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Le Banquet, Analyse

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Message par cedric Jeu 7 Mar 2013 - 10:04

- Je repris : « Il faut se rendre à ton raisonnement, étrangère, car il est juste. Mais l' Amour étant tel que tu viens de le dire, quels services rend-il aux hommes ?
- C'est justement, Socrate, ce que je vais à présent tâcher de t'apprendre, dit-elle. Tu connais la nature et l'origine de l' Amour et tu reconnais toi-même qu'il est l'amour des belles choses. Mais si l'on nous demandait : Pourquoi, Socrate et Diotime, l' Amour est-il l'amour des belles choses ? Ou, pour parler plus clairment : En aimant les belles choses, qu'aime-t-on ? »
- Je répondis : « Les avoir à soi.
- Cette réponse, dit-elle, appelle une autre question qui est celle-ci : Qu'est-ce qu'aura celui qui possédera les belles choses ? »
- Je répondis que je ne pouvais répondre au pied levé à une pareille question.
« Mais si, par exemple, dit-elle, substituant le mot bon au mot beau, on te demandait : Voyons, Socrate, quand on aime les bonnes choses, qu'aime-t-on ?
- Les posséder, répondis-je.
- Et qu'est-ce qu'aura celui qui possédera les bonnes choses ?
- La réponse, dis-je, est plus facile : il sera heureux.
- C'est en effet, dit-elle, dans la possession des bonnes choses que consiste le bonheur, et l'on n'a plus besoin de demander pourquoi celui qui désire le bonheur veut être heureux : on est arrivé au terme de la question, ce me semble.
- C'est juste, dis-je.
- Mais cette volonté et cet amour sont-ils, selon toi, communs à tous les hommes, et tous veulent-ils toujours posséder ce qui est bon ? Qu'en penses-tu ?
- Je pense, dis-je, qu'ils sont communs à tous les hommes.
- Pourquoi donc, Socrate, reprit-elle, ne disons-nous pas de tous les hommes qu'ils aiment, puisqu'ils aiment tous et toujours les mêmes choses, mais que les uns aiment, et les autres non ?
- Cela m'étonne aussi, dis-je.
- Cesse de t'étonner, dit-elle ; car c'est à une espèce d'amour particulière que nous réservons le nom d'amour, lui appliquant le nom du genre entier ; pour les autres espèces, nous nous servons d'autres mots.
- Un exemple ? Dis-je.
- En voici un. Tu sais que le mot poésie représente bien des choses. En général on appelle poésie la cause qui fait passer quelque chose du non-être à l'existence, de sorte que les créations dans tous les arts sont des poésies, et que les artisans qui les font sont tous des poètes.
- C'est vrai.
- Cependant, ajouta-t-elle, tu vois qu'on ne les appelle pas poètes et qu'ils ont d'autres noms, et qu'une seule portion mise à part de l'ensemble de la poésie, celle qui est relative à la musique et aux mètres, est appelée du nom du genre entier ; car cette portion seul s'appelle poésie, et ceux qui la cultivent poètes.
- C'est vrai dis-je.
- Il en est ainsi de l'amour ; en général, le désir du bien et du bonheur, sous toutes ses formes, voilà pour tout le monde « le grand et industrieux Amour ». Mais il y a beaucoup de manières de s'adonner à l'amour, et de ceux qui recherchent l'argent, les exercices physiques, la philosophie, on ne dit pas qu'ils aiment et sont amants ; mais il y a une espèce particulière d'amour dont les adeptes et sectateurs reçoivent les noms du genre entier : amour, aimer, amant.
- Il semble bien que tu aies raison, dis-je.

( p.73-74 )

Diotime ayant mis à jour la nature de l' Amour ( dimension ontologique, ce qu'est l' Amour ), Socrate va maintenant lui demander, selon la méthode déjà mentionnée auparavant, quels sont les effets de l' Amour, quels services l' Amour rend-il aux hommes ( dimension pragmatique ).

L' Amour est l'amour des belles choses. Or, celui qui possédera les belles choses, c'est à dire les bonnes choses ( équivalence claire ici entre le beau et le bon, qui peuvent selon Diotime se substituer l'un à l'autre ) sera heureux. Les effets de l' Amour tiennent donc, selon Diotime, au bonheur qu'il apporte aux hommes.

Cependant, si l' Amour est commun à tous les hommes, il existe bien des manières différentes d'aimer. En effet, l' Amour désigne en fait un nom générique, le nom du genre entier, qui en réalité se subdivise en une multiplicité d' amour qui se définissent différemment. En d'autres termes, les hommes recherchent différemment l' Amour selon les définitions de l'amour qui les anime et qui sont multiples. Ce qui signifie que l' Amour auquel s'attache le philosophe est un Amour bien particulier et qui ne se confond pas avec d'autres. On peut d'ores et déjà dire que l' Amour auquel s'attache le philosophe est l' Amour générique qui se tient pour ainsi dire au sommet de l'échelle des valeurs des différentes manières d'aimer, des différentes définitions de l'amour, qui entretiennent entre elles une relation clairement hiérarchique. Le philosophe est animé par l'idée même de l' Amour.

En effet, dans sa généralité, l'amour désigne le désir du bien et du bonheur, sous toutes ses formes. Mais, il va de soi que la définition de l'amour varie selon le type particulier de bien recherché par tel ou tel individu, de sorte que, sous le terme générique d' Amour sont en réalité regroupés une multiplicité d'amour que permettent d'ores et déjà de caractériser certains termes du champ lexical de l'amour.


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Message par Bergame Jeu 7 Mar 2013 - 16:54

Pour moi, toute l'opposition platonicienne entre philosophie et poésie est contenue dans ce passage. Ca ne peut pas être un hasard que Diotime fasse ici mention de la poiesis , comme une métaphore à l'Amour qu'elle définira plus loin comme "amour de la genesis (engendrement, devenir)".

D'ailleurs, je crois que "genesis" est ici pris comme une dérivation de "poiesis". La genesis est à la poiesis ce que l'amour est à l'Amour générique.
Le parallèle entre les deux concepts est rendue claire dans un passage tel que : "Aussi quand l'être pressé d'enfanter s'approche du beau, il devient joyeux, et, dans son allégresse, il se dilate et enfante et produit, quand, au contraire, il s'approche du laid, renfrogné et chagrin, il se resserre sur lui-même, se détourne, se replie et n'engendre pas."

La poiesis est le terme générique pour le processus qui fait passer du non-être à l'existence. La genesis en est un cas particulier.

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Message par cedric Lun 11 Mar 2013 - 10:27

Bergame a écrit:Pour moi, toute l'opposition platonicienne entre philosophie et poésie est contenue dans ce passage. Ca ne peut pas être un hasard que Diotime fasse ici mention de la poiesis , comme une métaphore à l'Amour qu'elle définira plus loin comme "amour de la genesis (engendrement, devenir)".

D'ailleurs, je crois que "genesis" est ici pris comme une dérivation de "poiesis". La genesis est à la poiesis ce que l'amour est à l'Amour générique.
Le parallèle entre les deux concepts est rendue claire dans un passage tel que : "Aussi quand l'être pressé d'enfanter s'approche du beau, il devient joyeux, et, dans son allégresse, il se dilate et enfante et produit, quand, au contraire, il s'approche du laid, renfrogné et chagrin, il se resserre sur lui-même, se détourne, se replie et n'engendre pas."

La poiesis est le terme générique pour le processus qui fait passer du non-être à l'existence. La genesis en est un cas particulier.

Oui, ce qui distingue fondamentalement le poète du philosophe, c'est l'invention. Le philosophie, lui, n'invente rien, il ne fait, d'une certaine façon, que faire appel à l'évidence et à la mémoire. Il ne crée pas de vérité nouvelle, car la Vérité n'est pas de l'ordre de la création ni de la nouveauté.

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Message par Invité Mar 12 Mar 2013 - 9:56

Il n'y a pas ici opposition entre poésie et philosophie, mais entre le verbe poi-ein qui veut dire "faire" et le sens particulier de "poi-esis", poésie (métrique). Diotime fait la distinction entre l'amour pur (ou la poésie pure) et l'amour de quelque chose (ou la fabrication d'un objet). On s'élève, on s'élève. :)

Il y a une progression à partir de ce passage :
- Mais cette volonté et cet amour sont-ils, selon toi, communs à tous les hommes, et tous veulent-ils toujours posséder ce qui est bon ? Qu'en penses-tu ?
- Je pense, dis-je, qu'ils sont communs à tous les hommes.
Evidemment, Socrate a conclu de façon définitive, ce qui était le but recherché par Diotime, donc, fidèle à la progression dialectique, on ne va pas s'arrêter là, on va avoir droit à une contradiction nouvelle :

- Pourquoi donc, Socrate, reprit-elle, ne disons-nous pas de tous les hommes qu'ils aiment, puisqu'ils aiment tous et toujours les mêmes choses, mais que les uns aiment, et les autres non ?

L'étonnement classique de l'interlocuteur (Platon savait attiser l'intérêt, c'était un bon auteur de théâtre) :

- Cela m'étonne aussi, dis-je.

C'est là qu'on s'élève :
- Cesse de t'étonner, dit-elle ; car c'est à une espèce d'amour particulière que nous réservons le nom d'amour, lui appliquant le nom du genre entier ; pour les autres espèces, nous nous servons d'autres mots.
- Un exemple ? Dis-je.
Et là, Diotime nous donne l'exemple de la poésie, qui amène à la distinction entre l'amour de quelque chose et l'amour en soi, toujours suivant la méthode socratique habituelle (ici inversée, car c'est Diotime qui l'applique, c'est elle qui accouche Socrate, plus tard, on verra que Socrate est plus grand encore, sûrement l'élève Platon qui a dépassé le maître), méthode qui consiste à se demander ce que sont les choses (qu'est-ce que l'amour ?).

Mais il y a beaucoup de manières de s'adonner à l'amour, et de ceux qui recherchent l'argent, les exercices physiques, la philosophie, on ne dit pas qu'ils aiment et sont amants ;
Même aimer la philo ce n'est pas "aimer" (en soi et pour soi). Ensuite, on aura l'amour du Bien, du Beau (là on en sera encore à l'amour du corps), et pour finir, Socrate l'ascète reprendra la main pour parler de l'immortalité.

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