Le Deal du moment :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à ...
Voir le deal

Un pari de 25 ans sur la conscience.

5 participants

Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Dim 2 Juil 2023 - 2:20

.

Un spécialiste du cerveau et un philosophe viennent de se rencontrer dans le but de reparler d'un pari sur la conscience qu'ils avaient fait dans les années 90.

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Captur13


Ils sont montés sur scène devant un auditorium bondé à l'Université de New York. Ils étaient là pour voir si le pari avait été réglé sur l'une des plus grandes questions de la science : comment un cerveau, un morceau de matière, génère-t-il des états de conscience subjectifs ?

Avant de révéler la résolution de leur pari, expliquons sa trame de fond : pourquoi la conscience reste un sujet de fascination et de frustration pour quiconque a le moindre penchant intellectuel. Christof Koch, le neuroscientifique, et David Chalmers, le philosophe, se sont affrontés en 1994  à Tucson, en Arizona, lors d'une conférence intitulée Vers une base scientifique de la conscience. Koch avait proclamé dans Scientific American que la conscience, avec laquelle les philosophes se sont débattus pendant des millénaires, pouvait être étudiée scientifiquement.

Tout comme Crick et Watson avait résolu l'hérédité en décodant la double hélice de l'ADN, les scientifiques allaient craquer la conscience en découvrant ses fondements neuronaux, ou «corrélats», ce que Crick et Koch avaient affirmé. Les scientifiques ont même identifié une base possible pour la conscience : des cellules cérébrales s'activant en synchronie 40 fois par seconde.

Tout le monde à Tucson n'était pas convaincu. Chalmers, plus jeune et alors beaucoup moins connu que Koch, a soutenu que ni les oscillations à 40 hertz ni aucun autre processus strictement physique ne pouvaient expliquer pourquoi les perceptions sont accompagnées de sensations conscientes. Le public s'est réveillé lorsque Chalmers a dit que la conscience était «le problème difficile». C'était la première fois que ce terme était prononcé devant un public intéressé par la science.

Chalmers a suggéré que le fameux problème difficile pourrait être résolu en supposant que l'information soit une propriété fondamentale de la réalité. Cette hypothèse, contrairement au modèle à 40 hertz de Crick et Koch, pourrait rendre compte de la conscience dans n'importe quel système, pas seulement un avec un cerveau. Même un thermostat, qui traite un peu d'information, pourrait être un peu conscient, a ironisé Chalmers.

Peu impressionné, Koch a déclaré que l'hypothèse de l'information était inutile. «Pourquoi ne dites-vous pas simplement que lorsque vous avez un cerveau, le Saint-Esprit descend et vous rend conscient ?»

Chalmers répondit froidement que l'hypothèse du Saint-Esprit était en conflit avec sa propre expérience subjective. «Mais comment puis-je savoir que votre expérience subjective est la même que la mienne?» s'exclama Koch. « Comment puis-je même savoir que tu es conscient ?» Koch soulevait implicitement le problème du solipsisme qu'on verra plus tard.

Le conflit entre Koch et Chalmers a été souligné en 1994 dans un article de Scientific American, «Can Science Explain Consciousness ?». Lorsqu'ils ont fait leur pari en 1998 lors de la réunion annuelle de l'«Association pour l'étude scientifique de la conscience», qu'ils ont contribué à créer, leur point de vue n'avait pas beaucoup changé. Koch a parié face à Chalmers que d'ici 25 ans, c'est-à-dire d'ici 2023, les chercheurs découvriraient un schéma neuronal «clair» sous-jacent à la conscience.

Cependant, au cours de la décennie suivante, la position de Koch a radicalement changée. Il avait adoptét un modèle ambitieux inventé par le neuroscientifique Giulio Tononi. Appelée théorie de l'information intégrée, ou IIT, le modèle est beaucoup plus détaillé que celui que Chalmers avait esquissé à Tucson. L'IIT soutient que la conscience apparaît dans tout système dont les composants échangent des informations d'une certaine manière mathématiquement définie.

En 2009, Koch a expliqué les implications surprenantes de la théorie dans Scientific American. Un seul proton, composé de trois quarks en interaction, pourrait posséder une lueur de conscience, a-t-il conjecturé. L'IIT semblait corroborer l'ancienne doctrine métaphysique du panpsychisme, qui soutient que la conscience imprègne tout.

On peut être perplexe devant ce genre d'affirmations lorsqu'on sait qu'en 2015 lors d'un atelier sur la théorie de l'information ayant eu lieu à l'Université de New York, il y avait parmi les conférenciers Tononi, l'inventeur de l'IIT, Koch, aujourd'hui directeur de l'institut Allen des Sciences du Cerveau, et Chalmers, codirecteur du Centre pour la pensée, le cerveau et la conscience de cette Université.

Bien que la plupart des intervenants de l'atelier aient traité l'IIT avec gentillesse, l'expert en informatique quantique Scott Aaronson l'a éviscéré. Selon la définition mathématique de l'information de l'IIT, a souligné Aaronson, un lecteur de disque compact exécutant des codes de correction d'erreurs peut être beaucoup plus conscient qu'un être humain.

Les objections peuvent être fondamentales face à l'IIT. Dans une interview de 1990, Claude Shannon, qui a inventé la théorie de l'information dans les années 1940, dit que l'information contenue dans un système est proportionnelle à sa capacité à «surprendre» un observateur, ce que je considère comme signifiant que l'information nécessite une entité consciente pour être informée. Expliquer la conscience avec un concept qui présuppose la conscience apparaît comme un raisonnement circulaire. C'est de la tricherie.

De plus, l'IIT, comme toutes les théories qui autorisent la conscience non humaine, pose ce que nous avons vu plus haut : le problème du solipsisme. Aucun humain ne peut être sûr qu'un autre humain est conscient, sans parler d'une méduse, d'un thermostat ou d'un proton. Koch a proposé de construire un «compteur de conscience» qui mesurerait la conscience de n'importe quel objet de la même manière qu'un thermomètre mesure la température, mais cet appareil reste une simple expérience de pensée, et d'ailleurs c'est plutôt un fantasme.

Alors où en sont les choses aujourd'hui ?

Grâce en partie aux efforts de Koch et Chalmers, plus de chercheurs que jamais tentent de résoudre l'énigme de la conscience. Ils sondent le cerveau avec l'optogénétique, l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, la stimulation magnétique transcrânienne et des électrodes implantées dans le cerveau. Et ils modélisent leurs données avec des algorithmes toujours plus puissants, augmentés par l'intelligence artificielle.

Ces efforts ont été présentés lors de la 26e conférence annuelle de l'Association pour l'étude scientifique de la conscience à l'Université de New York, où Koch et Chalmers se sont rencontrés pour régler leur pari. Lors du rassemblement du 22 au 25 juin, des dizaines de chercheurs du monde entier, certains n'étaient pas encore nés lorsque Koch et Chalmers se sont affrontés pour la première fois à Tucson, ont présenté leurs dernières idées, leurs dernières données.

La diversité des points de vue a été vertigineuse. L'ancienne hypothèse d'oscillation à 40 hertz de Crick et Koch a cédé la place à une multitude de modèles de corrélation neuronale plus sophistiqués. Chez certains, le cortex préfrontal est essentiel à la conscience ; d'autres se concentrent sur l'activité dans différentes régions du cerveau ou impliquent des types spécifiques de neurones ou des modes de communication neuronale. Les conférenciers se sont également penchés sur la conscience des primates, des araignées et des plantes, le statut ontologique de la réalité virtuelle et des rêves et les implications de la démence et d'autres états pathologiques.

La mécanique quantique a été absente bien que des physiciens comme John Wheeler et Roger Penrose l'aient lié à la conscience. Chalmers a récemment joué avec un modèle qui fusionne la théorie de l'information intégrée et la mécanique quantique. Mais Chalmers s'est prononcé sur l'omission des théories quantiques de la conscience en déclarant qu'elles étaient trop marginales pour cette conférence.

Les théories quantiques étaient donc hors de propos. Mais qu'en est-il de la façon dont la conscience peut être expliquée par la relativité, qui fournit un moyen d'unir les cadres de référence ? Qu'en est-il de la session qui a examiné si les intelligences artificielles telles que ChatGPT sont conscientes et donc moralement responsables ? Qu'en est-il des exposés sur les expériences mystiques induites par la méditation, le DMT et le LSD ?

Les orateurs se sont inquiétés de la prolifération des théories. «La croissance n'est pas toujours bénigne», a déclaré le philosophe Robert Chis-Ciure dans une conférence sur la falsification des théories. «Le cancer est un bon exemple.» Pendant la même soirée au cours de laquelle Koch et Chalmers ont réglé leur pari (je n'ai pas compris s'il l'avait vraiment réglé), les chercheurs ont présenté les résultats de tests rigoureux de la théorie de l'information intégrée et d'un modèle rival, la théorie de l'espace de travail mondial, dans laquelle la conscience sert de moyen au cerveau de mettre en lumière les informations critiques.

Les résultats des tests n'ont pas été concluants. Certaines données favorisent l'IIT ; d'autres privilégient l'espace de travail mondial. Cette conclusion n'est guère surprenante, étant donné que le cerveau est si vertigineusement complexe et que la conscience est si mal définie, comme l'ont reconnu plusieurs orateurs. Tout cela pour dire que la recherche sur la conscience, loin de converger vers un paradigme unificateur, est devenue plus fractionnée et chaotique que jamais.

Revenons au pari entre Koch et Chalmers : ils ont convenu que, pour que Koch gagne, la preuve d'une signature neuronale de la conscience doit être «claire». Ce mot, «clair», a condamné Koch. «Il est clair que les choses ne sont pas claires», a déclaré Chalmers, et Koch a approuvé.

Dans vingt-cinq ans, a-t-il prédit, lorsqu'il aura 91 ans et que Chalmers en aura 82, les chercheurs sur la conscience atteindront la "clarté" qui leur échappe désormais. Chalmers et Koch se sont serrés la main.

Dans  vingt-cinq ans, j'aurai 107 ans. Avec la grâce de Dieu, je serai là ...

En attendant le matérialiste radical et athée que je suis est très satisfait de constater que la science et la philosophie peuvent s'associer et bien s'entendre pour résoudre le problèmes autant philosophique que scientifique que constitue la clarté d'une éventuelle explication sur la conscience.

C'est quand-même pas gagné ! ...

.


Dernière édition par Saint-Ex le Dim 2 Juil 2023 - 14:04, édité 1 fois
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Bergame Dim 2 Juil 2023 - 8:46

Très intéressant, Saint-Ex, merci ! conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. 2101236583

_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame
Bergame
Persona
Persona

Nombre de messages : 5056
Date d'inscription : 03/09/2007

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par aliochaverkiev Dim 2 Juil 2023 - 9:25

Saint-Ex a écrit:.

Un spécialiste du cerveau et un philosophe viennent de se rencontrer dans le but de reparler d'un pari sur la conscience qu'ils avaient fait dans les années 90.

Ils sont montés sur scène devant un auditorium bondé à l'Université de New York. Ils étaient là pour voir si le pari avait été réglé sur l'une des plus grandes questions de la science : comment un cerveau, un morceau de matière, génère-t-il des états de conscience subjectifs ?

Avant de révéler la résolution de leur pari, expliquons sa trame de fond : pourquoi la conscience reste un sujet de fascination et de frustration pour quiconque a le moindre penchant intellectuel. Christof Koch, le neuroscientifique, et David Chalmers, le philosophe, se sont affrontés en 1994  à Tucson, en Arizona, lors d'une conférence intitulée Vers une base scientifique de la conscience. Koch avait proclamé dans Scientific American que la conscience, avec laquelle les philosophes se sont débattus pendant des millénaires, pouvait être étudiée scientifiquement.

Tout comme Crick et Watson avait résolu l'hérédité en décodant la double hélice de l'ADN, les scientifiques allaient craquer la conscience en découvrant ses fondements neuronaux, ou «corrélats», ce que Crick et Koch avaient affirmé. Les scientifiques ont même identifié une base possible pour la conscience : des cellules cérébrales s'activant en synchronie 40 fois par seconde.

Tout le monde à Tucson n'était pas convaincu. Chalmers, plus jeune et alors beaucoup moins connu que Koch, a soutenu que ni les oscillations à 40 hertz ni aucun autre processus strictement physique ne pouvaient expliquer pourquoi les perceptions sont accompagnées de sensations conscientes. Le public s'est réveillé lorsque Chalmers a dit que la conscience était «le problème difficile». C'était la première fois que ce terme était prononcé devant un public intéressé par la science.

Chalmers a suggéré que le fameux problème difficile pourrait être résolu en supposant que l'information soit une propriété fondamentale de la réalité. Cette hypothèse, contrairement au modèle à 40 hertz de Crick et Koch, pourrait rendre compte de la conscience dans n'importe quel système, pas seulement un avec un cerveau. Même un thermostat, qui traite un peu d'information, pourrait être un peu conscient, a ironisé Chalmers.

Peu impressionné, Koch a déclaré que l'hypothèse de l'information était inutile. «Pourquoi ne dites-vous pas simplement que lorsque vous avez un cerveau, le Saint-Esprit descend et vous rend conscient ?»

Chalmers répondit froidement que l'hypothèse du Saint-Esprit était en conflit avec sa propre expérience subjective. «Mais comment puis-je savoir que votre expérience subjective est la même que la mienne?» s'exclama Koch. « Comment puis-je même savoir que tu es conscient ?» Koch soulevait implicitement le problème du solipsisme qu'on verra plus tard.

Le conflit entre Koch et Chalmers a été souligné en 1994 dans un article de Scientific American, «Can Science Explain Consciousness ?». Lorsqu'ils ont fait leur pari en 1998 lors de la réunion annuelle de l'«Association pour l'étude scientifique de la conscience», qu'ils ont contribué à créer, leur point de vue n'avait pas beaucoup changé. Koch a parié face à Chalmers que d'ici 25 ans, c'est-à-dire d'ici 2023, les chercheurs découvriraient un schéma neuronal «clair» sous-jacent à la conscience.

Cependant, au cours de la décennie suivante, la position de Koch a radicalement changée. Il avait adoptét un modèle ambitieux inventé par le neuroscientifique Giulio Tononi. Appelée théorie de l'information intégrée, ou IIT, le modèle est beaucoup plus détaillé que celui que Chalmers avait esquissé à Tucson. L'IIT soutient que la conscience apparaît dans tout système dont les composants échangent des informations d'une certaine manière mathématiquement définie.

En 2009, Koch a expliqué les implications surprenantes de la théorie dans Scientific American. Un seul proton, composé de trois quarks en interaction, pourrait posséder une lueur de conscience, a-t-il conjecturé. L'IIT semblait corroborer l'ancienne doctrine métaphysique du panpsychisme, qui soutient que la conscience imprègne tout.

On peut être perplexe devant ce genre d'affirmations lorsqu'on sait qu'en 2015 lors d'un atelier sur la théorie de l'information ayant eu lieu à l'Université de New York, il y avait parmi les conférenciers Tononi, l'inventeur de l'IIT, Koch, aujourd'hui directeur de l'institut Allen des Sciences du Cerveau, et Chalmers, codirecteur du Centre pour la pensée, le cerveau et la conscience de cette Université.

Bien que la plupart des intervenants de l'atelier aient traité l'IIT avec gentillesse, l'expert en informatique quantique Scott Aaronson l'a éviscéré. Selon la définition mathématique de l'information de l'IIT, a souligné Aaronson, un lecteur de disque compact exécutant des codes de correction d'erreurs peut être beaucoup plus conscient qu'un être humain.

Les objections peuvent être fondamentales face à l'IIT. Dans une interview de 1990, Claude Shannon, qui a inventé la théorie de l'information dans les années 1940, dit que l'information contenue dans un système est proportionnelle à sa capacité à «surprendre» un observateur, ce que je considère comme signifiant que l'information nécessite une entité consciente pour être informée. Expliquer la conscience avec un concept qui présuppose la conscience apparaît comme un raisonnement circulaire. C'est de la tricherie.

De plus, l'IIT, comme toutes les théories qui autorisent la conscience non humaine, pose ce que nous avons vu plus haut : le problème du solipsisme. Aucun humain ne peut être sûr qu'un autre humain est conscient, sans parler d'une méduse, d'un thermostat ou d'un proton. Koch a proposé de construire un «compteur de conscience» qui mesurerait la conscience de n'importe quel objet de la même manière qu'un thermomètre mesure la température, mais cet appareil reste une simple expérience de pensée, et d'ailleurs c'est plutôt un fantasme.

Alors où en sont les choses aujourd'hui ?

Grâce en partie aux efforts de Koch et Chalmers, plus de chercheurs que jamais tentent de résoudre l'énigme de la conscience. Ils sondent le cerveau avec l'optogénétique, l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, la stimulation magnétique transcrânienne et des électrodes implantées dans le cerveau. Et ils modélisent leurs données avec des algorithmes toujours plus puissants, augmentés par l'intelligence artificielle.

Ces efforts ont été présentés lors de la 26e conférence annuelle de l'Association pour l'étude scientifique de la conscience à l'Université de New York, où Koch et Chalmers se sont rencontrés pour régler leur pari. Lors du rassemblement du 22 au 25 juin, des dizaines de chercheurs du monde entier, certains n'étaient pas encore nés lorsque Koch et Chalmers se sont affrontés pour la première fois à Tucson, ont présenté leurs dernières idées, leurs dernières données.

La diversité des points de vue a été vertigineuse. L'ancienne hypothèse d'oscillation à 40 hertz de Crick et Koch a cédé la place à une multitude de modèles de corrélation neuronale plus sophistiqués. Chez certains, le cortex préfrontal est essentiel à la conscience ; d'autres se concentrent sur l'activité dans différentes régions du cerveau ou impliquent des types spécifiques de neurones ou des modes de communication neuronale. Les conférenciers se sont également penchés sur la conscience des primates, des araignées et des plantes, le statut ontologique de la réalité virtuelle et des rêves et les implications de la démence et d'autres états pathologiques.

La mécanique quantique a été absente bien que des physiciens comme John Wheeler et Roger Penrose l'aient lié à la conscience. Chalmers a récemment joué avec un modèle qui fusionne la théorie de l'information intégrée et la mécanique quantique. Mais Chalmers s'est prononcé sur l'omission des théories quantiques de la conscience en déclarant qu'elles étaient trop marginales pour cette conférence.

Les théories quantiques étaient donc hors de propos. Mais qu'en est-il de la façon dont la conscience peut être expliquée par la relativité, qui fournit un moyen d'unir les cadres de référence ? Qu'en est-il de la session qui a examiné si les intelligences artificielles telles que ChatGPT sont conscientes et donc moralement responsables ? Qu'en est-il des exposés sur les expériences mystiques induites par la méditation, le DMT et le LSD ?

Les orateurs se sont inquiétés de la prolifération des théories. «La croissance n'est pas toujours bénigne», a déclaré le philosophe Robert Chis-Ciure dans une conférence sur la falsification des théories. «Le cancer est un bon exemple.» Pendant la même soirée au cours de laquelle Koch et Chalmers ont réglé leur pari (je n'ai pas compris s'il l'avait vraiment réglé), les chercheurs ont présenté les résultats de tests rigoureux de la théorie de l'information intégrée et d'un modèle rival, la théorie de l'espace de travail global, dans laquelle la conscience sert de moyen au cerveau de mettre en lumière les informations critiques.

Les résultats des tests n'ont pas été concluants. Certaines données favorisent l'IIT ; d'autres privilégient l'espace de travail mondial. Cette conclusion n'est guère surprenante, étant donné que le cerveau est si vertigineusement complexe et que la conscience est si mal définie, comme l'ont reconnu plusieurs orateurs. Tout cela pour dire que la recherche sur la conscience, loin de converger vers un paradigme unificateur, est devenue plus fractionnée et chaotique que jamais.

Revenons au pari entre Koch et Chalmers : ils ont convenu que, pour que Koch gagne, la preuve d'une signature neuronale de la conscience doit être «claire». Ce mot, «clair», a condamné Koch. «Il est clair que les choses ne sont pas claires», a déclaré Chalmers, et Koch a approuvé.

Dans vingt-cinq ans, a-t-il prédit, lorsqu'il aura 91 ans et que Chalmers en aura 82, les chercheurs sur la conscience atteindront la "clarté" qui leur échappe désormais. Chalmers et Koch se sont serrés la main.

Dans  vingt-cinq ans, j'aurai 107 ans. Avec la grâce de Dieu, je serai là ...

En attendant le matérialiste radical et athée que je suis est très satisfait de constater que la science et la philosophie peuvent s'associer et bien s'entendre pour résoudre le problèmes autant philosophique que scientifique que constitue la clarté d'une éventuelle explication sur la conscience.

C'est quand-même pas gagné ! ...

.

Il y a un sophisme dès le début dans ce texte.
" Comment un cerveau, un morceau de matière, génère-t-il des états de conscience subjectifs ?"
Cette question contient une affirmation que pourtant rien n'étaye. Nul ne sait si le cerveau génère les états de conscience. Ce préjugé fut rapidement dénoncé par les marxistes eux-mêmes. Dans "Les principes élémentaires de philosophie" de George Politzer, il y a déjà cette mise en garde : non le cerveau ne "produit" pas la pensée, il n' y a pas génération, production, fabrication. Qu'est-ce que la pensée alors ? La pensée est une acticité cérébrale. A l'époque de Politzer nous voyons déjà la distance prise par rapport à la "génération" de la conscience par le cerveau. Il n' y a pas "génération" il y a activité. Cette affirmation reste toutefois floue. Trop floue. Il y a encore imprécision. En effet Politzer ne distingue pas encore la conscience en tant qu'activité cérébrale, et la conscience en tant que collection d'états et d'actions mentaux.
Nous voyons d'ailleurs que cette distinction n'est pas encore faite dans tous ces débats fumeux entre Américains, débats qui n'arrivent à rien :  il y a un manque de rigueur scientifique. Il est nécessaire de distinguer les domaines dont on parle sinon c'est du n'importe quoi. Il est nécessaire de distinguer la conscience en tant qu'activité cérébrale, et la conscience en tant qu'activité mentale. Sinon nous passons de l'un à l'autre sans même nous rendre compte que nous ne parlons pas de la même chose. Cela explique les errements des Américains (enfin pas de tous quand même, aujourd'hui nombre de chercheurs américains font la distinction et évitent de passer inconsidérément d'un domaine à l'autre). Si je reprends le vocabulaire de Thomas Nagel il est nécessaire de distinguer l'activité neuronale affectée à la conscience et la conscience phénoménale, c'est-à-dire ces états et ces actions mentaux dont nous faisons l'expérience chaque jour, tout le temps que nous sommes éveillés.
Il y a enfin dans ce texte cette idéalisation de la conscience, idéalisation qui surprend de la part d'un athée radical matérialiste et  corpusculaire. Associer la conscience au proton cela rappelle Teilhard de Chardin.
Aborder la conscience en étudiant l'acticité cérébrale est une démarche intéressante. Et j'espère que cette étude permettra d'aller toujours plus loin dans la compréhension de la conscience neuronale. Je regrette que dans ce texte la notion d'espace de travail global (et non pas mondial) ne soit pas rendue à César, c'est-à-dire à Dehaene. Cette démarche, celle de Dehaene, qui pour le coup est scientifique, permettra peut-être un jour de réveiller les patients qui sont plongés dans le coma.
Mais quelles que soient les avancées de la science dans le domaine de la conscience neuronale, il restera toujours cette question : que dire de la conscience phénoménale ? Cette question intéresse tout le monde car tout le monde vit, du matin au soir, dans des états et des actions mentaux. Dehaene donne le ton : la conscience phénoménale ne l'intéresse pas. Pourtant c'est justement cette conscience-là qui intéresse chacun d'entre nous, puisqu'elle constitue notre vie quotidienne.

aliochaverkiev
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 429
Date d'inscription : 24/06/2017

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Vanleers Dim 2 Juil 2023 - 11:53

Le problème mind-body a déjà été longuement abordé sur le forum et j’avais, à l’époque, signalé un opuscule de Patrick Dupouey Est-ce le cerveau qui pense ? (Pleins feux 2002) qui est la transcription d’une conférence prononcée le 18 Mars 2002.

Pour introduire le sujet, je citais l’expérience de pensée de Leibniz que l’auteur rapporte à la page 30 :

Patrick Dupouey a écrit: Voici celle [l’expérience de pensée] que Leibniz avait imaginée pour montrer « que la perception et ce qui en dépend est inexplicable par des raisons mécaniques, c’est-à-dire par les figures et par les mouvements » (Monadologie, 17).
Imaginons « une machine, dont la structure fasse penser, sentir, avoir la perception : on pourra la concevoir agrandie en conservant les mêmes proportions, en sorte qu’on puisse entrer, comme dans un moulin ». Cette machine, c’est évidemment le cerveau humain. Et en effet, être matérialiste, c’est affirmer que le cerveau est quelque chose comme une étonnante machine à penser. « Et cela posé, poursuit Leibniz, on ne trouvera, en la visitant au-dedans que des pièces qui se poussent les unes les autres, et jamais de quoi expliquer une perception ». Même si cette fiction repose sur une conception dépassée de la machine (« des pièces qui se poussent les unes les autres »), je crois que Leibniz a raison : même en me représentant une infinité de réactions chimiques, de décharges électriques se produisant dans des réseaux de connexions physiques, je ne vois pas sortir de là la moindre pensée.

Je passe sur toutes les citations au cours du débat pour me limiter à la dernière :

Patrick Dupouey a écrit: Si je devais absolument trancher, j’opterais pour une solution prudente, qui s’apparente à ce qu’on trouve chez Spinoza. Peut-être faut-il regarder esprit et cerveau comme deux aspects, deux faces d’une seule et unique réalité. On parle de parallélisme, ou de théorie « du double aspect ». Spinoza considère l’étendue (la matière, si l’on veut) et la pensée comme deux attributs d’une seule et unique substance, qu’il appelle indifféremment « la Nature » ou « Dieu » (bien que le spinozisme soit plutôt un athéisme). Spinoza est au moins rigoureux en ceci qu’il refuse la confusion des ordres (pensée/matière), et affirme seulement l’absolue coïncidence des deux séries causales : « L’ordre et la connexion des idées sont les mêmes que l’ordre et la connexion des choses » (Ethique II 7). Ces séries parallèles sont totalement indépendantes : aucune interaction n’est pensable, dans le spinozisme, d’un attribut à l’autre. […]
Pour certains, cette thèse dite du parallélisme psychophysique est tout ce dont nous disposons pour l’instant. On peut juger que c’est peu, mais après tout, ce parallélisme spinoziste ne s’accorde pas si mal aux données des neurosciences. Car il faut bien noter, sans entrer dans les subtilités de la métaphysique spinoziste, que la pensée et la matière que Spinoza conçoit comme parallèles ne sont aucunement deux substances (comme chez Descartes), mais deux attributs ; deux aspects, si l’on veut, ou deux points de vue sur une seule et même réalité. (pp. 47-48)

Vanleers
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 3986
Date d'inscription : 15/01/2017

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Dim 2 Juil 2023 - 14:08

Aliochaverkiev a écrit:Je regrette que dans ce texte la notion d'espace de travail global (et non pas mondial) ne soit pas rendue à César, c'est-à-dire à Dehaene.

Merci de me signaler l'erreur «global». En effet, il aurait fallu lire «mondial». J'ai corrigé.

...............................................................................................................................
merci de ne citer que ce à quoi tu réponds, j'ai corrigé

hks
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Dim 2 Juil 2023 - 16:20

.

À aliochaverkiev et Vanleers.

Merci de vos réponses. Elles sont intéressantes.

Mais merci surtout de ne pas avoir exprimé quelque avis sur le fait que la science et la philosophie pouvaient très bien s'entendre, contrairement à l'idée reçue qui court surtout dans le monde du volet idéaliste de la philosophie.

Vos réponses sont intéressantes, donc, je dirais néanmoins que pour comprendre entièrement le message prétexte à cette enfilade de messages je crois qu'il faudrait que vous vous glissiez un jour dans la peau d'un défenseur impénitent du volet radicalement matérialiste et athée de la philosophie.

Très cordialement, camarades !

.
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par hks Dim 2 Juil 2023 - 18:27

à Victor


David Chalmers j'ai lu "l'esprit conscient" il y a 10 ans,  mais rien d'autre depuis,
 je ne sais pas où il en est.


Chalmers dit un jour (dans une  conférence publique):

Si un zombi était constitué exactement des mêmes mollécules qu'un humain alors ce zombie serait conscient (je rapporte de mémoire mais je pourrais retrouver)
C'est un peu abrupt dit comme ça en public

Je dirais bien que: évidemment ...(je suis  d'accord avec Chalmer là dessus)
mais que ce zombi serait alors un humain

et on n'a pas avancé du tout.

_________________
"J'appelle "violence" ce qui excède les capacités d'intégration psychiques et  physiques.
La violence est ce rythme de perturbations non acceptables, du moins pas sans dommages potentiels."  

hks
hks
hks
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 12028
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 04/10/2007

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Dim 2 Juil 2023 - 18:59


Le zombi fait partie de la culture américaine comme le tour de France fait partie de la culture française.

Les Américains mettent du zombi partout.

Le zombi de Chalmer, comme tous les zombis des États-Unis, c'est un humain mort, qui bouge, certes, mais à l'état mort. Elle est là, la subtilité de Chalmer : un mort peut-il avoir une conscience s'il est constitué comme un vivant dans la moindre de ses particules élémentaires. Réponse, oui, bien sûr, mais à condition qu'il soit vivant. Mais alors ce n'est pas un zombi. Etc.

Et en effet on ne s'en sort pas.

.
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par aliochaverkiev Lun 3 Juil 2023 - 14:05

Saint-Ex a écrit:.

À aliochaverkiev et Vanleers.

Merci de vos réponses. Elles sont intéressantes.

Mais merci surtout de ne pas avoir exprimé quelque avis sur le fait que la science et la philosophie pouvaient très bien s'entendre, contrairement à l'idée reçue qui court surtout dans le monde du volet idéaliste de la philosophie.

Vos réponses sont intéressantes, donc, je dirais néanmoins que pour comprendre entièrement le message prétexte à cette enfilade de messages je crois qu'il faudrait que vous vous glissiez un jour dans la peau d'un défenseur impénitent du volet radicalement matérialiste et athée de la philosophie.

Très cordialement, camarades !

.

Tout le monde n’est pas obsédé par Dieu ni par le matérialisme. Votre génération a eu ses combats, mais le monde avance, et là où vous êtes encalminé, dans des combats propres au siècle dernier, moi je suis déjà au delà, dans des terres ou sur des flots où ni Dieu ni le matérialisme ne fondent la pensée.

aliochaverkiev
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 429
Date d'inscription : 24/06/2017

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Lun 3 Juil 2023 - 14:45

aliochaverkiev a écrit:Tout le monde n’est pas obsédé par Dieu ni par le matérialisme. Votre génération a eu ses combats, mais le monde avance, et là où vous êtes encalminé, dans des combats propres au siècle dernier, moi je suis déjà au delà, dans des terres ou sur des flots  où ni Dieu ni le matérialisme ne fondent la pensée.

Le vent est extrêmement calme sur les flots de ta volonté de psychanalyser ton interlocuteur.

Dis-moi, «monsieur le psychanalyste», si tu me permets ce gentil syntagme qualificatif, dis-mois si tu as vu une seule étude scientifique qui ne sois pas fondé sur le volet exclusivement matérialiste radical et athée de la philosophie.

Et si tu en trouves une, dis-moi dans quelle revues scientifique à comité de relecture par des pairs elle se trouve pour que je l'examine attentivement en vue de vérifier qu'elle se trouve bien dans un au-delà, dans des terres ou sur des flots où ni Dieu ne le matérialisme ne fonde la pensée.

aliochaverkiev a écrit:Il y a un sophisme dès le début dans ce texte.
" Comment un cerveau, un morceau de matière, génère-t-il des états de conscience subjectifs ?"
Cette question contient une affirmation que pourtant rien n'étaye.
Pourquoi dis-tu cela ?

Comment ne vois-tu pas que la science est sophiste, justement, et pas au sens insultant que ce terme a pris aujourd'hui mais au sens antique du terme, celui de Leucippe, Démocrite, Épicure et de leur atomisme philosophique repris par Lucrèce et tous les philosophes radicalement matérialistes et athées depuis 2500 ans jusqu'à la seconde-même du temps présent ?

La science s'interdit de refuser quelque proposition. Celle de savoir comment un cerveau, un morceau de matière, génère des états de conscience subjectifs, comme celle de savoir si la terre est plate, si l'homme n'a pas marché sur la lune et si l'homéopathie guérit grâce à des phénomènes quantiques ou nucléaires.

Привет, друг

.
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Vanleers Lun 3 Juil 2023 - 16:33

aliochaverkiev a écrit:

Tout le monde n’est pas obsédé par Dieu ni par le matérialisme. Votre génération a eu ses combats, mais le monde avance, et là où vous êtes encalminé, dans des combats propres au siècle dernier, moi je suis déjà au delà, dans des terres ou sur des flots  où ni Dieu ni le matérialisme ne fondent la pensée.

Rencontrer Dieu, c’est toucher les alizés.
Fini de ramer, il suffit de hisser la voile et de se laisser porter par le vent de Dieu.

Vanleers
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 3986
Date d'inscription : 15/01/2017

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Bergame Lun 3 Juil 2023 - 16:41

Se laisser porter, oui. C'est ce que d'aucuns appellent le "sacrifice de l'intellect". Mais on peut imaginer que cela rende heureux -puisque, pour certains esprits peu exigeants, le bonheur est dans l'ignorance. D'ailleurs le Christ lui-même ne l'a-t-il pas dit ? "Heureux les simples d'esprit !"

Mais je dois dire que ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi ne pas attendre simplement la mort, pour vivre comme un légume ? Surtout si l'on croit : De toutes façons, après la mort, on vivra pour l'éternité dans la contemplation hébétée des choses divines. Pourquoi donc être si pressé et ne pas davantage profiter des potentialités de cette existence, ici et maintenant ?
C'est posé de manière un peu ironique, sans doute, mais c'est une vraie question, pour moi. Je ne comprends pas (?)

_________________
...que vont charmant masques et bergamasques...
Bergame
Bergame
Persona
Persona

Nombre de messages : 5056
Date d'inscription : 03/09/2007

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Lun 3 Juil 2023 - 19:40

Vanleers a écrit:
aliochaverkiev a écrit:

Tout le monde n’est pas obsédé par Dieu ni par le matérialisme. Votre génération a eu ses combats, mais le monde avance, et là où vous êtes encalminé, dans des combats propres au siècle dernier, moi je suis déjà au delà, dans des terres ou sur des flots  où ni Dieu ni le matérialisme ne fondent la pensée.

Rencontrer Dieu, c’est toucher les alizés.
Fini de ramer, il suffit de hisser la voile et de se laisser porter par le vent de Dieu.

Je préfèrerai consulter la météo pour savoir d'où vient le vent et avec quelle force avant de décoller aux commandes de mon Cessna 152.

.
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Vanleers Mar 4 Juil 2023 - 11:03

Je reviens à une citation de Patrick Dupouey donnée dans un post précédent :

Patrick Dupouey a écrit: Car il faut bien noter, sans entrer dans les subtilités de la métaphysique spinoziste, que la pensée et la matière que Spinoza conçoit comme parallèles ne sont aucunement deux substances (comme chez Descartes), mais deux attributs ; deux aspects, si l’on veut, ou deux points de vue sur une seule et même réalité. (pp. 47-48)

Il faut entrer dans les subtilités de la métaphysique spinoziste pour bien en  comprendre le caractère révolutionnaire.

Spinoza définit l’attribut comme suit :

Spinoza a écrit:Par attribut, j’entends ce que l’intellect perçoit d’une substance comme constituant son essence

Pierre Macherey a écrit:Cette manière de considérer l’attribut comme forme constitutive de la substance telle que l’appréhende l’intellect est originale et appartient en propre à Spinoza : elle se distingue par le fait qu’elle retire à l’attribut le caractère général d’une qualité des choses, […] Ceci a pour conséquence que l’attribut tel que Spinoza le conçoit n’est pas une propriété ou un « propre » (proprium) attaché ou attribué à une substance,mais une détermination intrinsèque de l’être de cette substance tel qu’il peut être connu par l’intellect. (op. cit. p. 43)

Cette définition de l’attribut permet à Spinoza de concevoir une substance aux multiples attributs, ce qu’il explicite dans le scolie d’E I 10.

Pierre Macherey a écrit:On commence alors à comprendre pourquoi Spinoza a développé le concept de substance en expliquant son rapport à celui d’attribut, […] c’est précisément pour parvenir à comprendre ensemble unité et diversité, sans les confondre ni les séparer, au niveau de la réalité absolue de ce dont l’essence est absolument d’exister. (p. 93)

On comprend mieux alors la définition de Dieu : « substance consistant en une infinité d’attributs... »

Il s’agit, non pas d’une infinité numérique mais d’une infinité multitudinale pour reprendre le terme proposé par Jean-Michel Lespade dans Substance et infini chez Spinoza (Revue de métaphysique et de morale 1991/3)
L’auteur parle (pages 337 et suiv.) d’une signification autre que numérique, d’un infini extensif en multitude ou encore, se référant à Leibniz, d’« un infini catégorématique qui possède en acte des parties formellement innombrables ».
On peut lire cet article en :

http://www.jstor.org/stable/40903183?seq=22#page_scan_tab_contents



Expliquant l’infinité multitudinale d’attributs infinis,

Jean-Michel Lespade a écrit: Cette multitude ne relève plus de l’infini imaginatif et successif, propre à l’arithmétique, mais se conçoit tota simul dans sa perfection. D’ailleurs, qu’il ne s’agisse pas dans un tel procès d’une série numérique indéfinie, cela se conçoit sur le fondement de l’hétérogénéité des attributs : la quantité numérique implique au contraire l’homogénéité de ce qui est nombré comme le rappelle Leibniz autant que Spinoza. […] Transcendant à toute énumération qui voudrait le ramener à un procès imaginatif inachevable, cet infini actuel d’attributs substantiels et hétérogènes, conçu par l’entendement, relève d’une intelligence ontologique de la quantité, échappant aux apories de l’imagination et de l’arithmétique. La raison en est simple : chaque attribut constitue une essence simple et unique qui ne se rencontre qu’à un seul exemplaire ; or, comme le dit Spinoza dans la lettre 50 à Jarig Jelles, le nombre ne concerne que l’existence et non l’essence, c’est-à-dire la reproduction existentielle d’une essence exemplaire. Ici, tout au contraire, l’infini de multitude ne s’applique qu’aux essences des attributs, innombrables, hétérogènes et incomparables, dont l’unicité (transcendantale et non prédicable) d’existence est incluse pour chacun dans son essence. (pp. 338-339)

Dans la lettre 50 :

Spinoza a écrit: Qui tient en main par exemple un sou et un écu, ne pense pas au nombre deux s’il ne range le sou et l’écu sous une même dénomination, celle de pièce de monnaie. Alors seulement il pourra dire qu’il a deux pièces de monnaie, l’écu et le sou étant tous deux dénotés par ce terme.

Ce qui est possible pour les sous et les écus ne l’est pas pour les attributs, essentiellement hétérogènes.

Dans un passage qui précède immédiatement celui cité ci-dessus :

Jean-Michel Lespade a écrit: L’infinité des attributs est un réquisit pour la construction de l’essence de Dieu. Il se formule sous la forme d’un axiome posant la relation nécessaire de la quantité d’être à la quantité d’attributs : « A proportion de la réalité ou de l’être que possède chaque chose, un plus grand nombre d’attributs lui appartiennent » (Ethique I 9) et Spinoza d’ajouter : « Il s’en faut de beaucoup qu’il y ait absurdité à rapporter plusieurs attributs à une même substance ; il n’est rien, au contraire, de plus clair que ceci » (Ethique I 10 scolie). « S’il y a quelque chose d’évident pour nous c’est que tout être est conçu par nous sous quelque attribut, et plus un être a de réalité ou d’être, plus il faut lui reconnaître d’attributs » (lette 9 à Simon de Vries).
Il peut paraître étonnant que Spinoza parle d’un « nombre d’attributs » quand on sait qu’il tient le nombre pour un simple auxiliaire de l’imagination, incapable d’entrer dans une connaissance adéquate. En réalité, en ce cas le terme ne doit pas être pris en son sens habituel. L’axiome évoqué par Spinoza, s’il est une règle de construction de l’essence divine, est seulement une règle subjective qui n’implique en rien un passage laborieux du fini à l’infini, semblable à celui que tente illusoirement l’imagination avec les nombres. Spinoza s’en explique auprès de son correspondant Schuller (lettre 64) : « L’axiome invoqué dans le scolie de la proposition 10 de la partie I, ainsi que je l’ai indiqué à la fin de ce scolie, a son origine dans l’idée que nous avons d’un Être absolument infini et non dans celle d’êtres ayant trois, quatre attributs ou davantage ». L’axiome n’est donc fondateur qu’en tant qu’il est lui-même fondé : c’est l’idée de Dieu, donnée a priori, qui impose l’exigence de l’infinité des attributs. Sa perfection ou son infinité absolue implique une proportion d’être qui soit elle-même absolue, une quantité d’être maximale, c’est-à-dire une infinité multitudinale d’attributs infinis.

En résumé de ce long post, on voit qu’une définition originale de l’attribut chez Spinoza résout, très simplement, le mind-body problem.

Vanleers
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 3986
Date d'inscription : 15/01/2017

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Saint-Ex Mar 4 Juil 2023 - 11:50

Vanleers a écrit:on voit qu’une définition originale de l’attribut chez Spinoza résout, très simplement, le mind-body problem.

Il faudra que tu en parles à David Chalmers et à Christof Koch ...

.
Saint-Ex
Saint-Ex
Digressi(f/ve)
Digressi(f/ve)

Nombre de messages : 1707
Date d'inscription : 01/07/2023

Revenir en haut Aller en bas

conscience - Un pari de 25 ans sur la conscience. Empty Re: Un pari de 25 ans sur la conscience.

Message par Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum