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Pour une anthropologie psychologiste

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Message par Bergame Lun 7 Juil 2008 - 13:26

Suite de la discussion https://digression.forum-actif.net/lignes-en-marge-f29/la-confusion-des-genres-t224-15.htm
Je vais essayer de formaliser un peu ce qui pour l'instant reste des idées en l'air, hein, faut pas trop m'en demander non plus Wink

Pierre Riviere a écrit:
La psychologie comme "science de l'esprit" m'apparaît comme un bric-à-bric d'observations sur le comportement d'autrui ou de mauvaises interprétations du symbolisme laissé par le grands hommes (référence au texte Léonard de Vinci par Freud). Il y a peu d'auteurs que j'aime moins lire que Freud.

Voila bien, je crois, une position typiquement philosophiste Wink
Il me semble qu'elle est partiellement juste. La critique de Foucault à l'égard des sciences humaines, on en a déjà parlé, ne me semble pas totalement dénuée de fondement. Il y a un risque à considérer l'humain comme un objet de science, et il m'est difficile -à moi au moins- de critiquer d'un côté le transhumanisme et de prôner une science humaine. Il me semble que c'est au moins en partie cette contradiction qu'essaie de résoudre la phénoménologie post-husserlienne -relayée par l'économisme d'inspiration anglo-saxonne qui partage avec elle la centralité accordée à la téléologie dans l'explication des comportements humains.
Mais elle est aussi erronnée. Par exemple, il me semble tout à fait typique que lorsqu'on parle "psychologie", les philosophes comprennent "psychanalyse". Or, la théorie psychanalytique n'est qu'une branche parmi d'autres de la discipline psychologie, et à mon humble avis, pas celle qui produit les développements les plus intéressants depuis 50 ans -ce qui ne m'empêche pas, moi, de considérablement apprécier Freud et les autres -au passage, j'ai une passion pour Georges Devereux, en particulier, un pur génie méconnu, bref.
Mais simplement, pour répondre à la question :

Plus Oultre a écrit:
Quelles sont ces évoltuions dont tu parles qu'aurait connu la psychologie comme discipline scientifique depuis un siècle (à grands traits) ?

La psychologie empirique a considérablement évolué. La psychologie a cet immense avantage -à mes yeux en tous cas- d'être la seule discipline des sciences humaines et sociales à intégrer une branche expérimentale -et à reposer en grande partie sur l'empirie. On peut monter des protocoles expérimentaux en psychologie, ce qui est absolument impossible en sociologie et en économie -tout simplement à mon avis à cause des postulats que ces deux disciplines acceptent. La psychologie sociale, en particulier, est une discipline tout entière fondée sur l'empirie. L'expérience la plus connue de psychologie sociale est celle de Milgram (dont nous avions déjà parlée ici : https://digression.forum-actif.net/foucault-f31/pouvoir-et-autorite-legitimite-et-reconnaissance-t148-30.htm) ; on connait bien autre paradigme ayant réussi le cross-over, la théorie de la dissonance cognitive initiée par Festinger, et qui constitue, dans ses fondamentaux, un paradigme potentiellement alternatif à celui du Choix Rationnel ; et évidemment, je ne parle par des travaux de Piaget et de son école, qui ont l'ambition de fonder une nouvelle épistémologie en sciences humaines.
Pour essayer de fixer les esprits, il faut par exemple savoir qu'il n'y a à ma connaissance qu'un seul chercheur en sociologie qui tente de proposer une théorie sociologique fondée sur l'épistémologie cognitiviste de Piaget (du moins en France), c'est Claude Dubar, dans un ouvrage qui date de 2002.
Au contraire, les sociologues ont plutôt tenté jusqu'à présent de réinterpréter les résultats issus de la recherche empirique en psychologie dans les termes de la TCR : Je pense par exemple aux efforts de R.Boudon, et plus récemment de G.Bronner (2007), pour proposer une explication alternative aux travaux de Tversky et Kahneman. Ou alors, ils font de la pseudo-psychologie de gare sous couvert de post-modernisme nietzschéo-truc -il ne me semble pas utile de citer de références.
Mais le dialogue entre psychologie et sociologie, s'il existe, est très récent.

Globalement, pour avoir une idée de ce dont traite la psychologie sociale, le mieux est de démarrer avec l'un des très bons manuels que l'on trouve assez facilement sur le marché. Il y a soit "Le Groupe en psychologie sociale" de Aebischer et Oberlé, soit le "Psychologie Sociale" de S.Moscovici, soit si l'on veut pousser un peu, celui en trois tomes dirigé par J.L. Beauvois -éventuellement, celui de Myers, Lamarche, plus orienté vers la recherche US.

Maintenant, en deux mots, pour moi, l'idée directrice est à peu près celle que j'avais exposée ailleurs : A l'a priori de la théorie sociologique soit-disant vérifiée par l'expérience (top down), substituer une recherche sur les croyances et attitudes des individus (bottom up). Une sorte de formalisation de la théorie tolstoïenne de l'histoire...
A un contributeur d'un autre forum (historique) qui faisait part d'une nouvelle méthode du décompte des morts en temps de guerre et qui demandait explication, j'avais répondu ceci :



  • On pourrait dire que la démarche classique, orthodoxe, en sciences sociales (donc en histoire également) consiste en 3 étapes :
    D'abord, il s'agit pour l'auteur / chercheur de créer un concept, par exemple, "la guerre". Il faut donc commencer par répondre à la question : Qu'est-ce qu'une guerre ? Pour ce faire, on définira (au moins implicitement) ce qu'elle n'est pas, et on énumèrera les traits caractéristiques qui la définissent positivement. A ce stade, premiers débats et discussions entre auteurs sur ce qu'est une guerre, ce qu'elle n'est pas, ce qui la qualifie ou non, etc.
    Mais une fois choisie la définition du concept, on le comparera aux évènements empiriques : Tel évènement historique X est-il bien une "guerre", selon la définition du terme "guerre" qu'on a accepté, ou non ? Là aussi, débats et discussions, sur le fait que l'évènement X soit bien une "guerre" et pas autre chose, quels adversaires exactement met-elles aux prises, quelle est précisément le terrain des opérations, cette partie Y de la guerre X n'est-elle pas une guerre elle-même à part entière, etc.
    Et enfin, si on reprend votre exemple, on comptabilise donc le nombre de morts qu'on peut considérer comme des conséquences de la guerre X. Et là encore, débats, discussions, sur quels types de morts doivent entrer dans ce décompte, les morts de qui, quelles sont les sources et d'où viennent-elles, etc.

    Or, effectivement, il y a une solution méthodologique alternative qui consiste à aller demander directement aux individus eux-mêmes concernés par un évènement X, qu'on définira en première approximation de la manière la plus large possible, comment eux le qualifient -si par exemple, ils considèrent que c'est une guerre ou non- et comment eux en analysent les conséquences. En gros, on pourrait qualifier la première démarche, classique et orthodoxe, de top-down, et la seconde, de bottom-up. Et je crois que cette seconde démarche épistémologique est tout juste naissante -ou peu s'en faut- car elle se fonde sur la prise en compte de ce qu'on appelle les attitudes des individus à l'égard des évènements. Je veux dire que ses fondamentaux sont psychologistes et non plus rationalistes.

    C'est d'ailleurs la critique qu'on lui adressera sans doute. L'écart considérable entre les deux estimations peut être compris trivialement comme : Les individus insérés dans une situation ressentent toujours bien plus fortement cette situation qu'un observateur. Concrètement, quand on vit un conflit armé au quotidien, nul doute qu'on en a un ressenti très différent de celui d'un chercheur-observateur. Et par exemple, on aura sans doute tendance à imputer à la guerre beaucoup plus de conséquences. Ainsi, on peut penser qu'on lui attribuera des décès qu'un observateur ne comptabilisera pas nécessairement comme conséquences suffisamment directes du conflit.
    La critique de cette méthodologie consistera donc schématiquement à dire qu'"on ne peut se fonder sur le ressenti des gens pour faire de la science". Sauf qu'on peut se demander si le chercheur-observateur, dans ces affaires, ne se fonde pas lui-même sur un ressenti également. Lorsqu'on choisit de comptabiliser telles morts et non telles autres comme conséquences d'un conflit donné, par exemple, ce choix n'est-il pas irréductibement fondé sur quelque chose qu'on pourrait aussi bien qualifier de "ressenti" ? Il se trouvera simplement que son ressenti, en tant qu'"observateur", ne peut être le même que celui d'un "participant".


Voila, c'est à peu près l'idée directrice : Une méthodologie fondée sur la prise en compte des attitudes des individus, càd sur leurs opinions, leurs croyances, quant à l'objet. Une sociologie véritablement psychologiste, donc, qui implique clairement que le social, en quelque sorte, est "dans les têtes". Ce que la sociologie n'a jamais nié, mais en s'inspirant fondamentalement de Kant et de Marx (et globalement de toute la tradition philosophique), elle est toujours partie du principe que ce qui est "dans les têtes" s'exprime, se réalise, dans les actes et que, ce qui compte vraiment, en quelque sorte, ce sont les actes. Or, je pense que cela est naïf, et surtout, condamne la sociologie, fondamentalement, à être une fille de la philosophie, càd un oiseau de Minerve. Ce que, paradoxalement -mais bien évidemment- elle se refuse à être.
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Message par Pierre Rivière Sam 12 Juil 2008 - 7:16

Bergame a écrit:
Pierre Riviere a écrit:
La psychologie comme "science de l'esprit" m'apparaît comme un bric-à-bric d'observations sur le comportement d'autrui ou de mauvaises interprétations du symbolisme laissé par le grands hommes (référence au texte Léonard de Vinci par Freud). Il y a peu d'auteurs que j'aime moins lire que Freud.

Voila bien, je crois, une position typiquement philosophiste Wink

Je ne m'en cache pas. :lut: Par ailleurs, je jetterai un coup d'oeil à ce Georges Devereux.

Petite remarque comme ça, en passant et sur la pointe des pieds: si la psychologie, science de la psyché, est ''fondée sur la prise en compte des attitudes des individus, c-à-d sur leurs opinions, leurs croyances, quant à l'objet'', alors tu sembles nier la distinction de Parménide entre la vérité (alètheia) et l'opinion en ce qui a trait aux formes de l'esprit. Ce qui revient à faire de la conscience naturelle le paradigme de l'esprit plutôt que de l'étudier dans son dévoilement, comme je le disais précédemment.

Je peux résumer mon objection (qui est bien plus une crainte) simplement en disant que je crains de la psychologie qu'elle veuille établir la forme définitive du mécanisme de l'esprit humain à partir d'information glanées dans certaines formes de son dévoilement. Ceci plutôt que de participer activement à une tâche de la pensée qui tente de faire advenir l'esprit, dans sa vérité, à la conscience.
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Message par Bergame Sam 12 Juil 2008 - 12:52

Ah mais je t'en prie, Pierre Rivière, et tous ceux qui le souhaitent, discutons-en. Ce ne sont, encore une fois, que quelques idées directrices, je suis très intéressé à les confronter.

J'entends, je crois, ton objection. Ou plutôt, j'y vois deux objections.
La première porte sur la théorie de la vérité. Il me semble que tu remontes tout à fait justement à Parménide, puisque la théorie de la vérité comme dévoilement implique une ontologie, une thèse sur l'Être. Il me semble que l'un des enseignements de Heidegger -qui retrouve bien la conception de la vérité comme alètheia- est qu'une ontologie s'accomode difficilement de la science. En fait, c'est avant tout un enseignement de Kant.
La science ne traite pas de l'Être. Elle traite d'un objet qu'elle isole dans le réel empirique et qu'elle définit. Elle ne traite même pas de ce qu'est cet objet. Elle y applique des grandeurs, des mesures, bref, des valeurs, et elle traite des relations entre ces valeurs.
Il est clair que la théorie scientifique de la vérité ne peut qu'être radicalement différente du concept d'alètheia.

Alors qu'est-ce que la vérité des théories scientifique ? Mon opinion personnelle est qu'il y a là un gap entre les sciences physiques et les sciences sociales. La théorie de la correspondance considère qu'est vrai un énoncé qui réfère à un état de fait dans le réel empirique. Le régime de causalité différent qu'acceptent les sciences physiques et les sciences sociales fait que cette théorie peut être considérée comme suffisante en sciences physiques -reste tout de même le problème de l'induction, mais bref : En physiques, une relation causale est valide ssi elle est nécessaire et suffisante, càd si à un effet correspond une cause et réciproquement. En sciences sociales, ce n'est pas suffisant, car un même fait y est considéré comme multidéterminé.
Au point où j'en suis, les thèses qui m'apparaissent les plus convaincantes en sciences sociales me semblent donc les thèses qui considèrent que la vérité est parcellaire, dans le sens où un même fait est éclairable par plusieurs théories, tout autant valides les unes que les autres, et que si la vérité existe, elle est la résultante de, en quelque sorte, l'addition de ces théories. La vérité comme un puzzle, disons. Ou bien, celles qui considèrent que la vérité est une asymptote à la résultante de la situation de discussion dans laquelle sont insérés deux ou plusieurs locuteurs, situation de discussion régie selon le principe du meilleur argument. Ces deux formulations renvoient à des thèses qui n'acceptent pas exactement les mêmes présupposés, mais qui partagent l'idée fondamentale que la vérité en sciences sociales, si elle existe, est la résultante (ou plus exactement sans doute, l'horizon) d'un travail collaboratif. Càd que d'une manière ou d'une autre, tu as raison, il me semble que les sciences sociales, aujourd'hui, comprennent le concept de vérité, if any, comme émergeant de l'opinion. Mais hé, après Parménide vinrent Socrate et Platon. Wink
Maintenant, allons un pas plus loin : Pour ces deux ensembles de thèses, le travail collaboratif en question est limitable à un certain type d'individus. Tous les individus ne sont pas considérés comme susceptibles de proposer des théories valides sur un objet des sciences sociales. Ils sont la société, ils en sont les acteurs, mais pour x raisons, ils sont considérés comme ne pouvant en être des observateurs dignes de foi ou d'intérêt. Et tous les individus ne sont pas invités à s'exprimer dans l'espace public. Pour cela, il faudrait qu'ils soient rationnels et, en particulier, obéissent à la règle du meilleur argument.
L'idée consiste donc à critiquer ces deux point de vue par l'apport de la psychologie.

J'ai déjà dit dans ce forum qu'à mon avis, on ne pense pas suffisamment ce que ce signifie Wikipedia. Wikipedia propose une nouvelle théorie de la vérité.

La seconde objection tourne, je crois, autour de ta crainte. Je serais intéressé à ce que tu la formules plus explicitement, si tu veux bien.


Anecdotiquement, si un jour tu en as l'occasion, je te propose surtout d'essayer de trouver l'essai de Devereux sur la crypteia, ce doit être dans les Essais d'Ethnopsychiatrie Générale. Moi ça m'avait bluffé, tu me diras peut-être ce que tu en as pensé. :lut:
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Message par Pierre Rivière Dim 13 Juil 2008 - 6:03

Ma crainte (qui est bien plus une déception) est que certains chercheurs (psychologues principalement) tentent de comprendre l'esprit de façon externe et non interne. Autrement dit, en participant à la maturation de l'esprit on comprend de façon interne la signification de son développement, c'est-à-dire du chemin que parcours sa réalisation puisque sa réalisation est en même temps celle de notre identité.

P.S.: Platon reprend et développe les concept parménidéens d'être et de vérité par sa théorie de l'idée (qu'on traduit maintenant par forme intelligible). Notamment en clarifiant le concept d'un principe anhypothétique, c'est-à-dire absolu selon le paradigme de l'inconditionné. Ce dernier serait le bien, mais quant à savoir ce qu'il veut signifier par cela... :sais pas:
Par ailleurs, on a aucune certitude au sujet de ce qu'affirmait réellement Socrate.
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Message par cedric Dim 13 Juil 2008 - 11:33

En gros Pierre, et on voit bien que tu as été marqué par la phénoménologie, tu es pour une psychologie phénoménologique, c'est à dire s'attachant à décrire le psychisme tel qu'il est vécu et senti, par opposition à une psychologie expérimentale, neuro-biologique...qui parle en termes de processus machiniques...

J'aimerais bien que tu développes ( tutoyons-nous, soyons fous ) le concept de nécessité que tu utilises ici et que, il me semble, tu as utilisé dans d'autres discussions.

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Message par Bergame Dim 13 Juil 2008 - 13:23

Oui, effectivement, cette question m'intéresse beaucoup aussi.
Mais il y a encore autre chose :


Ma crainte (qui est bien plus une déception) est que certains chercheurs (psychologues principalement) tentent de comprendre l'esprit de façon externe et non interne. Autrement dit, en participant à la maturation de l'esprit on comprend de façon interne la signification de son développement, c'est-à-dire du chemin que parcours sa réalisation puisque sa réalisation est en même temps celle de notre identité.

Très intéressant. Si je comprends ce que tu dis ici, notre identité est toujours en devenir et notre identité pleine et entière (d'individu humain, je suppose ?) ne sera atteignable que le jour où nous serons parvenu à faire advenir à la conscience tout ce qui est aujourd'hui dans l'ombre. C'est à peu près ce que tu dis ? Je serais vraiment intéressé de savoir à quel auteur tu rattacherais originellement cette thèse, Pierre Rivière, Heidegger non ?


P.S.: Platon reprend et développe les concept parménidéens d'être et de vérité par sa théorie de l'idée (qu'on traduit maintenant par forme intelligible). Notamment en clarifiant le concept d'un principe anhypothétique, c'est-à-dire absolu selon le paradigme de l'inconditionné. Ce dernier serait le bien, mais quant à savoir ce qu'il veut signifier par cela... :sais pas:
Par ailleurs, on a aucune certitude au sujet de ce qu'affirmait réellement Socrate.

Oui, rapidement, ce que je voulais dire ici, est que la doctrine de Socrate selon Platon consiste à dépasser le niveau de l'opinion marqué par le sensible et le devenir pour atteindre à des vérités éternelles logées dans le suprasensible. Avec Châtelet, je pense que Platon résoud la contradiction entre Héraclite et Parménide en faisant de l'un le théoricien de l'opinion et du sensible, et de l'autre le théoricien de la vérité et du suprasensible. Mais ce qui est surtout intéressant, je crois, c'est que la méthode socratique (selon Platon, on est d'accord) pour passer de l'opinion à la vérité passe par la discussion entre deux -voire plusieurs- locuteurs régie selon la règle du meilleur argument, càd globalement une méthode habermassienne -à laquelle j'ai fait référence comme l'une des deux théories de la vérité en sciences sociales qui m'apparaissent comme les plus convaincantes. Bien entendu, c'est la méthode qui m'intéresse, revue par Habermas, pas nécessairement la théorie des Idées.
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Message par zorba Jeu 18 Déc 2008 - 12:43

A mon avis, le psychisme humain est une fonction de rationalité subjective, ou de subjectivité rationalisée, sans que l'on puisse décider lequel des deux pôles l'emporte sur l'autre car dans leur formation ils sont interactifs donc indissociables, consubstantiels.
Un effet ponctuel de rationalité se trouve aussitôt géré par un ensemble subjectif et inversement.
C'est pourquoi une théorie des idées qui ferait l'impasse sur cette réalité n'a guère de chances d'aboutir sur une compréhension globale du psychisme. Et cette compréhension ne saurait qu'en rester à la globalité des choses, à leur épiderme car si les échanges sont permanents entre conscient et inconscient, s'ils permettent un savoir sur les soubassements du psychisme, aucun cas de dévoilement n'est possible pour deux raisons au moins : l'interaction qui ne permet par de savoir ce qui est de l'un et ce qui est de l'autre, et la profondeur de l'inconscient dont certaines "couches", ou "amas" ou "noyaux" sont à jamais "inapréhendables".

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Message par Pierre Rivière Jeu 18 Déc 2008 - 22:44

Eh bien! On a découvert une autre chose en soi.
D'ailleurs, comment veux-tu qu'on comprenne le concept de subjectivité rationalisée ou de rationalité subjective si tu ne définis pas ce que tu entends par subjectivité et par rationalité?
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Message par zorba Ven 19 Déc 2008 - 1:07

J'entends par là ce qu'en gros tout le monde entend. Il est facile de comprendre qu'émotion et rationalité ne fonctionnent que sous la forme d'un ensemble insécable.
D'ailleurs je vais plus loin : pour moi le psychisme humain est exclusivement émotionnel et rien d'autre, la rationalité étant le formatage de ce système sur le réel (réel naturel, réel culturel...).

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Message par RascarCapac Ven 19 Déc 2008 - 13:33

Oui mais qu'en est-il de la frustration ? Pour une anthropologie psychologiste 3714453215
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Message par zorba Ven 19 Déc 2008 - 17:51

Toi, rascar, je te vois venir lol!
Tu ne m'entraîneras pas sur ce terrain-là... on se connaît, peut-être :ninja:

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Message par Bergame Sam 10 Jan 2009 - 0:10

:gsdgr:

Rascar est notre ami Laugo, zorba.

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Message par zorba Dim 18 Jan 2009 - 11:32

Ah, je comprends mieux ! Il est donc au courant de nos prises de tête sur ce sujet ....!!! :lut:

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Message par Verdungelfar Ven 30 Oct 2009 - 2:11

"Voila, c'est à peu près l'idée directrice : une méthodologie fondée sur la prise en compte des attitudes des individus, càd sur leurs opinions, leurs croyances, quant à l'objet.

Une sociologie véritablement psychologiste, donc, qui implique clairement que le social, en quelque sorte, est "dans les têtes".

Ce que la sociologie n'a jamais nié, mais en s'inspirant fondamentalement de Kant et de Marx (et globalement de toute la tradition philosophique), elle est toujours partie du principe que ce qui est "dans les têtes" s'exprime, se réalise, dans les actes et que, ce qui compte vraiment, en quelque sorte, ce sont les actes.

Or, je pense que cela est naïf, et surtout, condamne la sociologie, fondamentalement, à être une fille de la philosophie, càd un oiseau de Minerve.

Ce que, paradoxalement (mais bien évidemment) elle se refuse à être."

Ceci est complètement faux. Tout d'abord, il existe une anthropologie psychologique qui est un courant surtout développé aux Etats-Unis.

Ensuite, dire que la sociologie ne s'intéresse pas à "ce qui se passe dans la tête" revient à renier les fondements mêmes de la discipline dans sa tradition allemande. En effet, face à la démarche explicative de Durkheim s'inspirant de la biologie, Weber, au début du 20è siècle, a été le premier à mettre en avant la n"cessité d'une démarche compréhensive. Autrement dit, la nécessité de comprendre le sens que les individus attribuent à leurs actions. La construction du sens est l'une des questions majeures de la sociologie. De Durkheim à Bourdieu, en passant par Berger, Luckmann, Giddens et bien d'autres.

En outre, tu parles d'expérimentation en sociologie. L'expérimentation n'existe pas en sociologie. Les techniques d'investigation passent par les entretiens (standardisés ou semi-directifs), par les observations in situ ou participantes, etc. Toute la difficulté de cette discipline mais qui fait également sa richesse est de ne pouvoir se modeler sur le même principe que les sciences dites exactes. Le sociologue est obligé de prendre en compte sa subjectivité et de l'objectiver. Cela permet justement ce genre d'inclinaison positiviste que tu sembles affectionner. Tout l'enjeu d'une sociologie pertinente est de surmonter le clivage entre subjectivisme (tout n'est que point de vue, pas de discours objectif possible) et objectivisme (un discours purement objectif et neutre est possible). Cela nécessite une remise en question et une réflexivité permanentes.
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Message par Bergame Ven 30 Oct 2009 - 13:37

Verdungelfar a écrit:]Ceci est complètement faux.
Allons bon ! Pour une anthropologie psychologiste Icon_smile

Verdungelfar a écrit:Tout d'abord, il existe une anthropologie psychologique qui est un courant surtout développé aux Etats-Unis.
Ah oui ? Ca, c'est intéressant. Peux-tu me donner des références, stp ? Peut-être R. Benedict et autres ?

Ensuite, dire que la sociologie ne s'intéresse pas à "ce qui se passe dans la tête" revient à renier les fondements mêmes de la discipline dans sa tradition allemande. En effet, face à la démarche explicative de Durkheim s'inspirant de la biologie, Weber, au début du 20è siècle, a été le premier à mettre en avant la nécessité d'une démarche compréhensive. Autrement dit, la nécessité de comprendre le sens que les individus attribuent à leurs actions. La construction du sens est l'une des questions majeures de la sociologie. De Durkheim à Bourdieu, en passant par Berger, Luckmann, Giddens et bien d'autres.
C'est bien clair, mais lorsque je parle de psychologie, je ne fais évidemment pas référence au Verstehen ni au Sinn. D'ailleurs, Weber, dans les Catégories de 1921 (E&S) distingue suffisamment bien la sociologie compréhensive et la psychologie.
Cela étant dit, je pense que c'est moins clair dans les Catégories de 1913 (Essais sur la Théorie de la Science). Et mon idée consiste justement à partir de Weber pour développer une sociologie psychologiste (ou du moins cognitiviste). Mais cela implique justement de passer outre la distinction explicite que Weber trace lui-même, et de mettre au jour l'implicite. Sachant que Weber a aussi travaillé sur des études de ce qu'on appelle à son époque la "psychophysique", ce qu'on commence à savoir en France.
Toutefois, effectivement, Giddens et Bourdieu (choix judicieux de références) ont effectivement commencé à montrer comment on pouvait aller chercher dans la psychologie sociale pour enrichir l'explication en sociologie. Mais à mon sens, ils n'ont fait pour l'instant que d'esquisser des rapprochements, ni Giddens ni Bourieu n'ont intégrés la psychologie dans leur épistémologie.
Berger & Luckmann, c'est différent, eux s'inspirent plutôt de Schütz et donc de la phénoménologie husserlienne. Je dirais que c'est aux antipodes de ce à quoi je pense.

En outre, tu parles d'expérimentation en sociologie. L'expérimentation n'existe pas en sociologie.
Mais si, mais si. Pour une anthropologie psychologiste Icon_smile Il existe une "école" sociologique aux Etats-Unis qui pratique beaucoup l'expérimentation, celle que j'appelle "école de Stanford" -je ne crois pas qu'elle ait encore de nom, et elle est très méconnue en France. Elle s'est constituée à partir des travaux d'un autre Berger, Joseph Berger, avec des auteurs comme Zelditch, Cook, Della Fave, etc. Bon, je les connais parce qu'ils travaillent sur le même objet que moi, le pouvoir et la légitimité, et qu'eux aussi sont assez influencés par la psychologie sociale.
En France, il y a au moins un auteur de sociologie qui a réalisé une expérience au sens propre, et qui réfléchit sur cette méthodologie, G. Brönner, actuellement professeur à Strasbourg.
Bon, maintenant, mon idée est qu'il y a un problème épistémologique là-dessous. Disons que j'y travaille.

Est-ce que je suis positiviste ? C'est une question intéressante. Je répondrais que non, au sens où le positivisme me semble reposer sur un schème théorie -> expérience. En fait, dans le positivisme, c'est la théorie, en tant qu'a priori, qui circonscrit le champ des possibles. Les travaux en sociologie inspirés de la Théorie du Choix Rationnel me semblent positivistes, et c'est ce qui m'ennuie profondément chez eux. Aussi, ce que moi, je cherche dans l'expérimentation, ce n'est pas une vérification de la théorie, c'est la mise au jour de régularités empiriques. Disons que je suis keplérien, si ça dit quelque chose. Et dès lors, je crois être assez proche de Weber, si du moins on lit suffisamment bien ce qu'il écrit.

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Message par Verdungelfar Mer 4 Nov 2009 - 23:15

""Tout d'abord, il existe une anthropologie psychologique qui est un courant surtout développé aux Etats-Unis."

Ah oui ? Ca, c'est intéressant. Peux-tu me donner des références, stp ? Peut-être R. Benedict et autres ?
"

Les bases de courant ont été posées par Louise et Georges Spindler dans les années 1950 (cf. Spindler, G., and L. Spindler, 2000, Fifty Years of Anthropology and Education 1950-2000, Hillsdale, NJ, Lawrence Erlbaum). ainsi que Murray et Rosalie Wax et Fred Gearing (Wax, M., S. Diamond, and F. Gearing, eds., 1971, Anthropological Perspectives on Education, New York, Basic Books).

Ce courant est circonscrit à l'anthropologie de l'éducation américaine en tant qu'étude des modes d'apprentissage cognitifs. Ceci dit, j'avoue ne pas pouvoir en dire plus étant donné que je n'ai pas encore parcouru leurs ouvrages. J'ai été amené à entendre parler d'eux au cours de mes recherches.




"C'est bien clair, mais lorsque je parle de psychologie, je ne fais évidemment pas référence au Verstehen ni au Sinn. D'ailleurs, Weber, dans les Catégories de 1921 (E&S) distingue suffisamment bien la sociologie compréhensive et la psychologie.

Cela étant dit, je pense que c'est moins clair dans les Catégories de 1913 (Essais sur la Théorie de la Science). Et mon idée consiste justement à partir de Weber pour développer une sociologie psychologiste (ou du moins cognitiviste). Mais cela implique justement de passer outre la distinction explicite que Weber trace lui-même, et de mettre au jour l'implicite. Sachant que Weber a aussi travaillé sur des études de ce qu'on appelle à son époque la "psychophysique", ce qu'on commence à savoir en France."

Je ne conteste pas l'intérêt de ta démarche. Mais de là à considérer la sociologie comme une branche de la philosophie sociale, je trouve qu'il y a là un pas à ne pas franchir. Bien sûr il existe des affinités entre la philo et la socio, tout comme il existe des affinités entre la psycho et la socio. Mais chaque discipline a son propre objet et l'on peut croiser les points de vue dans des approches transdisciplinaires; ce qui est par ailleurs souhaitable car, à force de spécialisation, les disciplines s'engagent dans des dialogues de sourds afin de protéger leur monopole de production de vérité propositionnelle concernant tel ou tel aspect du monde.

Mais comment vas-tu distinguer une sociologie psychologique d'une psychologie sociale ?




"Toutefois, effectivement, Giddens et Bourdieu (choix judicieux de références) ont effectivement commencé à montrer comment on pouvait aller chercher dans la psychologie sociale pour enrichir l'explication en sociologie. Mais à mon sens, ils n'ont fait pour l'instant que d'esquisser des rapprochements, ni Giddens ni Bourieu n'ont intégrés la psychologie dans leur épistémologie."
En effet, et ils n'ont jamais prétendu le faire. Le concept d'habitus de Bourdieu n'a pas pour objectif de comprendre les processus cognitifs à l'oeuvre dans la perception du monde des individus et de leurs choix. Ce concept vise à relier une perspective macrosociologique et microsociologique en dépassant le clivage entre objectivisme et subjectivisme.




"Berger & Luckmann, c'est différent, eux s'inspirent plutôt de
Schütz et donc de la phénoménologie husserlienne. Je dirais que c'est
aux antipodes de ce à quoi je pense."

Pourtant, leur réflexion est extrêmement féconde et pertinente. La construction sociale de la réalité de Berger & Luckmann reste d'une pertinence redoutable, notamment dans les questions posées. Bien évidemment, cet ouvrage a près de 40 ans et on peut lui attribuer nombre de critiques. Mais il est remarquable qu'en sciences sociales un ouvrage garde autant d'intérêt après tant d'années.

Tu dis plus bas que la question du pouvoir et de la légitimité sont au centre de tes réflexions. Or, le concept d'univers symbolique en tant que mode de légitimation d'un ordre social est d'une grande finesse.

Je te conseille également la lecture d'Habermas, notamment La technique et la science comme idéologie (1973). Bon, je ne suis pas sûr que tu seras très alléché par le fait qu'il était un disciple d'Husserl mais là encore, malgré l'ancienneté de l'ouvrage, sa pertinence reste toujours vive.




"Mais si, mais si. Il existe une "école" sociologique aux Etats-Unis qui pratique beaucoup l'expérimentation, celle que j'appelle "école de Stanford" -je ne crois pas qu'elle ait encore de nom, et elle est très méconnue en France. Elle s'est constituée à partir des travaux d'un autre Berger, Joseph Berger, avec des auteurs comme Zelditch, Cook, Della Fave, etc. Bon, je les connais parce qu'ils travaillent sur le même objet que moi, le pouvoir et la légitimité, et qu'eux aussi sont assez influencés par la psychologie sociale.

En France, il y a au moins un auteur de sociologie qui a réalisé une expérience au sens propre, et qui réfléchit sur cette méthodologie, G. Brönner, actuellement professeur à Strasbourg.

Bon, maintenant, mon idée est qu'il y a un problème épistémologique là-dessous. Disons que j'y travaille."

J'admets mon ignorance quant à cette "école" dont tu parles. J'irai faire quelques recherches dès que j'en aurai le temps.

Par ailleurs, je serais intéressé de prendre connaissance de tes travaux. J'ai abordé la question du pouvoir et de la légitimé au cours de mes études à travers l'angle de la l'instrumentalisation des connaissances. Cela peut se faire par mp et mail, si tu es d'accord.




"Est-ce que je suis positiviste ? C'est une question intéressante. Je répondrais que non, au sens où le positivisme me semble reposer sur un schème théorie -> expérience. En fait, dans le positivisme, c'est la théorie, en tant qu'a priori, qui circonscrit le champ des possibles. Les travaux en sociologie inspirés de la Théorie du Choix Rationnel me semblent positivistes, et c'est ce qui m'ennuie profondément chez eux. Aussi, ce que moi, je cherche dans l'expérimentation, ce n'est pas une vérification de la théorie, c'est la mise au jour de régularités empiriques. Disons que je suis keplérien, si ça dit quelque chose. Et dès lors, je crois être assez proche de Weber, si du moins on lit suffisamment bien ce qu'il écrit"

Pour la mise à jour de régularités empiriques, la sociologie quantitativiste, fondée sur les statistiques, ne te convient-elle pas? Pour ma part, je préfère m'inscrire dans une perspective davantage qualitative, même si les deux démarches sont complémentaires et, au bout du compte, difficilement séparable si l'on avoir une connaissance la plus large possible.

Lorsque je te soupçonne de positivisme, c'est parce que j'ai l'impression en te lisant çà et là, que tu privilégies une démarche qui aurait l'illusion d'avoir un accès direct au monde, d'être totalement objective. Bon, je peux me tromper et j'admets qu'en lisant ton dernier post, je nuance mon jugement.
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Message par Bergame Jeu 5 Nov 2009 - 23:16

Verdungelfar a écrit:
Les bases de courant ont été posées par Louise et Georges Spindler dans les années 1950 (cf. Spindler, G., and L. Spindler, 2000, Fifty Years of Anthropology and Education 1950-2000, Hillsdale, NJ, Lawrence Erlbaum). ainsi que Murray et Rosalie Wax et Fred Gearing (Wax, M., S. Diamond, and F. Gearing, eds., 1971, Anthropological Perspectives on Education, New York, Basic Books).

Ce courant est circonscrit à l'anthropologie de l'éducation américaine en tant qu'étude des modes d'apprentissage cognitifs. Ceci dit, j'avoue ne pas pouvoir en dire plus étant donné que je n'ai pas encore parcouru leurs ouvrages. J'ai été amené à entendre parler d'eux au cours de mes recherches.
Ok, merci, je ne connais pas, je regarderai cela à l'occasion.


Je ne conteste pas l'intérêt de ta démarche. Mais de là à considérer la sociologie comme une branche de la philosophie sociale, je trouve qu'il y a là un pas à ne pas franchir. Bien sûr il existe des affinités entre la philo et la socio, tout comme il existe des affinités entre la psycho et la socio. Mais chaque discipline a son propre objet et l'on peut croiser les points de vue dans des approches transdisciplinaires; ce qui est par ailleurs souhaitable car, à force de spécialisation, les disciplines s'engagent dans des dialogues de sourds afin de protéger leur monopole de production de vérité propositionnelle concernant tel ou tel aspect du monde.

Mais comment vas-tu distinguer une sociologie psychologique d'une psychologie sociale ?

Je l'ai dit ailleurs dans ce forum, pour moi c'est simplement une question de division du travail : La psychologie sociale au niveau des groupes, et la sociologie au niveau des ensembles.


Pourtant, leur réflexion est extrêmement féconde et pertinente. La construction sociale de la réalité de Berger & Luckmann reste d'une pertinence redoutable, notamment dans les questions posées. Bien évidemment, cet ouvrage a près de 40 ans et on peut lui attribuer nombre de critiques. Mais il est remarquable qu'en sciences sociales un ouvrage garde autant d'intérêt après tant d'années.

Tu dis plus bas que la question du pouvoir et de la légitimité sont au centre de tes réflexions. Or, le concept d'univers symbolique en tant que mode de légitimation d'un ordre social est d'une grande finesse.

Bien sûr que je regarde le concept de legitimation chez Berger & Luckman. Mais personnellement, je ne le trouve pas si intéressant, c'est un peu plat, aujourd'hui -à mon sens.

Je te conseille également la lecture d'Habermas, notamment La technique et la science comme idéologie (1973). Bon, je ne suis pas sûr que tu seras très alléché par le fait qu'il était un disciple d'Husserl mais là encore, malgré l'ancienneté de l'ouvrage, sa pertinence reste toujours vive.
Habermas est l'un des auteurs centraux de mon étude. Mais ce n'est pas du tout un disciple de Husserl, ami.
Ah si, oui, le concept de "monde vécu" -plutôt emprunté à Schütz d'ailleurs, je crois. Et sans doute que si tu as lu TSI, tu as lu également "Connaissance et Intérêt", un article qui, en français, a été publié dans le même volume. Mais c'est là le seul "moment" où Habermas, dans son oeuvre, commente Husserl -à ma connaissance. Tout le truc du "linguistic turn", c'est que la philosophie de la conscience, c'est terminé, place à la philosophie du langage.


Par ailleurs, je serais intéressé de prendre connaissance de tes travaux. J'ai abordé la question du pouvoir et de la légitimé au cours de mes études à travers l'angle de la l'instrumentalisation des connaissances. Cela peut se faire par mp et mail, si tu es d'accord.

Ok, avec plaisir, mais c'est un peu tôt pour l'instant.


Pour la mise à jour de régularités empiriques, la sociologie quantitativiste, fondée sur les statistiques, ne te convient-elle pas? Pour ma part, je préfère m'inscrire dans une perspective davantage qualitative, même si les deux démarches sont complémentaires et, au bout du compte, difficilement séparable si l'on avoir une connaissance la plus large possible.
Si je suis critique de la TCR, j'en suis aussi un élève. En l'occurence, Boudon m'a appris que les stats ne suffisent pas, dans le sens où, de toutes façons, ils sont toujours interprétés. Or, toute interprétation nécessite une grille d'interprétation. Toute la question est donc : Avec quelle grille interprétons-nous les résultats statistiques ? C'est ici qu'intervient la psychologie cognitive et sociale : Informer la construction de la "grille".

Et toi, tu booses sur quoi ? "Instrumentalisation des connaissances", c'est un autre nom pour "idéologie", non ?

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Pour une anthropologie psychologiste Empty Ce message explosera dans les mains de la première personne qui tentera de l'effacer, rendant cette main fort peu élégante pour le futur.

Message par Verdungelfar Mar 17 Nov 2009 - 18:03

C'est le genre de broutille qui n'arrive pas à Belle des Champs. Pour une anthropologie psychologiste Icon_smile Fort heureusement, j'ai l'habitude de solliciter un traitement de texte.



Vinter : " Mais comment vas-tu distinguer une sociologie psychologique d'une psychologie sociale ? "
Berg : " Pour moi c'est simplement une question de division du travail : La psychologie sociale au niveau des groupes, et la sociologie au niveau des ensembles."
Berg : " Bien sûr que je regarde le concept de legitimation chez Berger & Luckman. Mais personnellement, je ne le trouve pas si intéressant, c'est un peu plat, aujourd'hui -à mon sens. "

> T'es-tu penché sur le concept d'univers symbolique ? Je le trouve d'une grande complexité et bien loin d'être plat. Schématiquement, ils définissent ce concept à partir de quatre niveaux de légitimation qui se chevauchent : 1. le langage (nous définissons le monde avec des mots), 2. les proverbes et les maximes ("systèmes d'objectivations linguistiques de l'expérience); 3. les théories explicites (construites par des corps de spécialistes) et 4. les univers symboliques (qui agissent à la manière de cosmogonies, de visions du monde)



Berg : " Habermas est l'un des auteurs centraux de mon étude. Mais ce n'est pas du tout un disciple de Husserl, ami. "

> En effet, autant pour moi. Je sais pas où j'ai été chercher cette filiation...



Berg : " Ah si, oui, le concept de "monde vécu" -plutôt emprunté à Schütz d'ailleurs, je crois. Et sans doute que si tu as lu TSI, tu as lu également "Connaissance et Intérêt", un article qui, en français, a été publié dans le même volume. Mais c'est là le seul "moment" où Habermas, dans son oeuvre, commente Husserl (à ma connaissance). Tout le truc du "linguistic turn", c'est que la philosophie de la conscience, c'est terminé, place à la philosophie du langage. "

> Non, dans La technique et la science comme idéologie, il y a toute une partie consacrée à une critique de Husserl concernant la théorie pure ou theoria. Selon Habermas, Husserl, si je me souviens bien, pense pouvoir accéder à "la structure ontologique de l'univers" par la phénoménologie. Or, Habermas dénonce cette posture héritée des Anciens qui pensaient pouvoir accéder, par la contemplation, à cette structure ontologique. Il y a là une dénonciation du positivisme des sciences que Habermas divise en trois types : les sciences empirico-analytiques (sciences dites exactes), les sciences praxéologiques (sciences morales) et les sciences critiques (sociologie).

Brièvement, la prétention nomologique des sciences dites exactes entretient l'illusion d'un accès direct à l'ontologie. Les sciences praxéologiques comme l'histoire se sont basées sur les méthodes des sciences "dures" et penseraient pouvoir accéder aux faits historiques en dehors de tout biais interprétatif. Remarque : la socio de Durkheim a fait exactement pareil en se basant sur la biologie. Les sciences critiques permettraient de dévoiler l'intérêt à la base de toute construction de la connaissance et d'ainsi s'en dégager

Bon, si cette critique des sciences a peut-être été pertinente au moment où elle a été écrite, je pense qu'aujourd'hui elle est désuette. Mais il reste des questions pertinentes, notamment sur la "politisation de la science" et la "scientifisation de la politique". Comment la politique, se basant sur des études scientifiques objective les apparences de son discours laissant l'impression qu'il n'y a plus qu'une seule réponse, scientifique, aux problèmes de sociétés. Je décrits ça grossièrement mais sa thèse de la technocratie est toujours d'actualité.




Berg : " Et toi, tu booses sur quoi ? "Instrumentalisation des connaissances", c'est un autre nom pour "idéologie", non ? "

> Si on veut. Disons que la question est de savoir comment un ordre social légitime sa propre existence en instrumentalisant, en légitimant et en hiérarchisant, sur le plan symbolique, les savoirs produits dans une totalité sociétale donnée.
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Message par Verdungelfar Lun 30 Nov 2009 - 10:44

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Message par Verdungelfar Sam 5 Déc 2009 - 19:22

Mince. J'aurais dû me taire ?
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Message par Tenzin Dorje Sam 5 Déc 2009 - 22:10

Ce forum est mort. Rien de personnel. D'ailleurs, il est plus ou moins mort-né.

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Message par Verdungelfar Ven 15 Jan 2010 - 4:37

Bergame, j'ai été ravi d'avoir ce début d'échange avec toi.

C'est avec une petite quinzaine de jours de retard que je te souhaite une excellente année 2010 ; tous mes voeux pour une année qui, en France, ne sera probablement pas des plus simples avec une telle psychologie...
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Message par Bergame Sam 16 Jan 2010 - 11:55

Je ne suis pas certain de comprendre ce que tu veux dire. Tu me conseilles l'exil ? :)

Mais de toutes les façons, bonne année, Verdungelfar, et bonne année à tous.

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Message par Tenzin Dorje Dim 17 Jan 2010 - 3:56

Bergame a écrit:Mais de toutes les façons, bonne année, Verdungelfar, et bonne année à tous.

C'est pire qu'un principe associatif normal, je te voyais pas tomber aussi bas.

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Message par Verdungelfar Ven 22 Jan 2010 - 11:35

Pourquoi pas, oui, un exil chez les Bisounours. Trouve un moyen, n'importe quel procédé alchimique ou autre, pour éveiller leur raison. Dès lors, tu pourras débattre dans des conditions qui satisfont les critères de ton égo fragile.

Je me contente de préjuger que la vue de Gargamel a provoqué ton mutisme. Ma déception est alors due au pouvoir si grand qu'a eu l'événement de cette vue.

Mais si Gargamel se contentait d'être purement logique ? S'il s'avérait que les prémisses d'une éthique changeaient en fonction de la Polis considérée ? Le forum a cela de distinct avec la vie qu'il a un intitulé exposant une fonction préfixée ; ce n'est d'ailleurs le cas avec la vie qu'en cas de conception outrageusement absolutiste.
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