Message par hks Dim 16 Juin 2013 - 0:45

à Ataraxie 
 On voit qu'il n'envisage pas le progrès à travers un individu hors de tout écosystème relationnel (de générations en générations, individus dans le même temps sur un espace donné, les influences d'un "instant" sur un autre),
C'est à dire qu'il n'envisage pas un ecosystéme. La nature nous a "jeté" dans un monde stable et à disposition, dit-il en substance. La nature est bonne mère qu'elle reste telle et  nous progresserons  car nous, nous le pouvons.
 .
 A l'évidence nous déstabilisons une  nature qui pour nous n'a plus les traits  d'une vestale . Ce qui implique que les données du problèmes ne sont plus exclusivement dans les mains (si j' ose dire ) de l'esprit humain .
 Et elles ne l'ont jamais été de fait .
 On aimerait peut être penser avec Condorcet que l' humain se développe continûment dans une bulle intelligemment autogérée au sein d' une nature bienveillante . 
La pétition d' intelligence continue est déjà sujette à caution mais  l'idée de la  bulle encore plus.


 Hors l'intelligence, capacité relative et aléatoire, peut persister  le courage de survivre. L'intelligence qui n'est pas un gage de courage peut alors néanmoins contribuer à la perpétuation de la survie.
 Encore faut- il qu'elle soit l'intelligence de comprendre qu'il s'agit de survie dans une nature  qui va son train, indifférente sinon hostile à celle de l' humanité.
 
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Message par quid Dim 16 Juin 2013 - 23:50

Petits documentaires tout à fait dans le sujet Axiome, merci.

Poussbois,

Je précise que je pense que nous disons la même chose, sauf que je soulignais que si aujourd'hui on identifie le cycle de la recherche technique et scientifique, ce que tu appelles jardinage, comme un cycle qui finalement est vide de sens, de finalité et est vain, on peut juste remarquer que cette démarche a tout de même été vecteur de progrès.
Donc je suppose que lorsque tu contestes que c'est du progrès, tu fais état de la situation du moment comme étant une démarche ayant atteint ses limites, n'étant plus synonyme pour toi, de réel progrès.



Aujourd'hui, cette démarche est toujours à l'oeuvre, car elle a marqué notre histoire et fait partie de notre vision de la réussite. Sauf qu'elle va en s'accélérant, et en parallèle de la difficulté à justifier sa continuation, elle a des effets néfastes sur notre environnement.

Sa justification est difficile, car elle ne libère pas l'humain, mais semble plutôt le rendre dépendant. Elle fait miroiter des applications, qui souvent se rapprochent plus de la publicité lorsqu'elle fait état d'avancées qui bénéficieront à l'ensemble du genre humain. Il semble plus que l'on soit dans une démarche purement commerciale.

On réduit l'humain a un acteur manipulable. On considère que l'humain a des faiblesses et que sa mobilisation passe par l'exploitation des ses inclinations qui ont pu par ailleurs, faire sa réussite passée.

On l'entretien dans cette dépendance, dans cette addiction naturelle.

On considère ainsi que l'avenir de l'humanité ne passe pas par la rééducation des perspectives, mais par l'encouragement à ses inclinations dans une spirale irrationnelle, que son avenir ne passe pas par le savoir vivre en bonne intelligence avec son environnement, mais dans sa soumission à sa volonté sans autre considération.

La sortie de cette spirale passe par une inversion, ce que certains appellent la décroissance, car on ne change pas de perspective en œuvre depuis des siècles en un claquement de doigt ou par décret.

Cette spirale est irrationnelle, entre autre parce qu'elle a un rythme effrénée qui ne se justifie pas. Cela est significatif qu'elle ne bénéficie pas à l'humanité dans ce qu'elle a de durable, mais à des intérêts à courte échéance. Et qui a des intérêts à courte échéance sinon des individus qui ont une durée de vie limitée.


Bergame,

Es-tu vraiment sûr que l'on peut parler de capacité à agir lorsque l'on est incité à une sorte d'addiction ?

Bon j'exagère peut-être, mais c'est pour marquer le trait.
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Message par victor.digiorgi Lun 17 Juin 2013 - 1:02

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Le concept d'humanité vu par les deux bouts de la lorgnette du progrès :




Sur un trottoir de Nice, des affamés fouillant une poubelle pour tenter d'y trouver de quoi se nourrir pour la journée.


pauvrete-jpg_201432.jpg




Au milieu du Pacifique, un milliardaire de l'informatique voyageant suivant les principes fondamentaux de l'écologie :


post-1-1194372706.jpg


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Message par victor.digiorgi Lun 17 Juin 2013 - 2:11

.


L’homme est un animal social, un animal politique et un animal moral

Pour ce qui est de l'éthique, en termes de progrès, entre autres, nous somme trop longtemps restés englués dans un rationalisme quasi-mystique. 

Mais les progrès en primatologie, génétique, neurobiologie et autres disciplines « chapeautées » par la théorie de l’évolution ont bouleversé la donne, et ont provoqué des changements de perspective en philosophie des sciences et en épistémologie. 

Non seulement la biologie peut expliquer l’émergence de la morale, mais certains pensent qu’elle a aussi son mot à dire sur le contenu de celle-ci. Une approche biologique de la morale est-elle légitime ? Tout un courant de pensée, déjà ancien, a répondu à cette question par la négative.

Le raisonnement « antinaturaliste » peut se simplifier ainsi : l’originalité humaine procède de la culture, qui est un détachement progressif de la nature. L’homme trouve son humanité dans un processus d’arrachement au déterminisme biologique, dont le libre-arbitre est la plus pure expression. L’homme n’a donc pas d’autre nature que celle qu’il se donne par ses constructions  individuelles  et  sociales : il naît  vierge de toute préprogrammation.

Cette idée jadis populaire est fausse.

On a redécouvert l’importance de la composante biologique des traits et comportements humains. Sous l’égide de la science, et non plus de la philosophie. Dès lors, l’antinaturalisme se trouve de plus en plus contesté par les scientifiques eux-mêmes, secondés de philosophes, et ce mouvement s'est accéléré depuis le dernier quart du XXe siècle.. Le coup d’envoi symbolique de l’assaut contre la forteresse « antinaturaliste » a été donné en 1975, lorsque Edward O. Wilson fait paraître une œuvre monumentale : « Sociobiology, the New Synthesis ». Ce chercheur américain provoque alors l’une des plus importantes controverses du siècle passé. Il se fait le porte-parole de tout un courant de recherche né dans les années 1960, notamment avec Desmond Morris, visant à comprendre les bases biologiques des comportements sociaux et incluant l’homme dans le champ légitime de ses travaux. 

Trois vagues successives vont remettre au goût du jour les explications naturalistes de la morale. 

Une première vague, née dans les années 1960, est un renouveau du darwinisme appelé néodarwinisme, dont les représentants les plus connus sont William Hamilton, George Williams, Richard Dawkins, Robert Trivers et Edward O. Wilson lui-même. Ces auteurs et d’autres opèrent trois révolutions intellectuelles. D’abord, ils postulent que le schéma darwinien de survie du plus apte (variation-sélection-adaptation) explique aussi bien les traits  physiques  que les  comportements  complexes  (psychologiques notamment). Ensuite, ils considèrent que l’adaptation biologique s’exerce au niveau de l’individu et non du groupe. Enfin, ils font l’hypothèse que la sélection différentielle se comprend quant à elle au niveau du gène,  seule unité réellement  transmise par  l’hérédité.  Appliqué (grossièrement) à notre sujet, le raisonnement néodarwinien donne ceci : la morale est un comportement codé par des gènes, qui a été sélectionné au cours de l’évolution car il favorisait la reproduction des individus qui en étaient porteurs.

Une deuxième vague, se développant à partir des années 1970, est issue de l’étude du comportement des animaux (l’éthologie) et plus particulièrement de l’analyse de nos plus proches cousins, les singes (la primatologie). Un certain nombre de chercheurs, dont les plus connus sont Frans de Waal, Jane Goodall ou Christopher Boehm dans le monde anglo-saxon, Jacques Vauclair ou Dominique Lestel dans la francophonie, ont souligné la présence chez les animaux de comportements moraux ou proto-moraux dépassant le simple cadre de l’anecdote. Chez les grands singes notamment, observés à l’état sauvage ou en captivité, les interactions individuelles laissent place à des logiques d’empathie, d’altruisme et de réciprocité qui évoquent fortement ce que les humains qualifient de « morale ». Ces observations suggèrent logiquement que cette dernière est issue de l’évolution biologique plus que d’une création culturelle humaine sui generis. 

Une troisième vague a contesté la position antinaturaliste à partir des années 1980. Celle-là est venue de la psychologie et des sciences du cerveau. Elle retrouve le darwinisme de la première vague sur certains points,  mais s’intéresse d’abord aux explications neurophysiologiques et développementales de la morale — comme de l’ensemble des traits complexes de la cognition humaine :  mémoire, intelligence ou langage. Ses représentants les plus connus sont Jean-Pierre Changeux, Antonio Damasio, Joseph LeDoux, John Tooby, Leda Cosmides ou encore Michael Gazzaniga. La question posée ici est : quelles sont les zones fonctionnelles du cerveau impliquées dans le jugement moral  ? Et subsidiairement : en quoi cette neuro-anatomie de l’éthique nous aide-t-elle à comprendre les fondements de l’activité morale ?

Anthropologues, psychologues, généticiens, neurobiologistes, zoologistes… les travaux des auteurs que nous venons de citer sont de nature scientifique. Comment échappent-ils à la supposée « erreur naturaliste » de leurs prédécesseurs ? De plusieurs manières. D’abord, la critique de l’erreur naturaliste reposait elle-même sur un certain nombre d’erreurs, notamment une conception erronée de la nature humaine. À moins de défendre une position religieuse ou métaphysique, tous les faits à notre disposition laissent penser que l’homme procède de l’évolution biologique au même titre que toutes les autres espèces vivantes sur Terre. Tous les traits humains, sans exception, possèdent une base matérielle, moléculaire, cellulaire, qui influe sur leur expression. L’existence de cette influence n’est plus guère niée, même si sa nature exacte reste l’objet de l’investigation scientifique. 

Ensuite, et c'est très important : 

les scientifiques ne prétendent pas émettre un jugement de valeur sur le contenu concret, prescriptif de la morale (et de la politique).

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Nous avons résumé ainsi un progrès dans le sens d'une vérité comme dévoilement que Heidegger n'aurait certainement pas renié. (Enfin, je pense ...)


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Message par hks Lun 17 Juin 2013 - 17:44

les scientifiques ne prétendent pas émettre un jugement de valeur sur le contenu concret, prescriptif de la morale (et de la politique).


 J'adore  leur  fausse humilité quand  les scientifiques s'exhaussent au dessus du commun.
Les gens de peu, eux, sont déterminés  par la génétique et ont donc des jugements moraux induits, les scientifiques n' y prétendent pas .
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Message par hks Lun 17 Juin 2013 - 18:13

à Victor

 Tu cites à bon escient William Hamilton plus que digne de figurer dans la liste de ces sociobiologistes puis qu' édicteur de la célèbre loi de Hamilton .
 Loi tout à fait extraordinaire 


""""En fait, la loi de Hamilton dit que : « Les comportements altruistes seront favorisés par la sélection si les coûts (risques) pour effectuer le comportement sont moindre que les bénéfices (avantages) escomptés. » Il y a donc toujours un intérêt derrière toute action, mais cet intérêt décroît en fonction du coefficient d’apparentement. L’altruisme sera donc de 100 % pour un individu envers soi même, il ne sera plus que de 50 % pour les enfants, parents, frère et sœurs, il tombe à 25 % pour les grands-parents, petits enfants, demi frères et demi sœurs, et devient infime au-delà.

plus précisément:
 dans chaque espèce, les individus privilégient les comportements de coopération avec leurs parents génétiques les plus proches car en se dévouant ainsi, ils favorisent la propagation de leurs propres gènes."""""( tout copié sur Wikipédia ) ........
..........................................
 Cette intelligence et précaution des gènes me pose bien des problèmes " intellectuels"! . Dans un premier temps j' ai trouvé cette loi des plus difficiles à admettre  et par la suite je n'ai guère évolué .
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Message par Courtial Lun 17 Juin 2013 - 18:59

undefined a écrit:
hks a écrit:C'est à dire qu'il n'envisage pas un ecosystéme. La nature nous a "jeté" dans un monde stable et à disposition, dit-il en substance. La nature est bonne mère qu'elle reste telle et  nous progresserons  car nous, nous le pouvons.
Condorcet

Condorcet a écrit:Sans doute, ces progrès pourront suivre une marche plus ou moins rapide, mais elle doit être continue et jamais rétrograde, tant que la Terre occupera la même place dans le système de l'Univers et que les lois générales de ce système ne produiront ni bouleversement général, ni des changements qui ne permettraient plus à l'espèce humaine d'y conserver, d'y déployer les mêmes facultés, d'y trouver les mêmes ressources. 







Nous ne lisons pas la même chose : Condorcet dit que ce progrès sera infini tant que
La Terre occupera le même espace, tant qu'il n'y aura pas de bouleversement général, ce qui laisse plutôt entendre qu'il y aura des changements tôt ou tard, auquel cas le progrès sera inévitablement perturbé. 
Le caractère indéfini ne porte pas du tout sur l'état de l'Univers physique (de la biosphère), et c'est même le contraire. 
C'est la seule borne qu'il reconnaisse, mais il y a bien une borne. 




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Message par Courtial Lun 17 Juin 2013 - 19:07

euthyphron a écrit:
poussbois a écrit:
Que dit Rousseau du progrès ? Je n'en sais rien, mais je parie pour une position proche de celle de Condorcet.
Euh non pas vraiment! Le Discours sur les Sciences et les Arts, qui l'a fait connaître, défend la thèse selon laquelle le progrès des connaissances s'accompagne d'une régression morale. A lire! c'est chiant, comme tout Rousseau Razz, mais très riche en commentaires possibles, comme tout Rousseau aussi.

Ce que Rousseau appelle (dans le DOI) la "perfectibilité", c'est-à-dire l'idée que ce qui caractérise l'homme, c'est sa capacité, c'est sa faculté à acquérir des perfections qu'il n'a pas à l'origine, qui ne sont pas "naturelles", données d'abord, est une notion moralement neutre.
La notion de "perfection" est à entendre au sens classique : une "perfection", c'est une qualité (bonne ou mauvaise).
Cette idée de "perfectibilité" (Rousseau est l'inventeur de ce mot même, c'est un hapax), et qui est le fond d'anthropologie philosophique sur lequel Condorcet s'appuie, n'est donc ni optimiste ni pessimiste (pour faire simple et court) dans l'esprit de Rousseau : 'homme social, qui quitte l'état de nature, acquiert des qualités aussi bien bonnes que mauvaises, des connaissances, mais aussi des illusions, des vérités, mais aussi des erreurs, de la culture, mais de la méchanceté, etc.
La notion de "progrès" me semble traitée sur le même mode et n'a pas chez Rousseau le caractère d'une évolution vers le mieux.
La notion d'évolution n'appartenant au vocabulaire d'aucun des auteurs classiques que j'ai cités. Elle appartient je crois à une tout autre sphère intellectuelle


Dernière édition par Courtial le Lun 17 Juin 2013 - 19:25, édité 1 fois

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Message par neopilina Lun 17 Juin 2013 - 19:19

Les horreurs de la " sociologie darwinienne " vont au delà de ce que s'était interdit Darwin, avec son aveu d'échec quant à éclairer les phénomènes sexuels uniquement avec les ressources de la biologie, voir mon fil dans " Sociologie ", c'est à point nommé.
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Message par Courtial Lun 17 Juin 2013 - 19:29

Je crois savoir en effet que Darwin s'était opposé à cette exploitation (je crois me souvenir que tu avais posté en effet sur le sujet, je vais aller voir le fil que tu indiques).
C'était plutôt l'affaire de Spencer.
Et là où Nietzsche (et quelques autres) mettent le mot "Darwin", il faut souvent lire "Spencer".

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