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Husserl, Ideen 2

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Husserl, Ideen 2 Empty Husserl, Ideen 2

Message par Bergame Ven 21 Sep 2007 - 22:10

D'Olaf, Philautarchie



Ideen, section 2 : Considérations phénoménologiques fondamentales



Ce sujet fait partie de l'ensemble de sujets portant sur les Ideens.

Cette section pénêtre au coeur des principes de la phénoméologie. Lire ce texte est passionnant, mais difficile. D'autant plus qu'il y a beaucoup d'informations. Je vais donc présenter les idées dans leur succession pour aboutir à une première vue d'ensemble. Dans cette première partie, deux objectis : 1) Vous présenter la réduction phénoménologie ; 2) Esquisser une vue éidétique de la conscience.

*** *** ***


I - La réduction phénoménologique

1 - Thèse de l'attitude naturelle

Que je sois cartésien, kantien ou hegelien, je suis toujours en face d'un monde. Quelque soit ma façon de le penser, la façon de me considérer, j'ai beau fermer les yeux, lorsque je les ouvre, le monde reste là. D'ailleurs, j'ai une foi naturelle dans le monde, je me déplace dedans avec confiance, je retrouve les mêmes choses aux mêmes endroits. C'est la thèse du monde. Le terme "thèse" est assez intéressant, il faut le comprendre comme poser quelque, comme lorsque l'on pose une thèse, puis une antithèse. Le monde est là, quoique je fasse, il restera là.


2 - Épokhè, suspension de la thèse

Pour Husserl, il n'est nullement question d'élaborer une philosophie qui met en doute le monde. Ce que, précisément, fait le doute cartésien. Le doute cartésien est une antithèse, une destruction du monde. Husserl, lui, va suspendre cette question. C'est l'épokhè.

L'épokhè, c'est la mise entre parenthèse, la mise en suspens. Le monde est là, soit. Mais je ne décide pas de son existence, ni de son inexistence. Le monde est un , et c'est comme tel que je dois le prendre. Que je sois solipsiste ou matérialiste, je suis engagé dans ce du monde, dans cette attitude naturelle. L'épokhè n'altère en rien cette attitude naturelle, elle suspend simplement la thèse du monde. L'épokhè est plus profond que le doute, car elle est avant la négation. Le monde peut être ou n'être pas.

Mais maintenant que j'ai suspendu la question de l'existence du monde, que me reste t-il ?


3 - Après réduction : reste la conscience d'un monde

Je viens de suspendre la thèse du monde par l'épokhè. Par là, j'ai mis hors circuit tout un ensemble de chose, il s'agit d'une réduction phénoménologique. Conclusion : "Je suis, je pense" et "j'ai un monde en face de moi".

La sphère du Cogito subsiste. Il faut bien entendre le Cogito comme un ensemble de vécu propre à une sphère consciente (je perçois, je me souviens, j'imagine, je juge, je sens, je désire, je veux...). C'est l'ensemble du flux du vécu. Et ce Cogito est en face d'un monde, qui est là, en face de lui, permanent.

Maintenant peut s'ouvrir la nouvelle science : l'investigation éidétique de ce Cogito et de son monde. C'est-à-dire, la recherche de l'essence de la conscience en face de ce , une fois la réduction opérée.


II - L'investigation éidétique de la région "conscience"

1 - Cogito / Cogitatio / Cogitatum

Je suis à mon bureau, face à une feuille blanche et à mes livres. Je perçois ce bureau sous un certain angle, selon une certaine luminosité. Je suis assis, et je ne vois pas ce qu'il y a derrière la face cachée de ce bureau. Cet angle de vue, cette visée perceptive qui m'est propre, c'est la Cogitatio.

À ce bureau que je perçois s'oppose l'objet de ma perception. Ce bureau tel qu'il est dans l'espace physique, tel qu'il est dans l'étendue face à d'autres objets.

    Cogito (flux du vécu) -> Cogitatio (perception) -> Cogitatum (perçu)


2 - Objet explicite actuel / Fond implicite inactuel

Toujours à notre bureau, analysons notre Cogitatio. Il y a ce livre, en face de moi, un livre de Husserl. Ma conscience porte toute son attention à cet objet. Elle est dite actuelle, explicite. Pourtant, la pièce n'a pas disparu. Quand bien même je ne porte mon attention qu'à ce livre de Husserl, il y a d'autres livres à côté, des feuilles, mon ordinateur... Bref, un arrière plan, un fond à cet objet. Si une feuille s'envole, je la percevrai, car j'ai une forme de conscience de cet arrière. Cette conscience est dite inactuelle, implicite. À tout moment, je peux ballader mon attention et renverser l'inactuel en actuel. L'arrière-fond inactuel est donc un potentiel.

D'ailleurs, je me rend vite compte en analysant cette Cogitatio que cela n'est pas valable que pour la perception mondaine, la perception d'un objet du monde. Si je me remémore un souvenir, un rêve, ou que j'imagine une scène fantaisiste, ma conscience va porter son attention sur un objet avec son arrière-plan. Très vite, je m'aperçois qu'il s'agit d'une propriété générale de la conscience que d'être tournée vers un objet. Je découvre l'intentionnalité.

L'intentionnalité consiste en ceci : toute conscience est conscience de quelque chose. Quelque soit le vécu, quelque soit la clarté de la perception, la conscience est tournée vers un objet.


3 - L'objet intentionnel et les Data des sens

Mais c'est très étrange lorsqu'on y réfléchit : Je prend en main ce livre de Husserl, et je le tourne dans tous les sens. J'en vois différentes faces, différents aspects, et pourtant, pourtant ce livre reste le même. Je peux le contourner, le regarder de différents endroits, ce livre garde son unité profonde. Je viens de découvrir une autre propriété éidétique de la conscience : elle est synthétique. C'est-à-dire, qu'elle unifie le flux de la perception.

Car la perception, lorsqu'on y réfléchit, consiste en premier lieu en des matériaux sensoriels. Ce livre frappe par sa blancheur. Je le touche, et le papier est rugueux mais la couverture est lisse.
Bref, la perception en son fond consiste en des Data de sensations / affections. Les Data pour Husserl, sont la matière de la perception. Matière saisie par mon corps. Ma conscience intentionnelle va appliquer sa forme, synthétiser le divers du flux en un seul et unique objet.


4 - Cogitatio immanent

Seulement voilà, avec toutes ces découpes éidétiques, il ne faut pas perdre de vue l'expérience empirique. Avant que je ne prenne conscience de ma perception du livre, lorsque je contemplais encore innocemment sa couverture sans me soucier des caractéristiques éidétiques de cette expérience, lorsque j'étais immergée dans l'attitude naturelle, est-ce que cette cogitatio consistait en un objet intentionnel pour la conscience qui résulte de la synthèse du flux sensoriel ?

Et bien non. Ce livre était un, total. C'était juste un livre. Si ma conscience unifie le flux du divers et qu'elle impose sa forme, tout cet ensemble de mécanismes transcendantaux est immanent à l'objet. Ma conscience du livre est immanente à son objet :

    "La perception et le perçu forment par essence une unité sans médiation, l'unité d'une cogitation concrête unique."
    Husserl, Ideen, p.123

Bref, ma conscience est profondément entrelacée au monde. La perception est immanente au perçu.


Dernière édition par le Ven 21 Sep 2007 - 22:57, édité 2 fois
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Message par Bergame Ven 21 Sep 2007 - 22:23

Nous allons maintenant détailler l'articulation de deux paragraphes célèbres : le § 49 et le § 50. Le premier porte sur le refus d'une chose en soi et la mise à jour du caractère absolu de la conscience. Le second porte sur la fonction intentionnelle constitutive de la conscience.

*** *** ***


L'anéantissement du monde

Avec l'Épokhè, c'est-à-dire la suspension de l'attitude naturelle, nous avons court-circuité le monde et les sciences qui lui sont rattachées : science de la nature, physique, sciences humaines. Ces sciences sont sûrement valides, mais elles le sont pour mon monde, pour le monde en face de moi. La nature et les sciences de la nature (sciences mondaines) sont nécessairement secondes face à la science de la perception de la nature : la phénoménologie.

Bref pour l'instant, nous sommes encore dans une logique de la chose et de l'apparaître de la chose : Une perspective kantienne. Mais au paragraphe § 49, Husserl entend refuser la chose-en-soi. Ou plutôt, montrer qu'il n'est pas nécessaire de poser l'existence d'une chose-en-soi pour permettre l'existence de mon monde.

Avant d'aller plus loin dans l'exposition de cette audacieuse hypothèse, je dois préciser ce qu'est l'esquisse. Lorsque je tourne un livre, il reste un : c'est toujours le même livre que je tourne en tout sens. Et pourtant, ce qui se passe en réalité si l'on y prête attention, c'est une succession des différentes facettes du livre, selon telle ou telle luminosité. La perception du livre est en réalité la perception d'une multiplicité, que je touche par esquisse, et quelque chose (quoi encore, on ne sait pas) vient unifier cet objet, pour, au final, ne percevoir qu'un seul et même livre.

Ces esquisses témoigneraient alors dans un premier temps, de l'existence d'une chose en soi. Ce que le sujet percevant touche du doigt, c'est l'en soi du livre, qu'il ne peut atteindre que par petites touches, que par des esquisses sucessives. La chose en soi vient assurer une solidité du monde, une permanence. Ce livre restera toujours le même livre. Les objets de ma conscience sont fixes par la présence d'un arrière fond.


Seulement voilà, Husserl va renverser ce rapport. Est-ce que la présence de ces esquisses valide nécessairement une chose en soi ? Est-ce que l'unité de ces esquisses est assurée par l'unité d'une chose en soi ?

Je peux très bien imaginer un monde simplement fait d'esquisses. Un monde pareil serait alors nécessairement chaotique. Je peux détruire le monde en pensée. Si je peux détruire le monde en pensée, imaginer un monde d'esquisses généralisées, alors je ne suis pas dépendant d'une chose en soi qui régule l'unité des objets.

De plus, si je détruis le monde en pensée et que je coupe l'influence d'une chose en soi, que reste-t-il ? Ma conscience. Ma conscience continue d'être une conscience visant le chaos. Ma conscience survit, continue d'être, malgré le fait que j'ai reconnu n'entretenir aucun rapport avec une chose en soi, et malgré le fait que ma Cogitatio ne soit que ruine. Husserl en tire une conclusion radicale : la conscience est absolue, elle ne tire son existence de rien d'autre, et c'est même elle qui assure le support ontologique de mon monde.

Résumé : Si je peux détruire en pensée et peupler le monde d'esquisses, c'est alors moi qui assure l'unité de l'objet visé et non une chose en soi. Husserl refuse l'idée d'une chose en soi : le monde, c'est l'apparaître. La conscience et son monde sont alors absolus. Nous nous enfermons doucement dans une monade, que seule la Ve Méditation des Méditations Cartésiennes brisera.

*


De l'idéalisme à l'idéalisme transcendantal : l'intentionnalité

Avec l'hypothèse de l'anéantissement du monde, nous sommes désormais dans un solipsisme radical. Nous sommes dans une monade. Husserl vient de mettre à jour le caractère absolu de la conscience, et il va maintenant éclairer son rapport avec le monde sous l'angle de la signifiance. Nous étions dans un idéalisme, avec le §50 s'amorce le tournant transcendantal de cet idéalisme : la conscience est absolue et suffit pour valider ontologiquement le monde ; et c'est même la conscience qui constitue le monde.

Ayant coupé le rapport à la chose en soi, le sens des objets ne vient pas d'eux-même mais nécessairement de nous. L'intentionnalité est donatrice de sens !

    Le mot intentionnalité ne signifie rien d'autre que cette particularité foncière et générale qu'a la conscience d'être conscience de quelque chose.
    Husserl, Méditations Cartésiennes.

D'une part, la conscience est conscience de, elle vise un objet. D'autre part, nous avons vu que la perception synthétise le divers des esquisses : ce livre que je tournais tout à l'heure est une unité intentionnelle. Mais de plus, cette unité intentionnelle est chargée de sens, imprégnée d'une symbolique propre : je sais que c'est un livre de phénoménologie d'un auteur nommé Husserl, pas toujours facile, écrit il y a longtemps...

Puisque je suis l'être absolu de ma monade, que ma conscience est conscience de, alors ma conscience est elle-même constitutive. La conscience est donatrice. Elle donne du sens à ce qu'elle vise. Elle synthétise les esquisses du divers. Dans la sphère du monde, tout est unité de sens. La conscience constitue le monde. Nous aboutissons à une équivalence : voir c'est donner.

D'un idéalisme, nous aboutissons à un idéalisme transcendantal : la conscience opère, elle est constitutive. La conscience synthétise l'objet, elle l'unifie, et lui donne du sens.
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Message par Phydias Mer 3 Sep 2008 - 11:36

1- « Pour Husserl, il n'est nullement question d'élaborer une philosophie qui met en doute le monde. Ce que, précisément, fait le doute cartésien. Le doute cartésien est une antithèse, une destruction du monde. Husserl, lui, suspend la thèse du monde, c’est-à-dire la foi naturelle en celui-ci, par l’épochè. »

Les raisons de cette mise en suspens de la thèse du monde sont-elles les mêmes que Descartes, c’est-à-dire l’incertitude des idées reçues ?



2- « Je viens de suspendre la thèse du monde par l'épochè. Par là, j'ai mis hors circuit tout un ensemble de chose, il s'agit d'une réduction phénoménologique. Conclusion : "Je suis, je pense" et "j'ai un monde en face de moi". »

Est-ce que suspendre la thèse du monde ce n’est pas non plus suspendre la foi en notre perception (puisque je mets en doute la véracité de ce que je vois en questionnant l’existence du monde que je perçois) ? En ce sens, le fait que je puisse affirmer que « j’ai un monde en face de moi » découle-t-il du fait que si je perçois ou si je pense, je perçois ou pense nécessairement quelque chose (en l’occurrence un monde) ?

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Message par Courtial Dim 7 Sep 2008 - 18:44

Est-ce que suspendre la thèse du monde ce n’est pas non plus suspendre la foi en notre perception (puisque je mets en doute la véracité de ce que je vois en questionnant l’existence du monde que je perçois) ? En ce sens, le fait que je puisse affirmer que « j’ai un monde en face de moi » découle-t-il du fait que si je perçois ou si je pense, je perçois ou pense nécessairement quelque chose (en l’occurrence un monde) ?

Suspendre la thèse du monde est sans nulle doute suspendre la foi en la perception (et aussi en la mémoire, en la crainte, en l'espoir, etc.), mais ceci doit être soigneusement distingué de suspendre la perception elle-même.
C'est en ce sens aussi qu'il faut entendre ce que tu rappelles,
qu'il ne s'agit pas de "douter" au sens cartésien. Descartes veut fermer ses yeux et ses oreilles pour ne pas être troublé par le témoignage impur des sens, qui risque de nous éloigner du vrai (abducere mentem a sensibus). Chez Husserl, il ne s'agit pas de ne plus voir, mais de plus voir, mais en comprenant ce qui est à voir, c'est le voir lui-même. Je vais "voir" la relation perceptive si je fais abstraction de l'objet perçu dans sa modalité thétique (= en le réalisant).
Pour ce qui est de la question du "monde", ce que tu dis est encore exact, mais je crains que ta formulation recouvre ou engendre des ambiguités. On a l'impression dans ta question que c'est un pur effet logique (ou grammatical, transitivité du verbe percevoir) qui fait (que je pense) qu'il y a une monde, de sorte que je pourrais en quelque sorte le "déduire" de la perception. Or il n'y a nulle déduction ici. L'expérience transcendantale me confronte à un "monde" en face de moi, qui ne résulte nullement du fait que je perçois. Et c'est bien ainsi qu'il se présente à ladite expérience, qui le saisit certes comme un monde qui est pour moi, mais pas du tout qui est par moi.
La superficialité du réalisme qui conclut très vite de ma perception à une causalité extérieure produisant cette perception (une action de l'objet sur moi, une impression, etc.) doit être critiquée, mais non pour tomber dans la superficialité contraire d'un monde "produit" par ma sensation.

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Message par Phydias Lun 8 Sep 2008 - 10:32

Ce que je ne comprends pas c'est que, si il n'y a pas de doute husserlien, pourquoi suspendre la foi perceptive ? De plus, en quoi serait-il différent de suspendre la foi ou la perception elle-même puisque c'est finalement son principe de véracité qui est remis en cause ? Pour exemple : Je vois une chaise. Si je suspens la foi perceptive, je mets en doute le fait que ma perception puisse me donner une vérité. En conséquence, un double questionnement s'impose dans la suspension de la foi perceptive dans le cas présent : Ce que je vois est-il une chaise ? Plus encore, puisque je ne dois pas croire ce que je vois, est-ce que la chose que je vois existe réellement ? Suis-je en face d'une chaise comme je pourrais être "en face d'un monde" ?

EDIT :
Si pour Husserl n'importe que la réflexion (au sens de la rétention), qu'au "je vois une pomme" soit privilégié le "je me vois voir une pomme" comme tu me l'expliques, est-ce qu'il n'y a pas un problème qui se pose quant au fait que l'on ne soit pas certain que la pomme, même si elle n'est pas une pomme, est une chose existante que l'on dit pouvoir voir ?

Mon problème vient donc d'ici : Comment Husserl peut-il considérer une quelconque relation perceptive en suspendant la foi perceptive, c'est-à-dire en suspendant l'objet de ma perception ? Pour que je vois, il faut que je vois quelque chose, non ? Or est-ce que je vois ou crois-je voir ? En découle ma seconde question qui subsiste encore : comment affirmer que je suis "en face d'un monde" si l'existence de ce monde est mise en suspens dans la suspension de la foi perceptive ?

C'est aussi pour cela que ma seconde proposition apparaît comme un effet grammatical. Car je ne parviens pas à monter la première marche pour gravir la seconde.

Ton explication va paraître sans doute très clair à beaucoup mais je ne parviens pas à saisir ce qu'Husserl veut dire. Il manque pour moi un socle de vérité indestructible pour pouvoir poursuivre mon étude de sa philosophie. Désolé d'insister vraiment mais si tu pouvais m'en dire plus sur la distinction entre suspension de la foi perceptive et suspension de la perception car je pense que mon blocage vient du fait que je ne saisis pas cette différence du tout.

EDIT : J'ai bien compris que le noème monde, comme tout noème, est comme un point de buté pour la pensée, le quelque chose qui résiste à la "chaosification" (ouh le beau néologisme XD) du monde, cet indestructible de l'expérience. Ma difficulté vient juste de la compréhension et surtout de la valeur de cette thèse.

Merci :content:

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Message par Phydias Lun 8 Sep 2008 - 12:14

Une idée me vient en lisant la troisième partie des Ideens et je me demande si celle-ci ne répond pas en partie à ma question précédente :

Suspendre la foi perceptive, c'est suspendre la certitude de l'existence de l'objet. Voilà ce que je pensais. Pourtant, Husserl me dit que le noème est indestructible et son "être là" indubitable. Je fais l'expérience de quelque chose.
Pourtant, la réalité du noème ne semble pas être importante pour Husserl. Que la chose soit réelle ou non, et que je me trompe ou non quant à sa réalité, cela ne change rien à la structure noético-noématique. Car même si dans dans la suspension de la foi perceptive on doute de l'objet perçu, douter d'un objet c'est déjà une manière de poser l'objet comme existant.

On en revient un peu à ce que je disais précédemment mais mal formulé : c'est parce que je doute du noème (monde par exemple) que je ne peux refuser l'idée qu'il y a un noème ; le monde est en face de moi, et même si j'en doute en suspendant ma foi perceptive, je ne peux refuser que je doute bien de quelque chose qui est. Conséquence : le monde est et l'épochè serait une façon de poser les choses comme existantes.


C'est à peu près cela ?

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Message par Courtial Lun 8 Sep 2008 - 21:43

A la relecture, je continue de croire que ma première réponse suffisait. Mais si tu l'as mal comprise, c'est que je m'y suis mal pris et puisque aussi bien, ça ne te convient pas, je réessaye, avec plus de succès j'espère.
Tu conçois la perception comme inséparable d'une thèse ontologique sur l'existence du perçu. Là Husserl te dit que tu confonds des choses fort distinctes. Descartes ne dit rien d'autre au reste : il n'y a pas d'erreur des sens (dans la perception), il n'y a qu'une erreur du jugement, donc de l'âme, de la raison à propos des sens. C'est la Quatrième Méditation, très importante. L'opération par laquelle je pense une idée et celle par laquelle je l'affirme sont différentes. Pour la réfutation, voir Spinoza, Ethique II, prop. 48 et 49. Et au cas où on n'aurait pas compris, Descartes y revient dans la Sixième méditation.
D'où vient la confusion? Elle résulte du fait que la perception est un mode de rapport à l'objet qui le pose comme existant. C'est sa modalité. Je peux aussi me rapporter à cet objet en m'en souvenant (je me rappelle de mon ancienne maison que j'ai quittée) ou dans la protention (je songe à ma prochaine maison, la maison de mes rêves, etc.), mais là le souvenir comme l'espoir la posent comme non-existante (je la saisis comme une maison ayant été, donc n'étant plus, une maison devant-être, etc.). Je tiens à recommander à ton attention le fait que si je parlais de mon souvenir de mon ancienne maison en tant que maison n'étant pas, aucune de tes questions n'aurait de sens (qu'est-ce qui te prouve qu'elle n'est pas? Est-ce que ce n'est pas une croyance? Se souvenir, c'est se souvenir de quelque chose, etc.).

J'essaie de le dire encore autrement : la question de savoir comment je sais que ma perception n'est pas une hallucination (je résume ainsi, tu me corrigeras si j'ai mal compris certaines de tes questions), comment je distingue l'expérience du rêve (si je suspens l'idée qu'il y a quelque part un étant subsistant, etc.), eh bien tout cela tombe comme un château de cartes, si on veut faire l'effort d'adopter un regard phénoménologique. Tu passes ton Husserl Antivirus et tu effaces tout ça de ton disque dur. Et tu verras que ta bécane marche plus vite. Norton est trop parano, Descartes aussi : pourquoi chercher absolument à te soupçonner quand tu perçois la maison, demander si tu n'es pas un dingue qui s'imagine ou qui hallucine, ou si tu n'es pas en train de rêver, etc. Non, tu vires ces contrôles et tu vois simplement que lorsque tu te souviens, tu n'as pas le même rapport à l'objet que quand tu le vois, ou quand tu l'espères, ou quand tu le crains, etc.
Alors tu dis, il doit bien exister. Oui, mais dans les modes qui le posent comme existants, qui n'ont rien de plus digne, de plus insigne, plus métaphysiquement corrects que ceux qui le néantisent.

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Message par yahou Lun 8 Sep 2008 - 22:51

Hum… Désolé d'interrompre le flux, mais existe-t-il une synthèse claire des idées de Husserl sur lesquelles on s'accorde que c'est bien ce qu'il pense (quitte à laisser dans l'ombre ce qui reste obscur de toutes façons) ?

Merci d'avance!

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Message par Pierre Rivière Mar 9 Sep 2008 - 2:01

Prince herméneutique no.1 : De telles synthèses n'existent pas.

De toute façon, il vaut bien mieux lire les textes par soi-même et s'en faire sa propre idée.
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Message par Phydias Mar 9 Sep 2008 - 11:18

En résumé, je suis beaucoup trop cartésien dans ma faon d'aborder Husserl. Je pense simplement que Les Méditations Cartésiennes m'ont induit en erreur, en particulier la première méditation qui ressemble fortement à celle de celui qu'Husserl dit son prédécesseur en matière de phénoménologie. Mais Husserl ne suit pas Descartes, il le renouvelle plutôt... Jusque là je le pensais dans la même lignée, mais il y a un radicalisme ontologique chez Descartes qu'il semble falloir supprimer pour se dire "néo-phénoménologue" (j'emploie les termes d'Husserl lui-même).

Il y a un monde parce que je le perçois et il n'y a aucune raison de douter de son existence. Son existence ontologique nous importe peu, elle est en suspens dans la neutralisation de l'épochè.

Bref, j'arrête de me poser trop de question. C'est juste que le terme "suspension de la foi perceptive" se confond très vite avec "le doute cartésien". Mais le second est beaucoup plus radical (et dans ma philosophie propre, sans doute plus rigoureux).

En tout cas, merci beaucoup pour tes réponses. Elles m'ont beaucoup éclairé et j'espère que ma persistance désespérée à comprendre Husserl à partir de Descartes en aura convaincu quelques uns de sa presque inutilité. lol!

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Message par Bergame Mar 9 Sep 2008 - 11:35

:gsdgr:

Ce n'est sans aucun doute pas inutile. Wink

D'ailleurs, j'ai le sentiment qu'il n'y a pas meilleur moyen de comprendre la pensée d'un auteur que de chercher ce qu'il conserve et ce qu'il critique de la pensée d'un autre.
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Message par Phydias Mar 9 Sep 2008 - 12:20

Bergame reprend un peu plus loin dans son commentaire des Ideen 4 presque mot pour mot ce que j'ai dit un peu plus haut et finalement confirme un peu l'ambiguité grammaticale de ma question :

"Mais finalement, quand on y songe à deux fois, déterminer des caractères de probable, dubitable... Bref des caractères de doute, de négation... Ne faut-il pas un point de référence pour pouvoir douter ? Un point absolu ? C'est pourquoi pour Husserl tout jugement doxique se réfère à une proto-doxa, c'est-à-dire la croyance naturelle et certaine dans l'existence du monde. "

La proto-doxa est donc le principe même qui confirme l'existence du monde, "ce sol certain" qui fait que la pensée phénoménologique n'est pas vaine.

Je pense que c'est une bonne conclusion car tout devient clair pour moi dans l'élaboration de ce concept :gsdgr:

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Message par Bergame Mar 9 Sep 2008 - 19:25

Tant mieux, mais je répète : Je ne suis pas l'auteur de ces textes. J'ai indiqué qu'ils étaient d'Olaf, un intervenant du défunt forum Philautarchie, dont Digression essaie de prendre la suite. Je les ai simplement récupérés et repostés ici avec l'accord dudit Olaf. Je le reprécise parce que du coup, on m'accorde une compétence que je n'ai pas, et cela me met bien en peine. Merci Courtial de bien vouloir nous faire part de tes lumières. :)

Maintenant, Phydias, on compte sur toi pour nous faire part de tes progrès sur Husserl Wink
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Message par Phydias Mar 9 Sep 2008 - 20:13

J'attaque dès demain les Méditations cartésiennes. Donc vous n'avez pas fini de m'entendre avant que j'abatte définitivement Husserl lol!

*Hommage à Olaf*

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Husserl, Ideen 2 Empty Re: Husserl, Ideen 2

Message par Courtial Mer 10 Sep 2008 - 13:38

La question de la croyance originaire est importante - je n'y avais pas songé mais cela peut en effet, Phydias, être un aspect éclairant. J'aurai toutefois besoin d'y réfléchir et de retrouver quelques notes que j'avais prises là-dessus. J'essayerai de trouver le temps pour pouvoir y revenir bientôt sans dire trop de bêtises...

Mais je voulais surtout te poser une question , si tu me permets? As-tu une raison objective (travail à préparer, examen ou concours?) pour aborder Husserl par les Méditations cartésiennes? Je demande cela parce que je comprends mal la fixation qu'on fait sur ce texte, dont je ne nie pas la qualité, mais qui me paraît peu propice pour l'initiation. Les deux premières, passe encore, mais après cela devient très vite plus délicat, et ça finit sur la Cinquième méditation, une sorte d'Himalaya philosophique qui est une véritable torture pour le lecteur ! J'ai suivi l'an dernier la conférence d'un phénoménologue et lui ai posé une question dans ce sens, et il m'a répondu qu'il partageait ma perpléxité sur cette focalisation, la fascination qu'exerce ce texte. Il y a des textes plus faciles, par exemple Expérience et jugement, ou alors si c'est la réduction phénoménologique qui te pose problème, tout le deuxième volume de Philosophie première y est entièrement consacré, de façon beaucoup plus explicitée et abordable.
Parenthèse toutefois, les ouvrages dont je parle sont hors de prix. C'est ça que j'aime bien, dans la phénoménologie, on ne peut en parler qu'entre gens du beau monde, les prolétaires étant automatiquement écartés :gsdgr:
Une info : le livre de De Santi sur la phénoménologie (je ne suis plus sûr du titre, mais on doit le trouver facilement sur le Net... Introduction à la phénoménologie, un truc comme ça) est en fait essentiellement un commentaire sur les Méditations cartésiennes. Ceci dit, De Santi, c'est pas vraiment plus abordable que Husserl - mais bon, parfois, voir les choses présentées un peu autrement peut être éclairant, et son livre est très bon, de toute façon -et par ailleurs il ne s'attarde pas tellement sur les questions que tu évoques (et qui touchent au début de l'oeuvre) mais se concentre sur la vraie affaire de ce texte, l'abominable Cinquième méditation...

Une boutade, pour finir, et revenir à notre débat : tu notes que Husserl a fait 5 méditations alors qu'il y en a 6 chez Descartes. Il en manque une. Et de quoi s'agit-il dans la sixième méditation chez Descartes? D'établir enfin que les idées que j'ai sur le monde, la réalité, etc. correspondent bien au réel, qu'elles sont fiables, qu'il y a bien un être à mettre en face de mes idées. Eh ben, Husserl a cru bon de s'en dispenser :content:

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Message par Phydias Mer 10 Sep 2008 - 18:29

Je n'étudie pas Husserl dans un cadre prédonné. Je n'ai pas encore commencé mon année scolaire. :content:

Cependant, je suis très intéressé par les Méditations cartésiennes, non pas parce qu'on me les a conseillées, ni parce que cette œuvre philosophique est devenue culte dans l'étude de la phénoménologie. C'est juste que, comme je l'ai dit plus haut, je suis un grand admirateur de Descartes et que le titre d'Husserl m'a tout simplement interpelé. De plus, j'ai l'intention de spécialisé mon parcours en phénoménologie et je ne pense pas que je puisse couper au travers. perplexe

Je n'ai lu que 2 méditations sur les 5 pour l'instant et je n'y vois qu'un rappel de l'Ego cogito de Descartes, bien qu'il finisse par s'en éloigné au milieu de la seconde méditation. Donc pour l'instant, "no soucy" comme dirait l'autre :anxieux:

Je prends note du commentaire des MC. J'y jetterai sans doute un oeil.

Encore merci :impec:

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Message par helas.shinoda Sam 20 Mar 2010 - 21:18

Je trouve Dessanti insupportable (mais avis perso), niveau commentaire, je peux te conseiller 'Introduction à la phinlosophie de Husserl" de R. Barbaras, c'est très bon. Pour Husserl, les médiations c'est tendu pour un début, commence plutôt pas "L'idée de la phénoménologie", après faut forcément se faire mal pour entrer dans husserl. ("la théorie de l'intuition dans la philosophie d'Edmund Husserl" de Levinas est très bon pour commencer aussi).

Pour aiguiller ta lecture comparative avec Descartes : il y a deux points important qui différentie Descartes et Husserl, chez Descartes le projet est épistémologique, il s'agit de trouver une connaissance indubitable, chez Husserl le projet est ontologique, il s'agit de décrire le mode d'être des choses ; il n'y ap as de substance chez Husserl.

Je fait mon mémoire sur Husserl, n'hésite pas a me contacter si tu veux quelques éclaircissement.

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Message par modular02 Dim 28 Oct 2018 - 12:46

Je ne suis pas d'accord avec toi concernant le fait que le projet husserlien serait ontologique. Le projet de Husserl reste celui de l'élucidation de la connaissance en revenant sur les vécus dans lesquels sont visés et donnés les objets logiques. Il y a une ontologie dans la mesure où Husserl parle d'une théorie pure de l'objet mais il s'agit d'une ontologie formelle qui n'est pas encore la phénoménologie puisque cette dernière est amenée à fonder la logique formelle..

Je vais faire un article détaillé sur le sujet sur base de mon mémoire sur Husserl :)

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