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Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ?

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Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? Empty Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ?

Message par Crosswind Mer 3 Jan 2018 - 14:18

Je souhaite, puisque un spécialiste de la question agite ses nageoires dans le coin ;-), poser à nouveau cette discussion que, à l'époque, j'avais initiée sur Fdp. Euterpe étant ce qu'il est, l'affaire a tourné en eau de boudin et j'en fus pour mes frais. Pourtant, l'argumentation d'Euterpe ne me satisfait pas du tout. Il m'a donné l'impression du sophiste voulant à tout prix donner raison à son parti. Donc j'en reste sur l'idée que le système spinozien est bel et bien une forme de monisme. Ci-dessous la retranscription des principaux échanges.

Vanleers, qu'en pensez-vous ?


Crosswind a écrit:
Le monisme neutre de Spinoza me semble déplacer les problèmes plus qu'apporter une solution aux questions métaphysiques. Sa thèse d'une substance une et unique d'où tout proviendrait, esprit comme matière me semble peu convaincante. [...] Un monisme qui ne prend pas le parti d'associer la matière ou l'esprit à la source métaphysique. La substance originelle de Spinoza est une substance « neutre » : ni matière, ni esprit.

Euterpe a écrit:
D'abord, la substance de Spinoza est de toute éternité, on ne peut donc parler d'une substance "originelle". Ensuite, esprit et matière (l'étendue) sont des attributs de la substance (Éthique, première partie, au moins jusqu'à la proposition XXIII). Un exemple avec la proposition suivante :


[quote:"Spinoza, Éthique I"]
Proposition XVI

De la nécessité de la nature divine doivent suivre une infinité de choses en une infinité de modes (c'est-à-dire tout ce qui peut tomber sous un entendement infini).

DÉMONSTRATION

[...] les propriétés sont d'autant plus nombreuses que la définition de la chose exprime plus de réalité, c'est-à-dire d'autant plus que l'essence de la chose définie enveloppe plus de réalité. Or, comme la nature divine a une infinité absolue d'attributs (...), dont chacun exprime une essence infinie en son genre, de sa nécessité doit donc suivre nécessairement une infinité de choses en une infinité de modes (...).

Crosswind a écrit:
Certes, lorsque j'use du terme "originel" il faut le prendre comme "substrat". Le monisme neutre consiste, selon Bitbol "à poser une entité, domaine ou substance unique, une sorte d'"entre-deux" ni matériel ni mental, dont les phénomènes matériels et l'expérience consciente seraient deux "aspects", deux "attributs", ou deux "facettes" [...] Si Spinoza peut être qualifié de "moniste", c'est parce qu'il affirme l'unicité de Dieu en tant que substance infinie, laquelle n'a aucune raison d'être qualifiée de matérielle par elle-même. La matière n'en est que l'un des aspects, puisqu'elle relève de l'attribut "étendue" de cette substance unique et divine ; quant à l'esprit conscient et pensant, il relève d'un second attribut à la fois distinct du premier et coextensif à lui dans la substance unique".

Euterpe a écrit:
Trois remarques :
D'abord, à propos du monisme neutre :
Crosswind a écrit:
Le monisme neutre consiste, selon Bitbol "à poser une entité, domaine ou substance unique, une sorte d'"entre-deux" ni matériel ni mental

Cela ne s'applique donc pas à la substance de Spinoza. On peut prendre une autre des propositions de la première partie de l'Éthique, par exemple la neuvième :
Spinoza a écrit:
Plus une chose possède de réalité ou d'être, plus d'attributs lui appartiennent.
Ou encore la onzième :
Spinoza a écrit:
Dieu, autrement dit une substance constituée par une infinité d'attributs [...].
Les attributs de la substance sont bien des propriétés de la substance. Ce que Spinoza disait déjà dans ses Pensées métaphysiques, I, 3 :
Spinoza a écrit:
CE QU'IL FAUT ENTENDRE PAR AFFECTIONS. - Après cette explication de la nature de l'être, en tant qu'être, nous passons à celle de quelques affections de l'être, où il est à noter que nous entendons ici par affections ce que Descartes appelle attributs (dans la partie I des Principes, article 52). Car l'Être, en tant qu'être, ne nous affecte pas par lui-même, comme substance ; il faut donc l'expliquer par quelque attribut dont il ne diffère que par une distinction de Raison [...].

DÉFINITION DES AFFECTIONS. - [...] les affections de l'Être sont certains attributs sous lesquels nous connaissons l'essence ou l'existence de chaque être, et dont cependant il ne se distingue que par une distinction de raison. [...].
Ce qu'il dira également dans sa lettre à Simon de Vries (février 1663) :
Spinoza a écrit:
Par substance, j'entends ce qui est en soi et est conçu par soi ; c'est-à-dire ce dont le concept n'implique pas le concept d'une autre chose. C'est la même chose que j'entends pas attribut, à cela près que ce terme s'emploie du point de vue (respectu) de l'entendement qui attribue à la substance telle nature déterminée

Ensuite, à propos de l'affirmation ci-dessous, qui présente une incohérence :

@Crosswind a écrit:
dont les phénomènes matériels et l'expérience consciente seraient deux "aspects", deux "attributs", ou deux "facettes" [...]

Tels qu'ils sont énumérés, ces termes sont tenus pour synonymes ou interchangeables. Or, pour chacun des qualificatifs choisis, on ne dit pas la même chose. Des attributs, par définition, désignent des propriétés de la chose à laquelle on les attribue. Ce n'est pas nécessairement le cas avec des" aspects" ou des "facettes" d'une chose.

Enfin, on ne peut pas dire, tout à la fois, que la substance n'est "ni matérielle, ni mentale", mais que la matière et l'esprit en seraient des "aspects, attributs, ou facettes". Cela revient dans le même temps à attribuer et à ne pas attribuer une propriété à quelque chose.


Pour terminer, parler de monisme à propos de Spinoza pose plus de problèmes que ça n'en résout, compte tenu des définitions de l'Éthique. Spinoza conçoit une substance infinie, or une conception moniste n'est pas nécessairement la conception d'une substance infinie (donc sans limite assignable). De plus, d'après la proposition XIII (Éthique, I), "La substance absolument infinie est indivisible." Or, l'indivisibilité n'est pas non plus nécessairement le fait d'une conception moniste de la substance. Tout cela contribue à faire de l'expression de "monisme neutre", à propos de Spinoza, une expression d'une certaine manière anachronique, quoique Russell s'y réfère. Russell tient la matière et l'esprit pour des constructions plutôt que comme des données. Son monisme neutre s'inscrit dans sa théorie causale de la perception. Chez Spinoza, tout repose sur les définitions données plus haut.

Crosswind a écrit:
Je reste perplexe. D'un côté se trouvent des auteurs que l'on ne peut taxer d'amateurisme et dont la pensée me semble limpide quant à l'analyse des théories de Spinoza, de l'autre je vous lis, Euterpe, et avoue ne pas trouver convaincant l'argumentaire avancé pour appuyer votre critique d'une catégorisation moniste de la métaphysique spinozienne (du moins en l'état). L'erreur est humaine, je n'en doute pas un seul instant, et même un philosophe du calibre de Hegel a pu se tromper. De même qu'un professeur universitaire en philosophie, spécialiste en ces matières, n'est en rien à l'abri d'un couac ou d'un péché par omission. Je n'ose bien sûr pas parler de moi ! Mais après l'avoir dit, faut-il tout de même tenter de comprendre les vues d'autrui, la vôtre en l'occurrence, lorsque sa propre évidence, la mienne donc, est battue en brèche, et ce malgré des références que l'on peut "raisonnablement" considérer fiables.

Je démarre avec cette simple définition du CNRTL, quant au monisme :
CNRTL a écrit:
"Tout système philosophique qui considère l'ensemble des choses comme réductible à l'unité: soit au point de vue de leur substance, soit au point de vue des lois (ou logiques, ou physiques), par lesquelles elles sont régies, soit enfin au point de vue moral".

L'enjeu est extrêmement clair : pour qualifier la thèse de Spinoza de moniste, il faut démontrer, à tout le moins montrer, l'existence en elle d'une unité telle que la définition du CNRTL la définit. Voici, à nouveau, l'extrait et la définition, complète cette fois, de Bitbol :


Michel Bitbol ; La conscience a-t-elle une origine, p.284 a écrit:
Le monisme neutre consiste à poser une entité, domaine ou substance unique, une sorte d'"entre-deux" ni matériel ni mental, dont les phénomènes matériels et l'expérience consciente seraient deux "aspects", deux "attributs", ou deux "facettes" [...] Si Spinoza peut être qualifié de "moniste", c'est parce qu'il affirme l'unicité de Dieu en tant que substance infinie, laquelle n'a aucune raison d'être qualifiée de matérielle par elle-même. La matière n'en est que l'un des aspects, puisqu'elle relève de l'attribut "étendue" de cette substance unique et divine ; quant à l'esprit conscient et pensant, il relève d'un second attribut à la fois distinct du premier et coextensif à lui dans la substance unique"(5). Même si "l'objet de l'idée constituant l'esprit humain est le corps"(6), il n'en reste pas moins que "ni le corps ne peut déterminer l'esprit à penser, ni l'esprit ne peut déterminer le corps au mouvement" (7), puisque esprit et corps ne dépendent l'un et l'autre que d'un Dieu non personnel sous ses attributs respectifs de pensée et d'étendue.


(5) B. Spinoza, Éthique, II, PUF, 1993, p.103
(6) B. Spinoza, Éthique, II, op. cit. p. 113
(7) B. Spinoza, Éthique, III, op. cit. p.158
Vous commencez par réfuter l'idée selon laquelle la substance "une et indivisible" ne peut être qualifiée de matérielle (entre autre infinité) car, dites-vous en citant l'auteur, "Les attributs de la substance sont bien des propriétés de la substance". Dès ce stade, je dois reconnaître ne pas être en accord avec vous. S'il apparaît clairement que l'attribut "étendue" est "en" la substance, il est tout autant noté qu'elle ne l'est pas au sens d'une inclusion spatiale, étant précisé que l'attribut "étendue" ne peut en aucun cas être imaginé comme la somme de tous les corps étendus, cet attribut "étendue" étant indivisible et infini. En conséquence, l'attribut "étendue" ne peut pas être assimilable à de la matière, cette dernière ayant justement pour particularité d'être divisible, finie et massive (la particularité "masse" pouvant être discutée), c-à-d tout le contraire de l'attribut étendue. Vous me rétorquerez qu'il existe un lien et que cette matière divisée fait intégralement partie de la substance. Oui, mais pour un entendement, pas en tant que telle. Sans entendement, sans un point de vue pour lequel une division s'opère, la substance reste une et indivise et ne peut donc être prise pour de la matière. La matière n'a de sens que pour un point de vue qui sépare, qui oppose. Il est donc correct, ainsi que le fait Michel Bitbol, d'affirmer que la substance "une et indivisible" n'est pas matérielle. Il mentionne d'ailleurs clairement : "[...] la matière n'en est que l'un des aspects [un mode], puisqu'elle relève de l'attribut "étendue" de cette substance unique et divine". Si la matière relève de l'attribut étendue, elle ne peut lui être assimilée. Très justement ensuite, il remarque que l'esprit conscient et pensant est à la fois distinct de l'attribut étendue (puisqu'il fait partie de l'infinité d'autres attributs de la substance) mais lui est également coextensif puisque tout aussi infini et indivisible "en" la substance.

www.spinoza.fr a écrit:

(a) - L'étendue elle-même comme substance/attribut est indivisible (en tant qu'infinie, nécessaire, etc.) ; L'attribut étendue n'est pas la somme de tous les corps étendus ;

(b) - L'étendue comme modes, l'étendue "modifiée", les modifications de l'étendue sont divisibles : non pas cependant une division réelle mais seulement modale.

(c) - Toute substance (et la substance infiniment infinie) est indivisible, non composé de parties : les attributs ne sont pas des parties de la substance (=tout), ne sont pas les éléments composant un ensemble.

(d) - Cela signifie aussi que l'attribut se conçoit par soi et en soi - comme une substance, à la différence des modes - mais n'est pas en soi - à la différence d'une substance. L'attribut est "en" la substance - mais pas au sens d'une inclusion spatiale -, est "de" la substance.


La substance une et indivisible de Spinoza ne peut donc bel et bien pas être prise pour une quelconque substance matérielle, et par isomorphisme pour une substance mentale. La nature moniste de la thèse de Spinoza reste donc plus que plausible. En elle-même, la substance "une" n'est rien d'autre qu'une potentialité infinie supposée qui, sans l'entendement pour en percevoir l'un ou l'autre attribut et lui donner vie, n'est en fin de compte pas grand-chose d'autre qu'une expression déiste du mystère de l'existence. Et même si chez Spinoza Dieu n'est pas un Être qui crée quelque chose d'extérieur à Lui, il n'en reste pas moins que le plan pratiquement immanent qu'il propose n'explique en rien le dualisme toujours affirmé. Pour finir, on le verra succinctement un plus bas, on en revient au point de départ : on ne peut prouver que ce soit l'"entendement" qui crée l'idée de Dieu, ou l'inverse.

Or donc, voici les "faiblesses" du système de Spinoza, faiblesses articulées autour de ce fameux intellect, vues par Hegel et commentées par Bibol. Pour ce faire je vais d'abord insérer cet extrait-ci :

Michel Bitbol ; La conscience a-t-elle une origine, p.294 a écrit:

Aux yeux de Hegel, la première déficience du système de Spinoza est son option consistant à solidifier le domaine central en une "substance", support permanent de tout ce qui peut arriver. "La substance absolue est le vrai, écrit Hegel, mais elle n'est pas encore le vrai en son entier ; il faut aussi qu'elle soit pensée comme active en soi, comme vivante (1)." Or, poursuit-il, le seul moyen de la mobiliser est de cesser de le viser comme une sorte de grande "chose" sphérique et parménidienne, et de la reconfigurer comme un processus "spirituel" en développement (2). Une deuxième déficience résulte presque inévitablement de ce modèle statique. Si tout ce qui est se ramène à l'unique substance, si le domaine de la pensée et le domaine des corps étendus sont en vérité une seule et même chose, comment rendre raison de leur différenciation ? Spinoza les considère comme deux attributs de la substance une. Et les attributs, à leur tour, sont définis comme autant de formes que l'entendement est capable d'isoler et de saisir dans l'essence pérenne de cette substance. Mais, accuse Hegel, Spinoza ne décrit nullement le procédé de cette saisie, et il le maintient donc dans une obscurité aussi grande que celle de la communication dualiste des choses pensantes et étendue. Pire, on a parfois l'impression que la définition proposée par Spinoza est circulaire : qu'est ce que cet entendement qui assure la capture des formes d'attributs ? Ne relève-t-il pas de l'un des deux attributs qu'est la pensée, à ceci près que lui se voit attribuer un rôle actif pendant que les attributs qu'il distingue restent figés ? On ne s'étonne pas dans ces conditions qu'aucune précision ne puisse être fournie sur l'origine de l'entendement formateur et dualisant, ni sur son mode d'intervention (4). Là où un monisme substantiel prévaut, le reliquat de dualité qui continue à être postulé reste un mystère.

(1) G.F.W. Hegel, Lecons sur l'histoire de la philosophie. Tome VI - La philosophie moderne, op. cit., p. 1456
(2) G.F.W. Hegel, Lecons sur l'histoire de la philosophie. Tome VI - La philosophie moderne, op. cit., p. 1497-1498
(3) G.F.W. Hegel, Lecons sur l'histoire de la philosophie. Tome VI - La philosophie moderne, op. cit., p. 1468
(4) G.F.W. Hegel, Lecons sur l'histoire de la philosophie. Tome VI - La philosophie moderne, op. cit., p. 1471

Hegel voit juste (j'ai pu dénicher l'ouvrage en bibliothèque, mais la file était telle que je n'en ai fait aucune copie/emprunt). Cette substance une et indivisible qui se suffit à elle-même agit, doit être "vivante" ne fût ce que pour, précisément, justifier la différenciation, la dualité propre aux perceptions de notre entendement. Si cette substance n'est pas volonté, n'est pas pensante, qu'est-elle et pour quelles raisons ne donner à l'entendement que deux attributs perceptibles ? Est-il acceptable de se contenter d'une réponse fataliste à cette question ? Parce que "c'est comme ça", parce que Dieu est ainsi fait ? La circularité évoquée est éloquente. L'entendement, dont on ne sait pas grand-chose, relèverait de l'un des deux attributs qui lui sont accessibles, l'attribut "pensée" disposant de fait, on ne sait comment, de la capacité d'un rôle "actif" et même nécessaire (sans quoi toute la théorie s'effondre). Ainsi, de deux choses l'une : soit l'entendement est extérieur à la substance une, soit il lui est interne. L'extériorité étant exclue dans le système spinozien, reste l'intériorité. Mais cela pose les problème que Hegel et Bitbol relèvent à juste titre...

Tout cela étant bien entendu sujet à débat...

Me fut répondu :

Euterpe a écrit:

CNRTL a écrit:
"Tout système philosophique qui considère l'ensemble des choses comme réductible à l'unité: soit au point de vue de leur substance, soit au point de vue des lois (ou logiques, ou physiques), par lesquelles elles sont régies, soit enfin au point de vue moral".

Je me suis contenté de dire que le choix du terme, en soi, présente plus d'inconvénients que d'avantages - compte tenu de la diversité infinie de la substance spinozienne ; et parce que le choix de ce qualificatif expose le spinozisme à une réduction (l'opposition au dualisme, à sa lecture de Descartes, pour faire bref).

Crosswind a écrit:
l'attribut "étendue" est "en" la substance, il est tout autant noté qu'elle ne l'est pas au sens d'une inclusion spatiale, étant précisé que l'attribut "étendue" ne peut en aucun cas être imaginé comme la somme de tous les corps étendus, cet attribut "étendue" étant indivisible et infini. En conséquence, l'attribut "étendue" ne peut pas être assimilable à de la matière, cette dernière ayant justement pour particularité d'être divisible, finie et massive (la particularité "masse" pouvant être discutée), c-à-d tout le contraire de l'attribut étendue.

Je ne vous parle pas d'une "assimilation". La question est ailleurs, elle est dans l'immanence. Du point de vue de l'entendement, contrairement à ce que vous dites, l'étendue est un attribut indivisible. Mais du point de vue de l'expérience (des sens), nous la vivons, nous l'expérimentons comme divisible. (Cf. lettres X et XII, p. 1090-1091 ; 1096-1102 dans l'éd. de la Pléiade).

Crosswind a écrit:
En elle-même, la substance "une" n'est rien d'autre qu'une potentialité infinie supposée qui, sans l'entendement pour en percevoir l'un ou l'autre attribut et lui donner vie, n'est en fin de compte pas grand-chose d'autre qu'une expression déiste du mystère de l'existence.
Il n'y a pas de potentialité chez Spinoza. Par définition, la substance spinozienne, réalisée de toute éternité, est toujours actuelle (tout y est inscrit en son essence).
[/quote]
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Message par hks Mer 3 Jan 2018 - 16:26

excuse-moi mais la question de monisme ou pas est-elle capitale ?
....................................

puisqu'il est parlé de distinction de raison  voyons les textes (pensées métaphysiques )

NB: les pensées métaphysiques sont antérieures à L' Ethiques et  souvent mal considérées par les commentateurs mais bref ...

http://spinozaetnous.org/wiki/Pens%C3%A9es_m%C3%A9taphysiques/Deuxi%C3%A8me_partie/chapitre_V

Le texte n'est pas facile . Il y est expliqué ce que Spinoza entend par distinctions réelle, modale et de raison .

De ces trois sortes de distinction provient toute combinaison....... La troisième enfin ne se forme pas, mais est seulement conçue par la Raison comme se formant pour faire mieux entendre une chose. Les choses qui ne sont point composées de l’une des deux premières façons doivent être dites simples.


Comme il ne se peut rien dire de plus absurde, nous concluons que Dieu n’est pas composé d’un assemblage et d’une union de substances. Qu’il n’y ait pas en Dieu de combinaison de divers modes, cela s’impose par cela seul qu’il n’y a pas en Dieu de modes : car les modes naissent d’une altération de la substance (voir Principes, partie I, Art. 56). Enfin, si l’on veut forger une autre combinaison formée de l’essence des choses et de leur existence, nous n’y contredisons nullement. Mais que l’on se rappelle que, nous l’avons suffisamment démontré, ces deux choses ne se distinguent pas en Dieu.

Et de là nous pouvons conclure que toutes les distinctions que nous faisons entre les attributs de Dieu ne sont que de Raison et qu’ils ne se distinguent pas réellement entre eux. Entendez des distinctions de Raison comme celles que j’ai citées un peu plus haut et qui se reconnaissent à ce que telle substance ne peut être sans tel attribut. D’où nous concluons que Dieu est un être parfaitement simple. Nous n’avons cure d’ailleurs du fatras des distinctions des Péripatéticiens ; passons donc à la vie de Dieu.


ce qui serait sans appel
sauf que le passage souligné n'est pas clair  et que l'ajout d' un mot l'aurait éclairci (à savoir conçue)
d 'où
Entendez des distinctions de Raison comme celles que j’ai citées un peu plus haut et qui se reconnaissent à ce que telle substance ne peut être (conçue) sans tel attribut

ce qui est bien alors de raison (=conçue par la Raison) comme se formant pour faire mieux entendre une chose.
.........................


NB
dans le texte ci dessus on peut remarquer un passage  qui peut étonner
Qu’il n’y ait pas en Dieu de combinaison de divers modes, cela s’impose par cela seul qu’il n’y a pas en Dieu de modes :
ouff ça en décoiffe certains .
ALORS ?
réponse personnelle
il semble que toute la division (divisibilité y compris) soit  à la charge de l'esprit humain lequel bien évidemment et puisqu'il est en Dieu, est Dieu au sens de simple (indivisible)
La manifestation de Dieu  introduit l 'image  et la scission  entre l'image qui n'est pas "être" et  Dieu qui est .
la manifestation n'a pas l 'être  elle est si l'on veut la pensée de Dieu
sans la manifestation  (pour Spinoza)  Dieu ne pense pas ...or Dieu pense ( pour Spinoza Dieu pense )
Proposition 1 partie 2
La pensée est un attribut de Dieu ; en d'autres termes, Dieu est chose pensante.
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Message par hks Mer 3 Jan 2018 - 16:34

PS
Aux yeux de Hegel, la première déficience du système de Spinoza est son option consistant à solidifier le domaine central en une "substance", support permanent de tout ce qui peut arriver. "La substance absolue est le vrai, écrit Hegel, mais elle n'est pas encore le vrai en son entier
Sur Hegel On peut ironiser que Dieu attend que Hegel vienne.
Spinoza est éternaliste...mais pas Hegel .
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Message par Crosswind Mer 3 Jan 2018 - 16:44

hks a écrit:
Sur Hegel On peut ironiser que  Dieu attend que Hegel vienne.
Spinoza est éternaliste...mais pas Hegel .

Eh, Oui. Spinoza est un metaphysicien que je classifie dans ma propre nomenclature comme "soft". Mais j'abonde dans le sens de Hegel... La substance spinozienne n'est pas le vrai.
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Message par hks Mer 3 Jan 2018 - 17:29

La substance spinozienne n'est pas le vrai.
allons allons  Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? 2101236583 ... il n' y a que le vrai qui soit le vrai.

Il ne faut pas le prendre comme ça. Pas aussi abruptement .
Hegel veut que ça se développe pour devenir le Vrai .
Admettons. Il y a un développement infini, pourquoi pas ? Qui me semble au vu de son infinité faire du surplace  ...mais bref ... le "sur place" que s'attribue Hegel lui semble une place temporelle suréminente .

  Spinoza pense que c' est tout développé de toute éternité,  que "développement" çà n'a pas de sens. Je ne dis pas que Spinoza a tout élucidé non plus .
Fichte qu'on connait moins bien que Hegel  est beaucoup plus prudent sur Spinoza et beaucoup plus proche de Spinoza que Hegel ne l'est.

Fichte comme Spinoza ont une dimension vitaliste  (c 'est  l'acte ) qui n' a rien a envier à la dialectique de Hegel ... Hegel à qui on irait bientôt attribuer la découverte  du mouvement des choses.(voir l'emploi qu'en firent les marxistes)

La substance de Spinoza n'est pas statique mais de fond en comble dynamique .
Enfin quoi si Dieu pense il pense ( actes de penser ) Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? 2101236583
(et je dirais: il bouge )

(me reprocher de réduire un peu trop le Dieu de Spinoza à la pensée,
c'est une critique que j' accepte
je ne suis pas un spinoziste orthodoxe)
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Message par Vanleers Mer 3 Jan 2018 - 20:43

A Crosswind

Je vais lire votre post pour essayer de vous répondre.
En attendant, vous pourriez regarder l’article de Pierre Macherey Spinoza est-il moniste ?
Ce sera la troisième fois que je le signale sur le forum. Il est en :

http://spinozaetnous.org/wiki/Spinoza_est-il_moniste_%3F_par_Pierre_Macherey

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Message par Crosswind Mer 3 Jan 2018 - 22:20

Vanleers a écrit:A Crosswind

Je vais lire votre post pour essayer de vous répondre.
En attendant, vous pourriez regarder l’article de Pierre Macherey Spinoza est-il moniste ?
Ce sera la troisième fois que je le signale sur le forum. Il est en :

http://spinozaetnous.org/wiki/Spinoza_est-il_moniste_%3F_par_Pierre_Macherey

J'avoue très humblement ne pas comprendre grand-chose à son texte (par manque certain de compétence de ma part). Mais cela m'intéresserait que nous nous y attelions ensemble, histoire de démêler l'écheveau de mots qui sont, vraiment, pour moi des plus obscurs.

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Message par Vanleers Jeu 4 Jan 2018 - 15:33

Il est facile de suivre le raisonnement de Pierre Macherey dans la deuxième partie de son article qui traite explicitement de Spinoza.

1) La question du monisme prend, selon Spinoza, la forme d’une interrogation : « sur “ce qu’est l’unité” (quid sit unitas), dont, se plaçant d’emblée dans la tradition nominaliste, il fait une simple désignation abstraite qui, en elle-même, ne correspond à aucune réalité ».

2) L’unité, « à l’exclusion de tout autre, a le sens de l’unicité ».

3) L’unicité de Dieu « est, comme l’éternité ou la liberté, l’un de ses propres et non le déterminant de sa substance ».
Notons au passage que les attributs ne sont pas des propres (des propriétés) de Dieu.

4) De toute façon, on ne peut qu’attribuer de façon impropre l’unicité à Dieu car « représenter une chose comme une ou unique, c’est la comparer idéalement à une autre chose, ou à une infinité d’autres choses, dont l’existence, posée comme possible, est simultanément niée »
Or, « Dieu n’est pas une chose comme les autres. Dieu est la chose absolue dont l’essence est d’exister ».

5) La conclusion s’impose : « on ferait aussi bien de ranger dans le placard aux accessoires, pour l’y oublier », le “monisme” attribué à Spinoza.

P. Macherey explicite la question dans son commentaire du corollaire 1 d’Ethique I 14 :

Pierre Macherey a écrit: Il faut donc bien voir que le fait que Dieu soit unique, qui équivaut à celui que la substance est une, ne renvoie à aucune connotation d’ordre numérique : car celle-ci, replaçant cette unité dans le contexte d’une série, lui ôterait son caractère absolu. Dieu, pas davantage que la substance à laquelle il s’identifie totalement, n’existe qu’à un seul exemplaire, donc à la manière d’un individu qui constituerait à lui seul la totalité de la série à laquelle il appartient : Dieu, dans la mesure précisément où il est substance, n’est pas « un » individu, ou « un » être qui serait seul et unique de sa sorte ; son unicité, qui le qualifie en propre, n’est pas du tout une détermination numérique ; « un », dans ce cas, n’est pas un nombre, celui-ci fût-il le premier de tous les nombres.

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Message par Crosswind Jeu 4 Jan 2018 - 17:14

Je pense que le principal problème de cette argumentation provient de ce que, parallèlement au déni du qualificatif d'unique envers Dieu, il est conservé un langage attributif lorsqu'on en parle. "Dieu est la chose absolue dont l'essence est d'exister". Prise comme telle, cette phrase attribue 4 termes à Dieu. Dieu est une chose, une chose absolue, qui jouit d'une essence, l'existence. Tout ici pointe vers une substance totalisante. Il est évident que Dieu ne peut s'opposer à quoi que ce soit en théorie, puisque il revendique l'Ensemble. Mais est-il alors permis de parler de Dieu sans contradiction ? En effet, tout mot du langage pointe vers quelque chose, or Dieu n'est pas quelque chose (il le serait qu'il serait alors possible de l'opposer à autre chose). Mais si Dieu n'est pas quelque chose, comment alors lui attribuer une caractéristique ? Et si Dieu est dit être l'ensemble des choses, connues et au-delà, comment justifier l'interdit visant à refuser à l'ensemble des choses d'en être une (a fortiori si l'on en... parle !). Comment fonder une ontologie, c'est-à-dire poser un être, qui ne serait pas une chose ?

Et quand bien même serait acceptée l'idée, il n'en reste pas moins que l'ontologie spinozienne pose un principe moteur de l'existence, et c'est ce principe moteur qui est visé par l'attribution du qualificatif de monisme.

Pour l'instant, je ne peux souscrire à l'argumentation de Pierre Macherey. Mais je m'y attelle à nouveau, car il y a certainement une explication Wink
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Message par hks Jeu 4 Jan 2018 - 19:35

.
crosswind a écrit: Comment fonder une ontologie, c'est-à-dire poser un être, qui ne serait pas une chose ?
Spinoza ne veut pas fonder d' ontologie.
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Message par Crosswind Jeu 4 Jan 2018 - 20:51

hks a écrit:.
crosswind a écrit: Comment fonder une ontologie, c'est-à-dire poser un être, qui ne serait pas une chose ?
Spinoza ne veut pas fonder d' ontologie.

J'ai l'impression que sur le sujet, nous faisons face à une équivoque. Il parle tout de même bien d'un Dieu... [Edition : ] d'une Substance ?
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Message par Vanleers Ven 5 Jan 2018 - 11:50

A Crosswind

N’oubliez pas que l’Ethique est, avant tout, une sotériologie, une doctrine du salut.
Posez-vous alors la question : « Ai-je besoin d’être sauvé ? »
Si la réponse est non, c’est que vous avez compris que vous l’étiez déjà, sauvé.
Si la réponse est oui, la lecture de l’Ethique vous en fera prendre conscience.

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Message par Vanleers Ven 5 Jan 2018 - 12:15

Crosswind a écrit:Je pense que le principal problème de cette argumentation provient de ce que, parallèlement au déni du qualificatif d'unique envers Dieu, il est conservé un langage attributif lorsqu'on en parle. "Dieu est la chose absolue dont l'essence est d'exister". Prise comme telle, cette phrase attribue 4 termes à Dieu. Dieu est une chose, une chose absolue, qui jouit d'une essence, l'existence. Tout ici pointe vers une substance totalisante. Il est évident que Dieu ne peut s'opposer à quoi que ce soit en théorie, puisque il revendique l'Ensemble. Mais est-il alors permis de parler de Dieu sans contradiction ? En effet, tout mot du langage pointe vers quelque chose, or Dieu n'est pas quelque chose (il le serait qu'il serait alors possible de l'opposer à autre chose). Mais si Dieu n'est pas quelque chose, comment alors lui attribuer une caractéristique ? Et si Dieu est dit être l'ensemble des choses, connues et au-delà, comment justifier l'interdit visant à refuser à l'ensemble des choses d'en être une (a fortiori si l'on en... parle !). Comment fonder une ontologie, c'est-à-dire poser un être, qui ne serait pas une chose ?

Et quand bien même serait acceptée l'idée, il n'en reste pas moins que l'ontologie spinozienne pose un principe moteur de l'existence, et c'est ce principe moteur qui est visé par l'attribution du qualificatif de monisme.

Pour l'instant, je ne peux souscrire à l'argumentation de Pierre Macherey. Mais je m'y attelle à nouveau, car il y a certainement une explication Wink

Dans son commentaire d’Ethique II 47,

Pierre Macherey a écrit:[…] cette connaissance primordiale [de l’essence éternelle et infinie de Dieu], qui constitue la structure dont dépendent toutes nos connaissances particulières, ne fait elle-même rien connaître en particulier : l’essence éternelle et infinie de Dieu, qui est la condition de toute chose, n’est pas une chose à côté ou au-dessus des autres, mais elle est, si l’on peut dire la “ choséité ” qui est dans toutes les choses et constitue en dernière instance leur cause. Ce qui est premier dans l’ordre de la connaissance, ce n’est pas non plus une première connaissance, à laquelle toutes les autres se rattacheraient suivant un enchaînement du type de celui qui relie entre elles les choses particulières se déterminant réciproquement, mais c’est le fait même de connaître, considéré en lui-même de manière absolue, c’est-à-dire cette “ connaissabilité ” ou cette “ cognoscéité ” qui est au fond de toutes nos connaissances sans exception et constitue en dernière instance leur condition de possibilité.

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Message par Crosswind Ven 5 Jan 2018 - 14:12

Je copie-colle ma réponse adressée à Hks sur le fil qui combine Spinoza et la science.

Crosswind a écrit:Pris comme tel, et c'est d'ailleurs ainsi que je me le représente in fine, le système de Spinoza place le pivot ontologique dans le fait conscient, dans le principe premier du fait conscient. Si je pars sur la recherche d'une entité infinie - donc qui ne peut être un objet -, indivisible par la force des choses, et qui revendique une présence saturante et omni-"potente", je ne vois que le fait conscient pur.

Mais, à nouveau, jamais je ne me risquerais à glisser vers l'ontologie en caractérisant cette entité d'en-soi... Cette dernière remarque aurait d'ailleurs tout à fait sa place dans la partie relevant du monisme spinozien

Je dirais donc non pas une connaissance primordiale mais une reconnaissance primordiale. Mais ce qui me convainc toujours de ce que son système est un monisme est que, malgré tout, est attribué à cette non-chose la caractéristique de cause.

Si l'on se contentait de reconnaître le fond diffus métaphysique pur, inexprimable par des mots mais reconnaissable par le vécu propre, alors le système spinozien ne pourrait être targué de moniste. Mais en l'occurrence, de toute évidence et malgré une forte volonté d'éviter l'écueil, il en est trop dit.
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Message par Vanleers Ven 5 Jan 2018 - 15:03

La conscience n’occupe pas une très grande place dans l’Ethique comme on pourra s’en convaincre, par exemple, en lisant l’article de Chantal Jaquet, La positivité de la conscience. Je redonne le lien, une nouvelle fois :

http://books.openedition.org/psorbonne/141

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Message par Crosswind Ven 5 Jan 2018 - 15:29

J'en suis persuadé, en effet. Mais les descriptions de son système, utilisées par les maîtres et connaisseurs de notre homme, se coulent mieux que mieux dans l'appréhension que se fait une partie de la philosophie de l'esprit [de la conscience], de sorte qu'il n'est pas incongru, à ce détail près que dans cette perception la conscience n'est ni la conscience de l'homme, ni une substance, ni un Dieu et encore moins une chose en soi, à ce détail près donc d'assimiler l'un et l'autre.

Mais donc, il n'y a aucune ontologie dans le système spinozien, comme tel ?


Dernière édition par Crosswind le Ven 5 Jan 2018 - 22:40, édité 1 fois
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Message par Vanleers Ven 5 Jan 2018 - 16:22

La question de l’ontologie de Spinoza a déjà été longuement discutée, notamment sur le fil éponyme où il a été montré que cette ontologie était en fait une ousiologie.

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Message par Crosswind Ven 5 Jan 2018 - 16:36

Mais une ousiologie se fonde sur l'être. L'ousiologie modifie l'analyse de l'être, pas le moins du monde le fait d'être. Spinoza n'aurait jamais accepté, je crois, la proposition suivante : "Dieu n'est pas".

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Message par hks Ven 5 Jan 2018 - 16:39

Crosswind a écrit:à ce détail près que dans cette perception la conscience n'est ni la conscience de l'homme, ni une substance, ni un Dieu et encore moins une chose en soi, à ce détail près donc d'assimiler l'un et l'autre.
ben oui
c'est  ce que j' en pense ... et en fait  c' est ce dont parle Macherey

Macherey a écrit:c’est-à-dire cette “ connaissabilité ” ou cette “ cognoscéité ” qui est au fond de toutes nos connaissances sans exception et constitue en dernière instance leur condition de possibilité.

belle intuition de sa part... sauf rien n'en sort. On (les spinozistes ) pose une condition de possibilité et puis on produit un tableau objectif naturaliste. Je ne dis pas que Spinoza n'y pousse pas.

Je ne sais s'il y a un "progrès" possible en philosophie  Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? 4221839403 il y a en tout cas des évolutions, des mouvements, du mouvement ...le criticisme Kantien c'est  un palier d'évolution, la phénoménologie un autre, la philosophie du langage encore un autre ...

Et pour moi les spinozistes restent fixés sur leur  plate forme. .... à la limite seul ou presque Deleuze a innové sur le spinozisme et en le respectant... les autres, très intelligemment, je le reconnais, labourent et relabourent ...comme si rien ne s'était passé. L'intelligence suffit- elle?

(je ne suis pas deleuzien cela dit )

Bon et de toute manière, je ne supporte pas ce faux semblant alambiqué, ce sac de nœud théorique, de la liberté de l'homme qui n'est pas libre mais qui l'est sans l'être parce qu'il comprend qu'il ne l'est pas.
Ca pour moi c'est le plafond de verre du spinozisme. Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? 177519025

Difficile de faire comprendre à un spinoziste qu'il y a joie dans le sentiment d'être libre... et tristesse dans le sentiment opposé. Il ne voit pas, s'il n'éprouve pas ce sentiment il ne peut le comprendre ...
ou Quoi ? Peut-on parler de monisme à propos de Spinoza ? 4221839403
( là c'est moi qui ne le comprends pas )


Dernière édition par hks le Ven 5 Jan 2018 - 17:06, édité 1 fois
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Message par hks Ven 5 Jan 2018 - 17:05

Crosswind a écrit: Spinoza n'aurait jamais accepté, je crois, la proposition suivante : "Dieu n'est pas".
il dit pratiquement toujours Dieu existe.... question de sens du mot assez difficile  ... chez Descartes existence de Dieu c'est être ... mais  est- ce ce sens chez Spinoza?
Qu' est -ce que pense Spinoza par existence? ( je passe sur essence  question encore plus difficile à cerner clairement  parce qu'il n'est pas toujours si clair )

Il semble que dès le tout début, il y ait une auto production.
Le mot cause causa sui est choisi à dessein et en parler avant la substance est signifiant.

Au début il n'y a pas un être mais une cause .... et par la suite il n'y a que des causes (c'est ça le problème du déterminisme)
il n'y a que des actes de poser des effets  qui sont eux- mêmes des cause, jamais statiques en leur statut d’effet.
Il n'y a jamais d' effets en fait ou pas vraiment, le vélo  du funambule roule sur le fil et ne peut s'arrêter sous peine de tomber dans le vide.
C'est comme un faux déterminisme, il produit des causes  mais jamais d'effets ( ie des étants stables )
......................................................................................

Je passe vite sur essence qui induit cette idée d'ousiologie.

juste une citation (peu claire, mais c'est la meilleure )

scolie prop1O/2 a écrit:
C'est que les choses singulières ne peuvent, sans Dieu, ni être ni être conçues, alors que, cependant, Dieu n'appartient pas à leur essence ; j'ai dit au contraire que constitue nécessairement l'essence d'une chose ce qui, étant donné, fait que la chose est posée et ce qui, étant supprimé, fait que la chose est supprimée ; ou ce sans quoi la chose, et, inversement, ce qui, sans la chose, ne peut ni être ni être conçu. (Misrahi - fr)
on a essentiellement des causes ...(poser enlever)
et puis la chose qui si elle nest pas là, ne peut être intelligée  (ça évidemment )
mais cette" chose" est elle aussi essentiellement cause qui pose.
On n'a QUE des causes.
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Message par Vanleers Ven 5 Jan 2018 - 17:23

Crosswind a écrit:Mais une ousiologie se fonde sur l'être. L'ousiologie modifie l'analyse de l'être, pas le moins du monde le fait d'être. Spinoza n'aurait jamais accepté, je crois, la proposition suivante : "Dieu n'est pas".

Ce qui me paraît le plus intéressant à noter, c’est que l’existence s’entend de deux façons dans l’Ethique : l’éternité (Ethique I définition huit) et la durée (Ethique II déf. 5).
Dans le scolie d’Ethique II 45,

Spinoza a écrit: Ici, par existence je n’entends pas la durée, c’est-à-dire l’existence conçue abstraitement et comme une certaine espèce de quantité. Car je parle de la nature même de l’existence qui se voit attribuée aux choses singulières pour la raison que de l’éternelle nécessité de la nature de Dieu suivent une infinité de choses d’une infinité de manières (voir Ethique I 16). Je parle, dis-je, de l’existence même des choses singulières en tant qu’elles sont en Dieu.

Dans le scolie d’Ethique V 29, Spinoza se réfère à Ethique II 45 et son scolie :

Spinoza a écrit: Nous concevons les choses comme actuelles de deux manières selon que nous les concevons soit en tant qu’elles existent en relation à un temps et à un lieu précis, soit en tant qu’elles sont contenues en Dieu et suivent de la nature divine. Et celles qui sont conçues de cette deuxième manière comme vraies, autrement dit réelles, nous les concevons sous l’aspect de l’éternité, et leurs idées enveloppent l’essence éternelle et infinie de Dieu, comme nous l’avons montré à la Proposition 45 de la deuxième Partie, dont on verra également le Scolie.

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Message par Crosswind Ven 5 Jan 2018 - 18:57

Voilà bien des définitions qui rencontrent le fait conscient, en effet. A ceci près des caractéristiques d'éternité.
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Message par Vanleers Sam 6 Jan 2018 - 11:15

Crosswind a écrit:Mais une ousiologie se fonde sur l'être. L'ousiologie modifie l'analyse de l'être, pas le moins du monde le fait d'être. Spinoza n'aurait jamais accepté, je crois, la proposition suivante : "Dieu n'est pas".

Je reviens sur cette question.

Spinoza ne démontre ni que Dieu est, ni qu’il n’est pas. Il démontre que Dieu existe nécessairement (Ethique I 11).
Que signifie exister nécessairement pour Dieu ?
Dieu ayant été défini comme une substance (définition 6) et la proposition 7 ayant démontré que « A la nature de substance appartient d’exister », on en conclut que Dieu existe nécessairement.

La proposition 7 a été démontrée en mettant en évidence, via le corollaire de la proposition 3, qu’une substance est cause de soi.
Ce qui veut dire, en fonction de la définition 1, que « son essence enveloppe nécessairement l’existence, autrement dit, à sa nature appartient d’exister »

Il est clair, ici, que l’existence dont il est question n’est autre que l’éternité visée par la définition 8 : « Par éternité, j’entends l’existence même en tant qu’on la conçoit suivre nécessairement de la seule définition d’une chose éternelle ».
Dans l’explication qui suit cette définition, Spinoza précise :
« En effet une telle existence se conçoit, de même que l’essence de la chose, comme une vérité éternelle, et pour cette raison elle ne peut s’expliquer par la durée ou le temps, quand même on concevrait la durée sans commencement ni fin. »

L’éternité est donc le mode d’existence de Dieu.

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Message par hks Sam 6 Jan 2018 - 12:47

Vanleers a écrit:Que signifie exister nécessairement pour Dieu ?
c' est exister qui est à expliquer ( le sens  qu'on donne à ce verbe et à ce substantif "existence")

Il est clair, ici, que l’existence dont il est question n’est autre que l’éternité visée par la définition 8
on a une explication du sens donné à existence et donné dans les définitions précédentes

1) vérité éternelle (ce qui n'explique rien de" existence")
2) "éternelle"  ne peut s' expliquer par ce qu'elle nest pas (à savoir la  durée  ou temps)
et donc s' explique par ce qu'elle est c'est à dire éternelle

Ce qui est un pur cercle logique.
........................
On a néanmoins une compréhension par la négative  de "existence", c'est le hors du temps.
On peut en conclure que ce qui est dans le temps n' existe pas.

Comment en faire sortir un monde phénoménal?
Seul existe L'éternel principe qui pose (des choses qui n'existent pas). Que pose le principe ? Il se pose.
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Message par Vanleers Sam 6 Jan 2018 - 14:51

hks a écrit:
On peut en conclure que ce qui est dans le temps n' existe pas.

J’ai rappelé dans mon avant-dernier post les scolies d’Ethique II 45 et V 29 qui parlent des deux modes d’exister : sub specie aeternitatis et sub specie durationis.

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