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Bison futé et l'autonomie

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Message par hks Mar 2 Fév 2016 - 23:26

courtial a écrit:Chelmno a été fermé en 1941, sauf erreur de ma part (il avait fait son boulot et n'était pas aux dimensions du projet).
Le 11 avril 1943, les SS quittent le camp de Chelmno
En février 1944, Arthur Greiser décide de remettre le camp en activité, en prévision de l'extermination de la population du ghetto de Lódź qui avait échappé aux déportations de 1942.
.......

Mais pourquoi une déportation? ...Vers Auschwitz.
Question qui peut sembler secondaire.
Pourquoi ne pas exterminer sur place ? Sinon par balle si ce n'est pas assez efficace du moins par le gaz...  mais sur place (en Ukraine ou en Hongrie en Grèce en Italie, en France ?) ...

Pourquoi déporter ?

La création du camp souche Auschwitz I est décidée par les SS en février 1940 : c'est un camp de concentration et de travail forcé. Il se situe au milieu d'une région polonaise riche en matières premières : eau (au bord de la rivière Sola, zones marécageuses à proximité), chaux, et charbon (à 30 km du camp se trouvent des gisements parmi les plus riches d'Europe). Ces ressources sont nécessaires pour la production d'essence synthétique et de caoutchouc synthétique ; elles sont essentielles pour l'effort de guerre allemand.


S'ils constituaient un système d'extermination, les camps de concentration, étaient aussi, ce qu'on ne sait pas toujours, un système économique fondé sur l'esclavage. Les déportés gardés en vie à leur arrivée à Auschwitz ou dans les autres camps devaient pouvoir servir l'économie allemande et son effort de guerre. Considérés comme "rentables", ils étaient utilisés comme main d'ouvre gratuite, taillable et corvéable à merci. Bref, ils étaient transformés en esclaves.

Dans un rapport à Himmler en date du 30 avril 1942( postérieur donc à Wansee), le chef de l'Office principal économique et administratif SS, Oswald Pohl, fournit des détails très explicites sur l'intérêt de cette main d'oeuvre. "La guerre a apporté des changements structuraux visibles dans les camps de concentration, et a radicalement modifié leurs tâches en ce qui concerne l'utilisation des détenus. La détention pour les seuls motifs de sécurité, éducatifs ou préventifs, ne figure plus au premier plan". En clair, les motifs idéologiques et politiques sont laissés de côté. "Le centre de gravité s'est déplacé vers le côté économique", poursuit Pohl. "La mobilisation de toute main d'ouvre des détenus pour des tâches militaires (augmentation de la production de guerre), et pour la reconstruction ultérieure en temps de paix, passe de plus en plus au premier plan"
  http://www.terresacree.org/bayer.htm

au cours de la conférence de Wansee   le 20 janvier 1942,
Heydrich annonça que "Au cours de la solution finale, les Juifs devront être mobilisés pour le travail sous une forme appropriée avec l'encadrement voulu à l'Est. En grandes colonnes de travailleurs, séparés par sexe, les Juifs aptes au travail seront amenés à construire des routes dans ces territoires, ce qui sans doute permettra une diminution naturelle substantielle de leur nombre.

Pour finir, il faudra appliquer un traitement approprié à la totalité de ceux qui resteront, car il s'agira évidemment des éléments les plus résistants, puisque issus d'une sélection naturelle, et qui seraient susceptibles d'être le germe d'une nouvelle souche juive, pour peu qu'on les laisse en liberté".

La volonté d'extermination est clairement exprimée par Heydrich mais se double  d'une considération économique .

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Message par Courtial Mer 3 Fév 2016 - 0:07

hks a écrit:
courtial a écrit:Chelmno a été fermé en 1941, sauf erreur de ma part (il avait fait son boulot et n'était pas aux dimensions du projet).
Le 11 avril 1943, les SS quittent le camp de Chelmno
En février 1944, Arthur Greiser décide de remettre le camp en activité, en prévision de l'extermination de la population du ghetto de Lódź qui avait échappé aux déportations de 1942.
.......

Mais pourquoi une déportation? ...Vers Auschwitz.
Question qui peut sembler secondaire.
Pourquoi ne pas exterminer sur place ? Sinon par balle si ce n'est pas assez efficace du moins par le gaz...  mais sur place (en Ukraine ou en Hongrie en Grèce en Italie, en France ?) ...

Pourquoi déporter ?

La création du camp souche Auschwitz I est décidée par les SS en février 1940 : c'est un camp de concentration et de travail forcé. Il se situe au milieu d'une région polonaise riche en matières premières : eau (au bord de la rivière Sola, zones marécageuses à proximité), chaux, et charbon (à 30 km du camp se trouvent des gisements parmi les plus riches d'Europe). Ces ressources sont nécessaires pour la production d'essence synthétique et de caoutchouc synthétique ; elles sont essentielles pour l'effort de guerre allemand.


S'ils constituaient un système d'extermination, les camps de concentration, étaient aussi, ce qu'on ne sait pas toujours, un système économique fondé sur l'esclavage. Les déportés gardés en vie à leur arrivée à Auschwitz ou dans les autres camps devaient pouvoir servir l'économie allemande et son effort de guerre. Considérés comme "rentables", ils étaient utilisés comme main d'ouvre gratuite, taillable et corvéable à merci. Bref, ils étaient transformés en esclaves.

Dans un rapport à Himmler en date du 30 avril 1942( postérieur donc à Wansee), le chef de l'Office principal économique et administratif SS, Oswald Pohl, fournit des détails très explicites sur l'intérêt de cette main d'oeuvre. "La guerre a apporté des changements structuraux visibles dans les camps de concentration, et a radicalement modifié leurs tâches en ce qui concerne l'utilisation des détenus. La détention pour les seuls motifs de sécurité, éducatifs ou préventifs, ne figure plus au premier plan". En clair, les motifs idéologiques et politiques sont laissés de côté. "Le centre de gravité s'est déplacé vers le côté économique", poursuit Pohl. "La mobilisation de toute main d'ouvre des détenus pour des tâches militaires (augmentation de la production de guerre), et pour la reconstruction ultérieure en temps de paix, passe de plus en plus au premier plan"
  http://www.terresacree.org/bayer.htm

au cours de la conférence de Wansee   le 20 janvier 1942,
Heydrich annonça que "Au cours de la solution finale, les Juifs devront être mobilisés pour le travail sous une forme appropriée avec l'encadrement voulu à l'Est. En grandes colonnes de travailleurs, séparés par sexe, les Juifs aptes au travail seront amenés à construire des routes dans ces territoires, ce qui sans doute permettra une diminution naturelle substantielle de leur nombre.

Pour finir, il faudra appliquer un traitement approprié à la totalité de ceux qui resteront, car il s'agira évidemment des éléments les plus résistants, puisque issus d'une sélection naturelle, et qui seraient susceptibles d'être le germe d'une nouvelle souche juive, pour peu qu'on les laisse en liberté".

La volonté d'extermination est clairement exprimée par Heydrich mais se double  d'une considération économique .

Merci pour l'ensemble (et en particulier la remise en place sur Chelmno).

Ce qui est encombrant dans cette affaire, c'est la crainte de la "dérive".
Malgré toutes les tentations marxistes, il est difficile - et dangereux - d'accorder aux éléments économiques une influence déterminante.
On a fabriqué de la gomme à Monowitz ? Je le veux, mais j'aimerais qu'on me montre des bilans comme quoi c'était rentable. Je ne suis pas sûr que la main d'oeuvre fut très motivée (ni surtout en état de performer),  ni les SS des experts en Resssources humaines, capables de booster la productivité.
Je réclamerais même un audit sur le rapport entre le coût et les revenus : je soupçonne que ce n'est pas sérieux économiquement.

Ce qui est vrai en revanche, c'est que l'on a usé d'arguments économiques (fantaisistes), je ne dis pas pour fournir un alibi, mais pour donner une apparence de rationalité.
Officiellement, il n'y avait pas de budget. Par exemple, les Juifs devaient payer les frais de leur propre déportation (dans Shoah, Lanzmann raconte cela assez longuement : dans beaucoup de cas, les Juifs payaient leurs billets de train. Des tarifs de groupe, je vous rassure...Hillberg raconte dans le film que les Allemands ont été bien emmerdés quand ils ont évacué les Juifs de Salonique et qu'ils ont reçu des drachmes !)
On leur arrachait leurs dents en or et d'autres détails plus glauques encore sur lesquels il est inutile d'insister.
Mais le fait que les nazis aient été des furieux (en particulier sur le rapport Juif/argent) et ce soient livrés à cette débauche de prétendue rentabilité ne se confond pas avec la réalité économique - à moins naturellement que l'on considère, comme je le crois, que cette réalité ne se distingue pas, le plus souvent, du phantasme des économistes.

Ce sont les expropriations, les confiscations, les exhérédations, la rapine qui ont rincé financièrement les Juifs, pas les arrachages de dents et les fabriques de caoutchouc.
L'idée qu'il fallait que cela ne coûte rien n'avait aucun rapport avec l'économie. C'était métaphysique, pas économique.

Hitler n'avait que mépris pour l'économie. Rauschning est sans doute un affabulateur, mais ce qu'il en dit (savoir que quand on lui donne un raisonnement économique, le Führer vous insulte) fait furieusement vrai si on tient compte de l'ensemble de l'Oeuvre.

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Message par hks Mer 3 Fév 2016 - 0:55

J'ai discuté de cela  sur "liberté philo" avec princeps ( bref )

L' Allemagne pendant le nazisme était quelque part un parfait foutoir (chaotique dit en substance livre de Franz Leopold Neumann, historien marxiste contemporain du nazisme). Le système ne fonctionnait certes pas avec la "rationalité" du collectivisme en URSS.
Donc économiquement chaotique.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Leopold_Neumann

courtial a écrit:Ce qui est vrai en revanche, c'est que l'on a usé d'arguments économiques (fantaisistes), je ne dis pas pour fournir un alibi, mais pour donner une apparence de rationalité.
Je pense qu'ils y croyaient. Ils croyaient en l'utilité (productive) de cet esclavage.
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Message par neopilina Mer 3 Fév 2016 - 1:16

Vous avez tous les deux raison : l'objectif c'est d'exterminer les juifs, surtout les juifs, " ils ont droit à un traitement spécifique ". Mais faire travailler les prisonniers dans ces conditions, c'est faire les deux, et c'est ce que fera la majorité des camps de " l'archipel ". A Auschiwtz I Monowitz ( Les usines. ), Dora ( Usines. ), etc., les rations sont supérieures à celles des camps de concentration, il y a des consignes pour ne pas être trop brutal, le prisonnier, un tant soit peu formé, dure un peu plus longtemps, c'est tout. A contrario, l'obsession " métaphysique " chez Hitler, Himmler, Heydrich, et quelques autres, c'est vraiment éliminer les juifs. On sait par exemple que sur le réseau ferré les convois de déportés sont prioritaires, même sur ceux de l'armée ! La fin du propos d'Heydrich cité par hks illustre parfaitement " la chose ", l'obsession qui reprend le dessus, je cite : " Pour finir, il faudra appliquer un traitement approprié à la totalité de ceux qui resteront, car il s'agira évidemment des éléments les plus résistants, puisque issus d'une sélection naturelle, et qui seraient susceptibles d'être le germe d'une nouvelle souche juive, pour peu qu'on les laisse en liberté ". Il y a une considération économique de plus en plus prégnante dans une Allemagne qui se vide de ses hommes, mais la volonté première est bien l'élimination de tout ce qui gêne surtout les juifs. Les convois qui sont directement orientés vers les camps d'extermination sont essentiellement composés de juifs. Un autre prisonnier, autre que juif j'entends, avait un peu plus de chance de survivre qu'un juif. C'est du reste ce qui est arrivé. Le terme de Shoah s'applique à cette spécificité. Il s'applique aux juifs, pas aux autres victimes des camps.
Pour Chelmno, effectivement, il a été fermé puis réouvert, et a été le premier camp d'extermination ( Avant ceux de l'Aktion Reihnardt. ), jamais personne n'y à " travailler ".


Dernière édition par neopilina le Mer 3 Fév 2016 - 15:42, édité 3 fois

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" Tout Étant produit par moi m'est donné (c'est son statut philosophique), a priori, et il est Mien (cogito, conscience de Soi, libéré du Poêle) ". " Savoir guérit, forge. Et détruit tout ce qui doit l'être ", ou, équivalents, " Tout l'Inadvertancier constitutif doit disparaître ", " Le progrès, c'est la liquidation du Sujet empirique, notoirement névrotique, par la connaissance ". " Il faut régresser et recommencer, en conscience ". Moi.
C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
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Message par Courtial Mer 3 Fév 2016 - 1:38

hks a écrit:J'ai discuté de cela  sur "liberté philo" avec princeps ( bref )

L' Allemagne pendant le nazisme était quelque part un parfait foutoir (chaotique dit en substance livre de Franz Leopold Neumann, historien marxiste contemporain du nazisme). Le système ne fonctionnait certes pas avec la "rationalité" du collectivisme en URSS.
Donc économiquement chaotique.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Leopold_Neumann

courtial a écrit:Ce qui est vrai en revanche, c'est que l'on a usé d'arguments économiques (fantaisistes), je ne dis pas pour fournir un alibi, mais pour donner une apparence de rationalité.
Je pense qu'ils y croyaient. Ils croyaient en l'utilité (productive) de cet esclavage.

Le lien ne dit pas de quel "foutoir" on parle. C'était un foutoir naturellement puisque c'était un régime fasciste, ça c'est le jugement politique. Mais ce n'était pas économiquement un foutoir. L'industrie allemande était organisée et de toute manière, les éventuels gêneurs (syndicalistes, communistes, socialistes) ont été liquidés dès le départ. On leur a coupé la tête  comme à Sophie Scholl.
Au plan social, le Führerprinzip fonctionnait.
Le foutoir était surtout institutionnel, je crois. Hitler était un artiste raté, mais politiquement, c'était un bon pianiste. Il avait une main droite et une main gauche totalement indépendantes. Ainsi, il y avait d'un côté le Gouvernement, mais il y avait aussi le Parti. Alors certes, en théorie, le gouvernement était l'émanation du Parti, mais en réalité il y avait partage, mais un partage dans lequel les périmètres étaient délibérément confus. C'est-à-dire qu'un membre du gouvernement n'était pas simplement "doublé" par un membre du Parti - saine logique de répartition : je donne un pouvoir, je construis aussitôt un contre-pouvoir - , mais il était "doublé" par quelqu'un du Parti qui n'avait pas le même périmètre. Ils ne pouvaient même pas s'entendre entre eux.
C'était voulu, mettre le foutoir nous conduisant à aspirer vers un ordre, et je vous laisse deviner qui c'est-y qui, à la fin, mettait fin au foutoir ?
Je vous le donne en mille.
Un indice ?
Ca commence par "Adolf" et ça finit par "Hitler".
Vous avez trouvé ?


Pour faire "la synthèse" et se situer, naturellement, au-delà de la mêlée et du désordre.


Dernière édition par Courtial le Mer 3 Fév 2016 - 1:55, édité 2 fois

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Message par neopilina Mer 3 Fév 2016 - 1:47

L'Allemagne nazie n'a rien d'un foutoir, c'est tout le contraire, c'est par exemple une bureaucratie comme seuls les totalitarismes en ont le secret. Mais au fil du temps la guerre y sème le foutoir. Et on voit donc les nazis se démener avec leurs délires idéologiques, leurs " fondamentaux ", et la réalité de la guerre, puis d'une guerre qui tourne en leur défaveur, et dans le lot des problèmes ainsi générés, il y a effectivement un problème main d'oeuvre qui s'est réellement posé. A la fin de la guerre, toute personne prisonnière en Allemagne travaille ( Il vaut mieux bien sûr être prisonnier de guerre occidental au fin fond de la campagne bavaroise que juif à Dachau. ). Même les allemands qui ne se battent pas d'ailleurs ( On a évoqué le cas de Heidegger il y a peu. ).

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Message par Courtial Mer 3 Fév 2016 - 2:25

neopilina a écrit:L'Allemagne nazie n'a rien d'un foutoir, c'est tout le contraire, c'est par exemple une bureaucratie comme seuls les totalitarismes en ont le secret. Mais au fil du temps la guerre y sème le foutoir. Et on voit donc les nazis se démener avec leurs délires idéologiques, leurs " fondamentaux ", et la réalité de la guerre, puis d'une guerre qui tourne en leur défaveur, et dans le lot, il y a effectivement un problème main d'oeuvre qui s'est réellement posé.

Non, pas du tout, oublie cela, c'est une erreur. Le foutoir ne vient pas du dehors, même si c'est ce qu'ils racontent : c'est le foutoir parce qu'il y a des Juifs, des Bolcheviks, des francs-maçons, des Roms, des Arabes, des Syriens, ça c'est ce qu'ils disent, mais ce n'est pas la réalité. Ce n 'est pas à cause de cela que le nazisme est un foutoir.
Et ce genre de foutoir n'a rien de nazi.  Valls aussi croît que tout rentrera dans l'ordre quand on aura renvoyé les Roms chez eux, et Hollande qu'il n'y aura plus de foutoir au gouvernement en éliminant une Ministre dont il vient d'apprendre tout récemment qu'on dit qu'elle serait de gauche. Mais ni l'un ni l'autre ne jugule quelque foutoir que ce soit.

Mais il ne s'agit pas de cela. Le nazisme était un foutoir, hors ce que j'ai mentionné d'abord, par le fait que c'était un mouvement révolutionnaire, tout simplement. Or il appartient à ce genre de mouvements (c'est bien montré par Hegel, j'essayerai de vous retrouver le passage) que ce qui est établi par le système devient immédiatement une gêne, un obstacle pour ce système lui-même.

Par exemple, les lois racistes de 1935, ce n'est pas très sympa, mais elles interdisent la Shoah. Ca n'a pas été fait dans ce but-là, mais c'est leur effet. La Conférence de Wannsee (20/01/1942), c'est l'enregistrement de ce fait. Heydrich vient seulement expliquer que ce qu'il a lui-même voulu fout le bordel, va empêcher tout le monde de travailler.

Les vrais révolutionnaires, ce sont leurs propres décrets qui les mettent dans la merde, sois-en bien convaincu. C'était le cas pendant la Révolution française où certes, c'était la faute des Anglais, de la Reine, des Autrichiens, des accapareurs, des Vendéens, des aristocrates, de tout ce que tu veux et qui serait dehors.
Mais en réalité, ça n'a gravement buggé que quand le pouvoir s'est retrouvé confronté à lui-même.

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Message par neopilina Mer 3 Fév 2016 - 3:55

Courtial a écrit:Par exemple, les lois racistes de 1935, ce n'est pas très sympa, mais elles interdisent la Shoah. Ca n'a pas été fait dans ce but-là, mais c'est leur effet. La Conférence de Wannsee (20/01/1942), c'est l'enregistrement de ce fait. Heydrich vient seulement expliquer que ce qu'il a lui-même voulu fout le bordel, va empêcher tout le monde de travailler.

De " Mein kampf " au camp d'extermination, l'assassinat industrialisé, il y a une continuité : dans l'escalade, l'accomplissement d'un projet, dont Wansee est une des étapes, une persistance à poursuivre ce projet " phare " de ce régime ( Le tournant, Stalingrad, n'a pas encore eu lieu. ). Il y aura plus tard, quand les allemands reculent, un programme d'Himmler, j'ai oublié le nom, visant à déterrer des victimes pour faire disparaitre les corps qui n'ont pas été brulés ( Le Reich devant durer mille ans personne n'était supposé aller creuser là. ).

Courtial a écrit:1 - Les vrais révolutionnaires, ce sont leurs propres décrets qui les mettent dans la merde, sois-en bien convaincu. 2 - C'était le cas pendant la Révolution française où certes, c'était la faute des Anglais, de la Reine, des Autrichiens, des accapareurs, des Vendéens, des aristocrates, de tout ce que tu veux et qui serait dehors.

Une petite contradiction entre 1 et 2 ? Pas compris ! Ça a le mérite d'être clair !

Courtial a écrit:Mais en réalité, ça n'a gravement buggé que quand le pouvoir s'est retrouvé confronté à lui-même.

J'ai peur de ne pas comprendre. Dans le cas de l'Allemagne nazie, très manifestement, ça commence à coincer quand elle commence à perdre la guerre ( Après Stalingrad, du 07/42 au 02/43, 2 000 soldats allemands, et je ne parle pas des italiens, des roumains, également saignés lors de cette bataille, sont tués tous les jours. ). Ça " bugge ", oui, parce qu'ils sont en train de perdre la guerre. Pour les nazis, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, avant d'attaquer l'U.R.S.S., d'échouer aux portes de Moscou à cause de l'hiver russe ( Hitler avait prévu celui-ci, mais il a été obligé de différer l'attaque de deux mois, à cause des italiens qui n'arrivaient pas à accomplir leur part " du marché " en Yougoslavie, Grèce, etc. ), la contre-offensive soviétique, Stalingrad, etc.
Il faut que tu précises quand tu dis " quand le pouvoir s'est retrouvé confronté à lui-même ". Tu veux dire qu'à terme tous ces régimes se suicident inéluctablement ? Je veux bien, mais l'U.R.S.S. a quand même duré 70 ans, et Mao trône toujours sur la place Tian'anmen, alors que c'est le type qui a tué le plus de chinois dans l'histoire. Pour les russes, les historiens débattent encore pour savoir si c'est Staline ou Hitler.

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C'est à pas de colombes que les Déesses s'avancent.
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Message par hks Mer 3 Fév 2016 - 17:13

courtial a écrit:Le lien ne dit pas de quel "foutoir" on parle.
non c'est le livre qui le dit. Foutoir est certes un peu fort. L' historien pointe les antagonismes.


page 345 En fait, le national-socialisme a porté à
son plus haut degré de perfection cette structure même qu'il prétendait
attaquer. Il a réduit à néant chaque institution qui, dans un système
démocratique, préserve encore les derniers vestiges de spontanéité
humaine : le caractère privé de l'individu et de la famille, les syndicats,
les partis politiques, l'Eglise , l'organisation libre des loisirs. En
atomisant la population soumise - et dans une certaine mesure les
dirigeants eux-mêmes -, le national-socialisme n'a pas éliminé les
rapports de classe : il a, au contraire, approfondi et consolidé les
antagonismes.

page 347  Le national-socialisme n'a fait que transformer en organismes autoritaires
les organisations privées qui, dans une démocratie, laissent à
l'individu la possibilité d'exercer une activité spontanée.
La bureaucratisation
équivaut alors à la dépersonnalisation totale des relations
humaines devenues abstraites et anonymes. Le national-socialisme
impose à cette structure sociale deux thèmes idéologiques qui lui sont
totalement opposés : l'idéologie communautaire et le principe d'autorité
*.

page 360
On peut difficilement imaginer une destruction aussi
radicale de l'apparence extérieure des différences sociales. C'est
pourtant une démocratisation illusoire, parce que les différences de
statut et de pouvoir demeurent complètement inchangées. Un exemple
* Cf. p. 82 .
360 LA CLASSE DIRIGEANTE
encore plus frappant serait celui d'un atelier de réparation des chemins
de fer employant aussi bien des fonctionnaires ayant reçu une formation
universitaire que des cadres d'un niveau inférieur et des ouvriers. Il
existe en ce cas deux présidents pour l'entreprise , l'un pour les ouvriers
nommé par le front du travail local, l'autre pour les fonctionnaires
désigné par leur organisation locale. Selon l'accord Ley-Korner, tous
les employés forment une cellule dont la direction échoit au président
des ouvriers s'ils sont majoritaires, ce qui sera vraisemblablement le
cas. La démocratisation illusoire ne se limite donc pas à l'administration,
et s'étend aussi aux distinctions entre ouvriers manuels ct
fonctionnaires. Ici encore , elle ne modifie pas les différences financières,
sociales et politiques réelles. En outre, au-dessus de ces groupes,
trône une élite digne de confiance , qui emploie la terreur pour faire
pression sur quiconque laisse apparaître un relâchement de sa foi dans
le parti , ou refuse de prendre part à l'aide d'hiver ou aux autres
opérations de ce genre.
Le rapport entre le parti et l'administration est donc loin d'être
simple . Le livre est téléchargeable en PDF
C'est la multiplication des antagonismes qui est pointée.Une société apparemment harmonisée et qui ne l'est pas du tout sur le fond.
Sur le fond ça tirait beaucoup  plus à hue et à dia, selon les volontés, les ambitions, les prébendes, la corruption, la lâcheté, la mesquinerie, individualisées et plus qu'on ne le pense.
http://www.histoireebook.com/index.php?post/Neumann-Franz-Behemoth-Structure-et-pratique-du-national-socialisme
.....................

..dans cet autre  livre il y a un article sur la corruption en régime nazi

https://books.google.fr/books?id=CYwnggsRqIQC&pg=PT257&lpg=PT257&dq=allemagne+nazie+corruption&source=bl&ots=hMe5XYs0y1&sig=NQTxHH8KPhRjJhzONfhy4XzL8hk&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjl68aN_dvKAhUJnBoKHVmtBskQ6AEIPTAG#v=onepage&q=allemagne%20nazie%20corruption&f=false
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Message par Courtial Mer 3 Fév 2016 - 21:39

Neopilina a écrit:Il faut que tu précises quand tu dis " quand le pouvoir s'est retrouvé confronté à lui-même ". Tu veux dire qu'à terme tous ces régimes se suicident inéluctablement ? Je veux bien, mais l'U.R.S.S. a quand même duré 70 ans, et Mao trône toujours sur la place Tian'anmen, alors que c'est le type qui a tué le plus de chinois dans l'histoire. Pour les russes, les historiens débattent encore pour savoir si c'est Staline ou Hitler.

C'est-à-dire que je serais en train de te faire le coup de la "nécessité historique" ?

Bon, j'avoue, j'aime bien Hegel et je viens de le citer, mais Hegel, ce n'est pas comme la gnôle frelatée, ça ne rend pas forcément aveugle non plus. Et sur ce sujet, je n'avais aucune intention de polémiquer (1) ni de faire du mystère. Je m'étais même pris à espérer une discussion entre adultes.
Je suis d'accord avec toi : Hitler n'aimait pas les Juifs bien avant 1943. Déjà en 1925, dans Mein Kampf, on croyait voir percer une forme de méfiance, voire même parfois d'hostilité, de la part d'Adolf, pour le Peuple du Livre.

Ces légères divergences de vue avec le Peuple Juif l'ont conduit à des lois racistes en 1935.
Outre des dispositions légales d'interdiction (en particulier) dont le caractère discriminatoire et raciste n'est pas un sujet de débat, il y avait un volet théorique important. Car pour justifier les spoliations, les confiscations, les interdictions, les prédations, il fallait tout de même pouvoir répondre à la question : qui est Juif ?
C'est de la métaphysique, vous allez me dire ? Non, ce n'est pas de la métaphysique, c'est dans le texte de la loi, la réponse.
Je vous laisse aller voir sur Wiki ("Lois de Nuremberg 1935" ou un truc comme ça) pour savourer cette charmante littérature. Vous avez une grand mère juive mais pas votre grand père parternel ? Ah ben alors vous êtes un quart de Juif. Ah, pardon, qu'est-ce que vous me dîtes ? Pardon ? Ah oui, votre soeur, ou demi-soeur, n'est pas Juive, elle ? Ah si vous avez une soeur aryenne, vous n'êtes Juif qu'à 20 %, quoi.

Après avoir inventé cet instrument ubuesque, une usine à gaz, une machine à procès, à subtilités avocates sans fin, à enquête, à appel, contre-appel, etc. , là-dessus on pond la Shoah.

Et ça ne fonctionne pas ensemble parce que l'on ne peut pas conjuguer la tracasserie administrative et la destruction massive, c'est contradictoire. Et même si on pouvait les accorder, il y a une opposition formelle, qui est le temps. (Ca n'est pas possible de dire : nous verrons dans deux ans si votre avocat vous évite d'aller à Auschwitz).

Après, pourquoi Hitler a-t-il fait ces lois qui se sont révélées très vite autant d'emmerdations, c'est un sujet aussi.

Donc, ce que j'ai voulu dire, c'est que Hitler s'est pris les pieds dans ses propres lois.

Il y a un autre aspect, ce que j'ai dit sur la Révolution, où il y a analogie.
Hitler c'était un type qui aimait les Allemands, il paraît. Il croyait même qu'ils étaient la Race supérieure.
Il le disait en 1944, mais aussi déjà en 1923, en sorte que, comme dit Neo, "il y a une continuité", etc. Il a donc continûment dit cela.
Mais il y a eu une difficulté qui est, nous sommes bien d'accord, Stalingrad.

A partir de ce moment-là, la Race supérieure s'est brutalement démonétisée dans la cagnotte de Wolffy, et le Peuple allemand est devenu une camelote à liquider.
Ils avaient déçu Monsieur.
Ils n'étaient pas supérieurs aux Slaves puisqu'ils se faisaient tailler. Etant plus faibles, ils ne méritaient plus d'exister. A la fin, dans son bunker, il avait commandé la politique de la Terre brûlée : il fallait que tous les Allemands se suicident, comme lui. Il s'opposait systématiquement à toute mesure défensive et préservatrice ou protectrice pour privilégier le suicide (aller cogner avec les Russes à 1 contre 10).

Il y a une "continuité" certainement, parce que Hitler est un "nationaliste", mais c'est un nationaliste qui produit et qui appelle à la destruction de son peuple.






(1) Clairement : je veux dire que n'étant pas meilleur qu'un autre, je puis tout à fait utiliser (ou supposer) ce genre d'argument, mais que je le fais dans la polémique. Ou dit autrement : quand il y a de la bagarre, on fait ce qu'on peut. Pour la cuisine : je ne me sers pas de Hegel, beaucoup plus de Foucault.

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Message par Bergame Mer 3 Fév 2016 - 22:35

Courtial a écrit:Le lien ne dit pas de quel "foutoir" on parle. C'était un foutoir naturellement puisque c'était un régime fasciste, ça c'est le jugement politique. Mais ce n'était pas économiquement un foutoir. L'industrie allemande était organisée et de toute manière, les éventuels gêneurs (syndicalistes, communistes, socialistes) ont été liquidés dès le départ. On leur a coupé la tête  comme à Sophie Scholl.
Au plan social, le Führerprinzip fonctionnait.
Le foutoir était surtout institutionnel, je crois. Hitler était un artiste raté, mais politiquement, c'était un bon pianiste. Il avait une main droite et une main gauche totalement indépendantes. Ainsi, il y avait d'un côté le Gouvernement, mais il y avait aussi le Parti. Alors certes, en théorie, le gouvernement était l'émanation du Parti, mais en réalité il y avait partage, mais un partage dans lequel les périmètres étaient délibérément confus. C'est-à-dire qu'un membre du gouvernement n'était pas simplement "doublé" par un membre du Parti - saine logique de répartition : je donne un pouvoir, je construis aussitôt un contre-pouvoir - , mais il était "doublé" par quelqu'un du Parti qui n'avait pas le même périmètre. Ils ne pouvaient même pas s'entendre entre eux.
C'était voulu, mettre le foutoir nous conduisant à aspirer vers un ordre, et je vous laisse deviner qui c'est-y qui, à la fin, mettait fin au foutoir ?
Je vous le donne en mille.
Un indice ?
Ca commence par "Adolf" et ça finit par "Hitler".
Vous avez trouvé ?
Oui, il me semble que tu paraphrases Kershaw, là, non ? Une description effectivement particulièrement intéressante et édifiante du régime nazi puisqu'elle donne l'image d'un régime qui a systématisé le principe de séparation des pouvoirs. J'avais trouvé cela aussi très frappant, et inattendu.

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Message par hks Mer 3 Fév 2016 - 22:41

courtial a écrit: Or il appartient à ce genre de mouvements (c'est bien montré par Hegel, j'essayerai de vous retrouver le passage) que ce qui est établi par le système devient immédiatement une gêne, un obstacle pour ce système lui-même.

oui c'est dans ce sens que j'ai parlé de foutoir.

( je suis obligé  d' évoquer ma discussion avec princeps excusez-moi)

en bref  je faisais une assimilation de Daesh avec le nazisme
P me répond que c'est une absurdité
La comparaison avec le NSDAP est une ineptie, notamment sur la genèse du régime et sur « l’idéologie »sic
L'organisation de daesh ne pourra être comparée qu'a posteriori. L'Allemagne nazie a une organisation abracadabrantesque (sic princeps)

 partant de là P me cite un commentaire du livre de Neumann

Burrin Ph a écrit:Derrière la façade lissée par la propagande se déroule une lutte anarchique pour le pouvoir entre quatre groupes rivaux - l'armée, la bureaucratie, le parti, l'industrie — qui fonctionnent selon le principe d'autorité et sont dotés de pouvoirs législatifs, judiciaires et administratifs propres leur garantissant une très large autonomie. La prise de décision en devient difficile et irrationnelle, débouchant sur des compromis boiteux que le Führer se borne à entériner en les soignant de sa légitimité charismatique. On voit tout ce que les tenants actuels de l'interprétation polycratique et fonctionnaliste du IIIe Reich doivent à cet ouvrage. En refusant de prendre pour argent comptant l'image que le régime donne de lui-même, F. Neumann a ouvert des perspectives novatrices sur la structuration du pouvoir nazi, le pluralisme de ses soutiens et leur débridement institutionnel ; mais le prix en est bon nombre de jugements contestables.

Bon  j'arrête c'est assez clair sur le " foutoir" supposé.
..............................
 Cela dit ma comparaison de Daesh avec le NSDAP ne visait pas l'organisationnel mais l'ldéologique.
Non pas la cruauté des deux mais le ciment d'une foi. Le ciment de la charia stricte dans le cas de Daesh.
 Ce qui a pu faire tenir le nazisme c'est le ciment d'une foi intégrée par un maximum d 'individus.  Dans le cas de Daesh c'est intégré par la totalité des individus.

Avec une différence en l' Allemagne nazie et Daesh.
Dans l' état islamiste il n'y a pas de droit ou plus exactement le droit coïncide avec la charia.
D'où théoriquement moins d'antagonismes entre des fractions de pouvoir ( juridique, politique, administratif ,économique, syndicaliste, corporatiste et pouvoir personnel d' individus jouant pour eux mêmes) que dans l' Allemagne nazie.(théoriquement)

Pour moi c'est clair, au delà du foutoir organisationnel possible ce qui fait tenir une société, c'est une foi commune, intégrée par un maximum d 'individus...par une maximum de ceux ayant un pouvoir de décision.
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Message par hks Mer 3 Fév 2016 - 23:01

extrait tiré du livre de Neumann ( Neumann est marxiste ce qui marque toute son analyse  et, de plus, écrit pendant la guerre. Dans ce livre il ne sait pas si l'Allemagne va être vaincue).


politique.
Neumann a écrit:Les juristes nationaux-socialistes aux idées les plus avancées. Reinhard
Hahn 21 et Gottfried Neesse 22• rejettent la notion même d'Etat. et
leurs thèses ont reçu !"accueil le plus favorable 23 . Ils refusent l'un et
l'autre le concept de personnalité de l'Etat. qualifié de pure conception
libérale, car, expliquent-ils, si l'on accepte le concept d'Etat, ceux qui
exercent le pouvoir ne sont plus que ses organes. Selon eux. en
Allemagne, le pouvoir politique réside dans la personne du Chef, qui
n 'est pas l'organe de l'Etat. mais constitue lui-même la communauté , et
n'agit pas en tant que son organe. mais en tant que personnification de
la communauté . Neesse distingue trois pouvoirs indépendants de rang
égal : le parti, l 'armée et !"Etat (qui signifie pour lui la bureaucratie). Le
Führer est situé au-dessus d'eux et << n 'agit pas seulement pour le peuple
ou à sa place mais en tant que peuple 24 » . Il n'utilise le parti. l 'armée et
l'Etat comme i nstruments que parce qu'il lui serait impossible de tout
réaliser lui-même. Ce ne sont pas les sophismes de cette nouvelle
théorie de la transsubstantiation qu'implique !"identification du Chef et
du peuple qui nous i ntéressent. mais plutôt les conséquences qui
découlent de cette théorie. Cette doctrine constitutionnelle nationalesocialiste
très avancée , bien qu'elle soit critiquée par Carl Schmitt luimême
25, reconnaît franchement que ce n 'est pas l'Etat qui unifie le
pouvoir politique. mais qu'il y a trois (en fait quatre selon moi) pouvoirs
politiques coexistants dont l'unification est seulement personnalisée et
non institutionnalisée.
On peut aisément admettre qu'en droit constitutionnel,
comme en tout autre domaine , les théories de la communauté
populaire et de l'autorité soient de purs paravents cachant le pouvoir
d'appareils bureaucratiques à la croissance monstrueuse . Mais ces
théories détiennent peut-être une part de vérité : il est en effet difficile
de donner le nom d'Etat à quatre appareils concluant un marché.
En
fait. mis à part le pouvoir charismatique du Chef, aucune autorité ne
coordonne les quatre pouvoirs, et le compromis ne peut nulle part se
conclure sur une base universellement valide.

Mais si la structure nationale-socialiste n'est pas un Etat, qu'est-elle
donc ?

Je me risquerai à suggérer que nous sommes en présence d'une
forme de société dans laquelle les groupes dominants contrôlent
directement le reste de la population . sans la médiation de cet appareil
rationnel bien que coercitif connu jusqu'ici sous le nom d'Etat. Cette
nouvelle forme sociale n ·est pas encore parvenue it maturité . mais la
tendance existe et définit la nature même du régime.  page 438

http://www.histoireebook.com/index.php?post/Neumann-Franz-Behemoth-Structure-et-pratique-du-national-socialisme
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Message par Courtial Mer 3 Fév 2016 - 23:38

Bergame a écrit:
Courtial a écrit:Le lien ne dit pas de quel "foutoir" on parle. C'était un foutoir naturellement puisque c'était un régime fasciste, ça c'est le jugement politique. Mais ce n'était pas économiquement un foutoir. L'industrie allemande était organisée et de toute manière, les éventuels gêneurs (syndicalistes, communistes, socialistes) ont été liquidés dès le départ. On leur a coupé la tête  comme à Sophie Scholl.
Au plan social, le Führerprinzip fonctionnait.
Le foutoir était surtout institutionnel, je crois. Hitler était un artiste raté, mais politiquement, c'était un bon pianiste. Il avait une main droite et une main gauche totalement indépendantes. Ainsi, il y avait d'un côté le Gouvernement, mais il y avait aussi le Parti. Alors certes, en théorie, le gouvernement était l'émanation du Parti, mais en réalité il y avait partage, mais un partage dans lequel les périmètres étaient délibérément confus. C'est-à-dire qu'un membre du gouvernement n'était pas simplement "doublé" par un membre du Parti - saine logique de répartition : je donne un pouvoir, je construis aussitôt un contre-pouvoir - , mais il était "doublé" par quelqu'un du Parti qui n'avait pas le même périmètre. Ils ne pouvaient même pas s'entendre entre eux.
C'était voulu, mettre le foutoir nous conduisant à aspirer vers un ordre, et je vous laisse deviner qui c'est-y qui, à la fin, mettait fin au foutoir ?
Je vous le donne en mille.
Un indice ?
Ca commence par "Adolf" et ça finit par "Hitler".
Vous avez trouvé ?
Oui, il me semble que tu paraphrases Kershaw, là, non ? Une description effectivement particulièrement intéressante et édifiante du régime nazi puisqu'elle donne l'image d'un régime qui a systématisé le principe de séparation des pouvoirs. J'avais trouvé cela aussi très frappant, et inattendu.

Oui, Kershaw, certainement, mais c'est confirmé par les études plus délimitées. Moi, je me suis interessé en particulier à la politique kulturelle (c'est plus dans mes cordes) du camarade Dolfi. Lionel Rochmann  avait fait un livre là-dessus. Il y a des choses dans Pascal Ory aussi. Et chez moi des  explications au sujet de la musique.
Tout cela forme un portrait assez cohérent.

Et si les Anglais ont, depuis un bon moment, les plus grands historiens du monde, c'est pas ma faute.


Dernière édition par Courtial le Mer 3 Fév 2016 - 23:55, édité 3 fois

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Message par hks Mer 3 Fév 2016 - 23:42

à neopilina
L'Allemagne nazie n'a rien d'un foutoir, c'est tout le contraire, c'est par exemple une bureaucratie comme seuls les totalitarismes en ont le secret.
exemple concret . Dachau .

Le 22 mars 1933, la police de Bavière ouvre un camp pour communistes dans une ancienne manufacture de poudre et de munitions sise sur la limite des communes d’Etzenhausen et Prittlbach, tout près de la petite ville de Dachau. Dans le bâtiment administratif de la fabrique, ceinte de barbelés, sont internés les premiers communistes tirés des prisons de Stadelheim-Munich et de Landsberg, et surveillés par 54 policiers de Munich. On signifie aux prisonniers qu’ils sont en détention préventive.


Le 1 avril 1933 Himmler est nommé président de la Gestapo de Munich. Pour n’être pas en reste face à ses rivaux SA, à Göring ou à certains Gauleiter qui avaient mis en place leurs propres camps dès début février 1933, Himmler place immédiatement ce camp sous l’autorité des SA et des SS dont il est le chef, et ce malgré les protestation de la police de Munich. Dans la nuit du 11 avril, les SS prennent en main le camp et sont immédiatement « mis au parfum » par leur chef, le SS Oberführer Freiherr von Malsen-Ponickau :  : « Nous ne sommes pas venus ici pour traiter ces salopards de m… de façon humaine. Nous ne les considérons pas comme des hommes comme nous autres, mais comme des hommes de seconde classe ! »
Je veux mettre en évidence un coup de force. L' opposition là par exemple entre  la police de Munich versus la SS. IL y eut foule de conflits ( entre la Wehrmacht et la SS  c'est connu...mais ailleurs et au sein de la SS aussi.)
Sans autorité juridique supérieure et indépendante pour les régler.


Toutefois dans les années 70 des historiens allemands (tels que Martin  Broszat , Hans Mommsen) commencèrent à réinterpréter le 3eme Reich… Ces recherches firent apparaître une Allemagne nazie ressemblant moins à un monolithe totalitaire qu' à une enchevêtrement d’ agences d’ état et du parti en concurrence les unes avec les autres, présidées par Hitler de manière souvent erratique et au sein desquelles les politiques étaient le plus souvent des résultats de compromis entre des individus ou des gré groupes d’individus et des groupes  d’ intérêts puissants.
tiré du livre de david cesarini sur Eichmann ( C'est dans l'introduction si le lien fonctionne Bison futé et l'autonomie - Page 7 177519025 )

https://books.google.fr/books?id=zqZSCwAAQBAJ&pg=PT12&lpg=PT12&dq=Allemagne+nazie++conflits+internes&source=bl&ots=IrfBiCcgZs&sig=D_n8xb71ikhiIwMLDEpP6WaAwa0&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjS2a-v0tzKAhUJNhoKHYySDn44ChDoAQgbMAA#v=onepage&q=Allemagne%20nazie%20%20conflits%20internes&f=false
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Message par neopilina Jeu 4 Fév 2016 - 23:40

hks a écrit:Toutefois dans les années 70 des historiens allemands (tels que Martin  Broszat , Hans Mommsen) commencèrent à réinterpréter le 3eme Reich… Ces recherches firent apparaître une Allemagne nazie ressemblant moins à un monolithe totalitaire qu' à une enchevêtrement d’ agences d’ état et du parti en concurrence les unes avec les autres, présidées par Hitler de manière souvent erratique et au sein desquelles les politiques étaient le plus souvent des résultats de compromis entre des individus ou des gré groupes d’individus et des groupes  d’ intérêts puissants.
tiré du livre de David cesarini sur Eichmann.

C'est moi qui souligne. Je comprends mieux le " foutoir ", je connais mal l'organisation interne de l'Allemagne nazie ( Un peu mieux le conflit. ), mais il semble donc qu'elle soit à l'image de son dirigeant ...

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Message par baptiste Ven 5 Fév 2016 - 8:42

Le texte de Neumann, cité par HKS, illustre la complicité générale dont a bénéficié un régime dictatorial unique dans l’histoire, régime qui est l’illustration la plus parfaite d’une personnalisation du pouvoir à tous les étages sans idéologie autre que la haine et la terreur, cette dérive se fonde dans ce qui hantait les républicains romains : la disparition de la chose publique.

Cette même question s’est posée à toutes les époques révolutionnaires, et Néo si le régime de Mao à perduré c’est que Mao n’a exercé de pouvoir absolu que pendant certaines périodes, les plus catastrophiques par ailleurs, qu’il a été par deux fois écarté du pouvoir réel pour ne rester qu’un symbole de la révolution. Il existait dans les élites politisées du parti une tradition de l’intérêt public, de la chose publique, une culture politique, appelons cela comme nous le voulons.

L’exemple allemand est unique dans l’histoire, à qui la faute? Bison futé et l'autonomie - Page 7 2838363678

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Message par Bergame Ven 5 Fév 2016 - 10:06

Intrigante question ! A qui la faute, donc, selon toi ?

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Message par hks Ven 5 Fév 2016 - 18:40

Je trouve bien des réponses chez un auteur que je ne connaissais pas et que je découvre avec son dernier ouvrage

La Gouvernance par les nombres
Alain Supiot
en partie lisible ici
https://books.google.fr/books?id=y85-BgAAQBAJ&pg=PT241&lpg=PT241&dq=la+gouvernance+par+les+nombres+pdf&source=bl&ots=WTcM9icsVX&sig=KW-AVt1rInN44u6lxVjXFv4Ayow&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjNlcyXlOHKAhVL1xoKHczBA2kQ6AEIPjAG#v=onepage&q=la%20gouvernance%20par%20les%20nombres%20pdf&f=false
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Message par baptiste Dim 7 Fév 2016 - 10:08

Bergame a écrit:Intrigante question ! A qui la faute, donc, selon toi ?

Il ne s’agit pas de désigner un bouc émissaire juste d’une interrogation, comment rendre intelligible l’incompréhensible.

Au premier chef des responsabilités il y a sans aucun doute les masses allemandes, un peuple qui mu par une soif de revanche a confondu nationalisme et militarisme. Les historiens soutiennent que les masses allemandes, convaincues que seul un état fort autoritaire était capable d’accomplir la destinée allemande, ne voulaient pas de la démocratie imposée par la défaite et la volonté de l’étranger. Cet idéal d’un état fort était le seul capable de transcender les différences sociales, il suffisait d’ajouter le ciment d’une haine commune vulgaire pour obtenir la massification du phénomène. Il est facile de constater que de la vieille noblesse prussienne aux masses populaires en passant par les intellectuels et la bourgeoisie toutes les catégories sociales ont adhéré à ce message. Ce n’est pas tant la crise économique que la faculté de concilier dans une même idéologie nationalisme et socialisme, ces deux aspirations essentielles du XX siècle, tout en désignant un bouc émissaire qui permit de transcender les différences sociales.

Le grand malheur des allemands et du reste du monde c’est d’avoir cru une bande d’aventuriers inconséquents capables de réaliser cet idéal et d’avoir assuré le succès des nazis jusqu’à ce que l’impasse entraîne une évidence, la guerre devenue incontournable.

Comment expliquer cet aveuglement collectif, comment expliquer la complicité générale, le silence assourdissant lorsque ce n’est pas la complicité active des intellectuels « ariens ». Est-ce le produit d’une histoire allemande particulière, du luthérianisme, une forme de protestantisme si spécifique, était-ce en germe dans l’impérialisme allemand de Bismarck ?

Après il y eut le Cambodge et le Rwanda et on se dit que finalement non ce ne peut-être à ce point lié à ce point à un seul peuple. Mais si on creuse un tout petit peu autour de ces deux génocides, on s’aperçoit que le Rwanda est une ancienne colonie allemande et que cette division administrative entre Hutus et Tutsi à l’origine du génocide avait été imaginée par la puissance coloniale allemande à laquelle les belges n’avaient fait que succéder. Quand au Cambodge, à l’origine du désastre humanitaire il y eut la tentative de mettre en œuvre une pensée allemande.

Alors on se pose la question : est-ce une pathologie allemande ? Existe-t-il un sésame interprétatif alternatif ? Existe-t-il différentes formes d’universalisme moral?



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Message par Courtial Dim 7 Fév 2016 - 18:24

baptiste a écrit:Au premier chef des responsabilités il y a sans aucun doute les masses allemandes, un peuple qui mu par une soif de revanche a confondu nationalisme et militarisme. Les historiens soutiennent que les masses allemandes, convaincues que seul un état fort autoritaire était capable d’accomplir la destinée allemande, ne voulaient pas de la démocratie imposée par la défaite et la volonté de l’étranger. Cet idéal d’un état fort était le seul capable de transcender les différences sociales, il suffisait d’ajouter le ciment d’une haine commune vulgaire pour obtenir la massification du phénomène. Il est facile de constater que de la vieille noblesse prussienne aux masses populaires en passant par les intellectuels et la bourgeoisie toutes les catégories sociales ont adhéré à ce message. Ce n’est pas tant la crise économique que la faculté de concilier dans une même idéologie nationalisme et socialisme, ces deux aspirations essentielles du XX siècle, tout en désignant un bouc émissaire qui permit de transcender les différences sociales.

Avec la meilleure volonté du monde, je ne peux pas laisser dire cela sans réagir.
J'observe d'abord que la légitimation est circulaire. On explique le nationalisme parce que Weimar aurait été quelque d'imposé par l'étranger comme on explique que si on est antisémite, c'est parce que les Juifs sont méchants. Il faudrait de temps à autres que le hamster sorte de sa roue.
Deuzio, je lis ci-dessus très exactement l'interprétation nazie de cette affaire, avec en particulier le mythe d'une disparition des classes, le Junker comme le chômeur tous pareils, communiant tous dans le Culte du Führer, etc.
Retrouver la logomachie de Goebbels, ça témoigne pas d'un effort intellectuel très intense.A mon avis, l'idée, c'est d'essayer d'aller un peu plus loin que Goebbels même si je concède que son compliment est bien troussé.

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Message par Hervé BOURGOIS Lun 8 Fév 2016 - 12:17

La culture est toujours celle des vainqueurs, il en va donc de même pour la morale. Nous ne pouvons pas juger de la culture des vaincus, ce n’est pas la nôtre. Se chamailler sur des choses que nous ne pouvons pas comprendre et que nous ne voulons pas n’est pas très utile… La morale est ce qui est, aujourd’hui, nous ne savons pas juger ce qu’elle pourrait être, car ce ne serait plus la nôtre. Chercher à définir ce qui est bien ou mal ne peut que nous conduire à affirmer la morale actuelle. Ceux qui n’y arrivent pas sont ceux qui ont été vaincus, parce que le temps n’a pas encore effacé les plaies. Ceux qui peuvent définir ce qui est bien ou mal doivent pouvoir l’imposer aux autres, ce n’est pas le cas des philosophes. La question de la morale ne peut donc se poser qu’en cherchant à quoi elle sert, aujourd’hui. Le passé peut nous y aider, pas en cherchant dans le contenu mais dans l’utilité. Une fois que nous saurons à quoi elle sert, nous pourrions arriver à comprendre pourquoi et comment elle peut évoluer, comment l’être humain pourrait la maîtriser ou au moins apprendre à vivre avec.

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Message par kercoz Lun 8 Fév 2016 - 13:20

Hervé BOURGOIS a écrit:[justify]La culture est toujours celle des vainqueurs, il en va donc de même pour la morale. Nous ne pouvons pas juger de la culture des vaincus, ce n’est pas la nôtre.

He be !
Tu fais dans les certitudes au moins. Tu es persuadé de faire parti des vainqueurs. Il semble que tu estime la morale et la culture comme des éléments fluctuants, des variables aléatoires ....C'est une conception qui s' oppose au point de vue éthologique qui implique des rigidités comportementales déterministes plus influentes.
J' avoue que je trouve ton argumentation politiquement dangereuse. Dans le sens ou elle semble argumenter en faveur d' un individualisme destructeur et ( a mon humble avis) suicidaire du point de vue civilisationnel.
Mais , bon . Tu fais comme tu le sens hein.

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Message par Courtial Lun 8 Fév 2016 - 14:03

Je suis moi-même assez sceptique sur cette idée - qui ne frappe pas par son originalité et que je crois maniée le plus souvent par des demi-habiles - que "l'Histoire est écrite par les vainqueurs", comme on dit. Ceci d'abord parce que, dans l'Histoire, je ne crois pas si facile de désigner des "vainqueurs". C'est moins clair, je crois, que de savoir qui a gagné une partie d'Echecs ou un match de tennis. Et il arrive souvent que ceux qui se croient ou qu'on désigne comme les vainqueurs se révèlent être, in fine, les perdants. C'est aussi que l'Histoire est "mouvement" (pour faire plaisir à Hervé) et qu'elle ne s'arrête pas à la fin, comme il advient dans les matches de tennis. La fin, personne ne la connaît et il est très imprudent de croire qu'on a gagné. Il y a parfois des réveils difficiles, des lendemains de cuite désagréables, n'est-ce pas, Monsieur Fukuyama ?

Je serais plus prudent encore pour ce qui touche à la morale, qu'on ne peut d'ailleurs pas mettre en parallèle si vite, je crois, la morale ce n'est pas l'histoire, l'analogie est lointaine. Mais même en l'admettant, je ne suis pas sûr que la morale soit écrite par des "vainqueurs". Si je lis Nietzsche par exemple (je ne vois pas d'autres sources philosophiques qui appliquent à la morale l'opposition gagnant/perdant, ceci défini comme un caractère psychologique du sujet moral (1), j'ai même l'impression que, pour la "généalogie de la morale", elle enseigne au contraire que ce sont les faibles et les perdants qui gagnent.

(1) Je veux dire pas au sens où la morale consiste à chercher à gagner (ou à perdre), ça c'est l'utilitarisme, mais au sens où la personne est lui-même un winner ou un looser - dès qu'on parle de cela, on est obligé de passer à l'anglais - dans une anthropologie essentialiste, des qualités occultes, etc.

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Message par Hervé BOURGOIS Lun 8 Fév 2016 - 14:17

Discutons-en.

Kercoz a écrit:Tu es persuadé de faire partie des vainqueurs.

Je suis français et je parle français (enfin j’essaye), cela signifie que j’ai été vaincu par les romains il y a bien longtemps, maintenant je suis dans le camp des vainqueurs, celui des romains. J’entends parler de choses tels que l’âme, le libre-arbitre, cela signifie que j’ai été vaincu par le christianisme issu du judaïsme… maintenant, je suis encore dans le camp des vainqueurs car c'est mon éducation et ma culture. Je n'ai pas choisi, je sais pas dire si c'est bien ou mal. Nos ancêtres ont vaincu le nazisme, cela signifie que j'ai gardé ma culture.
Kercoz a écrit:Il semble que tu estimes la morale et la culture comme des éléments fluctuants, des variables aléatoires. C'est une conception qui s'oppose au point de vue éthologique qui implique des rigidités comportementales déterministes plus influentes.

Je ne comprends pas bien ce que tu appelles des variables aléatoires… Je parle français et pas latin, cela signifie que la culture change. Elle change au rythme d’événements qui induisent des réponses humaines. Que nous n’ayons pas connaissance des délais pour changer les comportements qui en découlent, ni de maîtrise sur la propagation de ses comportements au sein d’une société, ne signifie pas que nous ne puissions pas parler de culture en général, comme si c’était la même pour tous (tout en sachant que c'est faux).
Kercoz a écrit:J'avoue que je trouve ton argumentation politiquement dangereuse. Dans le sens où elle semble argumenter en faveur d'un individualisme destructeur et (à mon humble avis) suicidaire du point de vue civilisationnel.

Je ne comprends pas ce que tu veux dire. Et je ne comprends pas ce qui est politiquement dangereux. Le fait que la culture (concept abstrait) s’impose n’a pas grand-chose à voir avec l’individualisme (concept que je comprends à peine). Le fait qu’un changement s’impose par la force (dans un sens très large) n’est qu’un constat.

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Message par Hervé BOURGOIS Lun 8 Fév 2016 - 14:36

J’espère avoir répondu à tes interrogations dans ma réponse précédente.

Courtial a écrit:Je serais plus prudent encore pour ce qui touche à la morale, qu'on ne peut d'ailleurs pas mettre en parallèle si vite, je crois, la morale ce n'est pas l'histoire, l'analogie est lointaine. Mais même en l'admettant, je ne suis pas sûr que la morale soit écrite par des "vainqueurs". Si je lis Nietzsche par exemple (je ne vois pas d'autres sources philosophiques qui appliquent à la morale l'opposition gagnant/perdant, ceci défini comme un caractère psychologique du sujet moral (1), j'ai même l'impression que, pour la "généalogie de la morale", elle enseigne au contraire que ce sont les faibles et les perdants qui gagnent.

La morale ce n’est pas l’histoire, je suis d’accord, d’autant plus que la morale trouve des sources au-delà des écrits. Mais, cela ne signifie pas qu'il n'y en a pas de trace dans l’histoire.

Il faudrait définir plus précisément ce que vous appelez morale. Pour ma part, ce sont les règles de vie en société, le droit, je ne dois pas voler, et les usages, je ne sors pas nu dans la rue. Vous (tous les deux) avait pris le terme vainqueur dans son sens militaire. Une règle est toujours imposée par un groupe d’individus au détriment d'un autre, celui qui impose la règle est le vainqueur, ce n’est pas forcément la majorité, ce n’est pas forcément une minorité armée, cela peut-être par les armes… Par exemple, la prohibition aux États-Unis avait été imposée par la force. Ce n’est pas une règle morale ? Je ne pense pas ce que soit les faibles ou les perdants qui puissent imposer des règles…

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